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27/06/2025

Le plus beau métier du monde !

"Enseigner, c'est apprendre deux fois". Joseph JOUBERT

 

Un billet qui n'a rien à voir avec HFT, désolée, mais j'ai besoin de le poster ici, alors que je m'apprête à quitter des collégiens incroyables qui m'ont fait vivre la plus belle année scolaire de ma vie (je suis nommée en lycée) ! Et peut-être bien ma plus belle histoire d'amour !!! 

 

La fois où j'ai eu un fou rire parce que l'un d'eux m'avait demandé : « Madame, ce week-end, j'ai rencontré un mec qui s'appelait Brandon. C'est un prénom allemand, ça, Brandon ? ».

La fois où l'un d'eux, qui ne manquait pas d'humour, m'a dit : « Madame, en Allemagne, le matin, il ne faut pas se tromper, il ne faut pas emmener son enfant au Biergarten au lieu de l'emmener au Kindergarten ».

La fois où l'un d'eux, qui ne manquait pas d'esprit, a ajouté un qualificatif en « tif » à ma longue liste : « nominatif, accusatif, datif, génitif », s'exclamant : « C'est répétitif ». J'aurais dû lui répondre : « Oui, mais pas rébarbatif ». J'ai l'esprit pas très ... actif ! Plutôt celui de l'escalier !!!

La fois où l'un d'eux, au bout de quelques semaines de cours, a décidé de lâcher sa place tout au fond pour venir s'installer devant mon bureau, précisant : « Je sais pas ce que j'ai, moi, mais j'adore l'allemand ».

La fois où ils m'ont fait des affiches magnifiques pour la journée de l'amitié franco-allemande. Parmi les thèmes proposés : « Troque ceci contre cela », c'est-à-dire une spécificité française contre une spécificité allemande, lequel thème donna naissance à la savoureuse affiche : « Troque Emmanuel Macron contre Olaf Scholz ».

La fois où une troisième m'a dit que j'étais encore plus sehr schön que d'habitude avec ma robe fraîchement achetée.

La fois où j'ai dit dans une classe : « En fait, je vous ai fait croire que j'étais gentille, mais je suis une grosse sadique » et qu'une élève, qui ne manquait pas de répartie, s'est écriée : « Mais ça, madame, on l'a toujours su ».

La fois où je leur ai dit qu'à Berlin j'avais vu un mémorial et qu'un gamin, ne me laissant pas le temps de préciser qu'il s'agissait du mémorial du Mur, m'a demandé : « C'est qui ? ».

La fois où, en plein cours, un sixième s'est exclamé : « Vous êtes la meilleure, j'aime bien venir ici, on ne s'ennuie pas avec vous ».

La fois où ils m'ont fait des affiches magnifiques pour la journée portes ouvertes, il n'y a pas si longtemps. Mes doutes exprimés en classe de troisième à l'approche de cette journée portes... « Je vais essayer de faire quelque chose de bien », ai-je confié, obtenant cette réponse merveilleuse : « Madame, ce que vous faites, c'est toujours bien, alors ce sera mieux que bien ».

La fois, récente, où ils m'ont écrit plein de mots gentils sur le tableau. L'un ayant écrit son mot allemand préféré, « Lineal », l'autre ayant écrit « genau », « parce que madame, qu'est-ce que vous pouvez l'utiliser, celui-là ! On ne l'oubliera pas».

La fois où l'un d'eux m'a dit, à l'approche de midi, alors qu'il était resté pour discuter avec moi : « Bon, je vous laisse parce que ich habe Hunger ».

La fois où l'un d'eux a lancé, après m'avoir vue partir en fou rire : « Trop rentable, votre métier, madame, vous rigolez et vous êtes payée ».

La fois où ils ont voulu mettre en route une pétition pour que je reste avec eux l'année prochaine. Énumérant les raisons, toutes plus savoureuses les unes que les autres, pour lesquelles je ne devais pas les quitter. Florilège : « Elle nous soutient. On apprend bien et rapidement avec elle. Elle sait être drôle et sérieuse quand il le faut ».

La fois où une troisième m'a dit qu'elle avait peur que ses futurs profs d'allemand lui paraissent fades après mon passage. Ouah, carrément ?!

La fois, récente, où un sixième m'a dit : « On n'est pas des dictateurs, à vouloir vous obliger à rester avec nous l'année prochaine. Tout ce qu'on veut, c'est que vous soyez heureuse »...

 

J'ai noté tout ça sur des post-it. Si j'étais restée avec eux l'année prochaine, j'avais prévu de m'acheter un carnet dans lequel j'aurais consigné leurs bons mots. Je ne vais pas rester avec eux l'année prochaine et j'en ai déjà pleuré plus d'une fois... Pas plus tard qu'en écrivant ces lignes !

 

Les fois où ils sont venus avec des cadeaux et des lettres, et il paraît que ce n'est pas fini...

 

Pour paraphraser Romain Gary, celui que je paraphrase par tous les temps tellement il a écrit exactement ce que j'aurais voulu écrire, je dirai simplement : « Je me suis fait un vrai malheur avec ces élèves. Je me suis mise à les aimer comme c'est pas permis ».

 

Il ne me reste plus qu'à leur garder à jamais une place privilégiée, bien au chaud, dans mon cœur. Ce que je ne manquerai pas de faire. Ils symboliseront à jamais mon grand retour au temps plein, mon grand retour à la vie. Ils m'ont aidée à mieux opérer ma renaissance, déjà entamée avant de les rencontrer. Mais, sans eux, elle n'aurait pas été complète... Elle aurait été fade ! Oui, carrément !

 

Toutes les fois où ils m'ont fait penser que prof, ben, quand même, c'est le plus beau métier du monde !

 

13/06/2025

Comment j'ai réalisé, le week-end dernier, deux rêves...

"Ce qui est blessé en nous demande asile aux plus petites choses de la terre et le trouve". Christian BOBIN

 

En ce moment, je réalise un certain nombre de rêves, dont quelques-uns furent formulés en pleine maladie, alors que le peu de soleil qui restait en moi cherchait désespérément un futur et ne savait même pas si futur il y aurait. Ce même futur incertain cherchait désespérément un soleil. Qui a fini par venir, hourrah ! « La vie c'est ce qui vous tombe dessus toujours au moment où on n'y croit plus » : les circonstances me donnent souvent l'occasion de me souvenir de cette merveilleuse phrase d'Higelin !

Deux de mes rêves : voir un jour Stephan Eicher et Michel Polnareff. Le week-end dernier fut celui qui me permit de concrétiser ces deux souhaits à quelques heures d'intervalle. Allez, encore un hourrah !

D'abord Stephan Eicher. Il se produisait samedi soir au théâtre d'Esch-sur-Alzette, au Luxembourg (Luxembourg : petit pays qui gagne à être connu). Une salle intimiste, minimaliste. Très vite, je m'y sens comme dans un cocon.

