05/05/2007
Topo du 31 mars (suite)
La pensée du jour : "Il pleut sans fin il fera beau bientôt", Paul ELUARD.
1989 marque la fin de la collaboration avec Claude Mairet.
Vient ensuite, en 1990, « Chroniques bluesymentales », album d’une grande richesse, enregistré à New York : dans « Demain les kids », Thiéfaine s’attaque à ceux qui sacrifient les enfants et fusillent les poètes. L’écriture est ciselée et très poétique :
« Les charognards titubent au-dessus des couveuses
et croassent de lugubres et funèbres berceuses
kill the kid
pendant que nos sorcières sanitaires et barbues
centrifugent nos clônes au fond de leurs cornues
kill the kid
dans les ruines de l’école où brûle un tableau noir
une craie s’est brisée en écrivant espoir
kill the kid ».
Dans « Un automne à Tanger », « les vagues meurent blessées à la marée sans lune en venant féconder le ventre des lagunes »…
Dans « Zoo zumains zébus », Thiéfaine déclare :
« Je regarde passer les zumains de ma rue
un peu comme on reluque au zoo les zébus
triés normalisés fonctionnels uniformes
avec leurs initiales gravées sur leurs condoms ».
Coup de gueule contre l’espèce humaine, dont Thiéfaine ne peut pas et ne veut pas s’exclure, ce qui lui fait dire : « 542 lunes et sept jours environ
que je traîne ma carlingue dans ce siècle marron
542 lunes et sept jours environ
et tu vois mon amour je suis toujours aussi con ».
En 1993, c’est « Fragments d’hébétude », qui s’ouvre sur « Crépuscule-Transfert », chanson dont Thiéfaine dira qu’elle aurait pu s’intituler « Sarajevo-Transfert ». Là encore, les gens sont « tristement quotidiens » et se traînent dans leur « normalité baveuse ». Thiéfaine ne s’est pas réconcilié avec la race humaine, au contraire, et il déclare :
« L’horreur est humaine, clinique et banale
enfant de la haine, enfant de la peur
L’horreur est humaine, médico-légale
Enfant de la haine, que ta joie demeure ! »
Cet album est celui de la quarantaine. « Le vent se lève au large des galaxies et je dérêve dérive à l’infini », chante Thiéfaine dans « Animal en quarantaine ». Dans « Les mouches bleues », il avoue : « Peu à peu je vois s’estomper les rêves de mon esprit tordu je commence même à oublier les choses que je n’ai jamais sues ».
Le bleu du « ciel plombé » est « complètement destroyé », le soleil est écorché. « La terre tremble » et il n’est « pas facile d’apprendre à mourir »…
En 1996 et 1998, sortent respectivement les albums « La Tentation du bonheur » et « Le Bonheur de la tentation », le second étant comme l’écho du premier. Ainsi, dans « La Tentation du bonheur », on trouve « 24 heures dans la nuit d’un faune », « Orphée nonante huit », « La philosophie du chaos » et, dans « Le Bonheur de la tentation », «27ème heure : suite faunesque », « Eurydice nonante sept » et « Le chaos de la philosophie ».
Cette fois, Thiéfaine déclare ouvertement sa « haine contre la race humaine », dans le grandiose « Exercice de simple provocation avec 33 fois le mot coupable ».
En 1998, Thiéfaine fête ses 50 ans et, en même temps, ses 25 ans de scène. 25 ans passés loin de tout tapage médiatique. Pourtant, en décembre 98, Bercy (salle pouvant accueillir 17 000 personnes !) affiche complet. C’est la revanche du « vieux désespoir de la chanson française » sur des médias toujours un peu frileux à son égard… A ce sujet, Thiéfaine dira : « Je suis fier d’être mon propre média. Mes fidèles m’aiment pour ça ».
En mars 2001, sort « Défloration 13 », un album qui, comme l’écrit Jean Théfaine, déstabilise beaucoup de gens, en négatif comme en positif. Il est vrai que la première écoute peut dérouter. Mais, très vite, on reconnaît là l’empreinte de Thiéfaine. Cet album est extrêmement audacieux à bien des égards, il fait à présent partie de mes préférés, alors que je n’ai absolument pas accroché au début… Il faut écouter et réécouter cet album aux thèmes très riches : la première chanson, « Une ambulance pour Elmo Lewis », est un hommage à Bryan Jones, fondateur et guitariste des Rolling Stones. « Quand la banlieue descendra sur la ville » présente des accents visionnaires, quand on pense à ce qui devait se passer dix ans plus tard dans les banlieues. « Camélia : huile sur toile » est un hommage à la peinture de Charles Belle. Pour moi, les monuments de cet album sont « Eloge de la tristesse » et « Les fastes de la solitude ».
« Apprends donc à tenir ta laisse t’es pas tout seul en manque de secours la tristesse est la seule promesseque la vie tient toujours », chante Thiéfaine dans « Eloge de la tristesse ».
Le premier couplet de la chanson « Les fastes de la solitude » donne le ton du morceau entier :
« les fleurs de rêve obscur sécrètent de noirs parfums
dans la féerie marbrée des crépuscules forains
théâtre d’harmonies panorama lunaire
aux délicieuses lenteurs de cortège funéraire
où les âmes nuageuses nimbées de sortilèges
s’évaporent dans l’ivresse glacée d’un ciel de neige
banquises phosphorescentes et bleue mélancolie
qui projette ses violons sur d’étranges rhapsodies
aux étranges accords sous d’étranges latitudes
qui te révèlent les fastes de la solitude ».
11:00 | Lien permanent | Commentaires (4)
Commentaires
A moi d'y aller de mon com' :
Bravo pour cette approche personnelle et .... vivement la suite ;-)
Écrit par : Arnaud | 05/05/2007
Ouaip, pareil qu'Arnaud !!!
Salut Arnaud ;-)
Écrit par : Tommie | 06/05/2007
Encore une fois bravo à toi Katell!!!
P.S: tu as un MP sur Planète de ma part!!
Bye!
Écrit par : Yoann | 09/05/2007
Encore un commentaire sur la phrase du jour :
" Pour moi il n'est qu'une saison : la vie* "
* Jean-Pierre Zéni
Écrit par : Le Doc | 10/05/2007
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