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14/11/2010

Chanson n°38 : "Exil sur planète-fantôme".

La pensée du jour : "La vérité, ce n'est pas un trou dans la terre. La vérité, c'est l'infini d'amour parfois reçu dans cette vie quand nous n'avions vraiment plus rien". Christian BOBIN.

 

Exil sur planète-fantôme

 

en ce temps-là les fleurs vendaient leur viande aux chiens

et nous habitions tous de sordides tripots

avec des aiguillages pour nos petits matins

quand le beau macadam nous traitait de salauds

nous traitait de salauds

nous vivions nos vertiges dans des vibrations folles

et gerbions nos enzymes en nous gueulant : moteur !

mais entre deux voyages entre deux verres d'alcool

nous n'avions pas le temps de décompter nos heures

de décompter nos heures

nous étions les danseurs d'un monde à l'agonie

en même temps que fantômes conscients d'être morts-nés

nous étions fossoyeurs d'un monde à l'agonie

 

en ce temps-là le rien s'appelait quotidien

et nous allions pointer dans les jobs interdits

dans les musiques blêmes dans les sombres parfums

dans les dédales obscurs où plane la folie

où plane la folie

et nous avions des gueules à briser les miroirs

à ne montrer nos yeux que dans le contre-jour

mais entre deux délires entre deux idées noires

nous étions les plus beaux nous vivions à rebours

nous vivions à rebours

nous étions les danseurs d'un monde à l'agonie

en même temps que fantômes conscients d'être morts-nés

nous étions fossoyeurs d'un monde à l'agonie

 

en ce temps-là les gens s'appelaient citoyens

nous, nous étions mutants nous étions androgynes

aujourd'hui la tempête a lynché mes copains

et je suis le dernier à rater mon suicide

à rater mon suicide

mais je veux vivre encore plus ivre de cramé

je veux ronger le mal jusque dans ses recoins

j'ai traîné mes vingt siècles d'inutilité

je n'ai plus rien à perdre mais j'en veux pour ma fin

j'en veux pour ma faim

 

 

 

Il y a quelques semaines, j'avais eu l'idée de noter ici une chanson par jour. Pour patienter jusqu'au nouvel album. A l'époque, je ne savais pas du tout quand ce nouvel album sortirait. A présent, nous savons qu'il est prévu pour février 2011. Ce matin, je me suis lancée dans des calculs d'apothicaire : il y a 153 chansons en tout (si je compte « Amicalement blues » et « Annihilation »). Jusqu'au 7 février, date possible pour la parution de l'album tant attendu, il y a encore 85 jours ! Donc, j'aurai quelques chansons de retard !! Sans compter que je ne suis pas très assidue ici. La semaine dernière, par exemple, j'ai été trop chamboulée par les nouvelles qu'on nous a annoncées. Impossible alors de parler d'autre chose que de ces belles perspectives ! Bref, autant dire que mon truc ne marchera jamais. Par avance, je réclame votre indulgence. Je me suis lancée là-dedans pour « meubler », j'avoue (là encore, indulgence, s'il vous plaît !). Parce qu'il n'y avait pas de nouvelles croustillantes à se mettre sous la dent. Parce que je pensais que vous pourriez réagir à ces chansons, me dire quelles réflexions ou quelles émotions elles vous inspiraient. Continuons à le faire, si vous voulez bien, mais soyez déjà certains qu'il y aura des jours où je vais merder. Où je n'écrirai rien ici. D'avance pardon. Je n'aime pas ne pas tenir mes promesses...

Hier, avec tout ça, je ne vous ai pas dit que « Dernières balises (avant mutation) » était certainement l'album qui me bousculait le plus. « Une fille au rhésus négatif » m'a toujours fait froid dans le dos : entre le rat en laisse, les cafards, l'aiguille qui s'enfonce dans la peau, les bébés qui tombent du lit en lisant « Mein Kampf », on est servi ! C'est l'histoire d'un mauvais trip ou quoi ? Que de visions d'horreur ! Une chanson qui, il y a longtemps, lorsque je l'ai découverte, fit grande impression sur mon âme de 19 ans. J'en avais des frissons partout, j'imaginais toute la scène : le rat en laisse, Berlin, les œufs durs, l'aiguille (j'ai trop lu le bouquin de Christiane F. !!!), le téléphone sur la tombe. Visions hautement perturbantes ! Aujourd'hui encore, cette chanson me fait un effet incroyable. « Photographie-tendresse » aussi, d'ailleurs.

