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20/11/2010

Chanson n°44 : "Les dingues et les paumés" + petite note sur Lautréamont

La pensée du jour : "En descendant du grand au petit, chaque homme vit comme un sauvage dans sa tanière, et en sort rarement pour visiter son semblable, accroupi pareillement dans une autre tanière. La grande famille universelle des humains est une utopie digne de la logique la plus médiocre". LAUTREAMONT.

           

 

Les dingues et les paumés

Les dingues et les paumés jouent avec leurs manies

dans leurs chambres blindées leurs fleurs sont carnivores

et quand leurs monstres crient trop près de la sortie

ils accouchent de scorpions et pleurent des mandragores

et leurs aéroports se transforment en bunkers

à quatre heures du matin derrière un téléphone

quand leurs voix qui s'appellent se changent en revolvers

et s'invitent à calter en se gueulant come on

 

les dingues et les paumés se cherchent sous la pluie

et se font boire le sang de leurs visions perdues

et dans leurs yeux-mescal masquant leur nostalgie

ils voient se dérouler la fin d'une inconnue

ils voient des rois-fantômes sur des flippers en ruine

crachant l'amour folie de leurs nuits-métropoles

ils croient voir venir Dieu ils relisent Hölderlin

et retombent dans leurs bras glacés de baby-doll

 

les dingues et les paumés se traînent chez les Borgia

suivis d'un vieil écho jouant du rock'n roll

puis s'enfoncent comme des rats

dans leurs banlieues by night

essayant d'accrocher un regard à leur khôl

et lorsque leurs tumbas jouent à guichets fermés

ils tournent dans un cachot avec la gueule en moins

et sont comme les joueurs courant décapités

ramasser leurs jetons chez les dealers du coin

 

les dingues et les paumés s'arrachent leur placenta

et se greffent un pavé à la place du cerveau

puis s'offrent des mygales au bout d'un bazooka

en se faisant danser jusqu'au dernier mambo

ce sont des loups frileux au bras d'une autre mort

piétinant dans la boue les dernières fleurs du mal

ils ont cru s'enivrer des chants de Maldoror

et maintenant ils s'écroulent dans leur ombre animale

 

 

les dingues et les paumés sacrifient Don Quichotte

sur l'autel enfumé de leurs fibres nerveuses

puis ils disent à leurs reines en riant du boycott

la solitude n'est plus une maladie honteuse

reprends tes Walkyries pour tes valseurs maso

mon cheval écorché m'appelle au fond d'un bar

et cet ange qui me gueule viens chez moi mon salaud

m'invite à faire danser l'aiguille de mon radar

 

Un petit mot sur le comte de Lautréamont :

Qui était Isidore Ducasse, passé à la postérité sous le pseudonyme de comte de Lautréamont ? On ne sait pratiquement rien sur l'auteur des Chants de Maldoror.

Isidore Ducasse naît le 4 avril 1846 à Montevideo, en Uruguay. Très tôt orphelin de mère, il est d'un caractère renfermé mais montre de telles dispositions, au collège des Jésuites de Montevideo, pour les études, notamment en mathématiques et e sciences naturelles, que son père l'envoie à Paris afin qu'il y prépare Polytechnique. Il s'inscrit au lycée Henri IV et s'enferme dans sa chambre, dans le quartier de la Bourse, passant ses nuits à écrire.

En 1868, il fait paraître, à compte d'auteur, et anonymement, de Chant I de Maldoror. L'année suivante, il fait publier l'ensemble des six Chants, après en avoir remanié le premier : il y faisait allusion de façon trop précise à une de ses amitiés particulières. C'est pour cet ouvrage qu'il choisit son pseudonyme inspiré, sans doute, d'un personnage d'Eugène Sue, feuilletoniste alors très populaire : Lautréamont, un homme de cœur devenu monstre.

