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04/05/2024

Relire Hölderlin...

"Ils croient voir venir Dieu, ils relisent Hölderlin". Hubert-Félix THIÉFAINE

 

Hier encore, j'étais à Tübingen, en Allemagne (il paraît qu'on dit Tubingue en français, mais ce n'est pas terrible). C'est une ville où j'étais déjà passée en coup de vent il y a quelques années. J'avais voulu y visiter la tour Hölderlin, mais elle était fermée, je ne sais plus pour quelle raison. Je m'étais promis de retourner là-bas. C'est chose faite.
Pendant cinq jours (c'est si peu), j'ai eu le plaisir de me promener dans une ville où la littérature tient une large place. De nombreux écrivains sont venus ici. Hermann Hesse y a été apprenti libraire. Goethe y a séjourné. Mais celui qui a le plus profondément marqué Tübingen n'est autre qu'Hölderlin, celui-là même que Thiéfaine évoque dans Les dingues et les paumés. Un « catalogue » où ce poète est plus que légitime. Il fut déclaré fou en 1806. On l'interna à la clinique du docteur Authenrieth à Tübingen, puis le menuisier Zimmer lui offrit l'hospitalité, dans une tour située sur le fleuve Neckar (toujours à Tübingen). C'est cette tour que je vous présente en photos dans le nouvel album qui orne ce blog. Elle a été reconstituée, elle fut détruite par un incendie cinq ans après le passage d'Hölderlin en ses murs. Celui-ci y vécut les 36 dernières années de sa vie. Il transforma très vite la pièce qu'il occupait en laboratoire d'écriture. Il l'arpenta de long en large durant de longues années, scandant régulièrement ses vers, pour voir un peu si une mélodie acceptable en sortait (cela rappelle le gueuloir de Flaubert). Ses poèmes, parlons-en : ils firent mon désespoir durant mes années d'études. Je n'y pigeais tout simplement que dalle (ni en allemand, ni en français). Je me souviens d'y avoir écorché mes neurones sans aucun succès. Galère. En revanche, l'homme me fut d'emblée sympathique. Sa vie nous fut présentée avec beaucoup d'empathie par un professeur que la littérature allemande faisait vibrer par tous les pores, ça se voyait. Plus tard, une autre prof nous dirait, à nous ses étudiants, que nombreux étaient les génies germanophones qui avaient fini par se suicider ou par sombrer dans la folie. Une sorte de marque de fabrique, en quelque sorte. Je venais de pénétrer sur un territoire de sables mouvants, peuplé des fantômes de Kleist, de Zweig et d'autres désespérés... Ce ne fut pas pour me déplaire. Le tout porté par une langue majestueuse. Si, si, je persiste et je signe : l'allemand est une très belle langue. Ceux qui ne voient pas plus loin que le bout de ses accents toniques (un peu fiévreux, il est vrai, mais tellement « aussagekräftig », justement) me désolent. Disons qu'exprimer ce genre d'opinion devant moi n'est pas faire preuve de diplomatie... Bref...

Dans les jours qui viennent, je rassemblerai les informations que j'ai récoltées à Tübingen au sujet de ce pauvre Hölderlin à l'esprit embrumé, et je les mettrai ici. Avec quelques poèmes, en version bilingue. Vous me direz si vous y comprenez quelque chose ! Pour moi, c'est rien que du flou, mais je me laisse porter par la beauté des mots. Un peu comme si je me baladais en « Stocherkahn » sur le Neckar.... Doux souvenir de ces embarcations, à mi-chemin entre la pirogue et la gondole ! J'ai fait une jolie promenade sur l'une d'elles mardi dernier. Ah, que le temps file vite, mes amis ! « La vie passe comme une rivière, faut pas trop regarder l'heure », c'est le cas de le dire avec ce brave Capdevielle que je ne cite pas souvent ici !!!

26/04/2024

Miracle...

"Le petit jour favorise les songes creux car l'espérance est matinale". Paul GUIMARD

 

Années 1990. Il y a ce type un peu bizarre qui me chante des trucs tout aussi bizarres, comme « La vie c'est pas du bubble-gum et rien que le fait de respirer ça me fout des crampes dans le sternum ». Et tant d'autres choses encore qu'il me faudrait un livre entier pour les répertorier. Et une vie de plus pour les comprendre toutes ! Le type en question a un nom bizarre aussi : Hubert-Félix Thiéfaine. Pas mal de syllabes que l'on peut réduire, si l'envie nous en prend, à trois lettres : HFT. De la Haute Tension pour entourer le F, synonyme de Folie, ou quelque chose d'avoisinant.

