23/06/2018
Faune onirique...
"Il y a plein de secrets dans une vie, l'écriture tourne autour, on y entre, ou jamais". Annie ERNAUX
Je ne sais pas trop pourquoi Hubert-Félix Thiéfaine revient régulièrement dans mes rêves. Sans doute parce qu'il occupe une place assez importante dans ma vie ! Toujours est-il que mes délires oniriques m'ont souvent amenée à le croiser en des lieux improbables et dans des situations tout aussi insolites : je me souviens de ce rêve étrange dans lequel j'allais acheter un pack de bière (moi qui ne bois jamais une goutte de ce breuvage !) au supermarché du coin et où je tombais nez à nez avec Hubert ! Il y a eu bien d'autres rêves de ce genre, j'ai dû m'amuser à en noter le contenu quelque part, sans jamais chercher à en analyser les tenants et les aboutissants psychologiques. Me disant vaguement quand même, à chaque fois, que tout cela manquait de sérieux, de maturité surtout. Il y a là, peut-être (ce n'est pas prouvé scientifiquement !) la preuve d'un dérèglement effarant. Si c'est le cas, je préfère ne pas en connaître le nom, ni le pourquoi, ni le comment.
Dernièrement, deux rêves étranges ont encore hanté mes nuits : dans le premier, Hubert donnait un concert dans le garage de ma maison. Au début, je me disais qu'il n'y aurait jamais assez de place là-dedans pour accueillir et le public, et toute l'équipe (parce que tout le monde était de la partie : les musiciens de la dernière tournée, ainsi que tous ceux qui œuvrent dans l'ombre et n'apparaissent pas sur scène !), puis les choses finissaient par se faire plutôt naturellement. Personne (à part moi) ne trouvait l'endroit incongru. Un concert dans un garage, cela ne choquait personne, et je finissais par ne plus me poser aucune question, m'abandonnant seulement, par la suite, au plaisir d'écouter les chansons d'Hubert. Cette semaine, dans la nuit de jeudi à vendredi, ma « faune onirique » a de nouveau fait des siennes, prouvant, si c'était encore nécessaire, que cela yoyotait sérieusement là-haut ! J'ai rêvé que Thiéfaine se produisait dans un snack, je ne sais pas trop dans quelle localité ! La scène, c'était la baraque à frites, et le public était dehors. Hubert était seul dans son truc, une espèce de roulotte installée sur une grande place. Le public, j'en faisais partie, cela va sans dire. Pourquoi irais-je rêver d'un concert d'Hubert auquel je n'assisterais pas ? Je ne suis pas maso, tout de même ! Bref... HFT faisait un peu « animal en quarantaine », relégué dans une cage, mais cela prenait malgré tout : on en redemandait, on bichait, comme dans un concert réel, quoi !
Ce que je retiens de ces rêves ? C'est que le lien avec l'Allemagne, bien que flou, apparaît à deux reprises : la bière, le snack (ou Imbiss, dans la langue de Goethe !). Pour le garage, je ne sais pas. Quoique, quoique : à Sarrebruck, il existe une salle de concert qui s'appelle « die Garage ». Je laisse aux spécialistes de la psychanalyse du singe le soin de démêler les enchevêtrements tortueux de ces paysages oniriques un peu barges. Peut-être existe-t-il réellement un fil conducteur là-dedans ? Peut-être que mon cerveau turbine un peu trop ? Ou peut-être qu'à force de côtoyer de très près l'écriture parfois surréaliste de l'ami Hubert, j'ai envoyé mon subconscient, ou je ne sais trop qui là-dedans, peut-être la folle du logis elle-même, dans des eaux troubles où cela tangue particulièrement fort ? Je me le demande...
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16/06/2018
Foule sentimentale et plus encore
"La vie n'est qu'une allusion à ce qu'elle aurait pu être". Jean-Claude PIROTTE
Le vendredi 8 juin, Thiéfaine était l'un des invités de Didier Varrod dans l'émission Foule sentimentale. À réécouter sans modération sur le site de France Inter ! À un moment donné, Didier Varrod s'est lancé dans une jolie présentation d'HFT, parlant pour lui, à la première personne du singulier (même si l'on sait bien qu'Hubert est pluriel et plusieurs !!!). Cela donne cela :
Je m'appelle Hubert-Félix Thiéfaine. Je suis né à quatre heures du matin, sous les vibrations d'une étoile désintégrée, en Franche-Comté. Hitler était mort, Vercingétorix aussi. J'ai un point commun avec le chanteur Renaud : je fus génial à l'école jusqu'au jour où je m'aperçus qu'un instituteur avait remplacé l'institutrice. Je commençai donc mon apprentissage de l'ennui. Et me revenaient soudain, parfois, les souvenirs musicaux de mon enfance, forcément liés à ma maman qui me berçait en rythme sur des chansons tristes et réalistes.
Ici, on entend Les roses blanches.
Puis, Didier Varrod reprend :
Je m'appelle Hubert-Félix Thiéfaine. Je sais depuis toujours le poids du conditionnement. En effet, ces roses blanches ont aussi, peut-être, fleuri inconsciemment dans ma chanson Critique du chapitre 3, un titre inspiré par l'Ecclésiaste. Elle commence par : « Et les roses de l'été sont souvent aussi noires que les charmes exhalés dans nos trous de mémoire ». À propos d'Ecclésiaste, enfant, figurez-vous que je fus, par la force des choses, contraint de penser que Dieu existait. J'ai même fait sa connaissance dans un collège aux chatoyantes soutanes où les oiseaux déchiffraient le latin en chantant des cantiques. C'est eux qui m'ont donné l'envie de faire des chansons.
Et cela continue ainsi durant quelques minutes, pour aboutir à cela, que j'ai trouvé tellement beau qu'il m'a semblé que cela devait impérativement atterrir sur ce blog :
Non, je ne suis pas Hubert-Félix Thiéfaine. Vous, vous êtes Hubert-Félix Thiéfaine. Comment vous dire que je, nous, vous, ils vous aiment ? Pour votre humilité, évidemment, votre poésie mathématique et vénéneuse, pour vos frères maudits, Céline, Miller, Bukowski, Rimbaud. Moi je vous aime parce que vous citez Jim Morrison : « Nous avons été métamorphosés d'un corps fou dansant sur les collines en une paire d'yeux fixant le noir ». Je vous aime aussi parce que vous avez parfois décrit les catastrophes avant qu'on les évite. Je vous admire surtout parce que vos derniers albums sont toujours les meilleurs, ce qui est très, très, très, très rare. Je vous aime enfin parce que pour vous, écrire une chanson, c'est une longue phase érotique de préparation. Chaque nouvelle chanson est ainsi pour vous une balise que vous plantez dans votre vie. Vous en avez planté aussi dans la nôtre, pas mal de balises. Aujourd'hui, donc, vous avez quarante ans. Vous transmettez votre expérience. Vous êtes à la fois la môme kaléidoscope, Lorelei Sebasto Cha, la fille du coupeur de joints, et on reste bouleversé. Vous êtes surtout un homme dont les lubies sentimentales nous protègent de l'amour désaffecté. Et vous êtes un transmetteur qui appliquez ce proverbe chinois à la lettre : « Mieux vaut transmettre un art à son fils que de lui léguer mille pièces d'or ».
Voilà donc une émission que l'on écoutera avec profit ! Il y a également ce petit entretien, sympa comme tout, sur Causeur.fr, et tout cela permettra de fleurir le week-end :
https://www.causeur.fr/thiefaine-mai-68-nihiliste-gauchis...
15:29 | Lien permanent | Commentaires (14)