24/11/2006
Le 24 novembre 1997...
La pensée du jour : "Je songe, attristé, à tout ce que j'aurai ignoré de toi", Louis CALAFERTE.
Il y a très exactement neuf ans, s’éteignait celle que William Sheller appelle affectueusement et respectueusement « la duchesse ». La duchesse, c’est-à-dire Barbara…
Barbara, le bel aigle noir de mon enfance. Je me souviens des longues soirées passées avec ma mère, à écouter toutes les chansons qu’elle aimait bien. Parmi ces chansons, il y en avait un paquet de Barbara. C’est surtout lorsque j’avais quinze ans que je me suis réellement amourachée de l’œuvre de Barbara. Depuis, les mots de la duchesse ne m’ont jamais quittée et j’y puise courage aux heures d’accablement…
Barbara, pour moi, c’est avant tout « Göttingen ». Quand on pense aux circonstances dans lesquelles est née cette chanson, on en ressent d’autant plus toute la portée… En juillet 1964, Gunther Klein invite Barbara à aller chanter à Göttingen. La chanteuse, dont la famille aura tant souffert de la seconde Guerre mondiale, se montre d’abord largement réticente… Elle n’a nullement envie d’aller chanter en Allemagne ! Sous l’occupation, Barbara et ses proches durent fuir et se réfugier à Saint-Marcellin. C’est d’ailleurs là qu’en 2005 eut lieu un festival Barbara. Parmi les invités … Thiéfaine ! Bref… Finalement, Barbara accepte l’invitation de Gunther Klein. Elle chante donc à Göttingen, et le public lui réserve un chaleureux accueil. Je cite ses propos : « La soirée est magnifique. Gunther prolonge mon contrat de huit jours. Le lendemain, les étudiants me font visiter Göttingen. Je découvre la maison des frères Grimm où furent écrits les contes bien connus de notre enfance ». Et voici ce que Barbara écrit à propos de la chanson « Göttingen » : « Je dois donc cette chanson à l’insistance têtue de Gunther Klein, à dix étudiants, à une vieille dame compatissante, à la blondeur des petits enfants de Göttingen, à un profond désir de réconciliation, mais non d’oubli ». Moi aussi, « il y a des gens que j’aime à Göttingen » et dans bien d’autres villes d’Allemagne, et je ne peux écouter cette chanson sans penser à eux…
Barbara, c’est aussi « Nantes », bien sûr, et tout le drame qui se cache derrière ce cri d’amour, d’amour malgré tout… C’est également « Ma plus belle histoire d’amour c’est vous », déclaration d’amour au public, cette fois. Et « L’île aux mimosas »… « Il y a si peu de temps entre vivre et mourir »… « L’enfant laboureur ». « Mais comment voulez-vous qu’un enfant laboureur,
Si on lui prend sa terre,
Fasse pousser ses fleurs, ses fleurs ? »
« Drouot », bien sûr, et puis « Tu ne te souviendras pas », et « Vienne ». Pour moi, Barbara a chanté mieux que personne le baromètre de l’amour, toujours oscillant entre « beau temps » et « pluie »… « Dis, quand reviendras-tu ? ». « Voilà combien de jours, voilà combien de nuits, voilà combien de temps que tu es reparti »… Il y a aussi « La solitude » et « La mort ». Et « L’aigle noir », évidemment !
Bref, je pourrais citer l’œuvre entière de cette artiste. Ses mots m’accompagnent au quotidien, comme ceux de Thiéfaine, et ce n’est pas incompatible !
Dimanche, au retour de Paris, j’ai demandé à Sam de me faire une faveur et de m’emmener à Précy-sur-Marne, petite commune d’environ 400 âmes, je crois, et où Barbara vivait, loin des tumultes de la scène… Cela faisait des années que je rêvais de faire ce pèlerinage. Dans le village, nous avons eu la chance de pouvoir discuter avec un monsieur qui avait été pendant longtemps le voisin de Barbara et qui l’a décrite exactement comme je l’ai toujours imaginée, généreuse et drôle. Pas du tout austère… Il nous a également dit qu’il trouvait que Barbara était déjà tombée dans un injuste oubli, alors qu’on ne manquait jamais de nous rebattre les oreilles avec Claude François, par exemple. Tout à fait d’accord. J’espère quand même que pour les dix ans de la mort de Barbara, quelqu’un pensera à lui rendre hommage, sinon je fais une révolution sur ce blog !!
