11/05/2021
Indéchiffrables hiéroglyphes, chapitre 2. Ou : "dans les carnets intimes du messager des runes"...
"Dans les carnets intimes du messager des runes
l'écriture est en transe et clignote à la une". Hubert-Félix THIÉFAINE
J'ai passé la nuit en des contrées lointaines, à chevaucher des « dragons écarlates » et à mâcher, comme autant d'enivrantes chiques, d'énigmatiques hiéroglyphes superposés. Déjà, en temps normal, les hiéroglyphes, c'est coton. Mais imaginez-les donc en piles, se faisant la courte échelle pour atteindre Dieu sait quelle étoile invisible à l'œil nu. C'est, peut-être, toute la vie de Thiéfaine qui se tient résumée là : des mots, des mots, et encore des mots. Le petit truc indéchiffrable qu'on a découvert hier sur les réseaux sociaux et sur le site officiel, on dirait une ardoise. Ce n'est pas écrit noir sur blanc, mais blanc sur noir. Subtile différence. Avec notre artiste (je dis « notre », mais je ne m'illusionne pas : il ne nous appartient pas), rien n'est jamais, me semble-t-il, le fruit du hasard. Un message codé en contient dix autres, plus sibyllins encore. Blanc sur noir, donc : comme si l'écriture avait toujours été celle qui apportait un peu de clarté dans les ténèbres. J'ai bien dit un peu. Car la clarté qui semble s'afficher ici n'est clarté qu'en surface : partout, cela grouille de lignes illisibles. Palimpseste, oui, mais dont on n'aurait pas pris la peine d'effacer les premières versions. Pas le temps. Parce que parfois, l'écriture, ça urge. Ça te prend comme un galop.
J'en reviens au mystérieux manuscrit : ici ou là, tout de même, se dressent quelques mots plus distincts que les autres. Certains acharnés de la pierre de Rosette ont déjà lu « imaginer nos pleurs » ou encore « imaginer nos rêves ». Moi, hier soir, toute à mon ébullition, je n'ai absolument rien décrypté. Que ma joie d'être en ce mois de mai où, tout à coup, comme dans une chanson de Thiéfaine, j'ai miraculeusement « trouvé la fréquence que je n'attendais pas » !
« Mai, joli mai », vraiment : cela faisait des mois et des mois et encore des mois qu'Hubert était claquemuré dans le silence. C'en était même un peu flippant. Mais, comme je le disais hier, tous autant que nous sommes, nous y avons toujours cru. Impossible qu'il se taise en ces temps troublés. Impossible, surtout, qu'il nous laisse les traverser, ces temps troublés, sans nous indiquer, au moins un minimum, la lecture qu'il en fait. J'y ai toujours cru résolument, en un recoin caché de mon cœur que je n'ouvre à personne, pas même à moi !
On peut dire aussi que les mots qui nous ont été offerts hier se sont adaptés à l'époque : ils sont masqués. Enfin, ça, avec Thiéfaine, ce n'est pas nouveau, et je pense à toutes ces strophes qui me bercent depuis près de trente ans et auxquelles je ne pige toujours rien. D'ailleurs, ce mystère parmi tant d'autres n'est pas fait pour me déplaire. Ce qui s'offre sans jamais réserver aucune surprise n'a d'attrait qu'un certain temps. On s'en lasse. Moi en tout cas.
Alors, ces lignes emmêlées comme d'inextricables lianes, qu'est-ce donc ? La pochette du nouvel album ? Les mots qui ont servi à l'écriture de cet album ? Aucune idée, mais qu'importe puisqu'ils font rêver. En les regardant, je pense : 1) qu'ils sont beaux et que je les aime déjà, 2) que leur élégance à ne dévoiler que le strict minimum s'accorde bien avec une œuvre dont il est impossible d'explorer tous les mystères...
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