Mais son éditeur, jugeant le livre trop cru, refuse de le mettre en vente. Lautréamont se rend alors en Belgique pour tenter d'y publier Maldoror. Parallèlement, il travaille à l'élaboration d'un autre ouvrage, consacré à l'espérance et qui sera le pendant de Maldoror. Il en rédige la préface, qu'il fait paraître en mai 1870.

Ducasse-Lautréamont, qui vit toujours des subsides envoyés par son père, change fréquemment de domicile : s'est-il livré, en cette tumultueuse fin de règne de Napoléon III, à des activités révolutionnaires ? La guerre éclate, mettant fin à ses projets littéraires. Sa trace se perd jusqu'au 24 novembre 1870 : un acte de décès, confirmé par le patron et le garçon d'étage, annonce sa mort, dans un meublé du faubourg-Montmartre.

Les Chants de Maldoror, défendus par Léon Bloy, et par Rémy de Gourmont, seront réimprimés, de façon confidentielle, en 1874 et en 1890. Et c'est Blaise Cendrars qui, au début du XXème siècle, les fera reparaître. Les Surréalistes se chargeront alors de les faire connaître et de révéler l'œuvre énigmatique de Lautréamont au grand public.

 

Commentaires

Les Dingues et les Paumés dans sa version album reste, à mes yeux, une des chansons les plus fascinantes de Thiéfaine. Je pense que c'est la chanson que j'ai le plus écouté. Je m'étais même fait une K7 de toutes les différentes versions de la chanson que je me passais en boucle...

Écrit par : PK | 20/11/2010

Bonjour à tous,
La première fois que j'ai entendue "Les dingues et les paumés" c'est sur le 1er Live avec cette super intro digne des meilleurs morceaux instrumentaux des PINK FLOYD !! mais je m'égare un peu... j'ai écouté attentivement les paroles et même maintenant, je m'interroge toujours sur ce texte !! je crois qu'il est là, le génie d'HFT !! Un chanteur français qui fait une allusion aux "Fleurs du Mal" c'est pas courant même en 82 date de sortie de "Soleil cherche futur" et étant, parfois, d'un naturel curieux (!) je me suis dit c'est qui ce Lautréamont ?? connait pas !! idem pour Hölderlin, et grâce à HFT, j'ai connu !! Il y a des phrases comme ça d'HFT qui restent : "la solitude n'est plus une maladie honteuse" est une phrase qui m'a lontemps fait réfléchir et gamberger...

Je pense que cette chanson, sans vouloir trop m'avancer, est un pur chef d'oeuvre dans le répertoire d'HFT, beaucoup de comparatifs ("sang de leurs visions perdues", "voix qui s'appellent se changent en révolvers") également dans ce texte qui devrait être étudié en cours de philo !!!
Bon week-end à tous et à toutes, à bientôt, la biz, FRED06

Écrit par : FRED06 | 20/11/2010

une de mes préférées

Écrit par : lilith051 | 20/11/2010

;-)

Écrit par : Le Doc.L | 20/11/2010

Le génie n'a pas besoin de commentaire...

Écrit par : Monsieur Müller | 20/11/2010

Ah, l'intro des Dingues et les Paumés sur le Live vol.1, je me la mets à fonds, elle est terrible !

Assis !
Asseyez vous !

Écrit par : PK | 20/11/2010

Elle fait partie de mes préférées , ce n'est pas celle que j'écoute le plus mais celle qui me manquerait le plus s'il ne l'avait pas écrite ...

Écrit par : loreleï2 | 21/11/2010

Comme Pk, je m'étais fait une K7 avec toute les versions...

.../...

La solitude n'est plus une maladie honteuse...
Tout est dit quoi... des slogans pareils, y'a des jours, ça aide quand même à se lever le matin pour affronter une nouvelle journée...

Écrit par : Yannig | 21/11/2010

Bonsoir à tous,
ça y est nous avons nos places pour Bercy!!!
Ma femme aime Paris et moi j'aime Hubert alors.... Nous irons à Paris.
et YOP !!!

