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13/06/2025

Comment j'ai réalisé, le week-end dernier, deux rêves...

"Ce qui est blessé en nous demande asile aux plus petites choses de la terre et le trouve". Christian BOBIN

 

En ce moment, je réalise un certain nombre de rêves, dont quelques-uns furent formulés en pleine maladie, alors que le peu de soleil qui restait en moi cherchait désespérément un futur et ne savait même pas si futur il y aurait. Ce même futur incertain cherchait désespérément un soleil. Qui a fini par venir, hourrah ! « La vie c'est ce qui vous tombe dessus toujours au moment où on n'y croit plus » : les circonstances me donnent souvent l'occasion de me souvenir de cette merveilleuse phrase d'Higelin !

Deux de mes rêves : voir un jour Stephan Eicher et Michel Polnareff. Le week-end dernier fut celui qui me permit de concrétiser ces deux souhaits à quelques heures d'intervalle. Allez, encore un hourrah !

D'abord Stephan Eicher. Il se produisait samedi soir au théâtre d'Esch-sur-Alzette, au Luxembourg (Luxembourg : petit pays qui gagne à être connu). Une salle intimiste, minimaliste. Très vite, je m'y sens comme dans un cocon.

Juste avant le concert, je discute avec deux « stephanomanes ». Elles ont dû voir Eicher autant de fois que j'ai vu Hubert. En les écoutant, je souris et je note les similitudes : même capacité à enfiler les bornes pour aller voir leur chanteur préféré (l'une d'elles vient de Lyon), même affection quand elles parlent de lui. Dans leurs bouches, il s'appelle Stephan, comme un autre s'appelle Hubert dans la mienne. Dans leurs téléphones, des photos sur lesquelles on les voit en compagnie du beau Stephan (c'est vrai qu'il a beaucoup d'allure, leur Suisse !).

Bref... Cette conversation m'amuse autant qu'elle me laisse songeuse : quand reverrai-je de mon brave Hubert briller le talent sous mes yeux ébahis ?! Ok, bien sûr, pour aller voir d'autres artistes, mais nul ne saurait le détrôner, question d'affinités. De parenté d'âmes. Ouais, carrément, j'ose l'affirmer !

Mais, pour l'heure, voici Stephan. Pour un seul en scène. Avant que le concert ne commence, des mots, sur un écran, nous avertissent : il serait bon, pour une fois, de reléguer les portables au fond de nos sacs, en les branchant au préalable sur silencieux. Ce avec quoi je suis entièrement d'accord. Je ne suis pas de celles qui dégainent leur téléphone à tout bout de champ durant les concerts. Je préfère le mode années 80 années folles, cette époque lointaine où l'on s'envoyait encore des lettres manuscrites, par la poste, et où l'on allait aux concerts muni(e) de vrais billets qui ne se réduisaient pas à de barbares codes-barres. « Je vous parle d'un temps que les moins de vingt ans » : vous connaissez la chanson !

Et puis, Stephan arrive. Cheveux gris, mi-longs, plaqués sur la tête. Bel homme, mais pas seulement ! Suisse flanqué d'un délicieux accent et de phrases parsemées de petites fautes de français non moins délicieuses. Il en rit lui-même. Peut-être bien qu'il cultive ces maladresses, façon « soyons la version masculine de la regrettée Jane Birkin ». Entre deux chansons, il parle, il amuse. Il se fait grave parfois, déplorant le temps qui passe. Il dit que ce temps qui passe, c'est chiante, je cite. Il dit qu'hier encore il avait vingt ans (qu'est-ce que j'ai à citer autant Aznavour ?!) et que d'un seul coup, d'un seul, il a pris quatre décennies dans la face. Mon cher Stephan, on en est tous plus ou moins là. « La vie passe comme une rivière, faut pas trop regarder l'heure », chantait un certain Jean-Patrick Capdevielle, que je cite pour changer un peu d'Aznavour ! Si ça peut te rassurer, Steph, moi c'est tout pareil : je n'ai rien vu filer et j'ai eu beau supplier le temps de bien vouloir suspendre son vol, ce malotru n'en a fait qu'à sa tête et n'a rien suspendu du tout ! Tu as raison : il est chiante !