J'ai la vingtaine et des illusions pas encore perdues. Avec, cependant, une tendance à penser tout au fond de moi que ça viendra, qu'un jour les illusions clamseront comme des vieux chiens au soleil. Bref... Alors je me sens en pays connu dans les chansons de Thiéfaine qui ne suintent pas toutes l'optimisme béat, c'est à souligner. Dès que je peux, je case ce Thiéfaine dans mes conversations. Je le cite, je me l'approprie, je suis en couple avec son œuvre ! Sur la pochette qui accompagnera ma vie d'étudiante pendant plusieurs années, j'ai écrit, comme d'autres écrivent le doux nom de liberté : « Je respire l'odeur alcaline des relents d'amour périmé ». Rien que pour la beauté du truc. Je trouve que ça claque (bien qu'on ne dise pas ça à l'époque, me semble-t-il, mais j'ai volontiers la plume anachronique). Dans un petit carnet où je consigne des mots d'écrivains, voilà que trônent soudain des paroles de chansons aussi. Par exemple : « À regarder passer les linceuls dans la rue aux spectres visqueux, j'sais plus si c'est moi qui suis seul ou les autres qui sont trop nombreux ».

Je viens également de découvrir Cioran et Gary et tout s'emboîte miraculeusement. L'œuvre d'HFT, je lui trouve de délicieuses accointances avec celles de ces deux auteurs que je lis fiévreusement. De l'inconvénient d'être né, Sur les cimes du désespoir, Syllogismes de l'amertume, ça pourrait être du Thiéfaine, n'est-ce pas ? « Bourlinguer, errer, errer humanum est », ça pourrait être du Cioran, n'est-ce pas ?!

Je me souviens de m'être enivrée des pages que ce philosophe a consacrées à l'insomnie (« cette indigestion de l'âme », dira Thiéfaine), étant moi-même insomniaque à cette époque-là de ma vie (et pouvant l'être encore aujourd'hui, à la moindre contrariété). Je lisais ces passages de préférence la nuit, tant qu'à faire, pour être dans l'ambiance ! Et je trouvais qu'on n'était pas loin du sieur Hubert... Je m'entourais de tout un barda pas très jouasse, mais qui, étrangement, me faisait du bien. Il n'était pas rare qu'on me dise : « Moi, Thiéfaine, j'peux pas, c'est vraiment trop désespéré ». Ce à quoi je répondais que pour moi c'était l'inverse qui se produisait : ce désespoir, comme il seyait au mien, comme il le soutenait et, ce faisant, le mettait k.o. !

 

Années 2020. Dans ma vie, il y a toujours ce type un peu bizarre qui m'accompagne absolument partout et tout le temps. Même quand je ne l'écoute pas. Si on m'avait dit, il y a trente ans, que je venais de tomber pour des décennies dans la marmite, y aurais-je cru, moi qui pensais déjà, indécrottable optimiste (!), que toute chose était vouée à s'effriter pitoyablement ? Et si, au premier concert, à Sarreguemines, on m'avait dit que des dizaines suivraient, qu'aurais-je répondu ? J'aurais été dubitative, je pense, mais sans doute pas totalement incrédule. Je savais déjà qu'un truc immense avait pris corps dans ma vie ! Et, à mes yeux, c'est miracle qu'il soit toujours là, sans rides, frais et pimpant comme une jeune fille. J'aurais pu, soudain, ne plus me reconnaître dans les mots de Thiéfaine. Il aurait pu, qui sait, soudain ne plus me sembler raccord avec ses idées, prêcher un truc et afficher le contraire, que sais-je encore. Nos chemins auraient pu s'éloigner comme s'éloignent tous les chemins que la vie fait. Eh bien non. C'est miracle, vous dis-je !

16/04/2024

Michel Jonasz était à Neuves-Maisons samedi dernier !

"Donnez-moi le temps - ce luxe suprême - de vivre à mon rythme, de regarder, de prendre des chemins que n'indiquent pas les cartes et les plans. De faire halte et de boire un verre de souvenirs avec des compagnons dont je suis le seul à déceler la présence". André HARDELLET

 

Ils arrivent main dans la main, et c'est beau. Ils, c'est-à-dire Michel Jonasz et Jean Yves D'Angelo, le musicien qui l'accompagne. Cette manière d'entrer en scène en dit long sur la complicité qui les unit. Complicité qui ne se démentira pas une seule seconde durant le spectacle !

