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09/08/2006

Le Sturm und Drang : suite et fin

« On distingue traditionnellement quatre périodes dans la vie de Goethe : la jeunesse (1749-1775), le premier séjour à Weimar (1775-1786), le voyage en Italie et le classicisme weimarien (1786-1805), la vieillesse (1805-1832). Né en 1749 à Francfort-sur-le-Main, dans une famille de bourgeoisie aisée, il commence des études à Leipzig, puis à Strasbourg : en 1771, il s’inscrit comme avocat à Francfort, en 1775 il fait la connaissance du jeune duc de Saxe-Weimar, qui l’invite à venir s’installer chez lui. A Strasbourg, en 1770, il rencontre Herder, qui lui expose sa théorie de la poésie, attire son attention sur l’art « germanique », symbolisé par la cathédrale de Strasbourg, et lui fait connaître Shakespeare ; Goethe fait aussi la connaissance de la fille d’un pasteur, Friederike Brion, qui lui inspire ses premières poésies véritablement « goethéennes ». Les deux œuvres essentielles de sa jeunesse sont un drame, Götz von Berlichingen (1773) et un roman qui connaît un immense retentissement dans toute l’Europe, Les souffrances du jeune Werther (Die Leiden des jungen Werthers, 1774). Götz est un drame historique à la mode shakespearienne, où Goethe retrace le combat et la mort, au début du XVIème siècle, d’un chevalier qui essaie d’affirmer sa liberté dans une époque chaotique et succombe, victime de la marche de l’histoire. Plus que le récit plus ou moins autobiographique de l’amour malheureux de Werther pour Charlotte, Werther est celui de l’échec d’un jeune homme qui s’enferme dans l’infini de sa sentimentalité, et qui succombe à la fascination de la mort. Götz, qui se jette dans l’action, et Werther, qui s’abandonne au sentiment, sont les deux aspects complémentaires du « génie », dont Goethe montre la grandeur et le tragique dans tout ce qu’il écrit entre 1770 et 1775 : il ébauche des drames dans lesquels il met en scène les grands personnages historiques ou mythologiques (Mahomet, Prométhée, Faust), il écrit des hymnes au « génie », des poésies de la nature, tout en mettant en chantier les drames qui marqueront son passage au classicisme.

A côté et autour de Goethe figurent un certain nombre de jeunes écrivains, Jakob Michael Reinhold Lenz (1751-1792), qui écrit des drames et des traités historiques, Heinrich Leopold Wagner (1747-1779), Friedrich Müller (1749-1825). Mais c’est avec Schiller (1759-1805), qui n’appartient pas à ce groupe, que le Sturm und Drang trouve son prolongement et son achèvement.

Par son milieu, par ses origines, par toute sa personnalité, Schiller est entièrement différent de Goethe. Il est né en Souabe, à Marbach, dans une famille très profondément marquée par le piétisme, d’un père capitaine dans l’armée du duc de Wurtemberg. A 14 ans, il est inscrit sur l’ordre du duc dans une école où, tout à fait dans l’esprit de l’Aufklärung, on donnait aux enfants les plus doués, pour en faire les cadres de l’armée et de l’Etat, une formation que le jeune Schiller subit avec impatience. Affecté en 1780 en tant que chirurgien à un régiment de Stuttgart, il fait jouer au Théâtre national de Mannheim, en 1782, son premier drame, Les brigands (Die Räuber). Mis aux arrêts pour s’être absenté sans permission, il s’enfuit à Mannheim, puis, après quelques années de vie errante, il est nommé en 1789 professeur d’histoire à l’Université d’Iéna. C’est à cette date que l’on fixe la fin de sa première période, au cours de laquelle il compose des poésies, des traités sur le théâtre et surtout quatre drames : Les brigands, La conjuration de Fiesque (Die Verschwörung des Fiesco zu Genua), Intrigue et amour (Kabale und Liebe) et Don Carlos. Les deux plus célèbres, Die Räuber et Kabale und Liebe, se rattachent aux deux grands modèles qui dominaient alors la scène allemande : Die Räuber est une pièce « shakespearienne », avec le foisonnement des scènes et des personnages, les changements de lieu, l’étalement de l’action sur une longue durée, tandis que Kabale und Liebe est explicitement désigné comme un drame bourgeois, mais, dans les grandes lignes de l’action dramatique, les deux textes sont tout à fait parallèles. Chacun montre un jeune homme qui proclame les idéaux du Sturm und Drang ; dans Die Räuber, Karl exalte la force du génie, affiche son ambition de créer une « république allemande, auprès de laquelle Rome et Sparte seraient des couvents de bonnes sœurs », Ferdinand, dans Kabale und Liebe, affirme que l’amour est la valeur suprême. (…) Schiller utilise successivement les deux grandes formes théâtrales de son temps pour démonter le personnage glorifié par  le Sturm und Drang, pour montrer son échec, sinon sa culpabilité envers l’ordre du monde ».

 

Source : La littérature allemande, Jean-Louis BANDET, Que sais-je ?

 

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