Juste avant le concert, je discute avec deux « stephanomanes ». Elles ont dû voir Eicher autant de fois que j'ai vu Hubert. En les écoutant, je souris et je note les similitudes : même capacité à enfiler les bornes pour aller voir leur chanteur préféré (l'une d'elles vient de Lyon), même affection quand elles parlent de lui. Dans leurs bouches, il s'appelle Stephan, comme un autre s'appelle Hubert dans la mienne. Dans leurs téléphones, des photos sur lesquelles on les voit en compagnie du beau Stephan (c'est vrai qu'il a beaucoup d'allure, leur Suisse !).

Bref... Cette conversation m'amuse autant qu'elle me laisse songeuse : quand reverrai-je de mon brave Hubert briller le talent sous mes yeux ébahis ?! Ok, bien sûr, pour aller voir d'autres artistes, mais nul ne saurait le détrôner, question d'affinités. De parenté d'âmes. Ouais, carrément, j'ose l'affirmer !

Mais, pour l'heure, voici Stephan. Pour un seul en scène. Avant que le concert ne commence, des mots, sur un écran, nous avertissent : il serait bon, pour une fois, de reléguer les portables au fond de nos sacs, en les branchant au préalable sur silencieux. Ce avec quoi je suis entièrement d'accord. Je ne suis pas de celles qui dégainent leur téléphone à tout bout de champ durant les concerts. Je préfère le mode années 80 années folles, cette époque lointaine où l'on s'envoyait encore des lettres manuscrites, par la poste, et où l'on allait aux concerts muni(e) de vrais billets qui ne se réduisaient pas à de barbares codes-barres. « Je vous parle d'un temps que les moins de vingt ans » : vous connaissez la chanson !

Et puis, Stephan arrive. Cheveux gris, mi-longs, plaqués sur la tête. Bel homme, mais pas seulement ! Suisse flanqué d'un délicieux accent et de phrases parsemées de petites fautes de français non moins délicieuses. Il en rit lui-même. Peut-être bien qu'il cultive ces maladresses, façon « soyons la version masculine de la regrettée Jane Birkin ». Entre deux chansons, il parle, il amuse. Il se fait grave parfois, déplorant le temps qui passe. Il dit que ce temps qui passe, c'est chiante, je cite. Il dit qu'hier encore il avait vingt ans (qu'est-ce que j'ai à citer autant Aznavour ?!) et que d'un seul coup, d'un seul, il a pris quatre décennies dans la face. Mon cher Stephan, on en est tous plus ou moins là. « La vie passe comme une rivière, faut pas trop regarder l'heure », chantait un certain Jean-Patrick Capdevielle, que je cite pour changer un peu d'Aznavour ! Si ça peut te rassurer, Steph, moi c'est tout pareil : je n'ai rien vu filer et j'ai eu beau supplier le temps de bien vouloir suspendre son vol, ce malotru n'en a fait qu'à sa tête et n'a rien suspendu du tout ! Tu as raison : il est chiante !

À plusieurs reprises, le chanteur nous livre les premières notes de Déjeuner en paix. D'abord, il nous dit qu'il est « trop tôt pour la faire, celle-là ». Ensuite, il l'entame à nouveau à plusieurs reprises, pour la laisser choir sans autre forme de procès. Elle viendra plus tard, elle se fera attendre. D'autres titres surgissent : Des hauts, des bas, Combien de temps ?  C'est subtil, ça rappelle des époques lointaines qui me virent jeune... L'accompagnement musical est réduit au minimum, ce qui fait encore mieux luire le diamant des mots (de Philippe Djian pour la plupart, est-il nécessaire de le rappeler ?).

Les minutes défilent et ça y est, on va vers la fin. Déjeuner en paix nous arrive dessus en version intégrale et c'est mauvais signe. Stephan a prévenu : il n'y aura pas de rappel. Dommage, j'en aurais volontiers repris, moi, de ses chansons, de ses interludes parlés, de cette douce matière qui a fait la douce substance de cette douce soirée. Au passage, je retiens une formule : vieillir, d'accord, mais être vieux : ça, non !

Voilà, c'est fini. C'est chiante, mais c'est comme ça ! La vie elle-même n'est pas réputée pour vous livrer spontanément des tendresses à tour de bras. Les caresses, il faut les lui arracher, c'est moi qui vous le dis ! En s'octroyant, par exemple, des concerts, des moments hors du temps et tout ce qui peut répandre un peu de délicatesse dans ce monde qui en manque cruellement !

Et puis, c'est très vite dimanche et je suis toute guillerette à l'idée de réaliser mon deuxième rêve : voir Polnareff !

Avant lui, aux Francofolies d'Esch-sur-Alzette, il y a Ben Mazué. J'aime bien aussi. D'ailleurs, je vais le revoir en 2026, j'ai déjà mon billet. Ben : encore un qui trouve que le temps qui passe, c'est chiante ! Bienvenue au club ! D'entrée de jeu, il nous dit qu'il va falloir profiter de ce moment qui ne se reproduira pas. On dirait moi en couleurs, moi et mon étrange penchant pour ce que Serge Rezvani appelle la « nostalgie du présent ». La nostalgie du présent, c'est quand, au moment de vivre un truc, tu en envisages déjà la fin, rien que pour te faire masochistement du mal. Ça m'est tombé dessus dès l'enfance. À huit ans, j'avais déjà cette manie qui ne faisait pas de moi une gamine très jouasse. Mais c'est elle, cette manie, qui m'a menée vers l'écriture (ne pas perdre une miette du vécu qui, dès qu'il advient, n'est déjà presque plus). C'est elle qui m'a fait aimer Lamartine, Baudelaire, HFT et tant d'autres. Alors je ne lui en veux que moyennement. C'est elle encore, cette manie, qui m'invite à fixer une attention de tous les diables et de tous les instants sur le grand film de la vie. Ben Mazué, en ce sens, est un peu mon frangin d'âme (en couleurs). Il nous raconte, avec force textes ciselés, ses blessures, sa vie familiale, ses ratages. Amoureux pour la plupart, et c'est encore un point commun, mon frère. Franchement, Ben Mazué, si vous ne connaissez pas : allez-y, faites en sorte de connaître !

Et puis, donc, mon deuxième rêve : Polnareff. Là aussi, des fans qui l'appellent par son prénom. Et les « Michel ! Michel ! » que scande la foule me font penser à nos « Hubert ! Hubert ! ». Pour un peu, ça me filerait le bourdon ! Quand reverrai-je de mon brave Hubert briller le talent sous mes yeux ébahis ?!

Michel enchaîne les tubes : On ira tous au paradis (oui, même moi), Qui a tué grand-maman ?, La poupée qui fait non, Lettre à France, Goodbye Marylou, Love me, please love me. Tout cela me propulse dans un passé lointain où la voix et les mots de ce brave Michel emplissaient régulièrement ma chambre, chez mes parents. Souvenirs d'une époque qui me vit jeune...

