29/08/2009
Méthode de dissection : La tentation du bonheur
La pensée du jour : "Le désespoir est une forme supérieure de la critique. Pour le moment, nous l'appellerons bonheur". Léo FERRE.
Année de parution : 1996
Titres :
24 heures dans la nuit d'un faune
Critique du chapitre 3
La nostalgie de Dieu
Orphée nonante huit
Tita dong-dong song
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Une pochette sobre pour cet album. Devant, on voit Thiéfaine, tout de blanc vêtu. L'attitude est rêveuse, les traits de l'artiste plutôt reposés. Derrière, le voilà vêtu de noir, debout, appuyé contre un mur. A l'intérieur du livret, on découvre de jolis clichés : Thiéfaine avec sa guitare, souvenir de l'enregistrement des cordes à Abbey Road, Hugo et Lucas, quelques feuilles noircies de l'écriture de Thiéfaine, etc.
Le livret s'ouvre sur ces mots puissants de Ferré : « Le bonheur ça n'est pas grand-chose... c'est du chagrin qui se repose ». Histoire de bien rappeler que le bonheur, s'il daigne parfois visiter nos vies, n'est qu'un pont fragile entre deux abîmes... D'emblée, on sait que l'optimisme n'est toujours pas, malgré le titre, du monde de Thiéfaine...
De toute façon, la première chanson (« 24 heures dans la nuit d'un faune », et l'on songe à « L'après-midi d'un faune », poème de Mallarmé qui fut mis en musique par Debussy), la première chanson, donc, malgré la musique plutôt enjouée, n'est pas fondamentalement gaie ! Thiéfaine se demande, dans un premier temps, si les morts s'amusent autant que les vivants, puis, à la fin, la question dérive vers une interrogation plus grave : les morts s'ennuient-ils autant que les vivants ? Les morts se sentent-ils aussi seuls que les vivants ?
Vient ensuite la critique du chapitre 3. Vous connaissez tous ce texte du livre de l'Ecclésiaste dans lequel il est dit, en substance, qu'il y a un temps pour tout (j'ai déjà mis ce texte ici, il y a longtemps). Notamment, comme le rappelle l'exergue, « un temps pour aimer et un temps pour haïr, un temps de guerre et un temps de paix ». Au court temps d'amour, Thiéfaine oppose celui, bien plus long, de la haine... « Pour un temps d'amour, tant de haine en retour ». Une grande chanson, une sorte de prolongement de « Crépuscule-transfert ». Ainsi l'allusion aux ruines de Bosnie, ainsi ces mots : « Qu'est-ce que la planète terre
dans l'oeil d'un rat maudit ? », mots qui en rappellent étrangement d'autres : « A quoi peut ressembler ton spleen, ton désespoir et ton chagrin
Vus d'une des étoiles anonymes
de la constellation du chien ».
Une chanson lourde de colère, de tristesse, une de mes préférées sur cet album.
Ensuite, « La nostalgie de Dieu » nous répète inlassablement que Dieu est amour. Mais ici, l'amour n'est pas un sentiment noble, non, c'est d'amour physique qu'il est question : « God is sex machine » (on appréciera le glissement de « deus ex machina » vers « deus sex machine » !!). « God gode ! » Thiéfaine joue sur les mots et se laisse entraîner dans une jubilatoire série de blasphèmes en tous genres : « Dieu est un drôle de mec », « Jésus change le beurre en vaseline » !!!
« Orphée nonante huit » (et ce titre, le nom d'un personnage de la mythologie grecque associé à un nombre, n'est pas sans rappeler, à mon avis, Amphitryon 38, de Giraudoux) est la quatrième chanson de l'album. Je me souviens de Thiéfaine présentant ce morceau en concert : « Ce con d'Orphée n'a pas pu s'empêcher de se retourner », dira-t-il (ou un truc dans le genre !) Belle mélodie, belles paroles. Une chanson qui se boit comme du petit-lait, tranquille.
Puis, c'est « Tita dong-dong song », dont le refrain est constitué en grande partie d'amusantes onomatopées empruntées à Lucas. Après les paroles de la chanson, dans le livret, on trouve un « Tita dong-dong song glossaire » ! Une chanson dont la musique est terriblement empreinte de mélancolie...
« Moi j'écoute ton sommeil
et j'étudie tes rêves
et je n'suis plus pareil
quand le soleil se lève »... Conclusion puissante de ce grand cri d'amour !
La suite pour bientôt...
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