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01/10/2022

Casino de Paris, en être ou ne pas en être : question résolue !

"L'homme est ainsi, il se nourrit de souvenirs et trébuche sur l'amer". Richard BOHRINGER

Il en va de nos décisions comme de bien des choses dans la vie : elles ne nous appartiennent pas toujours complètement. Elles sont souvent le fruit d'un enchaînement - heureux ou non - de circonstances diverses et variées, voire avariées. Au moment où l'on prend telle ou telle décision, on ignore (et c'est tant mieux) tout ce qu'elle va impliquer. Ainsi, il y a 31 ans, m'étant moi-même condamnée à devenir prof en raison d'une soi-disant vocation (l'impétuosité de la jeunesse aime les grands mots), j'avais dit à mes camarades de terminale que j'hésitais entre enseigner l'allemand et enseigner l'italien. Là, un de mes amis s'était écrié : « Non, mais toi, il faut que tu deviennes prof d'allemand, c'est une évidence. Tu nous parles tellement de cette langue que si tu ne t'y consacres pas pleinement, tu le regretteras toute ta vie ». Ce jour-là, je devais rendre mon dossier de poursuite d'études et n'avais encore rien écrit dessus, à part mon nom et autres renseignements sans conséquences. Le reste n'était pas dépourvu de conséquences et j'en avais bien conscience. Les propos de mon ami, jouant un tantinet avec la corde du tragique, résonnèrent furieusement en moi. Sur le dossier, mon stylo traça avec conviction : « fac d'allemand ». Choix qui ne fut pas salué par ma prof d'italien ! Choix qui devait orienter ma vie entière, il faut bien le dire. Par la suite, je me suis souvent demandé quel chemin j'aurais parcouru si j'avais mis « fac d'italien ». Je ne saurai jamais. Pas le temps de vivre deux vies, une seule étant déjà assez compliquée à mener ! C'est comme dans la chanson de Goldman, chacun repart soit avec ses X, soit avec ses XY, et « tant pis, on ne saura pas ce que ça aurait donné ». Est-ce réellement mieux comme ça, plus sage, plus correct ? Mystère impénétrable...

Bref... Début septembre, en analysant mon emploi du temps, je m'étais vaguement dit qu'un aller Metz-Paris (avec retour le lendemain) serait envisageable le 22 novembre (date à laquelle HFT se produit au Casino de Paris : comment ça, vous l'ignoriez ?!)...

Mercredi, je conduisais ma fille Louise à son cours de krav maga, et nous écoutions Thiéfaine dans la voiture. À sa demande, je précise ! Honnêtement, si ça n'avait tenu qu'à moi, nous aurions … écouté Thiéfaine de la même façon !!! Nous chantions en chœur, tout en ne nous interdisant pas quelques commentaires. Ainsi, c'est mercredi que j'ai appris que Louise adorait le vers suivant : « À mettre sa vie en musique, on en oublie parfois de vivre ». La bonne gosse ! Cela m'a mise en confiance. J'ai décidé de lui dire que je n'avais toujours pas résolu le dilemme qui sévit en moi depuis septembre : en être ou ne pas en être, de cette soirée au Casino de Paris ? Bien sûr, d'un point de vue technique, c'est jouable, je le sais depuis un certain nombre de semaines, j'ai étudié la question avec un zèle exemplaire. Mais le reste, mais le reste... La fatigue engendrée par la surdose d'adrénaline, l'angoisse de louper mon train ou de ne pas le voir arriver pour cause de grève, la trouille d'un incident mécanique frappant précisément le même train ce jour-là précisément, la redescente redoutable après le concert, qui plus est en plein mois de novembre... La folie aussi. Car oui, c'est folie de plier ainsi ma vie aux exigences de ma passion. L'organiser en fonction du passage d'HFT ici ou là. Trembler devant le planning des réunions (parents-profs, conseils de classes, etc.). Craindre le moindre grain de sable susceptible de venir percuter la machine dont j'essaie de huiler savamment les rouages, tentant de parer d'avance à toute éventualité. Intimant aux malencontreux aléas l'ordre d'aller se faire voir ailleurs en période de tournée. Après, d'accord, ils pourront reprendre une activité normale, comme dans les Guignols de l'info, et comme dans le cours de toute existence. Essayer de combattre le mauvais œil en inventant toutes sortes de conjurations qui n'ont cours dans aucune religion. Les jours précédant un concert, ingurgiter en se pinçant le nez de douteuses décoctions censées renforcer le système immunitaire. Tomber bien bas, quoi !

Autant dire que chaque concert de Thiéfaine est une victoire sur les impitoyables coups tordus du destin ! Revenons à mercredi et retournons, si vous le voulez bien, à l'avant de ma voiture, en compagnie de Louise. Je lui faisais donc part du dilemme qui était le mien, Casino de Paris ou pas Casino de Paris ? Et voilà qu'elle me l'a réglé en deux coups de cuillère à pot, le dilemme : « Non mais maman, tu ne te poses même pas la question : tu y vas, à ce concert ». Comme je ne suis pas loin de penser que ce que Louise veut, Dieu le veut aussi (il n'a pas le choix, elle est tellement déterminée), j'ai donc décidé de faire en sorte d'assister à ce concert. À peine étions-nous de retour à la maison que je me procurais le nécessaire (billet de concert, aller-retour Metz-Paris, chambre d'hôtel). Le tour était joué. Il ne reste plus qu'à compter sur un sort clément et enclin à aligner docilement les astres en novembre. Ce n'est pas demander la lune non plus ! D'ailleurs, ce même sort a déjà fait preuve d'une certaine docilité et je l'en remercie : les réunions parents-profs tombent la semaine avant le concert au Casino de Paris !

Je rappelle qu'en décembre 1998, je refusai d'accompagner un de mes copains à Bercy au motif que le concert avait lieu un vendredi et que j'avais cours le lendemain matin. Alors que ce copain me promettait un retour dans la nuit et mettait en avant la possibilité que j'aurais de faire une sieste le samedi après-midi. Je me dérobai. Comme une cloche. Je ne me suis jamais pardonné cet écart de conduite absolument incompréhensible. Je sais, on peut avoir des regrets plus consistants, mais tout de même. Il en est quelques-uns qui persistent opiniâtrement. Donc, si j'ai décidé d'aller au Casino de Paris le 22 novembre, ce n'est pas folie, croyez-moi, mais sage précaution ! Il s'agit d'éviter tout regret. Ces machins-là, c'est trop tenace, ça vous enjambe les décennies avec une telle obstination qu'il vaut mieux ne pas en avoir !!! Et c'est le moment d'en revenir à mon introduction, vous savez, avec l'ami de terminale... Ce concert au Casino de Paris, si je n'y vais pas, je le regretterai toute ma vie !