On est en mode festival et j'avais oublié ce que ça signifie pour certains : parler à son voisin du gigot d'agneau que l'on cuisinera demain, étaler sa vie sentimentale ou professionnelle aux oreilles de tous, ledit étalage couvrant parfois, en l'occurrence, la voix de ce brave Michel... T'as des gens, purée, ils ne pigent que dalle à la valeur des moments qui ne se reproduiront pas ! De quoi désoler à la fois Stephan Eicher, Ben Mazué et moi qui vous parle...

Michel quitte la scène soutenu par deux hommes qui l'encadrent, et cette vision me flanque un coup de blues, là, comme ça, tout soudainement. Il y a des êtres qu'on espère immortels, jusqu'au jour où on les découvre fragiles, comme soi-même. Finalement, le commun des mortels, c'est tout le monde, sans exception.

Arrive alors, un peu plus tard, Julien Doré. Qui, lui, s'en cogne, je crois, du temps qui passe, chiante, indélicate... En tout cas, sauf erreur de ma part, ses chansons n'en parlent pas ! Et là, mes amis, je pose un joker sur la table, tellement le Juju n'est pas mon style. J'écoute quand même jusqu'au bout parce que j'ai été bien éduquée. Même en festival, j'évite de parler du gigot d'agneau que je compte cuisiner le lendemain. D'ailleurs, je ne raffole pas du gigot d'agneau et je ne cuisine pas très bien, ça aide !

« Si tu n'aimes pas la soupe, n'en dégoûte pas les autres pour autant », ai-je souvent entendu en ma jeunesse qui a fichu le camp irrémédiablement, et ceci bien que mes élèves m'aient dit dernièrement que je n'étais pas vieille et que je ne le serais jamais. Depuis, je me la pète grave, grave, grave, tout en sachant, au fond de moi, que rien ne sert de frimer, il faudra vieillir à point quand même ! Eh oui, toute prière lamartinienne est vaine, sans espoir, insensée... Le temps qui suspendrait son vol pour tes beaux yeux, où est-ce que tu as vu ça, toi ? Tu ne veux pas non plus qu'il te donne 100 balles et un Mars, comme on disait en une époque lointaine qui me vit jeune ?!

J'écoute quand même Julien jusqu'au bout, mais à ce moment-là de la soirée, ça devient casse-gueule pour moi : Hubert me manque comme jamais. Je le voudrais là, sous mes yeux ébahis, à la place de Juju... Et de contempler soudain un autre de mes rêves : revoir HFT. C'est une maladie, j'y peux rien, et je n'ai jamais cherché à la soigner car elle m'a toujours fait, me fait et me fera toujours un bien fou !

Voilà, mes amis. Savourez ce vendredi 13 qui ne se reproduira pas. Il est unique et précieux. Demain, il ne sera plus, déjà... Alors, à cinq heures, comme dans la chanson d'Hubert, ayez donc une pensée émue pour tout ce qui ne reviendra pas, voulez-vous ? Et vivez, si m'en croyez, n'attendez à demain : il n'y a que ça de vrai et, surtout, que ça à faire, n'est-ce pas ? Personnellement, je n'ai pas trouvé mieux.

 

29/04/2025

Petits plaisirs de ma vie de fan !

"Ô souvenirs, vous traversez le cœur comme un glaive !". CHATEAUBRIAND

 

D'abord, trois choses : 1) Oui, j'emploie le mot « fan » sans rougir. Je sais que certains ne l'aiment pas et l'apparentent (avec raison) à « fanatique ». Oui, mais moi je n'en ai pas d'autre, tout simplement, pour décrire mon état, et je m'en fous pas mal d'utiliser des termes excessifs. Je suis excessive, de toute façon, alors...

2) Je précise d'avance que la liste qui va suivre ne sera pas exhaustive, loin de là, parce que les plaisirs de ma vie de fan sont, pour ainsi dire, inépuisables. Et ce depuis presque trente-trois ans. Je dis ça sans vouloir frimer, mais quand même. Question fidélité, je me pose là, c'est tout (juste avec Hubert).

3) Je tiens à ajouter également qu'il n'y a pas, dans le lot, de plaisirs défendus. Enfin, pas à ma connaissance. Voilà. Cela étant dit, je peux commencer l'énumération (et j'espère bien recevoir la vôtre en retour).

 

-Rentrer de la FNAC avec l'affiche promotionnelle de Replugged, au dos de laquelle un employé du rayon CD a écrit, il y a quelques semaines : « réservé pour madame A. ». Nananère, elle est pour moi !!! L'anecdote en question est toute fraîche : je viens de rentrer avec l'affiche promotionnelle de Replugged et elle vient de finir sa trajectoire dans une de mes bibliothèques. Je sais qu'Hubert aime la compagnie des livres, le voilà dans un doux cocon où il va se plaire. Car, plus qu'une affiche, cette affiche est un peu HFT lui-même. À tel point que dans la rue, en veillant à ne pas plier mon trésor, je me disais : « Je tiens Hubert entre mes mains ». Oui, je sais, je suis un peu barge. J'ai comme qui dirait ma névrose, mais qui n'a pas sa névrose, n'est-ce pas ?

-Dans une conversation ou même une réunion professionnelle, choper un mot ou un bout de phrase qui me fait penser à une chanson de Thiéfaine et compléter secrètement le truc dans ma tête en pensant, face à mon interlocuteur qui, pour un temps, m'a perdue : « Tu peux pas comprendre »...

-Mieux encore : dans une conversation avec un(e) autre fan, choper un mot ou un bout de phrase et patati et patata et compléter le truc, à voix haute cette fois et en recueillant joyeusement l'écho qui me fait face. Et là, généralement, on se regarde d'un air entendu et … les autres ne peuvent pas comprendre. Nananère. Que voulez-vous, il y a des gens qui ne pigeront jamais rien à la vie...

-Faire des rêves saugrenus où Thiéfaine vient s'inviter. Une nuit, comme ça, il a donné un concert au fond de mon jardin (quand j'avais un jardin), dans une baraque à frites. Une autre nuit, je le rencontrai au rayon alcools d'un magasin. Laurent Voulzy a écrit Les nuits sans Kim Wilde, moi je pourrais écrire (en tout bien tout honneur évidemment) Les nuits avec Hubert-Félix Thiéfaine. J'y peux rien, c'est maladif, ça doit être ma névrose qui me visite même dans mes nuits. Peut-être pour que « l'heure avant l'aube du jour suivant » soit moins « cruellement noire », allez savoir ! Et là, si vous n'écoutez pas Thiéfaine … vous ne pouvez pas comprendre, pauvres de vous !

-Dans ma voiture, mettre des morceaux bien rock'n'roll d'HFT à fond, à m'en faire péter les turbines et surtout les oreilles. Et me dire qu'au volant de ma p'tite voiture, je suis une femme heureuse ! En ce moment, c'est Sweet Amanite Phalloïde Queen que je me mets en boucle dans la Clio. Je trouve que cette chanson déploie toute son ampleur et sa puissance en live. Souvenirs de tournées qui faisaient de moi une femme non seulement heureuse, mais carrément comblée. Ah, comme ça me manque, comme ça me manque... Barbara a écrit Dis, quand reviendras-tu ? Bon ben, moi je pourrais écrire … Dis, quand reviendras-tu ? aussi !