À plusieurs reprises, le chanteur nous livre les premières notes de Déjeuner en paix. D'abord, il nous dit qu'il est « trop tôt pour la faire, celle-là ». Ensuite, il l'entame à nouveau à plusieurs reprises, pour la laisser choir sans autre forme de procès. Elle viendra plus tard, elle se fera attendre. D'autres titres surgissent : Des hauts, des bas, Combien de temps ?  C'est subtil, ça rappelle des époques lointaines qui me virent jeune... L'accompagnement musical est réduit au minimum, ce qui fait encore mieux luire le diamant des mots (de Philippe Djian pour la plupart, est-il nécessaire de le rappeler ?).

Les minutes défilent et ça y est, on va vers la fin. Déjeuner en paix nous arrive dessus en version intégrale et c'est mauvais signe. Stephan a prévenu : il n'y aura pas de rappel. Dommage, j'en aurais volontiers repris, moi, de ses chansons, de ses interludes parlés, de cette douce matière qui a fait la douce substance de cette douce soirée. Au passage, je retiens une formule : vieillir, d'accord, mais être vieux : ça, non !

Voilà, c'est fini. C'est chiante, mais c'est comme ça ! La vie elle-même n'est pas réputée pour vous livrer spontanément des tendresses à tour de bras. Les caresses, il faut les lui arracher, c'est moi qui vous le dis ! En s'octroyant, par exemple, des concerts, des moments hors du temps et tout ce qui peut répandre un peu de délicatesse dans ce monde qui en manque cruellement !

Et puis, c'est très vite dimanche et je suis toute guillerette à l'idée de réaliser mon deuxième rêve : voir Polnareff !

Avant lui, aux Francofolies d'Esch-sur-Alzette, il y a Ben Mazué. J'aime bien aussi. D'ailleurs, je vais le revoir en 2026, j'ai déjà mon billet. Ben : encore un qui trouve que le temps qui passe, c'est chiante ! Bienvenue au club ! D'entrée de jeu, il nous dit qu'il va falloir profiter de ce moment qui ne se reproduira pas. On dirait moi en couleurs, moi et mon étrange penchant pour ce que Serge Rezvani appelle la « nostalgie du présent ». La nostalgie du présent, c'est quand, au moment de vivre un truc, tu en envisages déjà la fin, rien que pour te faire masochistement du mal. Ça m'est tombé dessus dès l'enfance. À huit ans, j'avais déjà cette manie qui ne faisait pas de moi une gamine très jouasse. Mais c'est elle, cette manie, qui m'a menée vers l'écriture (ne pas perdre une miette du vécu qui, dès qu'il advient, n'est déjà presque plus). C'est elle qui m'a fait aimer Lamartine, Baudelaire, HFT et tant d'autres. Alors je ne lui en veux que moyennement. C'est elle encore, cette manie, qui m'invite à fixer une attention de tous les diables et de tous les instants sur le grand film de la vie. Ben Mazué, en ce sens, est un peu mon frangin d'âme (en couleurs). Il nous raconte, avec force textes ciselés, ses blessures, sa vie familiale, ses ratages. Amoureux pour la plupart, et c'est encore un point commun, mon frère. Franchement, Ben Mazué, si vous ne connaissez pas : allez-y, faites en sorte de connaître !

Et puis, donc, mon deuxième rêve : Polnareff. Là aussi, des fans qui l'appellent par son prénom. Et les « Michel ! Michel ! » que scande la foule me font penser à nos « Hubert ! Hubert ! ». Pour un peu, ça me filerait le bourdon ! Quand reverrai-je de mon brave Hubert briller le talent sous mes yeux ébahis ?!