Pour commencer, Jonasz déclame un texte qui s'adresse à un mystérieux « frère des douleurs partagées ». En fouillant sur Internet aujourd'hui, j'ai découvert que c'étaient les paroles de la chanson Les mots d'amour. Le mystérieux frère est peut-être un frère réel ou un ami. Ou encore, plus vraisemblablement ce soir, le public.

On dirait que Michel Jonasz nous convie à une promenade bras dessus, bras dessous. Et c'est bien agréable. Nous le suivons, pendant environ une heure et demie, dans cette belle flânerie qui se déroule parfois à l'ombre des jeunes filles en fleurs, notamment quand le chanteur évoque ses amours d'enfance. Je pense au « vert paradis des amours enfantines » de Baudelaire. On sent que Jonasz est légèrement nostalgique sur ce coup-là. Je me dis que plus les années passent, plus nous foudroient les premiers souvenirs. Ma mémoire me fait souvent l'effet d'une vieille radoteuse qui va toujours triturer les mêmes territoires explorés cent mille fois... Et ce n'est pas le livre acheté aujourd'hui qui va arranger mes affaires : Donnez-moi le temps, suivi de La promenade imaginaire, d'André Hardellet, qui ne raconte ici que des souvenirs teintés de nostalgie ! Bref...

Flânerie, disais-je. Si l'on veut. C'est tout de même bien rythmé ! On ne s'ennuie pas une seconde, en tout cas. Quand Michel Jonasz ne chante pas, il parle, il nous livre des anecdotes, et c'est drôle. Je ne le savais pas doté d'un tel humour ! Il faut dire que je ne le connais pas bien. De son répertoire, je n'ai retenu que l'écume des grands « classiques », et c'est tout.

Jonasz nous parle de son compagnon de scène et nous le décrit comme sacrément calé dans son domaine, la musique. Il ajoute : « Le solfège, quand c'est bien joué, ça peut être très joli », et toute la salle éclate de rire. Comme lorsqu'il évoque cette jeune fille lui ayant demandé récemment un autographe, précisant malencontreusement que c'était … pour sa grand-mère ! Il plaisante sur l'âge de son public et je regarde autour de moi. Je crois, sans vouloir offenser quiconque, que je fais partie des plus jeunes ce soir. Je ne boude pas mon plaisir, celui-ci ne m'étant plus accordé si souvent !

Vient ensuite le moment de ce que Jonasz appelle ses chansons grigris : Super nana, Joueurs de blues, La boîte de jazz. Mais on n'aura pas droit aux Vacances au bord de la mer, que j'ai espérées toute la journée.

Pas grave. On a eu d'autres choses. Du blues et du jazz, mais pas seulement. Du rire aussi. Et beaucoup d'émotions. C'est peut-être encore plus vrai pour moi qui, par moments, avec les jeux de lumière, voyais se superposer une image sur la silhouette de Michel Jonasz : celle de mon père en sa plus florissante époque, quand il ne quittait la maison qu'en costar-cravate. Terriblement troublant...

Bref, c'était un super concert !

06/04/2024

HFT était au Casino de Mondorf-les-Bains hier soir !

"La nuit

 tombe, l'aube se lève, un été a passé.

Déjà, disent les fumées du hameau

tandis que des animaux sans colère continuent

d'amasser l'or du temps, l'or

de nos yeux avides et si vite fermés". Guy GOFFETTE

 

Heureusement que de temps en temps, un brin de raison vient me percuter et bloquer mes pulsions / impulsions, sans quoi je serais en ce moment même en route pour Dole. Bon, j'avoue que le pincement au cœur est énorme de ne pouvoir assouvir le désir de voir Hubert dans sa ville natale. Mais on ne peut pas tout avoir, n'est-ce pas ? J'ai eu Mondorf-les-Bains hier, j'aurai Paris et Reims en mai. Peut-être Besançon en juin, peut-être Bois d'Amont en septembre. C'est déjà pas si mal. Mais Dole, tout de même, ne m'aurait pas déplu !

Mondorf-les-Bains, donc. Hubert s'y est produit hier au Casino. J'y avais déjà vu, il y a bien longtemps, la chanteuse Berry dont on n'entend plus du tout parler aujourd'hui. Dommage, d'ailleurs. À l'époque, déjà, j'avais noté le côté un peu surréaliste du truc : aller voir un artiste pas loin des machines à sous et autres bandits manchots...

