11/05/2007
Topo du 31 mars (suite et fin)
La pensée du jour : "Vermutlich sind Schriftsteller potentielle Selbstmörder, die sich ins Wort retten, um überleben zu können. Wirklich, ich wüsste nicht, wie ich gewisse Situationen im Leben überstanden hätte, wäre es mir nicht gelungen, sie Satz um Satz in Form zu bringen", Luise RINSER.
Suite et fin, donc, de mon topo du 31 mars :
En 2004, Thiéfaine incarne le diable dans L’histoire du soldat, pièce musicale née de la collaboration du poète Ramuz et du compositeur Igor Stravinsky. Ce rôle lui sied diablement bien et lui permet de déployer un autre talent, celui d’un véritable comédien !
Enfin, en 2005, sort l’album « Scandale mélancolique ». Ici, Thiéfaine collabore avec plusieurs représentants de ce que l’on appelle la « nouvelle scène française » : Cali, Elista, Mickaël Furnon de Mickey 3D, ou encore M.
Cet album est celui de la maturité et de la presque soixantaine. La mort plane sur bon nombre de chansons.
« Libido moriendi », qui ouvre le bal, parle clairement de la faucheuse :
« On attend l’ange inquisiteurdans le calme froid de l’aurore
quand les chiens vitreux de la peur
flairent l’odeur sucrée de la mort ».
Ou encore :
dans sa robe de vamp-araignée
et l’acier de son lady-smith
au moment du dernier baiser ».
Ici, l’amour est un « chagrin des glandes », « les joyeux éboueurs des âmes délabrées se vautrent dans l’algèbre des mélancolies », « les morts parlent en dormant et leurs cris oniriques traversent nos écrans vieil écho sibyllin qui bugue entre deux mails avec des mots fusains sous le flou des pastels ». Dans cet album, Thiéfaine contemple son reflet dans la glace et ne s’y reconnaît guère : « Mais mon regard s’efface je suis l’étranger dans la glace ma mémoire s’efface », chante-t-il. « Les matins bleus de sa jeunesse » semblent se noyer complètement dans la brume. Dans cet album d’une beauté déchirante, l’artiste rend également hommage à ses parents, Maurice et Alice. La boucle est bouclée ! A propos de cette chanson-hommage intitulée « When Maurice meets Alice », Thiéfaine dira qu’avec le temps, on n’est plus dans la révolte contre ses parents. Thiéfaine apparaît comme cet homme sur la jetée qui se retourne sur son passé, constate la fuite du temps et se donne le titre non pas de has been, mais de never been…
Pour conclure, j’aimerais me permettre quelques remarques plus personnelles… J’ai découvert l’univers de Thiéfaine en 1992. Depuis, je porte cette œuvre en moi, ou plutôt c’est elle qui me porte. Etrange monde où l’on croise des « mômes kaléidoscopes », des « pauvres petites filles sans nourrice arrachées du soleil », monde d’une poésie un peu décalée, dont les mots cognent parfois avec violence, et, surtout, d’une richesse inépuisable… Si le trait principal qui se dégage de l’univers de Thiéfaine est la mélancolie, une certaine difficulté d’être, pour reprendre les mots de Cocteau, celle-ci n’en est pas moins contrebalancée par des chansons que Thiéfaine qualifie lui-même de récréatives. Il faut, pour s’en imprégner réellement, apprivoiser cette œuvre qui, me semble-t-il, n’a pas d’équivalent dans le paysage musical français.
23:07 | Lien permanent | Commentaires (5)
Commentaires
En deux mots : Bravo et Merci !
Et puis je vais en rajouter quelques uns. Tu m'as fait découvrir Thiéfaine. Oui oui (à ne pas confondre avec l'idole de ta fille), j'ai réellement appris des choses sur sa vie.
a+
Écrit par : petit-jour | 12/05/2007
Coucou Petit-Jour! Merci pour ce commentaire sympa! Ma fille semble avoir délaissé son Oui-Oui pour des admirations plus sérieuses!!! Elle reconnaît l'intro de "Lorelei", elle a rebaptisé "Mathématiques souterraines" (pour elle, c'est tout simplement "la chanson du bébé" parce que "laisse allumé bébé") et Hubert, pour elle, c'est tonton Beu (tu le sais, tu l'as déjà entendue le dire!!). Je trouve que cette appellation est amusante et colle assez bien!!!!
Écrit par : Katell | 12/05/2007
Ce fut un plaisir de "revoir" ta prestation. Merci ;-)
Écrit par : Tommie | 12/05/2007
Pareillement!!
Merci à toi Katell!!
Écrit par : Yoann | 13/05/2007
Je viens de tout relire d'une traite.
Merci encore Cath, c'était un beau moment.
Écrit par : Evadné | 18/05/2007
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