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18/09/2010

Réflexions en vrac sur "Critique du chapitre 3" et "Des adieux"

La pensée du jour : "Combien d'êtres chers, partis à l'aube de notre affection, nous laissent inassouvis ?" Fatou DIOME.

 

 

Hier, « avec un sacré mal de vivre, je me disais : je ne sais pas pourquoi je vais comme un bateau ivre »... Dans ces cas-là, un seul remède : me noyer dans les mots de Thiéfaine. Plonger dans cette somptueuse poésie, me sentir accompagnée dans les eaux glaciales de ma sombre détresse.

Machinalement, hier soir, j'ai pris « La tentation du bonheur », sans doute parce que cette tentation m'a titillée plus d'une fois, pour finalement me laisser en rade, systématiquement.

Quand on va clopin-clopant, écouter cet album peut s'avérer extrêmement dangereux ... ou salutaire, c'est selon. Pour ma part, j'ai déjà dit mille fois que le désespoir de Thiéfaine ne me faisait même pas peur ! Bien au contraire, il me permet de mieux digérer le mien. Bref...

Sur cet album, plus dangereux que tout le reste, deux morceaux : « Critique du chapitre 3 » et « Des adieux ». « Critique du chapitre 3 (du livre de l'Ecclésiaste) », c'est évidemment une référence biblique. J'ai déjà mis ce texte de l'Ecclésiaste ici. Petite piqûre de rappel :

« Il y a un temps pour tout, il y a un moment pour chaque chose sous les cieux :

Il y a un temps pour naître et un temps pour mourir;

Un temps pour planter et un temps pour arracher ce qui a été planté;

Un temps pour tuer et un temps pour soigner;

Un temps pour démolir et un temps pour bâtir;

Un temps pour pleurer et un temps pour rire », etc.

A lire ces mots de l'Ecclésiaste, on pourrait croire qu'il existe un bel équilibre entre tous ces différents moments. Que le temps passé à pleurer est égal à celui passé à rire. Or, « Critique du chapitre 3 », cela donne déjà le ton, cela annonce le thème de la chanson. C'est qu'Hubert-Félix n'est pas d'accord. Et il le dit : « Pour un temps d'amour, tant de haine en retour ». « Critique du chapitre 3 », donc, pour dire que s'il y a bel et bien un temps pour l'amour et un autre pour la haine, les proportions ne sont pas les mêmes, il y a maldonne. Chanson-cri, cri de révolte, cri de colère.

Deuxième danger de cet album, donc, « Des adieux ». Pas vraiment de révolte cette fois-ci, plutôt un simple constat : notre vie est faite d'adieux. Et même si l'on finit « toujours par noyer son cafard dans un taxi-dancing ou dans un topless-bar », il n'en reste pas moins vrai que notre condition, c'est avant tout le désespoir... Cela me fait penser à Jean d'Ormesson, que je suis allée écouter avec ferveur cet après-midi à l'Hôtel de Ville de Nancy. Et j'ai retenu, entre autres, cette phrase : « Il faut prendre avec gaieté cette situation désolante dans laquelle nous nous trouvons ». Cette situation désolante, à savoir la vie. « Et les noires sentinelles drapées dans leurs guérites

n'ont plus besoin d'antennes-paraboles-satellites

pour capter le chagrin à son extrême limite »...

 

Désolée, je ne suis guère en forme depuis quelques semaines, quelques mois, quelques années, je ne sais plus très bien. De deux choses l'une : soit je me mure dans le silence, cessant d'alimenter ce blog, ne restant pas, contrairement à Hubert, ouverte pendant les travaux, soit je viens ici déposer un peu de mon fardeau, de ma mélancolie, de mon mal-être... Au risque de vous lasser, au risque de vous chasser. Je ne sais pas très bien quelle solution il convient de choisir. Mais je sais que, pour ce qui est du « registre de mes plaies », le meilleur Mercurochrome restera toujours cet univers thiéfainien dont je me sens la frangine d'infortune, celle qui habite « rue des amours lynchées », tout près des dingues et des paumés... D'ailleurs, dingue et paumée, ne le suis-je pas un peu moi-même ?

Commentaires

Cit. de Cath. :

" Au risque de vous lasser, au risque de vous chasser.. "

... Dans la vie.. , et surtout lorsque l'on s'y engagée ( Clara et Louise ) on se doit d'assumer la continuité de la transmission de cet engagement.

... Alors comme il est inconfortable d'être assis le cul entre deux chaises il faut se donner les moyens de son confort, au-delà de la réalité existensialiste, se relever et avancer.

