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13/01/2012

"Elle dort au milieu des serpents"

La pensée du jour : "Le temps sème ses ecchymoses". Louis CALAFERTE

 

La Vouivre, suite (toujours d'après le roman de Marcel Aymé) :

 

La Vouivre, figure comtoise, est sans doute un des souvenirs les plus importants qu'ait laissés en France la tradition celtique. Survivante de ces divinités des sources, qu'adoraient les Gaulois et qui se comptaient par milliers, elle a transporté à travers les âges l'une des croyances les plus populaires de la Gaule antique. Cette croyance, fort répandue à son époque où la conquête romaine était toute récente, Pline l'Ancien la rapporte en ces termes : « En outre, il est une espèce d'œuf en grand renom dans les gaules et dont les Grecs n'ont pas parlé. En été, des myriades de serpents se rassemblent et s'enlacent. Collés les uns aux autres par leur bave et par l'écume qui transpire de leurs corps, ils façonnent une boule appelée œuf de serpent. Les Druides disent que cet œuf est soutenu en l'air par les sifflements des reptiles et qu'il faut le recevoir dans un manteau avant qu'il ait touché terre. En outre, le ravisseur doit s'enfuir à cheval, car les serpents le poursuivent jusqu'à ce qu'il ait mis une rivière entre eux et lui. Cet œuf est reconnaissable à ce qu'il flotte sur l'eau, même attaché à un morceau d'or... J'ai vu moi-même un de ces œufs, qui était de la grosseur d'une moyenne pomme ronde... » (PL. Historia Naturalis).

 

Telle que la raconte Pline l'Ancien, la légende apparaît à peine transposée dans celle de la Vouivre. Le talisman, qui avait chez les Gaulois la réputation de faire merveille dans les procès, a pris de la valeur avec le temps. On pourrait d'ailleurs, sans grands risques d'erreur, expliquer comment l'œuf de serpent s'est changé en rubis. La transformation s'est très vraisemblablement opéré depuis l'époque où l'industrie de la taille des pierres précieuses s'est installée dans les cités et les bourgades du haut Jura.

 

 

En passant devant Arsène, la Vouivre tourna la tête et le regarda avec une indifférence qui le troubla. Ses yeux verts, d'un éclat minéral, avaient non seulement la couleur des yeux du chat, mais aussi le regard, qui se pose sur celui de l'homme comme sur un objet en se refusant à rien échanger. Au milieu du carrefour, elle passa dans un rai de soleil qui fit étinceler le rubis de son diadème et briller des feux rouges dans ses cheveux noirs. A la suite de la vipère, elle s'engagea dans le sentier menant à l'étang des Noues, mais après avoir marché cent mètres, obliqua à travers bois et fougères et disparut au regard d'Arsène. Le premier moment de surprise passé, il ne pensa plus qu'à la rejoindre et à son tour entra dans le sous-bois. La crainte des vipères ne l'effleurait même pas. Il marchait à grands pas dans les fougères, les bas de pantalon trempés par la rosée qui dégouttait dans ses sabots et lui piquaient les pieds. En débouchant de la forêt, il fut d'abord ébloui. Le soleil était à l'autre bout de l'étang que partageait dans toute sa longueur un sillon étincelant. Vers le milieu, là où les eaux se resserraient dans un étranglement, des nappes d'herbes brillaient comme un argent vif.

 

Commentaires

Voilà qui continue à me donner envie de lire ce livre... Il fut un temps où je dévorais les légendes de toutes sortes. Ces extraits (et, bien sûr, la chanson Les Ombres du Soir) me donnent terriblement envie de m'y remettre.

Écrit par : aclh | 14/01/2012

C'est vraiment passionnant! Il semble que la Vouivre, sous diverses formes, a alimenté bon nombre de légendes dans beaucoup de régions de France, voire d'Europe! Même à Douai près de chez moi, ce qui m'était totalement inconnu! Et sous son apparence de dragon, elle est même devenu le symbole de Klagenfurt, où une monumentale (faramineuse eût été plus à propos) statue-fontaine lui est dédiée!
Encore une suite à cette note riche d'enseignements?

