10/12/2006
Un très beau texte de Léo Ferré
"A Charles Baudelaire
Si je vous disais « tu », on me prendrait pour qui ? On dirait : « Celui-là, il se perche là-haut, dans les nuées, avec ses ailes d’albatros qui donneraient plutôt vers le corbeau… »
Si je te disais « vous », tu deviendrais encore plus froid dans ta dernière terre et tu m’appellerais : Léo ! Viens, allons voir les putes du boulevard Edgard Quinet, ce n’est pas loin de chez moi, deux pas, allons même au « Monocle », cette boîte où celles qui « sont trop gaies » s’en vont se faire une nouvelle virginité qui pèsera pas lourd, dans les quatre heures du matin, au bras d’une « saphique d’occasion ». Ils t’ont pillé, Baudelaire, ils t’ont traîné dans leur Morale, ils disent que tu avais la vérole et que tu en es mort. Ils disent tant de choses, tant de choses dans les manuels de littérature, je dis bien « manuel… » avec tout ce que cela comporte d’inversion intellectuelle. Ils sont tous invertis ce jour, ils pensent en reculant. Ils préfèrent qu’on les surprenne par-derrière, pour ne pas voir, avec leur légion d’horreur, leurs journaux qui vont de l’avant comme des écrevisses, leur Culture avec un grand C comme…
J’ai l’impression qu’il n’y a plus grand-chose à découvrir au club des métaphores. La poésie t’a muselé dans le génie étiqueté, inodore avec de beaux et cons discours qu’on doit faire à ton propos et lors d’une pâle distribution de prix au Lycée de Nevers. Rimbaud nous a quittés par une porte de secours.
Il savait que derrière il devait y avoir « la vraie vie ». Breton a fait une fausse sortie… Il l’a dit, dans l’ambulance qui transportait son urgente dépouille de Cahors à Paris. Il t’aimait bien : je pense qu’il aurait voulu écrire des alexandrins, mais un peu trop comme Valéry, son ami, qui est parti, lui, d’académie française… Apollinaire a pris de toi ce qu’il pouvait et puis réinventé le Verbe. Il nous a laissé Aragon qui a bien du talent.
C’est tout.
Quand tu me manques, je te mets en musique, humblement. C’est vraiment la seule rose que je puisse apporter sur ta tombe.
A bientôt."
22:55 | Lien permanent | Commentaires (4)
Commentaires
Maudit, maudit, traitez moi de maudit, et peut-être je me croirais poète...
Écrit par : Tommie | 10/12/2006
Ma co-autrice m'a qualifié une foie de " poête " , alors je lui répondu : " ne m'insulté plus, je viens chez vous pathologiquement pour parler d' une pathologie ! ".
Je parle comme je panse, point de faute ici car le ' a ' est à sa place, il me semble entendre ' e '.
Donc point d'étonnement car je n'ai jamais travesti ma vie, même si celle-ci m'a travesti et les poêtes aussi !...
Écrit par : Le Doc. | 11/12/2006
AVEZ-VOUS VU ???? Il y a eu un sujet sur le phénomène Thiéfaine sur Télé-matin ce matin même... Il parait qu'on y voit 655321 !
Mon Lilou m'a enregistré le sujet, faut que je le regarde, histoire de voir si on voit d'autres personnes et si c'est intéressant.
Peut-être, si vous l'avez loupé, aurez-vous l'occasion de le retrouver via le net.
Bises
petit-jour
Écrit par : petit-jour | 11/12/2006
Pour ceux qui aimerait retrouver ce reportage via le net, petite précision : il est passé vers 8h30 ce matin du 11 décembre. On y voit très bien le doc et un petit peu mon frère (655321 pour ceux qui ne le savent pas).
Voilà, j'espère que vous pourrez le voir.
PS, je suis tout de même surprise que Katell n'en ait pas parlé... N'étais-tu pas au courant ?
Écrit par : petit-jour | 11/12/2006
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