... J'ai relu la biographie d'Emile Coué qui fût entre autres pharmacien à Toul, et au final un retour à une approche simple et courageuse de la vie est salutaire.

... Il faut arrêtre la culture d'un surplus de pathos pour garder son énergie pour le réel de la vie !...

Bon courage Cath. , Bises.

Écrit par : Le Doc. | 18/09/2010

, de Cath. :

" .. soit je me mure dans le silence, cessant d'alimenter ce blog, ne restant pas, contrairement à Hubert, ouverte pendant les travaux.. "

, de part ta profession tu sais Catherine qu'il est difficile de transmettre, toutefois dans la capacité à transmettre il ne faut exclure sa propre capacité à recevoir !...

, chaque personne se devrait d'être en travaux permanents tout en restant ouvert. En ce qui concerne Hubert.. , il n'est pas beaucoup ouvert pendant ses travaux. Dans une interview il disait qu'il n'aimait pas s'encombrer avec la pensée des autres.. , il interprète pourtant admirablement " Pensée des morts " !...

, le besoin de mémoire ne doit exclure la pensée de celles et ceux qui sont encore vivants.. ;

Écrit par : Le Doc. | 20/09/2010

Aux leçons prétentieuses de J'ean d'Ormesson, je répliquerais par une citation d'un entraineur de foot : "Aux problèmes complexes, il y a toujours des solutions simples... qui ne sont jamais les bonnes!"

Voilà ça c'était pour en finir avec ces vieux cons qui vivent à nos crochets en nous donnant des leçons alors qu'ils ont très largement contribué à rendre la situation aussi désolante... C'est facile de se la jouer détaché alors que toute ta vie tu t'es gavé en bouffant à tous les rateliers.

Mais je m'écarte du sujet...

Ce que je n'arrive pas à comprendre très bien (avec les informations très parcellaires dont je dispose sur toi et ta situation) c'est comment quelqu'un d'aussi cultivé que toi, ne parviennes pas à prendre un peu plus du recul... Je ne parle pas d'un évènement particulier (sur celui qui t'as frappé récemment il n'y a aucun recul à prendre, juste la douleur et la peine) mais sur la situation "globale"...
Si tu sens qu'il t'est nécessaire pour toi de faire un break et bien fait le... je ne vois pas qui pourrait te le reprocher (enfin au sein de notre petite communauté d'internautes thiéfainistes)...
Les anciens (les vrais, pas les fossiles précédemment visés) s'accordaient des périodes "dédiées" au deuil. Ils s'accordaient une période où ils exprimaient entièrement leur chagrin ce qui faisait qu'une fois la période finie, la vie "reprenait son cours"....
Dans notre société moderne, nous niions totalement la mort... pour mieux nous la prendre dans la gueule à chaque fois et je pense malheureusement que cela va être de pire en pire... en ne respectant pas la mort, nous niions de fait la vie...





J'ai perdu une être très cher le 10 janvier 2010... je ne m'en suis pas remis et elle me manquera toujours, mais je sais depuis ce jour que ma place est parmi les vivants...

La bise,
Boub'

Écrit par : boub' | 20/09/2010

Bien incapable de t'aider Cath , étant donné mon état , mais sache que si ton blog t'apporte , il m'apporte aussi , et je suppose que je ne suis pas la seule ...

Écrit par : loreleï2 | 20/09/2010

Cit. de Boub' :

" J'ai perdu une être très cher le 10 janvier 2010... je ne m'en suis pas remis.. "

On n'en se remet jamais mais beaucoup on besoin de se contruire " aussi " de cette réalité là et ce " aussi pour l'autre ".

Pour donner du sens à sa vie il faut " aussi " donner du sens à la vie de l'autre en ne devenant pas fossile de son vivant, car au final nous serons nous "aussi " des fossiles !...

Écrit par : Le Doc. | 20/09/2010

je viens souvent sur votre blog que j'ai connu grâce à Jamait..
vous avez un grand coeur ne baissez pas les bras...

Écrit par : Jean-pierre | 20/09/2010

Il y a même des personnes qu'on a pas encore perdues et dont on ne se remet pas ...