Écrit par : Monsieur Müller | 14/01/2012

Et Vincenot y fait référence dans le "Pape des escargots"...

Écrit par : Monsieur Müller | 14/01/2012

Et Vincenot y fait référence dans le "Pape des escargots"...

Écrit par : Monsieur Müller | 14/01/2012

Ah ben zut, deux fois...

Écrit par : Monsieur Müller | 14/01/2012

Oui, on peut envisager une suite à cette note ... si vous êtes demandeurs !

Écrit par : Katell | 14/01/2012

Je demande!

Écrit par : Monsieur Müller | 14/01/2012

Tiens, Monsieur Muller connaît Henri Vincenot ? C'était un homme charmant, un vrai bourguignon, qui a en effet beaucoup parlé dans ses livres des légendes celtes de chez nous. Je dis " de chez nous " car il habitait un village proche du mien, sur " le toit du monde occidental ", comme il disait. Cette année, on va fêter le centenaire de sa naissance, d'ailleurs ! Voici une vidéo où on le voit dans sa campagne bien-aimée, si ça intéresse quelqu'un : http://video.google.com/videoplay?docid=3371732843311610915

Écrit par : Aska | 14/01/2012

Merci pour ce lien, Aska ! Cela m'intéresse aussi. J'aime beaucoup Henri Vincenot et suis d'ailleurs en train de lire un de ses bouquins. C'est l'histoire d'une jeune institutrice et de ses déboires, dans le Paris des années 60. C'est d'ailleurs resté très actuel, c'est fou. Parole de prof !

Écrit par : Katell | 15/01/2012

Aska, je regarderai cette vidéo quand je n'aurai plus d'enfants dans les pattes ! Peux-tu en dire plus sur cette célébration à venir ? C'est où et quand ?

Écrit par : Katell | 15/01/2012

Merci pour la vidéo, Aska! Idem que pour Katell, visionnage dès que mes filles m'en laissent l'occasion!
Et même question pour les festivités!

Écrit par : Monsieur Müller | 15/01/2012

Ça me fait plaisir de trouver sur le net des lecteurs d'Henri Vincenot ! Alors, pour vous répondre, l'anniversaire sera surtout célébré en Côte-d'Or, notamment à Dijon puisque c'est là que Vincenot est né en 1912. Une exposition lui sera consacrée de mai à septembre au musée de la Vie bourguignonne (170 objets, peintures, manuscrits, dessins, sculptures, etc). Alors, si vous passez par là... Il y aura d'autres expos plus petites ça et là, dont une en mars à Commarin, son village (celui qu'on voit au début de la vidéo).
Dans la vidéo, on le voit défrichant un hameau en ruines qu'il avait acheté : la Pourrie. C'est là qu'il est enterré avec sa femme et un de ses fils, en plein milieu des bois. Sur sa tombe, il y a une croix celtique en pierre.
Voilà, voilà ! Je suppose que tu lis " A rebrousse-poil ", Katell ? Je ne l'ai pas encore lu, pour ma part.
Tiens, je me demande si HFT connaît Henri Vincenot ? Dole, ce n'est pas loin de Dijon, et lui-même, Hubert, il habite à Dijon, il me semble ?

Écrit par : Aska | 15/01/2012

Oui, Aska, c'est bien A rebrousse-poil que je lis.
Pour ma part, cela m'étonnerait qu'HFT ne connaisse pas Vincenot !

Écrit par : Katell | 15/01/2012

Superbe vidéo que tu nous offres là, aska. Quelle quiétude chez cet homme, quelle simplicité! Une vie simple et paisible, entouré de ceux que l'on aime, n'est-ce pas le rêve de tout un chacun?

Écrit par : Monsieur Müller | 16/01/2012

A ton service, Monsieur Müller !

La vie simple n'est accessible qu'à ceux qui savent la rendre compliquée et beaucoup ont perdu la clé de ce subterfuge... (citation toute personnelle)

Écrit par : Aska | 17/01/2012

Les commentaires sont fermés.