Je ne vois rien de négatif dans tout cela. Certains œuvres peuvent effrayer et fasciner à la fois. Je me demande même si ce ne sont pas celles qui nous marquent le plus. Je me souviendrai toujours d'un bouquin de Marlen Haushofer, Die Wand, qui raconte l'histoire d'une femme qui soudain se trouve coupée du monde, enfermée derrière un mur invisible et infranchissable. Pendant la lecture, j'avais parfois la sensation d'étouffer, carrément. Je me sentais prisonnière aussi, comme la narratrice. En repensant à ce livre, je ressens encore cela de manière très forte...

Quant à « Exil sur planète-fantôme », c'est également une chanson à la fois effrayante et fascinante, vous ne trouvez pas ? « Nous avions des gueules à briser les miroirs, à ne montrer nos yeux que dans le contre-jour ». « Et je suis le dernier à rater mon suicide », de quoi flipper encore !! Et la fin, donc ! Terrible ! « J'ai traîné mes vingt siècles d'inutilité, je n'ai plus rien à perdre mais j'en veux pour ma fin, j'en veux pour ma faim »... Sa faim ? Tiens, je croyais qu'Hubert l'avait laissée chez la famille Duraton !

Commentaires

Je vous remets le torse d'Hubert en grand, c'est plus fort que moi !

Écrit par : Katell | 14/11/2010

Ce qu'il faut noter dans ce texte, surtout, c'est le passage du "nous" au "je" tout comme dans "les dingues et les paumés", on passe du "ils" au "je", comme si le canteur se désolidarisait du monde qu'il évoque. Il en a fait partie, puisque "nous" c'est moi plus les autres, mais l'eros finit par l'emporter sur le thanatos. Et puis il y a cette référence chrétienne aussi qui interpelle. Vingt siècles d'inutilité c'est deux mille ans, soit, en 1981, la période chrétienne (ou peu s'en faut). Ce qui renvoie aussi à "taxiphonant d'un pack de kro" qu'évoque Katell puisqu'il y dit qu'ça "fait bientôt deux mille ans qu'j'ai plus faim". En rejoignant les deux, on s'aperçoit que la faim laissée chez les Duraton, concerne une envie de vivre plus forte que tout, une volonté de faire quelque chose d'utile. Maintenant, cette inutilité, est-elle liée à la religion ? Cette hyperbole (vingt siècles d'inutilité) ou cette autre (deux mille ans qu'j'ai plus faim), lancent sur l'idée d'une volonté d'exagérer la situation, mais n'est-ce pas un leurre ? Affaire à suivre ...

Écrit par : LeGrizzly | 14/11/2010

Sinon, Katell, comptes-tu aussi les chansons écrites pour Paul Personne et Maïdi Roth ?

Écrit par : LeGrizzly | 14/11/2010

Cela dit je partage aussi ton ressenti vis à vis de cet album qui m'a aussi filé un grand coup de poing dans l'estomac. Mais j'ai plus été marqué par "scènes de panique tranquille".

Écrit par : LeGrizzly | 14/11/2010

Cette chanson compte sans doute parmi les plus noires, les plus désespérées... Et parmi mes préférées.
" Dans les musiques blêmes, dans les sombres parfums "... Katell, est-ce que t'entends ce que je vois ? ;-)

Écrit par : Evadné | 14/11/2010

Elle est très noire cette chanson , très dure ... une de mes préférées sur Dernières Balises
En l'écoutant , on a l'impression d'être au milieu de la nuit dans une sombre ruelle trempée de pluie ...

Écrit par : loreleï2 | 14/11/2010

@Grizzly : non, je ne comptais pas mettre les chansons écrites pour Paul Personne et Maïdi Roth. Cela dit, si vous (je veux dire : vous, les visiteurs de ce blog) souhaitez les voir ici pour les commenter, faites-moi signe !

Écrit par : Katell | 15/11/2010

Y'a aussi celle écrite pour Kerplunk ...

Écrit par : loreleï2 | 15/11/2010

Ah oui, Lorelei, c'est vrai, j'avais oublié ! C'est cette chanson dont les paroles sont presque incompréhensibles, non ?!!! Je crois que je l'ai entendue une fois et qu'il me fallait tendre l'oreille pour percevoir trois mots !!!!

Écrit par : Katell | 15/11/2010

Euh ... la musique est bien mais la voix ... c'est inécoutable !
Heureusement que les textes d' Hubert peuvent se lire sans le son !

Écrit par : loreleï2 | 15/11/2010

Une de mes préférées ! g dû l'écouter en boucle à une période de ma vie où j'avais une gueule à briser les miroirs tellement je ne décomptais pas mes heures... La mutation c plutôt bien passée, je ne suis toujours pas citoyenne mais si j'ai encore faim c peut-être parce que grace à Thiéfaine je ne me suis plus jamais sentie seule. Ou, si ça m'arrive encore parfois, je sais à quoi je dois me droguer pour aller mieux.

Écrit par : nath | 18/11/2010

Les commentaires sont fermés.