Écrit par : loreleï2 | 21/09/2010

Bonsoir,
« Critique du chapitre 3 » voilà un texte suscitant une particulière attention. D’autant qu’il précède une chanson « la nostalgie de Dieu » dont j’ahane à cristalliser la genèse : hommage ludique ou règlements de compte ?
Quoiqu’il en soit j’aurai rêvé assister à l’interprétation de ce titre en « live » : le public de Thiéfaine reprenant « Dieu est Amour » : ça aurait valu le déplacement !
La phrase « pour un temps d’amour, tant de haine en retour » placée dans le refrain de ce « critique du chapitre 3 » est peut-être aussi à rapprocher de cet utopique défi « si tu aimes celui qui t’aime, quel mérite as-tu ? Aime celui qui te déteste… » Combien pèsent les paix durables, les bienveillances mutuelles et fraternelles et la fragilité des coccinelles face à ces fardeaux de génocides invraisemblables où nos semblables s’enorgueillissent d’une cruauté qu’ils se plaisent à célébrer en « hymne national »… !!!
Force est de constater que les tolérantes attitudes magnanimes véhiculées par des « sages »aux espoirs d’humanité oecuménique n’ont qu’une portée relative et insignifiante face à cette appétence d’agressivités, d’ambitions dominantes et d’égoïsmes assumés éclaboussant ces humaines poupées d’argile enluminées (ou pas) de halo divin… « …les dieux sont pas très bavards… ».
J’apprécie aussi beaucoup ce coté dérisoire voire minimaliste évaluant nos vies de terrien et résultant de certains passages de cette chanson « que représente la planète terre dans les yeux d’un rat maudit ») et de « sentiments numériques » (« …4 milliards de versions différentes du réel… ») du même album.
Lesté d’un vécu ombrageux, d’expériences sulfureuses, Hubert-Félix, ce
« rodeur » des confins livrait alors un album apaisé parce que plus relatif et moins absolu. Si l’humain y est quelquefois égratigné (même par un orang-outan), il n’est jamais dénigré mais plutôt analysé par le prisme de ses travers anecdotiques (alcool, télé, religion…).Et puis même la solitude, vécue et décrite par le biais de tournures elliptiques plus communicatives et fédératrices (emploi fréquent du « nous ») rend la proximité de Thiéfaine avec son public plus évidente et plus palpable que sur d’autres albums.
Quant « aux adieux » inévitablement l’idée de la mort flirte le fil de ces vers…et si cette fidèle et invisible compagne est si souvent présente chez Hubert, à titre personnel cela m’a permis de la rendre plus familière ,donc moins flippante et au final de m’en accommoder.De toute façon peut-on faire autrement ?…
A une certaine époque (volcano-acnéique) je tentais d’approcher cet ultime instant alors un peu trop idéalisé en passerelle pour onirique au-delà ; en retenant ma respiration le plus longtemps possible, j’enrayais une fascination équivoque. Ce n’était pas une tentative de suicide, juste ressentir l’asphyxie des derniers instants…pour voir. Heureusement pour moi et ma santé les découvertes de Thiéfaine et des poètes maudits m’ont permis d’appréhender d’autres accointances avec, ce qui demeure pour moi, le plus grand des mystères…
Boub insiste sur l’évacuation rapide de la mort dans notre société et j'adhére à son argumentation. Les cimetières se situent souvent en périphéries des villes, nous mourrons rarement chez nous, bref la mort où est-elle, on ne la voit pas. Pourquoi donc s’étonner d’en avoir si peur et d’être si démuni lorsqu’on la côtoie plus intimement ?
Et puis l’inanité de lieux communs du langage oral dévoie la Vérité de ces moments importants de…Vie. Je m’explique : par exemple à force d’être serinées par automatisme et tradition « séculaire »certaines expressions subsistent comme si elles correspondaient à une réalité incontournable : « faire le deuil » me semble emblématique de cette propension à résumer le contre-coup de la perte d’un proche.
Dans une émission lui étant consacrée Roland Giraud s’insurgeait « faire le deuil qu’est-ce que ça veut dire faire le deuil, encore une expression capitaliste, moi je n’ai pas envie de faire le deuil » il parlait de sa fille assassinée.
Effectivement réflexion faite je ne sais pas ce qu’on entend vraiment par « faire le deuil » mais si c’est se résigner à être privé de quelqu’un je m’emploierai à ne plus utiliser une expression dont le sens se dévoile si antinomique à un ressenti personnel foncièrement différent. Et puis le mot capitaliste a été bien choisi dans le sens où le système n’est jamais rassasié : toujours produire, consommer vite, enchainer, alors que mourir c’est s’arrêter, échouer et s’échouer « Vanitas vanitatum, et omnia vanitas » tiré de… l’Ecclésiaste ! Mais l’infini mystère de la mort ne contribue pas à développer un intérêt très populaire et très compatible avec ce monde de l’éphémère et de la célérité…
« C’est comment qu’on freine » chantait Baschung…moi j’aime bien revoir mes chers disparus sur l’autel de mes pensées enrobées de tendresse …
A notre grand-mère
Amitiés

Écrit par : alfana | 22/09/2010

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