Michel enchaîne les tubes : On ira tous au paradis (oui, même moi), Qui a tué grand-maman ?, La poupée qui fait non, Lettre à France, Goodbye Marylou, Love me, please love me. Tout cela me propulse dans un passé lointain où la voix et les mots de ce brave Michel emplissaient régulièrement ma chambre, chez mes parents. Souvenirs d'une époque qui me vit jeune...

On est en mode festival et j'avais oublié ce que ça signifie pour certains : parler à son voisin du gigot d'agneau que l'on cuisinera demain, étaler sa vie sentimentale ou professionnelle aux oreilles de tous, ledit étalage couvrant parfois, en l'occurrence, la voix de ce brave Michel... T'as des gens, purée, ils ne pigent que dalle à la valeur des moments qui ne se reproduiront pas ! De quoi désoler à la fois Stephan Eicher, Ben Mazué et moi qui vous parle...

Michel quitte la scène soutenu par deux hommes qui l'encadrent, et cette vision me flanque un coup de blues, là, comme ça, tout soudainement. Il y a des êtres qu'on espère immortels, jusqu'au jour où on les découvre fragiles, comme soi-même. Finalement, le commun des mortels, c'est tout le monde, sans exception.

Arrive alors, un peu plus tard, Julien Doré. Qui, lui, s'en cogne, je crois, du temps qui passe, chiante, indélicate... En tout cas, sauf erreur de ma part, ses chansons n'en parlent pas ! Et là, mes amis, je pose un joker sur la table, tellement le Juju n'est pas mon style. J'écoute quand même jusqu'au bout parce que j'ai été bien éduquée. Même en festival, j'évite de parler du gigot d'agneau que je compte cuisiner le lendemain. D'ailleurs, je ne raffole pas du gigot d'agneau et je ne cuisine pas très bien, ça aide !

« Si tu n'aimes pas la soupe, n'en dégoûte pas les autres pour autant », ai-je souvent entendu en ma jeunesse qui a fichu le camp irrémédiablement, et ceci bien que mes élèves m'aient dit dernièrement que je n'étais pas vieille et que je ne le serais jamais. Depuis, je me la pète grave, grave, grave, tout en sachant, au fond de moi, que rien ne sert de frimer, il faudra vieillir à point quand même ! Eh oui, toute prière lamartinienne est vaine, sans espoir, insensée... Le temps qui suspendrait son vol pour tes beaux yeux, où est-ce que tu as vu ça, toi ? Tu ne veux pas non plus qu'il te donne 100 balles et un Mars, comme on disait en une époque lointaine qui me vit jeune ?!

J'écoute quand même Julien jusqu'au bout, mais à ce moment-là de la soirée, ça devient casse-gueule pour moi : Hubert me manque comme jamais. Je le voudrais là, sous mes yeux ébahis, à la place de Juju... Et de contempler soudain un autre de mes rêves : revoir HFT. C'est une maladie, j'y peux rien, et je n'ai jamais cherché à la soigner car elle m'a toujours fait, me fait et me fera toujours un bien fou !

Voilà, mes amis. Savourez ce vendredi 13 qui ne se reproduira pas. Il est unique et précieux. Demain, il ne sera plus, déjà... Alors, à cinq heures, comme dans la chanson d'Hubert, ayez donc une pensée émue pour tout ce qui ne reviendra pas, voulez-vous ? Et vivez, si m'en croyez, n'attendez à demain : il n'y a que ça de vrai et, surtout, que ça à faire, n'est-ce pas ? Personnellement, je n'ai pas trouvé mieux.

