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29/11/2007

Strindberg (suite)

0a07eed85151e733ab7a2e42d0ef1fd7.jpgStrindberg, autoportrait.

 

 

En 1876, Strindberg fait la connaissance de la baronne Wrangel, née Siri von Essen, et de son mari, un officier de carrière. La baronne admire Strindberg, car il est auteur dramatique, alors qu’elle-même rêve de monter sur les planches. Celle-ci finira par divorcer, pour épouser Strindberg, le 30 décembre 1877. Les premières années du mariage furent heureuses, semble-t-il. Vers 1880, l’horizon commence à s’assombrir quelque peu, des dissentiments se font jour entre les époux, nous en trouvons les échos dès le drame La Femme de Sire Bengt (1882). Déjà Strindberg prend position contre les thèses d’Ibsen, très favorable à la cause féministe. Strindberg commence à cette époque la publication de récits historiques évoquant le passé national du peuple suédois : Le Peuple suédois. Pour lui, l’histoire de la Suède se confond avec celle des petites gens, dont les souffrances et les sacrifices ne doivent jamais être oubliés. Strindberg met bien vite en péril la popularité que lui valent ces excellents récits. Il publie en effet Le Nouveau Royaume, roman satirique qui ridiculise la société suédoise et les institutions parlementaires récemment instaurées, mais qui contient aussi de désobligeantes (et transparentes) allusions personnelles.

L’équilibre nerveux du poète paraît compromis dès 1883. Sa susceptibilité maladive l’oblige à quitter la Suède et il emmène avec lui sa famille. Il réside d’abord à Grez, près de Fontainebleau, au milieu d’une petite colonie d’artistes scandinaves, puis à Passy, enfin à Neuilly. Il fait de sérieux efforts pour comprendre la vie spirituelle en France et pour apprendre le français de façon plus courante. Il écrit dans diverses revues parisiennes. Nous retrouvons ensuite Strindberg en Suisse romande, à Ouchy, puis à Chexbres. Il publie en 1884 un recueil de nouvelles, Mariés, qui devait soulever des tempêtes ; dans un de ces récits, Strindberg parle en effet irrévérencieusement de la Cène luthérienne. Cité devant un tribunal à Stockholm, Strindberg accepte de comparaître, il se défend fort bien, il est acquitté (17 novembre 1884). Cependant son attitude antiféministe, plus accusée encore dans un second recueil de nouvelles (Mariés II, 1885), inquiète aussi bien son éditeur Bonnier que les écrivains de tendance radicale ou naturaliste de la « Jeune Suède ». Jusqu’alors penseur de tendance humanitaire, respectueux du Christ et de son enseignement, en dépit de certaines incartades, croyant en Dieu, Strindberg évolue ensuite rapidement et de façon déconcertante pendant ces années d’épreuves ; nous le trouvons d’abord radical, se rapprochant des frères Brandès (les pontifes du radicalisme danois et scandinave), affichant son athéisme, proclamant sa foi en la Science, désireux de faire œuvre positive, plutôt que de briller par son imagination (assez rapidement, vers les années 90, il tendra vers un aristocratisme intellectuel, s’éloignant alors du socialisme). Pour manifester sa ferveur positiviste, il se met à rédiger ses confessions ; c’est l’année 1886 qui voit paraître Le Fils de la servante et Fermentation, suivis de La Chambre rouge et de l’Ecrivain ; il entreprend en 1886 également un voyage d’études en France, pour approcher de plus près les travailleurs de nos campagnes (Au milieu des paysans français, 1889). De plus en plus instable, le poète change perpétuellement de résidence ; c’est sur les bords du lac de Constance que, pris de nostalgie pour l’archipel stockholmien, il écrit un de ses meilleurs romans, Les Habitants de Hemsö, c’est là aussi qu’il compose Père, et il oblige sa femme et ses enfants à partager sa vie errante et incertaine. L’harmonie a cessé progressivement de régner au sein d’une famille qui semble avoir connu environ sept années de bonheur. L’athéisme et l’antiféminisme agressifs de Strindberg choquent Siri. Elle regrette que son mari ne l’ait pas laissée poursuivre une carrière d’actrice, sur laquelle elle fondait les plus grands espoirs. Strindberg qui, e ce temps, selon les dires de certains psychiatres, traversait une crise de type paranoïaque, détestait plusieurs personnages dans l’entourage de sa femme, notamment cette Marie David qui, d’après lui, incarnanit le féminisme dans ce qu’il a de plus funeste, et qui servit de modèle au personnage d’Abel dans Les Camarades. Il suspectait Siri, persuadé qu’elle le trompait. C’est dans cette atmosphère de suspicion et de combat que furent conçus et créés les chefs –d’œuvre dramatiques de l’époque naturaliste, Père, Mademoiselle Julie, Créanciers, et toute une série de pièces en un acte, en particulier Le Lien et La Plus Forte.

 

(à suivre)

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