Hier, en traversant tout cet arsenal, je pensais à la chanson Sexe, Casino et tendritude, qui n'est pas la plus connue d'HFT. Je me disais que ce serait drôle qu'il nous la fasse. Vous imaginez ? Une chanson par ambiance. Ce soir Villes natales et frenchitude. À Reims Affaire Rimbaud, parce qu'on n'est pas loin des Ardennes. À vous de poursuivre la liste à l'envi.

Bon, mais non, pas de Sexe, Casino et tendritude hier soir, pas plus que de Maalox Texas Blues qui était venu visiter un de mes rêves la semaine dernière. J'aurais adoré, pourtant. Tout comme Dole ce soir. Mais on ne peut pas tout avoir, n'est-ce pas, et pas la peine de radoter.

Reprenons donc depuis le début. Départ de la maison vers 16h30. Une heure et demie plus tard, même pas tout à fait, j'arrive dans un pays où « herzlich willkommen » se dit «häerzlech wëllkomm ». On dirait de l'allemand, en plus compliqué encore !!!

Je suis toute guillerette en ce 5 avril 2024 qui, comme tous les jours que Dieu fait d'ailleurs, aura la particularité de ne jamais revenir. J'y pense un peu au volant de ma voiture, je sais que chaque seconde qui passe est précieuse. Il faut la savourer comme il se doit. Dans quelques secondes, elle ne sera plus là. Et m'amènera, avec ses petites sœurs, au point de non-retour : la fin du roman de ce soir. Je roule vers Bruce et Cindy, lorrains comme moi. Fans de Thiéfaine aussi. Adeptes quand il le faut des grandes discussions sur les parkings qui bordent les salles de concert... Même durant les hivers que la Lorraine sait rendre rigoureux à souhait.

Nous nous retrouvons et allons manger ensemble. À 20h et des brouettes, agitation à notre table de resto : il ne faudrait pas que nous soyons en retard où vous savez. Il n'y a que cinq minutes de marche de là où nous sommes au Casino, mais prévoyons large quand même, on ne sait jamais, une traversée d'engin, que sais-je...

Comme moi, Bruce et Cindy ont chacun un billet pour le premier rang. Mais pas du même côté que moi. Nous nous séparons donc. Embrassades à droite et à gauche, et je m'installe. Ça y est, le voilà, le moment tant attendu.

Concert assis. Ça me fait toujours un peu bizarre. Incompatibilité avec les chansons d'Hubert. Mais son public n'ayant plus tout à fait vingt ans, il faut offrir un certain confort aux arthroses naissantes, aux rhumatismes, aux cartilages devenus trop poreux, n'est-ce pas ?!

Est-ce cette foutue position assise qui fait que pendant quelque temps rien ne bouge ou presque dans les rangs ? C'est mou du genou, tout ça. Et, pour ma part, je reconnais que quand ça ne s'agite pas plus que ça, je suis plutôt du genre à ne pas oser. Il n'en va pas de même pour un de mes voisins, 655321, qui, à un moment, estimant que la mollesse ça va bien cinq minutes, même quand on a les articulations rouillées, jouera les ambianceurs à grand renfort de larges gestes bien qu'étant lui-même perclus de douleurs !

Démarrage tout doux, donc. Ce n'est que sur Amanite phalloïde queen que tout ce petit monde se décrispe. Ah, ça y est, enfin ! Désormais, chaque chanson connaîtra ses envolées, et je suis soulagée. Je ne voudrais pas qu'Hubert pense qu'on n'est pas d'humeur à le suivre. Ou qu'on a mal vieilli.

Aux quatre coins de la salle, des vigiles veillent au grain. Le moindre flash apparent se voit couvert de remontrances. Ici et là, quelques personnes se lèvent. Le vigile qui est à quelques pas de moi est aux aguets. Ok pour la position debout, mais pas trop près de la scène.

Et puis, finalement, tout part en vrille quand même, et ce avant La fille du coupeur de joints. D'accord, on n'a plus vingt ans, ni même trente, parfois même plus quarante, mais il ne s'agirait pas non plus de nous condamner direct à l'Ehpad. On a de la ressource et on va (enfin) le prouver. La même ressource donnant à voir le meilleur d'elle-même quand retentissent les premières notes de La fille. À ce propos, savez-vous que désormais, on trouve au merchandising une boîte à musique qui joue ce morceau ?! J'adore l'idée ! Mais je n'ai pas acheté le gadget en question : dans quelques mois, je déménage et j'ai bien assez de bibelots comme ça. Notamment un cendrier HFT qui ne sert jamais, vous vous souvenez ?!