En faisant ce crochet par Précy, je voulais juste, et cela avec le plus grand respect, m’imprégner de l’atmosphère dans laquelle Barbara avait pu vivre… Ce jour-là, il « automnait », comme elle aurait dit. Tout à fait le ciel qu’il fallait au-dessus de Précy… Et lorsque nous sommes arrivés dans le village, nous avons tout de suite vu ce joli panneau : « rue de la petite cantate »… Peu de temps après, nous avons entendu les cloches de l’église, que Barbara évoque dans la chanson « Précy », justement. J’ai ressenti une vive émotion en entendant ce carillon !
Voilà. Et je terminerai par cette phrase de Barbara :
« Et les mots qui sortent de ma gorge, je ne les connais pas : des mots qu’on a plantés là, des mots qui me font mal et qui m’étouffent ; alors je les crie, je les vomis pour pouvoir respirer, pour vivre… ».
Repose en paix, ma duchesse ! Merci encore et … chapeau bas !
08:37 | Lien permanent | Commentaires (9)
Commentaires
Merci...
Écrit par : petit-jour | 24/11/2006
Ce simple mot pour dire combien ce post m'a ému.
Je ne connais pas beaucoup l'oeuvre de Barbara mais tes mots me touchent.
Il y a 9 ans, je débarquais à Montpellier (déjà 9 ans ! la vache) et j'avais rejoint un groupe musique à l'aumônerie de la fac. Je me souviens avoir appris cette chanson "Göttingen" lors d'une soirée. Le lendemain matin, on apprenait la mort de Barbara. Sentiment étrange, bizarre. Finalement, sans le savoir, nous lui rendions hommage.
Veille sur nous de là où tu es...
Écrit par : petit-jour | 24/11/2006
Coucou Petit-Jour,
Je viens de réécouter un CD de Barbara, c'était incontournable aujourd'hui.
Quand la "dame brune" est morte, j'étais dans les Ardennes... La veille, je m'en souviens très bien, je m'étais justement dit : "tiens, on n'entend plus parler de Barbara"... Son dernier album est déchirant, sa voix est fichue, mais quel beau dernier cri...
Le 24 novembre 1997, Gaïa m'avait téléphoné pour savoir comment je prenais la nouvelle, tant je lui avais dit mon admiration pour la duchesse. Je suis un peu triste en ce morne anniversaire...
Écrit par : Katell | 24/11/2006
Quel beau texte...merci...
Écrit par : JPADPS | 24/11/2006
merci pour ces mots...
Écrit par : sev | 24/11/2006
Je me souviens en te lisant qu'un soir de Mai 2005, j'ai appris que Cath aimait Barbara et qu'Hubert au festival Barbara... enfin je me souviens pourquoi cette affiche était si importante pour Sam ;-)
J'aime aussi beaucoup l'oeuvre de Barbara et c'est terrible ce que je vais dire mais j'aime par dessus tout l'entendre chanter dans ce souffle qui lui était si difficile, parfois arraché...
Et Barbara, c'est pour moi comme un cordo ombilical qui m'accroche à ma mère dans l'infini.
Écrit par : Mélusine | 24/11/2006
Mélusine, tes mots me touchent vraiment. Pour moi aussi, Barbara, c'est le cordon ombilical qui me relie à ma "Mutti"...
Écrit par : Katell | 25/11/2006
juste quelques mots...
en sortant de la réunion parents/profs 3ème hier, j'avais le moral dans les chaussettes, tout ça à cause d'un petit délinquant, qu'on nous force à garder en classe parce qu'il n'y a pas de place dans des établissements fermés. cet élève a déjà fait l'objet de plusieurs garde à vue mais il vient en classe comme un héros: parce que les autres en ont peur et qu'ils ne veulent pas l'avoir sur le dos. et que nous répond notre direction: il faut faire avec, vous n'avez ps le choix! super pédagogie! bref, en mettant le contact, j'entends la voix de HFT qui entonne when Maurice meet Alice: et là, tous mes soucis s'envolent, je pense à mon père, je craque, mais au final, en arrivant chez moi, je vais mieux.
Alors encore une fois merci Katell pour le CD, et merci à vous tous pour votre passion!!
Écrit par : sev | 25/11/2006
Bonsoir Sév,
Ah, comme je te comprends! Oui, vraiment, nous avons de plus en plus affaire à des élèves qui n'ont pas leur place au collège, et c'est épuisant de lutter sans cesse et de s'entendre dire qu'il faut faire avec...
Bises.
Écrit par : Katell | 25/11/2006
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