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20/05/2024

A armes égales avec la lave et le magma !

"Comme la poussière, le temps tombe en petites miettes fines sur les meubles et sur mon cœur". Brigitte FONTAINE

 

Ne me cherchez pas en ce mai, joli mai, mois de Marie, car je suis bien décidée à faire ce qu'il me plaît de mes envies ! Est-ce ma faute à moi si celles-ci me ramènent si souvent à Hubert ?! Non, c'est sa faute à lui, d'abord. À peine un concert s'achève-t-il que j'ai besoin de me projeter dans le prochain pour ne pas déprimer. Je parlais justement de ce curieux phénomène à la sortie de l'Olympia, vendredi soir, avec deux jeunes dont la passion m'a émue. Lui, vingt-six ans, initié à Thiéfaine par son père. Elle, vingt-sept ans, tombée je ne sais comment dans le grand feu. Lui voyant HFT pour la vingtième fois, elle pour la cinquième fois. Là, je n'ai pas pu m'empêcher de frimer et d'évoquer ma soixantaine de concerts. Attendez, jeune homme et jeune fille, on ne peut pas avoir et la jeunesse et l'expérience. Il faut bien que vieillir offre quelques avantages, mince alors, c'est déjà assez cruel comme ça de devoir s'accommoder jour après jour des chairs tombantes, des yeux flétris, et autres implacables joyeusetés. La gravité est une sacrée salope, entre nous soit dit. Alors oui, j'ai cinquante ans, mais un palmarès que ces deux jeunes-là n'atteindront jamais, fussent-ils animés de la meilleure volonté du monde ! Non mais ! N'empêche que cinquante, vingt-six ou vingt-sept ans, c'est rien que du pareil au même : à peine tu quittes une salle de concert que tu mets déjà mentalement un pied dans la suivante, pour ne pas sombrer. C'est ce que m'expliquait la jeune fille vendredi. C'est ce que je me tue à répéter moi-même ici, depuis dix-huit ans !

Ça m'a fait quelque chose de voir ces deux-là. Lui, je le regardais régulièrement pendant le concert, car il se trouve qu'il n'était pas loin de moi. À aucun moment je n'aurais pu le prendre en défaut : il connaît toutes les paroles par cœur. Il écoute Thiéfaine depuis l'âge de huit ans. La classe. Et tous deux de s'extasier sur le mélange de générations auquel ils assistent à chaque fois qu'ils vont voir Thiéfaine... C'est peut-être moins flagrant qu'après Suppléments de mensonge, mais quand même. Et dire qu'un jour je fus comme eux, toutes risettes dehors... Émerveillée par le palmarès des plus âgés... Un jour, un de mes collègues m'avait dit : « J'écoutais Thiéfaine, t'étais même pas née ». Maintenant, voici venu mon tour de tenir ce genre de propos. Ma mère aimait citer Corneille : « On m'a vu ce que vous êtres, vous serez ce que je suis ». Ce n'est pas que j'en tire de l'amertume, non, mais une putain de nostalgie. Toutes ces choses qui nous filent entre les doigts, et cette vie qui passe comme une rivière, faut pas trop regarder l'heure (c'est la deuxième fois que je cite Capdevielle en quelques jours, il doit y avoir un truc, mais quoi, je ne sais pas)...

Donc, en ce lundi de mai, joli mai, mois de Marie, la nostalgie, camarade, anime ma plume comme souvent, plus souvent qu'à mon tour. L'Olympia, c'est fini. Ça ne reviendra plus. Et c'est fort dommage car ce fut un truc de malade. Sur cette tournée, jamais je n'avais vu une telle ambiance. D'habitude, il fallait attendre une bonne demi-heure avant que le dégel n'arrive au sein de la foule, mais là, mais là... Dès les premières notes de Droïde song, comme l'impression de flotter sur un volcan. Non pas sur, mais dedans. Pour tout bagage, l'incandescence. À armes égales avec la lave et le magma ! Très vite, je sens le sol onduler sous mes pieds. Pas besoin de danser, il le fait pour moi, mû par d'autres ardents. C'est une communion immense. Même mon voisin de derrière, pourtant roi de l'indélicatesse, est soudain mon semblable, mon frère, en ces circonstances exceptionnelles. À plusieurs reprises, il me donne des coups. L'un d'eux me fait plus mal que les autres. Je me retourne et je gueule : « Purée, ça fait mal ». Le gars ne me calcule même pas. En proie à une extase que je finis par trouver belle et touchante (ah ça oui, très touchante, encore plus au propre qu'au figuré). Pas grave, l'ami, reste accroché à ta transe, la mienne n'est pas mal non plus dans son genre. Simplement plus discrète et moins rentre-dedans !

Je crois que la folie qui agite le public galvanise et Hubert et ses musiciens. Partout, des bras levés, des mains qui tapent, des corps qui bougent (mesdames, quelques séances de rééducation périnéale ne nuiront pas, je pense !), des cordes vocales qui s'enflamment. Vers la fin, un type, devant moi, lance tout de go : « Hubert, nous on est Bretons et les Bretons aiment les Jurassiens » ! Ah, ben voilà un début d'explication pour mon cas clinique : c'est du côté des origines qu'il faut chercher...