Hubert et ses musiciens arborent un franc sourire à la fin : le public du Casino a mis un peu de temps à s'enflammer, mais une fois que ce fut chose faite, le brasier s'avéra pas mal. Aurait pu mieux faire, mais je m'attendais à pire compte tenu du départ mollasson.

Encore un concert que j'ai kiffé. De l'émotion à foison en ce qui me concerne. Des frissons partout et des larmes quand j'ai vu Hubert apparaître sur la scène. Il m'a toujours fait ça, ne me demandez pas pourquoi, c'est un truc entre lui et moi ! Re-frissons et re-larmes pendant Combien de jours encore. Chanson ambiguë, vous ne trouvez pas ? Ce qui sous-tend le texte semble se situer entre nostalgie de partir (« Combien de jours encore à contempler l'automne ? ») et soulagement de partir (« délivré à jamais du poids de l'univers »). Tout cela me laisse songeuse à chaque écoute...

Durant la chanson, je me demande combien de concerts encore. C'est miracle d'en avoir vu autant. Miracle d'avoir partagé tant de décennies avec l'œuvre qui me fracassa littéralement il y a trente-et-un ans. Je savais bien, à l'époque, que je venais de me prendre un choc émotionnel déterminant, fondamental, irréversible, mais de là à imaginer qu'il durerait ainsi... J'en éprouve régulièrement une profonde gratitude.

Après le concert, je discute avec un monsieur qui me dit qu'il vient de voir HFT pour la 25ème fois. J'allonge (sans même vouloir frimer) mes quelque soixante concerts et je me transforme soudain en phénomène de foire. Le monsieur va chercher ses potes, qui me félicitent, n'en reviennent pas. Ils sont mordus aussi, me disent-ils, mais tout de même pas à ce point. Ouais, je sais...

Notez encore ceci, s'il vous plaît : à la toute fin, Hubert s'est approché de la foule qui s'était massée près de la scène et a distribué une avalanche de checks. En riant lui-même de son audace. Moment de grâce parmi tant d'autres. Quel homme, vous dis-je, quel homme !

Je ne dévoile pas la setlist pour l'instant. Laissez-vous surprendre lors des dates à venir. Vous ne serez pas déçus !

05/04/2024

Les affaires reprennent !!!

"D'innombrables moi m'habitent et me narguent. Une cacophonie de moi". Paul VALET
 
Dieu, que la campagne lorraine est jolie ce matin ! Colza, fleufleurs en goguette, arbres parés de joie, le tout arrosé de soleil. On dirait que le paysage s'est fait beau pour Hubert qui va le traverser. On dirait que c'est lui, Hubert, qui a fait jaillir le printemps après tant de jours de pluie. Je ne serais pas étonnée qu'il ait ce pouvoir-là aussi, parmi tant d'autres, et pas des moindres !
Printemps dans les cœurs itou, n'est-ce pas, et surtout dans le mien. Depuis que la maladie m'est passée dessus comme un poids lourd lancé à vive allure, je sais que chaque concert de plus est un cadeau. Et une revanche sur la période où j'avais mal aux globules...
Combien de concerts d'HFT à ce jour ? Peut-être bien 59. Ce qui voudrait dire que ce soir je vais entrer dans la soixantaine. Je ne sais plus trop, il faudrait que je reprenne les calculs, comme ça, pour voir, mais quelque chose me dit aussi que quand on aime on ne compte pas. On ne compte pas les kilomètres parcourus (m'en fous, j'adore conduire !), on ne compte pas non plus les deniers dépensés, ce serait trop petit comme raisonnement. De toute façon, pour Hubert, j'ai toujours eu un bas de laine planqué quelque part, au cas où. Et il y a eu pas mal de cas où...
Ce soir encore, je m'enivrerai de ces chansons sur lesquelles pas un seul cheveu blanc n'a poussé. Du fond des âges, j'entendrai la voix de ma mère me demander, comme il y a trente ans : "T'en as pas marre d'écouter ce chanteur ?". Ben non, maman, toujours pas marre, tu vois... Trente ans plus tard, on prend le même et on recommence !
Ce soir encore, je m'émerveillerai en regardant le public d'Hubert. On n'est plus tout jeunes, certes, mais qu'est-ce qu'on est beaux ! L'œil vif encore, et l'âme enflammée !
Il y a quelques nuits, j'ai rêvé qu'HFT nous revenait, en cette deuxième partie de tournée, avec une setlist un peu modifiée. Et qu'on avait droit à Maalox Texas Blues. Que j'adore, que j'adore... Ce serait vraiment Byzance. Mais tous les rêves ne sont pas prémonitoires...
Dieu, ou je ne sais trop qui là-haut, faites que ce bel aujourd'hui ne passe pas trop vite ! C'est si fragile et si précieux, un bel aujourd'hui...

