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31/07/2011

Saint Augustin (suite)

La pensée du jour : "Etrange chose que ces individus qui attirent un jour notre regard, piquent notre curiosité, font surgir maintes questions, se fixent sans grande raison dans notre mémoire, et qui réapparaissent en nous de temps à autre, parfois longtemps après que nous les avons entraperçus". Charles JULIET, Lumières d'automne.

 

 

Bien qu'il fût désormais assuré de son avenir immédiat, l'inquiétude subsistait en Augustin mais elle était de nature spirituelle ; à Rome il avait été attiré pendant un temps par le scepticisme des Académiciens, d'Archésilas plutôt que de Carnéade. Il écoutait maintenant les prédications de saint Ambroise, le grand évêque de Milan. Mais trois choses retenaient encore Augustin loin de la foi et de la discipline de l'Eglise catholique : l'impossibilité de concevoir une substance absolument immatérielle, l'impossibilité d'expliquer l'origine du mal, l'impossibilité de se passer de femmes. Les deux premiers obstacles furent les plus facilement franchis : il lut les platoniciens (ou plutôt les néo-platoniciens, très probablement Plotin) et il trouva sur l'essence divine et la nature du mal des notions qui lui ouvrirent des voies nouvelles. Il comprit que Dieu est lumière, substance spirituelle dont tout dépend et qui ne dépend de rien. Quant au problème du mal, la solution lui en apparut dans le fait que les choses étant subordonnées à Dieu, elles ne possèdent ni l'être ni le non-être absolu : elles sont puisqu'elles tiennent leur existence de Dieu, elles ne sont pas absolument, puisqu'elles ne sont pas Dieu. Aussi ne sont-elles corruptibles que dans la mesure où elles participent de la bonté divine; si elles étaient dépourvues de bonté, elles ne pourraient même se corrompre. La corruption n'est donc que perte d'un bien; tout ce qui est, est bon; le mal n'est pas substance, mais absence de bien, non-être. Dès lors il était dans l'état d'un homme convaincu de la vérité, mais cela ne put l'empêcher de vivre encore dans le péché. Sur l'instance de sa mère qui voulait le marier à une jeune fille de bonne famille, il avait renvoyé sa compagne, mais ce fut pour reprendre une autre concubine. C'est alors qu'eut lieu la crise décisive : un jour qu'il était allé chercher la solitude et le calme sous un bosquet de son jardin, il crut entendre une voix qui lui disait « Tolle et lege » (« prends et lis »). Surpris, se demandant de quel livre il s'agissait, il courut consulter un de ses amis, un livre était placé devant ses yeux, les Epîtres de saint Paul; il les ouvrit au hasard et tomba sur ce passage : « Ne passez pas votre vie dans les festins et les plaisirs de la table ni dans la débauche et l'impiété..., mais revêtez-vous de votre Seigneur Jésus-Christ et gardez-vous de satisfaire les désirs déréglés de la chair. » Touché par la grâce, il décida de se retirer dans la maison de son ami Verecundus en Lombardie avec ses amis et disciples, sa mère Monique et son fils. Là ils passaient leur temps en prières, études et discussions. C'est là que virent le jour ses fameux dialogues philosophiques : Contre les philosophes de l'Académie, De la Vie Heureuse, De l'Ordre, Les Soliloques, les trois premiers en 386 et le dernier au début de 387. Après les vacances, il donna sa démission de professeur de rhétorique et dans la nuit du 24 au 25 avril de l'année 387, il reçut de saint Ambroise le baptême par lequel Augustin de Thagaste, futur évêque d'Hippone, docteur et saint de l'Eglise, se trouva lavé de tous ses péchés.

 

03/07/2011

"Elle dit c'est pas Saint Augustin qui joue du violon dans les bois"...

La pensée du jour : "Je ne m'approche de la mort que pour mieux me précipiter vers la vie. Toute grande et âpre avidité de vivre naît d'une hantise de la mort". Charles JULIET, Ténèbres en terre froide.