La setlist est un peu rabotée. Dommage. On aurait aimé réentendre Je ne sais plus quoi faire pour te décevoir (j'adore cette chanson et cette déclaration d'amour à rebours, je trouve que c'est assez génial d'aller dire ça à quelqu'un), Redescente climatisée, 113ème cigarette sans dormir et Whiskeuses images again.

Toujours des musiciens au top du top. Un Fred Gastard volontiers taquin. Il m'éclate. Il est non seulement virtuose, mais en plus incroyablement marrant, ce qui fait de lui un être éminemment sympathique. Oui, désolée, c'est mon chouchou.

Au début de Sweet Amanite Phalloïde Queen, Thiéfaine s'emmêle les pinceaux. Le pilote aux yeux de gélatine se crashe, le public rit et applaudit. Le pilote se ressaisit presque aussitôt, avec brio. De temps en temps, sur une ou deux chansons, un peu de yaourt, par-ci, par-là, mais rien de grave, docteur !

On arrive soudain à La fille du coupeur de joints sans avoir rien vu passer. C'est dingue quand même, ce que provoque cette ritournelle, en tout cas en moi : joie et tristesse mélangées.

La sortie du public est à l'image de cette soirée : délirante et volcanique. Des voix s'élèvent dans le hall et entonnent le refrain de La fille. Des bras promènent un drapeau franc-comtois. Même pas un drapeau breton pour rivaliser. Ben mince alors. La fierté bretonne ne serait-elle plus ce qu'elle était ?! Mais si, voyons : ne pas oublier qu'en plein concert, le type devant moi a exhibé ses origines à voix haute. Même que sa femme a eu un peu honte, elle me l'a avoué entre deux chansons. Je lui ai dit que je comprenais son mari, étant moi-même à moitié de son pays. Les origines qui vous remontent tout soudain, je connais, ça vous prend toujours au moment où on s'y attend le moins !

Donc, dans le hall, ça chante, ça danse. Un vigile se marre, il nous dit qu'il faut partir quand même, comme dans la chanson*. Il est presque gêné de nous demander ça, il voit bien qu'ici on aime faire durer, comme dans une autre chanson (pas de Françoise Hardy, celle-là). La joyeuse petite bande fredonnante ne se démonte pas et poursuit son récital sur le trottoir, secouant l'âme de Bruno Coquatrix qui, à mon avis, n'en est toujours pas revenue.

Mes filles me rejoignent alors (elles ne m'ont pas accompagnée au concert). Louise, voyant l'ambiance qui se prolonge délicieusement dans la rue, me dit : « Je regrette tellement de ne pas être venue ». Et ça, c'est peut-être le plus cadeau de cette soirée qui n'en fut pourtant pas avare...

 

*Partir quand même, Françoise Hardy.

Commentaires

Seb et Bételgeuse, notre entrevue fut courte, mais intense ! Je vous embrasse !

Écrit par : Katell | 20/05/2024

Avec tout ça, j'ai oublié de vous dire que quand ma fille Louise et moi quittions le coin de l'Olympia, nous avons vu Hubert et Francine passer en voiture. Ils ont ouvert les vitres et salué les quelques personnes qui étaient encore là. Hubert arborait le sourire des grands jours ! Je suis sûre qu'il a kiffé cette soirée, lui aussi !

Écrit par : Katell | 20/05/2024

Et aussi : sur le trottoir, après le concert, j'ai discuté avec une autre jeune fille, très sympa. Elle m'a dit qu'elle venait ici parfois, sans laisser aucun commentaire. Et qu'elle en mettrait un la prochaine fois qu'elle viendrait. J'ignore son prénom, mais j'ai juste envie de lui dire : "Ne fais pas ta timide" !

Écrit par : Katell | 20/05/2024

Ah Katell… il n’y a que toi pour nous faire revivre la magie des concerts d’Hubert ! C’est vrai que l’Olympia fut un grand moment, pendant et après ! Notre entrevue fut courte mais toujours agréable, hélas la lave et le magma m’habitaient ce soir-là et pas pour les meilleures raisons… snif. J’attends Reims avec impatience !

C’est chouette que des gens viennent au Cabaret pour te lire. Si nous voulons que ce Cabaret perdure , il est nécessaire de l’alimenter. Ne soyez pas timides et écrivez quelques billets ! Chacun a quelque chose d’intéressant à exprimer encore plus lorsqu’il s’agit d’Hubert !

Katell, Besançon t’appelle…

Écrit par : Bételgeuse | 20/05/2024

Oui Katell, fugace fût notre coucou :-)
J'en avais un peu le bourdon.

Bourdon auquel s'ajoutait le bourdon post-communion…
Bourdon et bourdonnement au vu du volume…
Bourdon que je soigne, non pas à coup de bourbon, mais en ré-écoutant les différents live du Thiéfaine…
Et constamment cette pensée : Quel bonheur-honneur d'être contemporain de ce Monstre !