-Dans mon appartement, mettre des morceaux bien rock'n'roll à fond et chanter et danser au milieu du salon. Tant et si bien que ma fille aînée, au bout d'un moment, se pointe et baisse le son de la chaîne tellement ça décoiffe ! Elle ne manque généralement pas d'ajouter : « Alors, maman, quand est-ce que tu nous fais un concert ? » ! Si mes élèves me voyaient... Si mon banquier me voyait... Fort heureusement, tout cela restera entre vous, mes filles et moi !

-Bien sûr, durant les périodes où l'actualité HFT est brûlante, guetter le moindre petit indice de quelque chose sur le site officiel ou sur les réseaux. Et, quand cette actualité passe de brûlante à torride, me précipiter à la FNAC et acheter l'album que j'ai tant et tant et tant et tant encore espéré ! Évidemment, au passage, demander à un employé de la FNAC de me mettre de côté l'affiche promotionnelle et kiffer ce moment où il écrira dessus « réservé pour madame A. ». « Ah, que la vie est belle », chante Brigitte Fontaine. Je ne saurais mieux dire.

-Bien sûr, durant les périodes où HFT tourne, étudier méticuleusement toutes les dates et me dire : « Oh, ben, celle-ci, je pourrais la faire. Et puis celle-là, et puis cette autre encore », jusqu'à me retrouver avec pas loin de sept billets de concert planqués dans un endroit que rigoureusement ma mère m'a défendu de nommer ici, comme dans la chanson de Brassens. Vous comprendrez bien que même entre fans, il y a des secrets qu'on n'ébruite pas...

-Durant ces mêmes périodes, attendre fiévreusement chaque concert. Comme une énorme pochette-surprise sur le calendrier. Il arrive que celui-ci ne sache plus où donner de la tête tant je le blinde de dates que j'enchaîne comme si j'avais encore vingt ans, alors que j'en ai … censuré !!! « Ô temps, suspends mes heures de vol », pourrais-je chanter avec Yves Jamait, cette fois !

-Avant chaque concert, rôder sur des parkings un peu glauques et observer les foules qui se sont déplacées pour les mêmes raisons que moi, « à décalquer en suivant les pointillés ». Me marrer en les voyant tenant qui un sandwich, qui une binouze, tout en chantant (faux la plupart du temps) un morceau bien rock'n'roll d'HFT. Dans ces moments-là, je suis un peu leur frangine, à tous ces gens qu'anime un feu semblable au mien. Et c'est trop bon, il n'y a plus de barrières, ni sociales, ni d'âge, ni de rien du tout.

-Après chaque concert, rôder encore sur des parkings encore glauques et discuter avec d'autres fans. Sentir que dans leur cœur à eux aussi se mêlent deux trucs contradictoires : l'extase et la tristesse. Car, un concert d'HFT, c'est toujours l'extase. Et la fin d'un concert d'HFT, c'est toujours la tristesse. Cruelle loi qui veut que la vie soit un mélange de saveurs opposées, le doux et l'amer se retrouvant souvent, allez savoir pourquoi, dans ces duos à la con. Quand tu es fan, tu as tes moments incroyables où tu es au sommet de l'ivresse, puis tes moments pareillement incroyables où tu es au fond du trou, sans ascenseur pour te remonter vers les hauteurs... Là encore, cruelle loi. C'est le prix à payer.

-Pouvoir me dire parfois, quand la chance plane sur ma vie de fan, que l'ivresse est peut-être passée, mais que le flacon n'est pas vide, qu'il reste encore deux ou trois dates éparpillées sur le calendrier. Et me dire « ouf, ça va, c'est pas fini ».

Sauf qu'en ce moment, ben si, c'est fini. Disons que c'est entre parenthèses. Car je suis certaine qu'Hubert finira par entendre l'appel de Barbara. Et qu'il reviendra. Alors là, ce sera jour de fête, c'est moi qui vous le dis ! Et je pourrai compléter avec entrain la liste des petits plaisirs de ma vie de fan !

05/04/2025

Voilà, voilà, voilà qui elle est, Barbara Pravi, vue hier soir à la BAM, à Metz !

"Nous pouvons dire des choses avec une infinie sincérité et malgré tout trahir". Jon Kalman STEFANSSON

 

Non, je ne vais pas vous parler du live Replugged. Pas encore, pas aujourd'hui. À cela deux raisons : 1) Je ne l'ai écouté qu'une fois. Honte à moi ! À ma décharge, je peux dire que j'ai été très occupée depuis le 28 mars. Malgré tout, ce jour-là, j'étais à la FNAC de Metz très peu de temps après l'ouverture et je demandais au responsable du rayon CD s'il pouvait me mettre de côté l'affiche publicitaire liée à la parution de ce live. Il pouvait. L'affiche m'attend à quelques encablures de chez moi, mon nom est écrit derrière. Le vendeur m'a dit que dès que la promotion pour Replugged serait terminée, je pourrais aller récupérer mon petit trésor (il n'a pas dit « votre petit trésor », c'est moi qui modifie ses propos pour les faire concorder avec ma conception des choses). Je suis passée dans le rayon avant-hier. Trop tôt. La promo n'était pas finie. Il faut laisser à Hubert la possibilité de se déployer comme il se doit, voyons ! D'ailleurs, si vous passez par hasard devant Replugged, je ne saurais trop vous conseiller d'en faire l'acquisition immédiate !

2) J'ai passé beaucoup de temps, dernièrement, à écouter Barbara Pravi. Une pub pour un de ses concerts ayant atterri dans ma boîte mail, je décidai de me pencher sur ses chansons. Ouah, quelle claque ! Ce fut un enchantement immédiat. Et j'achetai mon billet de concert après avoir écouté seulement quatre ou cinq chansons ! En paraphrasant un peu la chanteuse, je pourrais dire : « Voilà, voilà, voilà qui je suis, une femme qui fonctionne au coup de cœur et agit rarement autrement que passionnément » !

 

Donc, hier, Barbara Pravi... Avant qu'elle n'entre en scène, on entend sa voix puissante retentir, presque suppliante : « Parlez de moi, à vos amours, à vos amis ». Je me promets sur-le-champ de répondre favorablement à sa demande. Chose promise, chose due, et cela vaut autant pour les promesses que l'on fait aux autres que pour celles que l'on se fait à soi-même, n'est-ce pas ? Alors, ce matin, vous parler d'elle...