 

Commentaires

Hello Katell, merci pour ce compte rendu sympathique de retour de concerts !
Stephan Eicher je ne connais pas trop et je ne l’ai jamais vu sur scène. J’aimerais beaucoup voir Michel Polnareff et j’aurais pu car il était en concert pas loin de chez moi dernièrement mais une copine m’avait expliqué qu’il est pas mal fatigué et je n’avais pas envie de le voir comme ça. Quant à Julien Doré je ne connais pas grand chose de lui à part un chouette duo avec Eddy de Pretto qui s’appelle « Elle est pas belle la vie » (sans point d’interrogation…).

Les concerts d’Hubert me manquent aussi… Je l’imagine, studieux, dans son havre de paix jurassien, en train d’écrire de magnifiques textes dont lui seul a le secret. Peut-être un nouvel album pour la fin de l’année ?… Et une nouvelle tournée sur 2026 ?…
J’écoute beaucoup Unplugged, davantage que Replugged. J’adore le saxo très présent et puissant sur cette tournée. Et je te rejoins sur le fait que le son de Replugged est un peu étouffé, sur tout l’album.

J’ai une pensée émue pour tout ce qui ne reviendra pas Katell mais j’ai aussi et surtout des pensées pour tout ce qui peut surgir à tout instant dans nos plaisirs de fans !

Écrit par : Bételgeuse | 13/06/2025

Hey !!
Et wow !!
J'ai eu le temps de boire tout mon café en te (vous ) lisant.

D'ailleurs, c'est marrant car, en allumant mon ordi, je pensais justement que j'avais oublié mon petit rituel du vendredi 13 à 5h… Pas grave, j'y penserai au prochain passage de la comète…

Cool pour Polnareff ! Je pense que c'est vraiment le moment de le voir… Après…
Au fait, l'Amiral a ses moussaillons mais, a-t-il, lui, son Conseiller Maritime ? Pas sûr :-)

Bételgeuse, moi aussi, j'attends la prochaine galette d'Hubert avec impatience ! On doit d'ailleurs être des milliers dans nos boxes…

Salutations numériques !

Écrit par : Seb | 14/06/2025

Hey !!
Et wow !!
J'ai eu le temps de boire tout mon café en te (vous ) lisant.

D'ailleurs, c'est marrant car, en allumant mon ordi, je pensais justement que j'avais oublié mon petit rituel du vendredi 13 à 5h… Pas grave, j'y penserai au prochain passage de la comète…

Cool pour Polnareff ! Je pense que c'est vraiment le moment de le voir… Après…
Au fait, l'Amiral a ses moussaillons mais, a-t-il, lui, son Conseiller Maritime ? Pas sûr :-)

Bételgeuse, moi aussi, j'attends la prochaine galette d'Hubert avec impatience ! On doit d'ailleurs être des milliers dans nos boxes…

Salutations numériques !

Écrit par : Seb | 14/06/2025

Avec une grande expérience !

https://www.thiefaine.com/livre-dor/conseiller-maritime-dhubert/

? ... ,

Écrit par : En fait :Q.M 1ère classe | 14/06/2025

Mais aussi :

https://www.thiefaine.com/livre-dor/#comment-252822

;-) à Seb

? ... ,

Écrit par : En fait :Q.M 1ère classe | 14/06/2025

Oh, mais trop cool de vous retrouver, mes amis fidèles ! Oui, pour Polnareff, c'est le moment, c'est triste à dire...
Ce week-end, j'ai réalisé deux autres rêves (décidément, c'est la période !) : revoir Véronique Sanson et voir Jean-Louis Aubert. Ils se produisaient tous les deux au Zénith de Nancy, hier soir, l'un après l'autre. J'en suis ressortie totalement chamboulée. Ce sont vraiment deux artistes de haut vol. J'essaie de vous faire un billet dans la semaine.
Moi aussi, j'attends la prochaine galette d'Hubert, avec une impatience non dissimulée !

Écrit par : Katell | 15/06/2025

@ ... :

https://thiefaine.com/livre-dor/

? ... ,

Écrit par : la pépite | 20/06/2025

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