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23/12/2018

Charles Cros

"Il faut s'y résigner : il y a toujours à tout une explication scientifique. On peut évidemment se réfugier dans la poésie, se lier d'amitié avec l'océan, écouter sa voix, continuer à croire aux mystères de la nature. un peu poète, un peu rêveur..." Romain GARY

 

En 2015, Thiéfaine recevait le Grand Prix de l'Académie Charles Cros. Retrouvant hier soir, sur le site officiel, les traces de cette distinction, je me suis dit : « Charles Cros, c'était un poète, je me souviens avoir lu, il y a longtemps, quelques lignes sur lui dans ma grande Anthologie de la Poésie française, mais qu'a-t-il écrit au juste ? Qui était-il ? ». Et voilà que l'idée m'est venue de la note qui va suivre.

 

CROS, Charles Hortensius Émile :

Poète français. Né le 1er octobre 1842 à Fabrezan (Aude), mort à Paris le 9 août 1888. Fils d'un instituteur de Narbonne, Charles Cros fit des études d'autodidacte, avec une prédilection marquée pour les sciences ; à quatorze ans, il passait son baccalauréat. Au même âge il était déjà capable d'enseigner le sanskrit et l'hébreu. Entré en 1860 comme répétiteur et professeur de chimie à l'Institut des Sourds-Muets, il s'en vit une première fois renvoyé en 1862, à la suite d'un duel entre son frère et un employé de l'établissement, puis il fut repris, puis définitivement exclu en 1863. Il se replongea alors dans l'étude pendant plusieurs années, et présenta à l'Exposition Universelle de 1867 un télégraphe automatique de son invention. Peu après, devenu l'amant de la mondaine Nina de Villard, il rencontra dans son salon les principaux poètes parnassiens, mais se lia particulièrement avec François Coppée, Verlaine et Villiers de l'Isle-Adam. C'est dans L'Artiste qu'il fit ses débuts littéraires. En 1871, des poèmes de lui figurèrent dans le recueil du deuxième Parnasse contemporain, mais en 1876 le troisième Parnasse refusa de l'accueillir ; à cette date Leconte de Lisle avait déjà refusé de recevoir Charles Cros, lequel, en orientaliste érudit, avait été rapidement irrité par ce qu'il appelait les « poses philologiques déplacées » des parnassiens. En octobre 1871, il avait fait la connaissance de Rimbaud et l'avait hébergé quelque temps ; leur entente, pourtant, ne dura guère, et lors de la fuite du jeune homme et de Verlaine en Belgique, Charles Cros prit parti pour madame Verlaine et rompit complètement avec les deux poètes. De la fréquentation de Verlaine, il allait cependant garder jusqu'à sa mort le goût d'une vie irrégulière, des stations dans les cafés, des apéritifs. On le vit fréquenter à peu près tous les groupes de la bohème littéraire des années 1872-85 : le groupe des « Vivants » où il rencontrait Richepin, Ponchon Bouchor et Germain Nouveau ; le café de la Nouvelle-Athènes où il retrouvait Alexis, Duranty, Catulle Mendès, Huysmans et Manet, qui allait devenir son ami intime ; les « Hydropathes » dont, en 1878, il fut un des fondateurs, le cercle du Chat noir, celui des « Zutistes » qu'il anima avec Alphonse Allais. Ainsi devint-il peu à peu une sorte de célébrité du Paris littéraire anecdotique, un personnage burlesque boute-en-train ; seulement, en dépit de l'admiration d'artistes comme Manet, Gustave Kahn, Laforgue, le plus profond Charles Cros, le poète de l'absurde et de la solitude qui s'était exprimé dans Le Coffret de santal, Le Fleuve, La Science de l'amour, La Vision du Grand Canal Royal des Deux Mers restait complètement méconnu et même ignoré. Le chercheur scientifique aux vues anticipatrices souvent géniales, l'inventeur avait connu la même malchance : son mémoire concernant « la description d'un procédé d'enregistrement et de reproduction des phénomènes perçus par l'ouïe », procédé que Cros appelait « paléophone », mais qui n'était autre que le premier phonographe, après avoir suscité quelques articles pendant l'automne de 1877, devait être rejeté dans un oubli complet lorsque, au mois de mai suivant, Edison eut présenté son premier appareil à l'Académie des Sciences. Quant au poète, bien qu'on ait donné en 1908 une édition de ses derniers vers sous le titre Le Collier de griffes, il ne devait avoir sa revanche posthume que grâce aux surréalistes qui, en 1923, le célébrèrent comme l'un de leurs inspirateurs. On a publié en 1954 une édition complète de ses œuvres.

 

Michel MOURRE, Dictionnaire des Auteurs de tous les temps et de tous les pays, Éditions Robert Laffont.

 

 

Et voici un poème de Charles Cros :

 

Sonnet astronomique

 

Alors que finissait la journée estivale,

Nous marchions, toi pendue à mon bras, moi rêvant

À ces mondes lointains dont je parle souvent.

Ainsi regardais-tu chaque étoile en rivale.

 

Au retour, à l'endroit où la côte dévale,

Tes genoux ont fléchi sous le charme énervant

De la soirée et des senteurs qu'avait le vent.

Vénus, dans l'ouest doré, se baignait triomphale.

 

Puis, las d'amour, levant les yeux languissamment,

Nous avons eu tous deux un long tressaillement

Sous la sérénité du rayon planétaire.

 

Sans doute, à cet instant, deux amants, dans Vénus,

Arrêtés en des bois aux parfums inconnus,

Ont, entre deux baisers, regardé notre terre.