25/05/2024
Jil Caplan au Long Way à Longwy...
"Quelque chose va venir
Quelque chose vient toujours
Le meilleur comme le pire
La surprise de l'amour". Jil CAPLAN
Ça se passe au Long Way à Longwy. Vous avez la subtilité du jeu de mots ? Pas encore ? Laissez infuser, ça va venir...
Voilà un lieu tout récent et déjà presque mythique. Comment le définir ? Pub rock ? Oui, quelque chose dans le genre. En tout cas pub où sont régulièrement organisés des concerts. Il paraît que le patron apprécie beaucoup Thiéfaine. La preuve : sur un mur, la pochette du vinyle Soleil cherche futur. Un peu plus loin, un espace appelé « le mur des bons », où l'on trouve une belle photo de l'ami Hubert. À côté d'un portrait de Robert Smith, entre autres. Les Cure, toute ma jeunesse ! Je les écoutais beaucoup à une époque où mon frère habitait à Longwy, justement. C'était dans les années 90. Longwy n'était alors qu'une ville éteinte qui se cherchait un futur dans les ruines de ses aciéries désaffectées. Tout le monde la trouvait moche et triste. Moi aussi, un peu, mais j'avais quand même de la tendresse pour elle. Ça m'arrive toujours avec les lieux qui n'ont pas eu de chance, je crois que ça me vient de mon expérience de l'ex-RDA !
Mais hier, en traversant Longwy, je fus plus qu'agréablement surprise : sauvagement surprise, dirais-je. Les anciennes usines ont été démontées et ont fait place à des espaces verts. Les fortifications ont été mises en valeur. Je reviendrai un jour, en touriste, c'est promis.
Mais ce soir, je suis là pour Jil Caplan. Elle et moi, ça commence aussi dans les années 90. Et ça commence avec sa voix, que je trouve belle, enveloppante, swingante. J'achète un album, À peine 21. Dans la chanson du même nom, ça dit « j'ai si vite grandi et je me sens tellement vieille, à peine 21 ça vaut plus le coup que j'essaye ». Ce pessimisme noir c'est noir il n'y a plus d'espoir me plaît, il faut dire que je patauge alors dans les mêmes eaux troubles. Je me nourris d'œuvres littéraires et musicales qui dépeignent le spleen dans de grandes largeurs anthracites. Je comprends qu'elles font plus que le dépeindre : elles le dépassent, elles le subliment, elles aident à moins claudiquer. Je n'ai pas encore croisé la route d'HFT, mais je suis lancée sur la bonne trajectoire, il n'y a plus qu'à patienter...
Mais pour l'heure, Jil Caplan. Démarre alors une longue histoire. Qui m'a menée jusqu'au Long Way hier. Et m'entraînera sans doute encore plus loin, ailleurs, je l'espère...
Jil Caplan, je l'avais déjà vue deux fois : chez Paulette en 2006 (je crois) et à Longlaville en 2018, peut-être bien. Chez Paulette, j'avais été estomaquée de la voir, avant le concert, arriver au bar avec son labrador noir. Qui, à un moment, avait même fini sur la scène ! Il paraît que Jil a toujours aimé les animaux en général et les chiens en particulier et que si elle devait créer un parti politique, il s'appellerait LPC, Liberté pour les Chiens. Voilà ce qu'elle nous dit, au Long Way, pour introduire la chanson Animal Animal, extraite du dernier album (que je vous recommande, comme tous les autres). Elle est accompagnée de sa complice Emilie Marsh, qui a composé les musiques de cet opus joliment intitulé Sur les cendres danser. Paru en septembre 2023, à un moment où j'avais, au sortir de la maladie, le sentiment de devoir moi aussi contempler des cendres, avec en tête un seul mot d'ordre : danser dessus.