 

Saint Augustin (Aurelius Augustinus) : Le plus illustre des Pères de l'Eglise latine est né à Thagaste (aujourd'hui Souk-Ahras), petite ville de Numidie, le 13 novembre 354, il est mort à Hippone le 14 août 430. Il était fils d'un païen, Patricius, et d'une chrétienne, Monique. Il fit ses premières classes dans sa ville natale, puis alla étudier la rhétorique dans la cité de Madaure. Il se passionna pour le latin et la littérature latine, mais il haïssait le grec, dont il semble qu'il n'ait assimilé que les quelques rudiments nécessaires pour comparer une traduction avec le texte original. Bien que sa mère, fort pieuse, le poussât à se faire baptiser, il resta catéchumène. Rentré à Thagaste, il y mena pendant une année (369-370) une vie dissipée, dont il se repentira amèrement, comme en témoignent les Confessions. Il put poursuivre ses études, comblant ainsi le vœu de son père, grâce à la libéralité du mécène Romanianus, ami et lointain parent de la famille. C'est ainsi qu'il partit pour Carthage, où il fréquenta l'école d'éloquence, sans oublier les plaisirs du théâtre et les jeux de cirque, dont il était avide. Il connut une jeune fille de très humble condition qui fut sa compagne pendant douze ans et à laquelle il fut fidèle « comme à une épouse légitime ». De leur union naquit un fils, Adeodat (A Deo datus) chéri sinon désiré, et à l'éducation duquel ils consacrèrent tous leurs soins. Entre-temps Augustin continuait à travailler avec acharnement, à la fois par goût, par ambition, par nécessité et par reconnaissance à l'égard de son bienfaiteur. A 18 ans la lecture de l'Hortensius de Cicéron lui révéla sa vocation philosophique. C'est alors qu'il s'éprit d'un amour sans égal pour la beauté incorruptible de la véritable sagesse. L'étude de la sagesse païenne l'amena à prendre connaissance de la doctrine chrétienne : il lut les Ecritures. Elles le déçurent et il ne les comprit pas. Hésitant, il adhéra en tant que simple auditeur au « manichéisme », une des innombrables sectes chrétiennes de l'époque. Deux raisons surtout guidèrent son choix : l'impossibilité d'accepter une foi imposée, non fondée sur la raison, et le problème du mal qui le préoccupera toute sa vie. Ses études une fois terminées, il rentra avec sa femme et son fils à Thagaste où, s'étant consacré à l'enseignement de la rhétorique et à la diffusion du manichéisme, il s'attacha des disciples qui le suivirent à Carthage. Entre 380 et 381, il écrivit son premier ouvrage, un traité en deux ou trois volumes, De pulchro et apto (Sur la beauté et la convenance), déjà perdu au moment où il écrivait les Confessions. Lorsqu'arriva de Rome à Carthage l'évêque Faustus, célèbre docteur manichéen, Augustin l'accueillit comme l'homme qui devait lever tous ses doutes. Il fut déçu : Faustus lui apparut comme un habile orateur, mais ignorant, et incapable de faire la lumière sur le moindre problème. Son ardeur manichéenne s'en trouva refroidie. Peu après il décida de se rendre à Rome, dans l'espoir d'y conquérir des lauriers et quelque aisance. Sa mère ne voulait pas le laisser partir ou du moins désirait qu'il l'emmenât (son père était mort en 379) : elle le suivit en pleurant jusqu'à la mer. Rome ne remplit pas son attente : il tomba gravement malade et l'enseignement de la rhétorique s'avéra peu lucratif. Un poste de professeur de rhétorique s'étant trouvé libre à Milan, il se présenta et fut agréé grâce à l'intervention de ses amis manichéens auprès de Symmaque, préfet de Rome. Il avait alors trente ans. L'amélioration de sa situation lui permit de faire venir sa femme et son fils, et l'année d'après sa mère et ses fidèles disciples.

 

La suite dans les jours qui viennent.