31/05/2006
"Baudelaire est mort hier, à 11 heures du matin, en zoomant d'apaisantes nuées crépusculaires, fatigué d'un été qui le rongeait sans fin"
CHARLES BAUDELAIRE (1821-1867)
Charles Baudelaire naît à Paris le 9 avril 1821. Il a six ans lorsque son père, un prêtre défroqué devenu fonctionnaire, meurt sexagénaire. Sa mère se remarie peu de temps après avec Aupick, un officier qui deviendra général commandant de la place de Paris. L’enfant prend ce beau-père en aversion, et dans les internats où il est pensionnaire, au gré des affectations du général Aupick, il s’ennuie, rêvant d’être « tantôt pape, tantôt comédien ».
Après son baccalauréat, il refuse d’entrer dans la carrière diplomatique avec l’appui de son beau-père. Il ne veut être qu’écrivain. Au grand dam de sa famille bourgeoise, qu’il effraie par ses frasques, il fréquente la jeunesse littéraire du Quartier Latin. Un conseil de famille, sous la pression du général Aupick, l’envoie aux Indes, en 1841, à bord d’un navire marchand. Mais Charles Baudelaire ne veut pas tenter l’aventure au bout du monde. Il ne désire que la gloire littéraire.
Lors d’une escale à l’Ile de la Réunion, il fausse compagnie au capitaine et revient à Paris prendre, lorsqu’il a atteint sa majorité, possession de l’héritage paternel. Il se lie avec Jeanne Duval, une actrice mulâtre dont, malgré de fréquentes brouilles et de nombreuses aventures, il restera toute sa vie l’amant et le soutien. Ami de Théophile Gautier, de Gérard de Nerval, de Sainte-Beuve, de Théodore de Banville, il participe au mouvement romantique, joue au dandy, et fait des dettes. Ses excentricités sont telles que sa mère et le général Aupick obtiennent en 1844 du Tribunal qu’il soit soumis à un conseil judiciaire.
Baudelaire, ulcéré, ne guérira pas de cette humiliation. Privé de ressources, il ne cessera dès lors de fuir les créanciers, déménageant, se cachant chez ses maîtresses, travaillant sans relâche ses poèmes tout en tentant de gagner sa vie en publiant des articles.
Un premier ouvrage marque ses débuts de critique d’art. Il encense son ami Delacroix, éreinte les peintres officiels. Cette même année, une tentative de suicide le réconcilie provisoirement avec sa mère. En 1846, il découvre l’œuvre d’Edgar Poe, ce maudit d’Outre-Atlantique, cet autre incompris qui lui ressemble, et, pendant dix-sept ans, va la traduire et la révéler.
Après la révolution de 1848, à laquelle il a participé plus par exaltation que par conviction (au cours des émeutes, il suggère à ses compagnons de tuer son beau-père… « Il faut aller fusiller le général Aupick ! », s’écrie-t-il), il poursuit ses activités de journaliste et de critique. En 1857, la publication des Fleurs du Mal, jugées obscènes, fait scandale. Baudelaire doit payer une forte amende. Seuls Hugo (qui lui écrira « Vous aimez le Beau. Donnez-moi la main. Et quant aux persécutions, ce sont des grandeurs. Courage ! »), Sainte-Beuve, Théophile Gautier et de jeunes poètes admiratifs le soutiennent. Amer, incompris, Baudelaire s’isole davantage.
Sa santé commence à se dégrader. Il étouffe, souffre de crises gastriques, et une syphilis contractée dix ans auparavant réapparaît. Pour combattre la douleur, il fume de l’opium, prend de l’éther. Physiquement, c’est une épave. Dans la solitude orgueilleuse où il est enfermé, deux lueurs : les écrits admiratifs de deux poètes encore inconnus, Stéphane Mallarmé et Paul Verlaine, sur son œuvre qui se résume à un seul recueil, Les Fleurs du Mal, auquel il faut ajouter les poèmes en prose du Spleen de Paris, des essais (Les paradis artificiels, étude sur les effets de l’opium et du haschisch), ses articles de critique et sa correspondance.
En 1866, lors d’un séjour en Belgique, une attaque le paralyse et le rend presque muet. Il agonise pendant un an ; des amis, pour l’aider à surmonter la douleur, viennent à son chevet lui jouer du Wagner. Il s’éteint à 46 ans, le 31 août 1867, dans les bras de sa mère.
Sources : Le grand livre de la poésie française, Marcel JULLIAN, Editions Fixot, 1988.
Préface du livre Le Spleen de Paris et Les Paradis artificiels, Bookking International, Paris, 1995.
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