Pour en revenir à cette communion : mazette ! L'ambiance des Grands Soirs !! L'envie était là Sur scène, en fosse, sur balcons, etc.

Effectivement, j'aurai bien listené (ben ouais quoi…) 113ème… Mais, à vrai dire, me faire le tour du catalogue m'aurait bien dit aussi :-)

Et pour en revenir aux bourdonnements : Me dites-pas que je deviens plus sensible de la feuille avec l'âge (j'ai déjà la vue tellement puissante que je me suis fait enlargé -oui- les avant-bras). Ce soir encore, je trouvais le volume trop puissant.
J'ai bien essayé les bouchons d'oreilles mais y ai renoncé rapidement. Je n'étais plus dans l'ambiance et dans le ton (et oui).

C'était du Grand Thiéfaine, ce soir. Ostéopathe de l'âme, il m'a remis d'équerre. Merci Docteur !

J'aurais bien aimé le voir passer en voiture… Façon Elisabeth 427…

Salutations numériques !

Écrit par : Seb | 20/05/2024

Je réfléchis pour Besançon, mais je crois que mon compte en banque va finir exsangue !!! Surtout que la semaine prochaine, j'enchaîne Bohringer, Caplan et Thiéfaine, trois soirs de suite tant qu'à faire ! Comme une envie de rattraper quelques mois de grand vide ! Revenir d'une leucémie vous change à jamais, je vous assure...
Bételgeuse, tu vas mieux ?
Oui, dommage, Seb, c'était bien court ! Mais il y aura d'autres occasions. J'ai décidé d'aller plus souvent à Paris, ça me plaît de manger des expos et des kilomètres dans la ville, et le TGV permet de rejoindre la capitale en 1h30 depuis Metz ou Nancy !
Je n'ai pas remarqué que le son était fort, mais il faut dire que je deviens sourde !!! D'ailleurs, je pense que les nombreux concerts auxquels j'ai assisté en restant tout près des enceintes comme une débile ont quelque chose à voir avec le problème !
J'ai oublié d'évoquer Paul Pavillon. J'ai beaucoup aimé, je vais l'écouter tranquille chez moi. Et vous, qu'en avez-vous pensé ?

Écrit par : Katell | 20/05/2024

Seb, Élisabeth 427 : j'adore !!!!

Écrit par : Katell | 20/05/2024

Superbe compte rendu! C’est vrai que c’est dur de redescendre après une telle soirée; l’ambiance des grands soirs, digne de Bercy 98. Une ferveur sans faille! Petite déception aussi sur la setlist resserrée pour l’occasion (alors qu’elle était rallongée le lendemain à Lille).
A la fin du concert l’ambiance a continué au café de l’Olympia, et Hubert nous a salué en passant dans son taxi. Une soirée inoubliable. A quand une nouvelle date dans la capitale?…

Écrit par : Ignatius | 21/05/2024

Merci, Ignatius, pour votre commentaire. Oui, c'était vraiment quelque chose, cet Olympia ! Dommage que nous ne nous soyons pas croisés !

Écrit par : Katell | 21/05/2024

Magnifique concert jusqu'au fond de la salle, je m'en fais l'écho ! J'ai vite oublié l'inconfort du strapontin pour profiter pleinement d'une soirée exceptionnelle à tous les niveaux. Son ( oui ça sifflait bien un peu en sortant...), lumières, et une présence sur scène incroyable, entouré de ses musiciens, Hubert, comme jamais... ou comme toujours! De Dies olé Sparadrap Joey à Cabaret Sainte-Lilith ( petit pensée pour ce blog) Lorelei nous a fait faux bond, elle reviendra. On l'embrasse.
Pas vu passer le concert... ni le carrosse à la sortie... Je vous dis à bientôt !
A récouter l'interview de Paul Pavillon qui assurait la 1ère partie du concert:
https://www.francebleu.fr/emissions/france-bleu-bourgogne-part-en-live/france-bleu-bourgogne-part-en-live-invite-paul-pavillon-avec-lucas-thiefaine-7271920

Écrit par : isabelle | 22/05/2024

Oui, vraiment un concert magnifique, Isabelle ! Celui de Reims était quelques crans en dessous, je trouve ! Mais bien quand même, hein, n'allez pas me faire dire ce que je n'ai pas dit !

Écrit par : Katell | 26/05/2024

Quelque crans ?

Écrit par : Ratman | 27/05/2024

Oui, je trouve que le concert de Reims était moins bon que celui de l'Olympia, notamment à cause des problèmes de son récurrents.

Écrit par : Katell | 27/05/2024

C'est normal , c'est surtout y question d'image , l'exposition de Reims en regard de l'Olympia il n'y a pas photo !

Toutefois quand on aime on n'évalue pas :-)

Écrit par : Ratman | 27/05/2024

Ça doit être une déformation professionnelle (je suis prof) !!!

Écrit par : Katell | 27/05/2024

J’attendais ton compte rendu comme un concert d’Hubert ! Et je ressors de la lecture avec le même enthousiasme admiratif ! Merci !!!

Écrit par : Evadne | 27/05/2024

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