21/03/2024

Véronique Sanson était au Galaxie d'Amnéville dimanche dernier !

"Maudit soit le temps qui passe

Maudit soit ce qu'il en reste". Véronique SANSON

 

S'il fallait ne prononcer qu'un mot après le concert de Véronique Sanson à Amnéville (dimanche dernier), ce serait : RESPECT. Et en lettres capitales, s'il vous plaît. Le temps, pourtant assassin comme chacun sait et comme elle l'a chanté, semble n'avoir aucune prise sur elle. C'est qu'on la jurerait indestructible, comme dans sa chanson !

Elle arrive, elle s'assoit à son piano et le monde autour d'elle et en elle entre dans une autre dimension. Une dimension où « les jours de pluie, qu'est-ce que ça peut faire », n'est-ce pas ? Une dimension où « la vie paraît moins dure », tout ça, quoi. Elle annonce la couleur de la soirée que nous allons passer en sa compagnie : il y aura un peu de tout, des émotions, de la rigolade, du rythme. Elle va nous parler à cœur ouvert. De ses chagrins, mais pas seulement. Et quelque chose me dit, après un simple coup d'œil dans la salle, que nous allons l'écouter sinon religieusement, du moins respectueusement. N'oublions pas que c'est miraculeux qu'elle soit devant nous quand on sait par quelles tempêtes elle est passée. Personnellement, c'est pour ça que je l'aime. Entre autres. Je l'aime aussi parce que chaque modulation de sa voix me rappelle ma mère qui l'aimait tant, je l'aime aussi parce qu'elle m'accompagne depuis des décennies.

Brel disait qu'un artiste, c'est quelqu'un qui a mal aux autres. C'est parfois aussi quelqu'un qui a horriblement mal à lui-même. Sanson s'est écorchée plus d'une fois, mais elle s'est comme régénérée. Elle est tombée huit fois et s'est relevée neuve. Elle a très bien décrit tout cela dans une chanson : Je me suis tellement manquée. Chanson à laquelle nous avons eu droit dimanche soir. Frissons merveilleux. Ce que cette femme nous livre là, sans fard, sans chichis, c'est un bout de son intimité. Nous le recevons sept sur sept, dans un grand recueillement.

Elle ne reste pas assise très longtemps. Au moment où résonnent les premières notes d'Indestructible, elle se lève, rejoint ses musiciens, danse, tape dans ses mains. Le public gigote aussi. Jusque-là, tout le monde était sagement assis sur son siège, mais voilà que ça décolle de partout ! On se croirait à un concert de Thiéfaine, où la foule ne reste jamais disciplinée bien longtemps. Il y a soudain un bouquet de gens massés autour de la scène. On entend fuser des « Véro » et des « on t'aime ». Voilà qui la porte. Elle nous donne le meilleur d'elle-même et de sa discographie : Amoureuse, Bernard's song, Rien que de l'eau, Vancouver, Alia Souza. C'est un florilège de chefs-d'œuvre. Avec de splendides jeux de lumière pour faire un bel écrin à tout ça. On en prend plein les yeux et les oreilles. Et sa jolie veste queue-de-pie scintille. Voilà, c'est le mot : nous sommes en train de passer une soirée scintillante, sur toute la ligne !

Malheureusement, même pendant des moments aussi magiques et aussi purs, le temps reste assassin et vient le moment où il faut se quitter. Véronique nous propose de chanter Bahia. « Vous chantez, je vous accompagne au piano et comme ça, j'aurai encore vos voix dans la tête quand je serai dans ma chambre d'hôtel ».