 

Quelle présence sur scène ! Quelle énergie, quel coffre ! On a du mal à croire que cette voix renversante sort d'un si frêle bout de femme, et pourtant, si. Le public s'embrase très vite, c'est comme si un incendie parcourait la salle. Pour ma part, je suis venue en novice, je connais encore très mal les chansons de Barbara Pravi. Tout ce que je sais, c'est que je les aime déjà, bien que n'ayant fait que les effleurer pour l'instant. Mais il y a comme ça des certitudes qui vous saisissent tout de suite. C'est comme les débuts d'un amour vertigineux : dès les premiers jours, vous sentez qu'il est de taille à révolutionner votre vie. D'ailleurs, il l'a déjà fait. Toute ressemblance, partielle ou totale, avec mon vécu serait purement fortuite, croyez-moi (si vous voulez).

Je regarde cette jeune femme se donner entièrement à son public et je pense tour à tour à Édith Piaf, pour la gestuelle et le coffre, à Barbara, pour cette manière de nous livrer sans filtre des histoires d'amour, des échecs, des joies, des peines, tout cela à la fois, à Dalida, pour la sensibilité enfouie sous les paillettes. Mais trêve de comparaison car comparaison n'est pas raison, c'est bien connu : Barbara Pravi est elle, simplement, et pour notre plus grand bonheur. Elle interprète essentiellement des chansons de son dernier album, La pieva, que j'ai acheté en même temps que Replugged et … écouté trois fois ! Non mais ces infidélités que j'ai... Qu'on me pardonne ! Pour la peine, je réciterai, ce soir, au coucher, quarante Exercices de simple provocation avec 33 fois le mot coupable et j'insisterai fortement sur les « j'me sens coupable » qui rythment cette merveilleuse page d'anthologie ! Peut-être même que je me flagellerai !

Bref... Donc, oui, essentiellement des chansons tirées de La pieva. La pieva, ça veut dire la chanteuse en serbe. C'est aussi le surnom qui fut donné à une ancêtre de Barbara Pravi, une gitane qui vivait dans les montagnes de Serbie et se déplaçait de village en village pour chanter. Toute ressemblance avec la pieva qui se produit devant nous en ce radieux soir d'avril 2025 serait tout sauf fortuite !

Je reconnais de nombreux titres écoutés récemment : -Antoine, somptueuse déclaration d'amour à un homme qui a plutôt intérêt, c'est moi qui le lui dis, à mériter et cet amour et cette déclaration (parce que purée, c'est du lourd),

-L'armure qui, comme Exister et Si ce monde est fou, transforme la BAM en une immense piste de danse, ça envoie du disco intelligent, mélancolique, percutant,

-Bravo,

-Maman,

-Vivante,

-Qui j'étais. Enfin bref, tout l'album ! Et d'autres titres plus anciens devenus mythiques, notamment La femme. De quoi régaler un public qui ne cache pas son gigantesque plaisir. Que c'est chouette, un concert de Barbara Pravi ! Et, quand elle fend la foule pour chanter en communion avec elle, la magie est à son comble.

Pour le dernier titre, November Ultra vient rejoindre son amie Barbara sur scène, et ces deux-là ensemble, ça fait un truc absolument bouleversant, que t'as envie que jamais ça ne s'arrête. Et puis ça s'arrête quand même, comme j'ai souvent eu à l'écrire ici, parce que les supplications lamartiniennes ne sauraient, malheureusement, avoir raison de la cruauté du temps qui, ne sachant rien faire d'autre que passer, passe, passe, passe, encore et toujours. Qu'il est morne et prévisible, franchement ! Mais déjà, il m'entraîne, je le sens, vers le prochain concert de Barbara Pravi (car, c'est sûr, je retournerai la voir) et, je l'espère du plus profond de mes entrailles, vers le prochain concert d'Hubert. Parce que oui, d'accord, il y a d'autres artistes que lui et il n'est pas idiot de leur prêter une oreille attentive, mais, mais... Quand même, lui seul a ce pouvoir de me secouer jusqu'en la moindre parcelle de mon âme. Ouais, carrément ! Ça va, j'ai bien rattrapé le coup de mon infidélité ? Vous m'absolvez ? Ne vous inquiétez pas, j'ai vérifié la conjugaison avant de poser ce verbe étrange ici ! Donc, vous m'absolvez ? Peut-être serez-vous encore plus enclins à le faire si je vous dis que dans trois jours je pars à Berlin avec une amie, fan de Thiéfaine elle aussi, et que j'ai, pour l'occasion, acheté des œufs en plastique que nous comptons bien gober en marchant sur la capitale allemande ! Bienheureux initiés, vous avez la réf et l'image ?! Au regard de tout cela, je trouve que mon infidélité n'était qu'infime babiole et … je m'absous moi-même, après avoir vérifié la conjugaison de ce verbe qui ne fait décidément pas dans la simplicité !

08/03/2025

Louis Chedid était à la salle Poirel avant-hier et c'était ... parfait, peut-être même un peu plus !

"On s'aim'ra ce printemps

Quand les soucis guignols

Dansent le french cancan

Au son du rossignol

Quand le chignon d'hiver

De la terre endormie

Se défait pour refaire

L'amour avec la vie". Léo FERRÉ

 

Envie de chanter à tue-tête C'est le printemps (de Léo Ferré) dans les rues de Nancy en ce jeudi 6 mars où la jolie saison, avec un peu d'avance, nous offre un ciel tout bleu et un soleil généreux. Et ça rime, parce que tout rime en ce jeudi. Il y a comme une douceur dans l'air. On dirait que la ville a voulu se mettre en phase avec l'univers de Louis Chedid, qui passe à la salle Poirel à partir de 20 heures. Tout n'est que délicatesse, où que le regard se pose. Luxe, calme et volupté. Un peu d'enchantement dans ce monde de brutes !

Depuis de nombreuses années, Louis Chedid chante avec entrain que ce qui compte avant tout dans la vie, c'est l'amour. Qu'est-ce qu'on veut, tous autant qu'on est ? Qu'on nous aime. Quoi encore ? On veut de la tendresse, on veut du rêve, on veut du bonheur. Voilà qui nage à contre-courant de la bellicosité ambiante et qui n'est pas pour me déplaire. Si tous les gars du monde se donnaient la peine de ressembler à Louis Chedid, pour sûr que la planète tournerait enfin rond. Domaine de l'utopie, n'est-ce pas ?!

Mais croyons-y (oh, que c'est bizarre comme tournure !) en ce jeudi où tout semble permis puisque : -le printemps s'offre à nous avec quelques semaines d'avance sur le calendrier qui l'a fixé au 20 de ce mois (mais le printemps, cette année, sera rebelle ou ne sera pas, qu'on se le dise),

-j'ai dans le cœur, depuis janvier, une démangeaison qui fait du bien,

-je suis en rémission d'une maladie à qui j'ai prouvé qu'il ne fallait pas trop me chercher non plus,

-je sais désormais savourer, en raison de ladite rémission, cette chose étrange qu'est la vie,

-Louis Chedid passe à la salle Poirel...

 

A peine les premières notes retentissent-elles que la salle acclame le chanteur. Qui le vaut bien, je vous le dis. Il déclare dès le début que ça démarre de la meilleure des façons entre Nancy et lui. Et nul ne pourrait le contredire. D'ailleurs, toute la soirée sera à l'image de ce début. Tout sera parfait, de bout en bout. Parce que c'est Louis et parce que c'est nous. Parce qu'entre lui et nous circule un fluide d'amour. Oui, carrément !