Écrit par : herve | 22/11/2010

re-bonsoir,
je sais bien que je retarde un peu mais après avoir passé 25 ans à croire qu'Hubert chantait :" à contempler la gouaille dans les yeux des passant"
je viens de découvrir grace à vous que c'était : "noïlle".
Quelqu'un pourrait me dire ce que c'est la noïlle, mon dico ne connait pas.

Faut dire que j'ai pas un dico Jurassien. :-)

Merci

Écrit par : herve | 22/11/2010

Moi aussi, Hervé, pendant longtemps, j'ai cru que Thiéfaine chantait "la gouaille dans les yeux des passants". Et c'est en entendant "Cabaret Sainte Lilith" sur scène que j'ai compris qu'il s'agissait d'autre chose. Mais de quoi au juste ? Il en a déjà été question ici et plusieurs personnes avaient émis des hypothèses, mais quand, où, sous quelle note ? Aucune idée.

Écrit par : Katell | 22/11/2010

@Hervé : je viens de me renseigner sur Facebook, où j'ai depuis peu une page consacrée à mon blog. Quelqu'un (de très sensé !) me dit que la "noïlle", c'est la nuit en argot.
Contente pour toi ... et ta femme !! Moi j'adore Hubert et j'adore Paris, donc tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes !

Écrit par : Katell | 22/11/2010

C'est la nuit dans le dictionnaire d'argot.
Pas mieux :-)
http://www.languefrancaise.net/bob/detail.php?id=19119

Écrit par : Arnaud | 22/11/2010

Attention chef d'œuvre,,,la quintessence poétique de HFT se résume dans cette magistrale effusion de vers flamboyants, Touché par la grâce Thiéfaine déroule un texte dont les richesses ne se débusquent qu'au prix d'une lente maturation de notre vécu intime et pas seulement par le
renvoi à d'autres trésors littéraires (Baudelaire, Lautréamont)
Avec "Les dingues et les paumés" Hubert atteint une perfection, un accomplissement qui n'existent peut-être pas réellement mais qui se laissent entrevoir parfois dans quelque éclair de plénitude artistique.
"C' était beau mais sacrément casse-gueule" avait déclaré HFT lors d'une tournée des FNAC qui comblait l'absence de tournée entre "Météo Fur nada" et "éros uber alles"...Effectivement.
Alors que l'album s'ouvrait par de tonitruantes incantations à un "soleil" de plus en plus lointain, qu'une "mome kaléidoscope" devenue "Lorelei" allait se révéler de plus en plus fraternelle et libertine,le paroxysme de cette œuvre s'ourdissait par les premières notes croissantes d'une guitare à la rythmique déferlante de solennité.
Comme galvanisé par cette mélodie intense certaines envolées poétiques résonnèrent comme autant d exaltants 'aphorismes estampillés HFT:
"se greffent un pavé à la place du cerveau,,,s'en retourne dans leur ombre animal,,,ce sont des loups frileux au bras d'une autre mort,,,"
Oui c'est certain,"le génie n'a pas besoin de commentaires,,,"
d'où mes excuses,,,

"J'ai reçu la vie comme une blessure,et j'ai défendu au suicide de guérir la cicatrice,Je
veux que le Créateur en contemple,à chaque heure de son éternité,la crevasse béante"
Isidore Ducasse, Comte de Lautréamont

Amitiés

Écrit par : alfana | 23/11/2010

;-)

Écrit par : Le Doc.L | 23/11/2010

Merci à vous pour la noïlle !
C'est drole je pensais avoir une certaine culture de l'argot due à San Antonio et autres polards des années 50/60, et hop, voila que je suis passé à coté de ça.

L'argot dans les chansons d'Hubert, un thème à creuser peut être?
Mais j'ai pas l'impression que ce soit sa tasse de vin jaune...

Bonne noïlle !!!

Écrit par : hervé | 23/11/2010

Les commentaires sont fermés.