Interviewée il y a quatre ans par Léa Salamé qui lui demandait comment elle définissait l'art, Véronique Sanson avait répondu : « L'art, c'est ce qui vous parle ». Ben voilà. Les chansons de Sanson me parlent. J'aime les artistes qui me racontent leurs amours pas plus simples que les miennes, j'aime les artistes qui ne sont pas passés entre les gouttes, mais se sont pris des seaux d'eau sur la tronche. Et en ont fait de l'art !

Encore une fois : RESPECT !

14/03/2024

"Ton piano danse toujours", un spectacle de Jean-Marc Sauvagnargues

"Il y a comme cela des nostalgies qui courent en pointillé tout au long d'une vie". Paul DE ROUX

 

« Il manque quelqu'un près de moi, je me retourne, tout le monde est là, d'où vient ce sentiment bizarre que je suis seul ? ». « Il y a peut-être quelque part un bonheur dont j'aurais eu ma part », « Diego libre dans sa tête », « Mademoiselle Chang a tout ce qu'elle demande » : ces mots ont bercé mon adolescence. Il y avait toujours, pour les accompagner, une mélodie qui portait dans son architecture la signature de son compositeur, reconnaissable entre toutes. Celle d'un certain Michel Berger. Ma mère l'adorait. Combien de fois l'ai-je surprise, chantant à tue-tête ses chansons devant son fer à repasser ? C'est qu'elle repassait toujours intelligent, ma mère. Elle se posait dans le salon, face à la fenêtre. Pas trop loin de la chaîne stéréo pour pouvoir se transformer en DJ le moment venu, et roule, c'était parti pour plusieurs heures. En un après-midi, elle venait à bout du linge entassé, et en chantant. C'est à son contact que j'ai appris que tout, dans la vie, est « plus marrant et moins désespérant en chantant ». C'est qu'on en aura passé des heures, à écouter les chanteurs et les chanteuses qu'elle aimait. Elle avait des goûts éclectiques et surprenants. Moi qui ai gardé ses CD, je ris souvent de voir Scorpions pas très loin de Dalida, Alain Barrière avoisiner A-ha, et autres savoureuses bizarreries. Ma mère se moquait bien des classifications et des genres. C'était elle qui décidait : si elle aimait un morceau de Supertramp, pourquoi ne pas acheter illico l'album sur lequel il se trouvait et ranger celui-ci à côté des Fabulettes d'Anne Sylvestre ? Dans son monde, tout était possible. Un exemple à suivre, je crois !
Et donc, elle aimait particulièrement les chansons de Michel Berger. Si bien que ce dernier devint pour moi, après la mort brutale de ma mère, un artiste au potentiel hautement inflammable. Je ne l'ai pas écouté pendant des années. Idem quelques autres. Et puis, il y a quatre ou cinq mois, j'ai fait comme dans La minute de silence : j'ai sorti, pour voir, des disques de leurs pochettes. Des disques de Michel Berger. Les grandes eaux se sont vite invitées et, en même temps, il y avait cette joie incommensurable de retrouver un petit quelque chose ayant appartenu à ma maman. Le genre de truc qui fait à la fois du bien et du mal. Après plusieurs écoutes, j'en vins à la conclusion suivante : moi aussi, j'aimais beaucoup Michel Berger. Que de souvenirs contenus dans ses chansons ! 
Et voilà qu'il y a quelques semaines, j'apprends que Jean-Marc Sauvagnargues, des Fatals Picards, tourne en solo avec un spectacle entièrement consacré à Michel Berger. Mieux encore : j'apprends que le même Jean-Marc Sauvagnargues va venir pas loin de chez moi le 13 mars. Billet pris dans la foulée. Et nous voilà le 14 mars, au lendemain d'un soir qui a chanté comme ma mère aimait. Et qui l'aurait enchantée. 
C'est que tout est enchanteur dans ce concert. Jean-Marc Sauvagnargues alterne les parties parlées et les parties chantées. Quand il parle, c'est pour nous présenter la biographie de Michel Berger, ses amours, ses amis, ses emmerdes (et Dieu sait s'il y en eut dans cette courte vie, intense mais pas exempte de drames) ou pour nous dire combien ce chanteur compte pour lui. Déjà, hasard ou pas : ils sont tous deux nés un 28 novembre, à exactement vingt ans d'écart. Il y a comme ça des choses qui interpellent. Et me ramènent à Hubert, forcément : né la même année que ma mère et le même mois que mon père, prénommé Maurice comme le sien. Jean-Marc Sauvagnargues nous confie que les chansons de Berger ont fini par composer la bande-son de sa vie. Voilà qui me ramène encore à notre cher HFT, dont les chansons me racontent désormais mon histoire, de mes dix-neuf ans à aujourd'hui. Ça en fait, des choses à me dire ! 
Bref... Le spectacle de Jean-Marc Sauvagnargues s'appelle « Ton piano danse toujours » et il est d'une grande délicatesse...
Hier encore, comme tous les jours depuis février 2009, il manquait quelqu'un près de moi. Quelqu'une, plutôt. Et pourtant, à un moment, en entendant La groupie du pianiste, j'aurais juré qu'elle était à mes côtés, en train de chanter très fort, son fer à repasser à la main ! 