Les titres s'enchaînent sans avoir l'air de toucher au temps qui, pourtant, passe, passe encore et passe toujours, et c'est dommage car vous savez bien ce qu'il en est, des soirées parfaites : on voudrait qu'elles ne s'arrêtent pas. Et elles s'arrêtent quand même. On rêverait qu'un écran les fige dans une éternité imprenable. Ce serait bien, non ?

Je reconnais des chansons du dernier album, Rêveur, rêveur, celui-là que j'ai offert en janvier à l'objet de ma délicieuse démangeaison. Je suis très émue lorsque j'entends Je suis là. J'envoie un message à monsieur. Il comprendra pourquoi j'ai choisi ce moment précis pour lui faire parvenir mes plus douces pensées...

Tout est parfait, écrivais-je, et tout devient encore plus parfait (je sais, ce n'est pas possible, normalement, de faire plus parfait que parfait, mais je vous ai dit que tout était permis en ce jeudi) après que Louis nous a demandé de nous lever. C'était sur je ne sais plus quelle chanson. Mais il est vrai que rester assis sur cette chanson-là n'eût eu ni queue ni tête. Et nous voilà donc tous, salle Poirel, à chanter, à taper dans nos mains, à danser. Que chacun fasse donc ce qui lui plaira pour exprimer sa joie ! D'ailleurs, un jeune homme ne s'en prive pas et chante presque aussi fort que Louis, en avance d'une strophe en plus (comme le printemps, il faut croire que c'est une caractéristique de cette année 2025). Louis entend ce jeune homme et l'invite à se présenter (il s'appelle Lucas) et à chanter seul depuis sa place. Lucas s'en sort bien. Il s'emmêle juste un peu les pinceaux à un moment, ça doit être l'émotion. Mais qui ne serait pas ému en pareille circonstance ?

Lucas aura, en ce jeudi 6 mars, son petit quart d'heure warholien. Louis n'oubliera pas Lucas comme ça. Pendant un morceau, alors qu'il nous fera tous chanter, il interpellera notre jeune homme : « C'est drôlement bien. T'en penses quoi, Lucas ? ». Je crois que Lucas ne peut que penser la même chose. Que c'est drôlement bien. Que l'osmose est absolument vertigineuse ce soir.

Vraiment, on voudrait que cela ne s'arrête jamais. Ça fait tellement de bien d'entendre parler de joie et de douceur en ce moment où tant de contrariétés pourraient oppresser le printemps ! Mais il est comme Louis (et je l'appelle par son prénom, comme on appelle un ami ou un frère, car c'est bien ce qu'il me fut, deux heures durant, avant-hier). Oui, le printemps est comme Louis : rien ne le démolit, tout le rend plus fort. Et je pose une question, comme ça, au passage : opposer une cargaison de délicatesse à la brutalité qui règne partout en ce moment, n'est-ce pas là la plus audacieuse des rébellions ?

 

On n'a pas envie de se quitter et pourtant... Et pourtant on se quitte quand même, comme ces amants qui ont cru que, et puis finalement, ben non... Soit dit en passant, j'ai pas envie que ça finisse comme ça avec l'objet de ma démangeaison ! Mais nous maîtrisons si peu de choses, moi comme vous, vous comme moi. « Ils ont peur de se perdre et se perdent pourtant », chantait Brel. Oui, mais là, non ! Ce sera différent, ce sera plus solide que tout ce que j'ai vécu auparavant, ce sera du béton armé avec beaucoup de douceur dedans. Allez, on y croit !

 

Et pour accompagner le rêve : si je m'écoutais un petit Louis Chedid ?! Avant de reprendre les bonnes habitudes et de refaire à Hubert la place qui lui revient de droit, Hubert que je n'oublie pas, que je n'oublie jamais. Ça y est, ça fait à peu près un mois sans lui. Je crois qu'il est temps de rallumer la chaîne et de reprendre une activité normale ! D'abord Chedid, ensuite Thiéfaine. Deux univers diamétralement opposés, mais, fermement, je crois que tout est permis dans la vie ! C'est le printemps lui-même qui me l'a dit !

 

10/02/2025

Dry January, wet February, et tutti quanti !

"Je veux qu'aujourd'hui soit la première journée d'une vie nouvelle". Julien GREEN

 

Il y a ceux qui font le « dry January ». J'ai une amie qui, elle, a décidé de faire le « wet February », c'est-à-dire qu'elle se voit bien arroser copieusement chaque jour que Dieu fera entre le début et la fin du mois le plus court de l'année.

Hier, quelqu'un (qui compte énormément pour moi depuis quelques semaines, genre tornade arrivée dans ma vie alors que je naviguais, peinarde, sur des flots pépères – mais, bon sang, que j'aime ces remous inattendus !), quelqu'un me disait qu'il allait se faire son « dry February ». Pas bête, n'est-ce pas, d'avoir choisi le mois le plus court de l'année ?! Il faut dire que ce quelqu'un est sacrément astucieux ! Il m'expliquait les raisons de son choix. L'une d'elles était « je fais ça ne serait-ce que pour me prouver que ... je peux le faire » !

Eh bien, moi, figurez-vous que je me suis lancée dans un truc similaire il y a quelques semaines. Rien à voir avec les spiritueux : j'en consomme tellement peu que je n'ai pas besoin de me faire des mois « dry ». L'avantage de ne pas être dans l'addiction vis-à-vis de l'alcool ! En revanche, je ne vous cacherai pas (comme si vous n'étiez pas déjà au courant) que je suis légèrement addict aux chansons d'un certain Hubert-Félix Thiéfaine. Et j'ai décidé ceci : ne pas en écouter pendant quelque temps. Pas avant la sortie de Replugged. Je fais cela ne serait-ce que pour me prouver que … je peux le faire !

Ce n'est pas si simple, croyez-moi : dans la voiture, quand je bidouille la clé USB pour passer en revue les artistes qui la peuplent, la tentation est forte, lorsque « Thiéfaine » s'affiche sur l'écran, de poser le doigt sur ce nom tant aimé. Il suffirait même d'effleurer ledit écran, et hop, un univers où j'ai tous mes repères s'offrirait à moi comme une vaste (mais pas morne) plaine !

Or, même si ma main me démange atrocement en pareilles circonstances, je choisis systématiquement l'abstinence ! Je m'inflige de ces tortures, purée, comme si la vie n'en recelait pas assez à elle seule ! Il faut croire que j'ai un côté masochiste, que voulez-vous !