Bref... Tout au long de la soirée, cet album est mis à l'honneur, et c'est tant mieux pour moi qui l'adore et l'écoute régulièrement en boucle. Je ne le connais pas encore tout à fait par cœur, mais ça va venir, c'est sûr. Que nous raconte Sur les cendres danser ? Qu'un jour les enfants grandissent et font de leurs parents des darons et des daronnes. Jil Caplan a tiré une chanson très émouvante de cette expérience troublante : Daronne. Qu'elle introduit avec humour : « On fait des enfants. Au début, ils sont tout petits et ils nous obéissent. On leur dit va au lit, et ils vont au lit. Ils nous disent je t'aime, maman. Et puis, un jour, on entre dans leur chambre et on les entend dire à quelqu'un, au téléphone : J'peux pas te parler, y'a ma daronne ».
Que raconte encore Sur les cendres danser ? La triste histoire de Virginia Woolf, des voix dans la tête, des pierres dans les poches pour être certaine de bien sombrer dans les flots où elle s'enfonce. Ça raconte aussi qu'être heureux, peut-être que ça n'existe pas. Et bien d'autres choses encore, que je vous invite chaudement à découvrir sans tarder, non mais !
Quelques chansons anciennes viennent ponctuer la soirée. Notamment un mémorable Tout c'qui nous sépare, le tube de Jil (son cylindre, comme elle dit), porté au Long Way par un public qui en connaît les paroles par cœur, ainsi que toutes les modulations. C'est beau à pleurer, ce chœur qui s'est formé spontanément dès les premières notes du morceau. Dans la série des anciens, il y a aussi Les deux bras arrachés (quoi de plus radical pour décrire l'absence ?), Natalie Wood, À la fenêtre, Des toutes petites choses. Je suis au deuxième rang et je ne me lasse pas de regarder Jil. C'est une des plus belles femmes que je connaisse. Elle a ce qu'on appelle du chien, et ce n'est peut-être pas un hasard, n'est-ce pas ?!
Après le concert, elle vient à la rencontre du public. Je prends mon courage à deux mains et j'exagère un peu en lui demandant de signer Le feu aux joues (son livre paru en 2022 aux éditions Robert Laffont) et l'album sur lequel il y a L'âge de raison, L'écrin, Les clés, Blanc, etc. Celui-là, je l'ai écouté des milliers de fois. Sur la première page du livret, ces mots d'Anaïs Nin : « Je marche au-devant de moi-même dans l'attente perpétuelle d'un miracle ». N'est-ce pas ainsi qu'il faudrait toujours marcher ? Parfois, les miracles se produisent. Comme hier au Long Way à Longwy. Être heureux, peut-être que ça existe. De temps en temps, par touches subtiles. Et fugaces, bien sûr, sinon ce serait trop beau et trop facile. Il faut savoir saisir ces touches subtiles et fugaces comme on saisit une balle au bond. Comme Jil Caplan saisit son tambourin et Emilie Marsh sa guitare : avec grâce et toujours au bon moment !
C'était hier au Long Way et je crois que je me suis pas trop mal débrouillée pour choper tout ça et m'en faire des souvenirs exaltants. Sur ce, on the road again, car aujourd'hui il y a Hubert à Reims, du soleil dans ma rue et un feu dans ma tête, comme dans la chanson de Jil Caplan !
10:34 | Lien permanent | Commentaires (3)
Commentaires
Salut Katell
Je ne connais pas Jill Caplan, mais là, je voyais presque le LongWay (mur de briques ??).
Et donc ? Reims ? Hubert ? Bon atterrissage…
Salutations numériques
Écrit par : Seb | 26/05/2024
Salut Katell
Je ne connais pas Jill Caplan, mais là, je voyais presque le LongWay (mur de briques ??).
Et donc ? Reims ? Hubert ? Bon atterrissage…
Salutations numériques
Écrit par : Seb | 26/05/2024
Quel week-end, Seb ! La redescente est violente... Je suis sur la route, je rentre de Reims. C'était intense. De très belles rencontres et de superbes discussions avec Bételgeuse. Je me demande s'il ne me faut pas un petit crochet par Besançon afin de me remettre d'aplomb !!!
Écrit par : Katell | 26/05/2024
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