14/02/2024

On attend la suite (comme dans la chanson de la Grande Sophie, dont il ne sera pas question ici)...

"Et, de nouveau, elle se sentit seule en présence de sa vieille antagoniste, la vie". Virginia WOOLF

 

Connaissez-vous le balafré, celui à qui il manquait quatre phalanges? Soit dit en passant, et on s'en doute un peu, « ça lui donnait pas l'air d'un ange ». Avez-vous entendu parler de Hyacinthe aux grosses mains d'étrangleur ? Vous sentez-vous en famille en présence d'un fou ? Et Jeanne aux cheveux mayonnaise, ça vous dit quelque chose ? Pour le formuler simplement : connaissez-vous Thomas Fersen ? Voilà un monsieur qui a un univers totalement à part et foutraque à souhait ! Il m'accompagne depuis presque autant d'années qu'Hubert. On n'est pas du tout dans le même registre, mais est-ce important ? De temps à autre, une petite infidélité à HFT ne fait pas de mal. De toute façon, c'est toujours pour « mieux revenir, vagabond(e), dans sa rue », évidemment ! On est fan ou on ne l'est pas. Mais, tout de même, comme je l'ai déjà écrit ici, il n'y a pas qu'Hubert dans la vie (encore que, parfois, on se demande, hein...). C'est aussi qu'il faut bien passer le temps entre les intervalles, entre deux tournées ou sessions de tournée. Donc, voilà, j'ai mon petit programme avant de reprendre une activité saine et normale (comprenez le prochain volet de la tournée Replugged) : vendredi soir, Thomas Fersen à Neuves-Maisons (où j'ai déjà vu Hubert), le 17 mars Véronique Sanson à Amnéville (où j'ai déjà vu Hubert itou). Ici s'impose, messieurs dames, un arrêt sur image, pour vous dire que ce soir-là, je vais réaliser un rêve : j'adore Véronique Sanson et je ne l'ai jamais vue sur scène. Je l'adore, oui, et c'est encore un coup de ma mère qui, très tôt, jugea utile de me mettre Le temps est assassin et autres délicatesses entre les deux oreilles. Comme si je n'étais pas née avec le pessimisme chevillé au corps. Comme s'il avait fallu remettre une louche de déréliction dans mon esprit que torturait déjà, durant l'enfance, la vacuité de vivre ! Mais bon, passons. Et donc, Sanson, je l'écoute depuis longtemps aussi. J'ai hâte de la voir. Je sens que ça va être magique, et je pense que Bételgeuse ne me contredira pas.

En avril, je reprendrai une activité saine et normale. Comprenez la même chose que tout à l'heure, à savoir : aller voir Hubert aux quatre coins de la France ou presque, et même par-delà les frontières. Pour le moment, je n'ai qu'un billet : c'est pour le concert qui aura lieu le 5 avril au casino de Mondorf-les-Bains. Mon p'tit Jiminy Cricket inversé me susurre à l'âme que j'ai un peu merdouillé, n'ayant toujours pas de place ni pour l'Olympia, ni pour Reims, ni pour Dole. Et ne sachant pas s'il reste des places... Quoi ? Ça coûte cher, me hurle dans l'oreille mon Jiminy Cricket pas inversé. Oui mais ça, mon ami, c'est accessoire, compte tenu des autres soucis qu'on peut avoir dans l'existence. Plaie d'argent n'étant pas mortelle, je dis qu'il est grand temps de regarder s'il reste des billets pour l'Olympia, Reims et Dole ! Au diable l'avarice !

Et vous, comment patientez-vous jusqu'à la reprise de Replugged ? Quels concerts sont inscrits à votre calendrier ? Et en ce qui concerne Hubert, lesquels avez-vous prévus ?