Pourquoi tant de peine ? Ne serait-ce que pour me prouver qu'une vie sans HFT, c'est possible, même pour moi ! Parfois, quand je croise d'anciens élèves et qu'ils me disent qu'ils ne font plus d'allemand, je ne peux m'empêcher de m'exclamer dans un regret : « Alors, c'est vrai, on peut vivre sans allemand ? J'imagine, oui, que c'est possible, mais comme ça doit être étrange ! En tout cas, moi, je ne pourrais pas ». L'analogie est vite faite avec Hubert : je suppose, oui, qu'on peut vivre loin de son œuvre. Mais comme ça doit être étrange ! Et dommage ! En tout cas, moi, je ne pourrais pas !

Pourquoi tant de peine encore ? Pour « mieux revenir, vagabonde dans la rue » d'Hubert, et savourer les fruits de mon application. Car le plaisir, à n'en pas douter, sera à la hauteur des efforts consentis ! C'est comme quand un être aimé vous a follement manqué : le retrouver n'en est que plus intensément savoureux ! Je suis de celles qui aiment l'attente.

 

Moi aussi, quelque part, je suis sacrément astucieuse (il n'est pas inutile de se complimenter soi-même en ce monde de brutes) : pour mettre ma passion à l'épreuve, j'ai choisi le mois le plus court de l'année ! Et je suis bien décidée à rompre le « jeûne » le jour où Replugged pointera le bout de son nez. Courageuse, mais pas débile non plus, faut pas pousser !

 

Ce jour-là, celui qui signera mes retrouvailles avec une œuvre qui est un peu ma façon de respirer, je serai divinement heureuse. Je me féliciterai du sacrifice accompli, comme un devoir un peu absurde, et je n'en siroterai que mieux le contenu du flacon tant aimé !

 

Qui se lance dans le même pari que moi ? Allez, un petit « dry February », pour la route !

07/02/2025

"Et je ne suis plus pareille quand le soleil se lève"...

"Il nous faut vivre cette espérance

pareille à la brève résurrection des herbes

après qu'elles ont bu le feu et l'eau des orages

il nous faut tenir à cette idée

qui promet un ciel au centre de toutes choses". Jean-Pierre SIMÉON

 

 

Aujourd'hui, billet qui n'a pas grand-chose à voir avec Hubert ! Cependant, je souhaite le poster ici, parce qu'il me tient grandement à cœur. Le 14 mars, dans le cadre d'un colloque sur la leucémie qui aura lieu à l'hôpital où je fus prise en charge, je témoignerai en tant qu'ancienne malade et je dirai les mots qui suivent. J'ai tellement changé depuis que j'ai vécu ce truc invraisemblable ! Merci à vous qui m'avez envoyé des marques de soutien durant les longs mois de combat ! 

 

Il est des dates qu'on n'oublie pas. Le 9 novembre 2022, ma vie devait basculer dans ce que j'appelle désormais une dimension parallèle. Lorsque j'évoque la maladie, j'ai recours à tout un arsenal lexical qui a trait à la science-fiction. Il m'arrive également de parler d'expérience aux frontières du réel.

 

En ce 9 novembre 2022, ma généraliste me faisait faire une prise de sang en urgence. Le soir, après en avoir reçu les résultats, elle m'appelait et me demandait de me rendre au plus vite à son cabinet. Cabinet où elle devait m'annoncer qu'au regard de mon bilan sanguin, elle soupçonnait une leucémie. J'avais alors 24% de blastes dans le sang.

 

Le lendemain, je voyais le docteur Carassou, qui confirma le diagnostic de ma généraliste. Il m'hospitalisa en urgence. Nous étions le 10 novembre.

 

L'avant-veille de ce jour sinistre, j'étais encore en cours, face à mes élèves. En refermant ma salle de classe à la fin de la journée, j'étais loin de me douter que je n'y retournerais pas avant bien longtemps.

 

Un long parcours commença alors. Avec des hauts et des bas. Trois semaines après mon entrée à l'hôpital, j'étais transférée en chambre stérile. Entre-temps, j'avais été renseignée sur le type de leucémie que j'avais : il s'agissait d'une leucémie promyélocytaire. Par chance, c'est celle qui se traite le mieux de nos jours, si j'ai bien compris. Contrairement à d'autres malades, je n'ai pas eu besoin de greffe, je n'ai pas connu les tourments liés à l'attente d'un donneur compatible. Mais, pour autant, mon chemin n'a pas été exempt d'embûches. J'ai connu des moments de grande faiblesse, la tension trop basse pour envisager la moindre activité en dehors de mon lit, la mise sous oxygène et plusieurs infections.

 

Fin novembre, je rencontrai l'art-thérapeute Adeline Bouillet. Elle vint me voir une première fois dans ma chambre stérile et me proposa d'exprimer mon ressenti à l'aide de collages. Elle me donna également un cahier et un stylo. Elle ne croyait pas si bien faire : j'ai toujours eu recours à l'écriture, dans tous les moments de ma vie, et notamment face aux coups durs. Ce cahier et ce stylo, j'allais en faire des alliés précieux. Avant mon entrée en chambre stérile, j'avais dû renoncer à mes propres carnets car on ne pouvait pas les désinfecter. Le matériel qu'Adeline m'offrit avait pu l'être. La couverture du cahier était en papier glacé. Dès lors, tous les jours ou presque, je consignai mes états d'âme dans ce cahier. J'essayais de trouver un mantra pour chaque jour. Un mantra positif ou, en tout cas, pas trop pessimiste. Cela m'aida énormément à traverser cette expérience aux frontières du réel dont je parlais dans mon introduction. Le travail avec Adeline me fut d'un grand secours, tout comme celui que je menai en parallèle avec la psychologue Laëtitia ou encore celui que je fis avec Valérie, la sophrologue.

 

Lorsque ma généraliste avait lâché le mot « leucémie », je n'avais pu m'empêcher de penser à une mort prochaine. Je ne connaissais rien à cette maladie, je ne savais même pas qu'elle était classée en plusieurs catégories. Cette ignorance n'avait rien d'anormal : j'avais toujours fait partie du monde des bien portants et cela me semblait une évidence, voire un dû. Aujourd'hui, je sais à quel point la santé est un bien précieux. Le plus précieux de tous.

 

Après quelques péripéties, en janvier 2023, je pus commencer le traitement en ambulatoire. Au début, à la maison, je me sentais perdue. À l'hôpital, même si je n'étais pas chez moi, j'avais mes repères et toute une équipe qui me rassurait. Je n'oublierai jamais les soignants qui m'accompagnèrent lors de cette longue traversée. Pendant plusieurs semaines, nous fûmes comme une famille. Nous avons vécu des choses tellement fortes ensemble ! Je me souviens des propos d'un certain William, qui me dit un jour avec beaucoup d'humour : « Madame Auboyer, on vit de ces choses intimes, vous et moi, c'est un truc de fou ». Cela me fit rire ! Il faut dire que c'était toujours William qui était de service quand mes hémorragies se déclaraient de manière intempestive. Il savait dédramatiser toutes les situations. Parfois, avant de m'annoncer ma température, il me demandait d'essayer de la deviner. Quand je tombais à côté, il me disait : « Bon, c'est pas aujourd'hui qu'on aura notre loto gagnant ». J'ai apprécié son sens de l'humour. Comme j'ai apprécié les mots délicats de Nastasia, d'Amandine, de Lysiane et de tant d'autres.

 

En plein milieu du traitement en ambulatoire, je fis une infection qui me conduisit à nouveau à l'hôpital. J'y restai une semaine. Car l'infection était sérieuse. Elle faillit me coûter la vie. C'est lors de cette deuxième hospitalisation que je rencontrai des membres de l'association Leucémie espoir 57, qui devait m'accompagner jusqu'à la fin de mon parcours. Et même au-delà.

 

Ensuite, les choses se tassèrent un peu et je pus continuer le traitement sans encombre jusqu'au 14 juillet 2023. Et je pus même partir en vacances fin juillet avec mes deux filles ! C'est à partir de ce moment que ce qui me semblait évident avant la maladie se mit à revêtir un caractère exceptionnel à mes yeux ! Tout est exceptionnel, finalement, et on l'ignore généralement : partir en vacances, aller au travail, sortir avec des amis, se lever le matin et être en bonne santé !

 

En août 2023, je revoyais le docteur Carassou. Il me disait que je pouvais reprendre une vie normale. C'était quasiment inconcevable pour moi ! J'avais vécu dans une dimension parallèle à la vie ordinaire, et voilà que je pouvais quitter cette dimension ! Je repris le travail en septembre 2023, à mi-temps. Ce fut une grande joie.

 

Un mois plus tard, en octobre, je fêtai mes cinquante ans. En aucun cas, cet âge ne signa mon entrée dans la vieillesse ! Je me souviens d'avoir dit à mes filles que cet anniversaire était précieux car il avait failli ne pas être !

 

Depuis, je me sens incroyablement jeune. Je savoure la seconde chance qui m'a été accordée. J'ai repris le travail à temps plein. Quand il m'arrive de ne pas avoir envie d'y aller, je me dis que ce manque d'envie est un luxe ! Quand j'ai des tracas, qu'ils soient d'ordre professionnel ou privé, je repense à la chambre stérile et je me dis : « Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes ».

 

Cette expérience a changé ma vie. Je sais que j'ai eu une chance incroyable. Je sais que la santé n'est pas un dû, mais un cadeau du ciel. Désormais, je savoure chaque aube nouvelle avec, dans le cœur, un enthousiasme indestructible. Et une gratitude infinie. Gratitude envers tout le personnel de l'hôpital de Mercy. Gratitude envers Leucémie espoir 57. Gratitude envers ma famille, mes amis, mes élèves, mes collègues, qui furent là pour me soutenir. Gratitude envers mes filles qui, à l'époque, du haut de leurs 14 et 17 ans, firent preuve d'une maturité admirable. Chaque matin, durant mon hospitalisation, je les suppliais intérieurement de me donner la force de tenir debout sur mes jambes, chose qui n'allait pas toujours de soi. Elles exaucèrent jour après jour ma prière, sauf une fois, parce que j'étais trop faible. Elles ont un super pouvoir, mes filles ! Ce sont des fées. La maladie a renforcé nos liens. Maintenant, nous nous aimons encore plus fort et, j'ose espérer, encore mieux.

 

Que serait cette expérience aux frontières du réel si elle n'avait pas modifié mon regard sur l'existence ? J'en ai tiré des leçons qui, je crois, m'accompagneront jusqu'à la fin de mes jours. Je ne suis plus la même personne. Avant de tomber malade, j'avais tendance à toujours voir le verre à moitié vide. Maintenant, je ne le vois jamais autrement qu'à moitié plein, et même : il déborde. Il est rempli d'un nectar délicieux que je sirote jour après jour : ce nectar, c'est la vie, ici et maintenant !

22/01/2025

Unplugged / Replugged / Unplugged !

"Je suis un égaré qui ne retrouve son chemin que par un perpétuel effort". Henry BAUCHAU

 

Ben voilà, j'ai réécouté tout Unplugged, en commençant par le deuxième CD, pour changer. Sur Page noire, j'ai clairement vu Hubert saluer le public et s'en aller, sur la pointe des pieds... Ouais, tout ça dans mon salon...

Durant toute l'écoute, j'ai tenu compte des conseils précieux d'un ami musicien à qui j'ai demandé dernièrement comment je pouvais détacher les sons de chacun des instruments pour les isoler dans ma petite tête. Comme cet ami est fin pédagogue, il m'a envoyé des tas de liens vers des morceaux qui m'ont permis de m'entraîner. Trop, trop bien ! J'ai l'impression que ça marche déjà ! On verra ce qu'il en sera ce week-end, lorsque j'irai écouter les Schubertiades qui seront données près de chez moi. Bref...

En voyant clairement Hubert faire sa petite révérence et s'arracher de scène, j'ai eu des frissons. Comme ceux que j'ai à chaque fois que je le vois apparaître. Faut pas me demander pourquoi il me fait ça, lui, alors qu'aucun de mes amoureux ne me l'a jamais fait, n'en déplaise à ces messieurs !!! N'est pas Hubert qui veut, qu'on se le tienne pour dit !

Toujours en voyant clairement Hubert faire sa petite révérence dans mon salon, je me suis dit qu'il me manquait horriblement. Oui. Faut pas me demander pourquoi il me manque régulièrement comme ça, par bouffées, alors qu'aucun de mes amoureux... Remontez quelques lignes ci-dessus et décalquez, décalquez puisque malheureusement, t'as pas à la ronde un mec capable de me mettre dans le même état de manque qu'HFT. N'est pas Hubert qui veut, qu'on se le tienne pour dit et qu'on se dise bien, aussi, que c'est dommage !

 

En mettant le CD1, je me suis demandé ce que foutait Replugged, qui devait atterrir en janvier dans nos chaumières, n'est-ce pas ? Ou me trompé-je ? Peut-être qu'on l'aura pour la Saint-Valentin ou une connerie comme ça ?! Ce sera quand même pas un vendredi 13 : le prochain tombe en juin, on serait mal s'il fallait attendre jusque là. Ce sera quand même pas non plus le jour de l'Immatriculée Contraception, dites-moi ? Cela nous ramènerait encore plus loin. J'aime attendre, vrai, mais tout de même. Attendre, oui, poireauter : non !

 

En écoutant cette orgie d'excellente musique mariée à de non moins excellentes paroles, je regardais par la fenêtre. Je me disais que le temps passait si vite que bientôt, les arbres dénudés que je voyais au dehors se rhabilleraient joliment pour le printemps, chacun à sa façon, chacun selon la couleur qui lui siérait. Comme ça va être chouette ! Vivement ! Parce que l'hiver, ça va bien, c'est juste parce qu'il n'y a rien d'autre à faire, n'est-ce pas ?

 

Mais, quand même : Replugged, c'est pour quand ?! Si on nous annonçait une date, on pourrait se projeter. Compter les dodos, nous accrocher comme des malades à nos tétines et à nos objets transitionnels !

 

En attendant … Écoutons Unplugged, à fond la gomme et les manettes !