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Thiéfaine sera à Verdun ce soir : haut les cœurs !

"Béni sois-tu et reviens-moi 

présent lointain qui fait mémoire". Georges PERROS

 

Je pense souvent à la chanson de Bashung, Hier à Sousse. Pour en appliquer les paroles à ma vie, au gré du vent, au rythme du vécu. En novembre dernier, lors de ma semaine thiéfainienne, mon refrain, c'était « hier à Metz, demain à Paris, après-demain à Dijon ». Cet été, c'est « en juillet à Carhaix, en août à Verdun ». Et aussi : « Hier à Walygator, aujourd'hui près des Alligators ». Walygator, c'est un parc d'attractions de ma région, j'y ai emmené mes filles hier. Suis-je la seule à le nommer « Walygator 427 » ?! De même, lorsqu'il est question d'Uber ici ou là, suis-je la seule à ressentir comme un léger tilt dans le cerveau et à penser à Hubert ?! Je sais, je sais, les circuits chauffent là-dedans !

Bref, ce soir, c'est Verdun. Je suis déjà en train de m'habiller le cœur. Carrément, à la Saint-Ex ! J'attends avec impatience le moment où je monterai dans ma voiture pour une folle chevauchée. La 47ème, je crois. On the road again ! Cette fois, ça y est : j'ai plus de concerts d'Hubert au compteur que d'années sur la trogne ! Yeah ! L'an dernier, lors de mon 45ème, je disais fièrement à qui voulait bien m'entendre : « Voilà, 45 ans, 45 concerts de Thiéfaine, ça me fait une moyenne d'un concert par an depuis la naissance ». Oui, je sais, les circuits chauffent dans le bocal...

Ce qui est bien, avec les concerts de Thiéfaine, c'est que d'emblée, quand je vais rôder près des salles ou des scènes où il passe, je me sens parfaitement dans mon élément. Le seul élément qui tienne debout dans ma vie, qui ne se soit jamais cassé la gueule, effrité, élimé. Allez savoir pourquoi. Partout où je vais, je me sens en décalage, pas à ma place. L'impression de ne jamais en être totalement. C'est le cas, par exemple, dans mon boulot. Mettez-moi dans une salle des profs et je me sens une étrangère sur la Terre, jusqu'à la moelle. Cet univers, je n'en suis pas. Depuis 23 ans, je fais de mon mieux pour y mettre ne serait-ce qu'un orteil, mais non, rien à faire, ça ne prend pas, ça ne prendra jamais. Plongez-moi dans les « à-côtés » d'un concert d'Hubert, et là, miracle, la cancoillotte prend direct, j'en suis illico. Je regarde autour de moi les visages emplis d'attente, comme le mien sans doute, et je sais que me voilà dans un monde qui me ressemble trait pour trait. D'ailleurs, il vous est déjà arrivé, je suppose, d'aller traîner de la même manière avant les concerts d'autres artistes. Et alors, bilan ? Eh bien, vous n'en êtes pas tout à fait, si ? Quand j'allais voir Higelin, par exemple, je me sentais légèrement mise de côté. J'avais beau faire, j'avais beau connaître relativement bien l'œuvre du bonhomme, quand je regardais tous ceux qui attendaient comme moi (je me souviens d'un homme croisé X fois aux concerts du grand Jacques, c'était son sosie, il avait assimilé intégralement la dégaine de son idole, jusqu'à ses cheveux fous), je me sentais un peu différente d'eux. Pas du même monde. Alors que tout à l'heure, à Verdun, c'est écrit d'avance, je me sentirai de cette faune un peu cinglée qui sera là des heures avant le concert ! De plain-pied avec leur ferveur ! Nous serons, l'espace de quelques instants, d'un même sang, d'une même folie, d'une même ardeur. Et peut-être bien que nous donnerons à d'autres, qui n'en seront pas tout à fait, eux, l'impression d'être une bande à part, de drôles de types et de nanas, branchés sur un drôle de secteur à ultra-haute tension !

Allez, bon concert à tous ceux qui auront la chance d'être à Verdun ce soir !

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Les rescapés, de Miossec

"Je me suis fait tout seul et je me suis raté". Christophe MIOSSEC

Miossec a cinquante-trois ans. C'est un âge qui a vu passer plus d'une fois la charrette de l'Ankou, un âge où l'on ne compte plus les cités d'Ys englouties autour de soi, il y en aurait trop. Tous ces naufrages, ces départs, ces effacements, voilà qui vous donne l'impression d'être un sursitaire. Un rescapé, en somme ; un du bataillon de « ceux qui ne sont pas passés de loin à côté ». D'où ce titre donné à l'album : Les rescapés. Le mot vient du picard, rescaper, et signifie réchapper. Il serait devenu d'usage courant dans la langue française au début du vingtième siècle, après la catastrophe minière de Courrières. À cinquante-trois ans, de quoi a-t-on réchappé ? D'un certain nombre de coups de grisou qui n'ont pas épargné tout le monde. De bien des tempêtes qui ont cogné en aveugle sur leur passage. Le dernier Miossec parle de la grâce d'être encore là. Il dit également combien l'on est minus face à la mécanique broyeuse du temps, il dit qu'on est un peu la somme des désastres auxquels on a eu la chance d'échapper. Il dit aussi que l'homme sera toujours petit face aux éléments déchaînés et aux crocs des vagues démontées (cf. la septième chanson de l'album, La mer, quand elle mord, c'est méchant). La cinquantaine a quelque chose d'impitoyable, dirait-on : c'est l'âge où l'on devient non pas ce que l'on est (ce serait trop beau !), mais ce que l'on redoutait d'être. Constat assez sombre, je vous l'accorde, mais tout cela est soigneusement contrebalancé par des odes à la vie. Miossec est rescapé et conscient de l'être. La chanson Pour célèbre, si j'ai bien compris, la chance qui nous a été donnée de venir tâter du pied la planète Terre, malgré les aspérités, les achoppements et les chutes. Et je suis presque sûre que le mot qui est sous-entendu à la fin, c'est « merci ». En tout cas, moi, je vois dans ce texte quelque chose du Chapeau bas de Barbara. L'aventure fait l'éloge du grand large, des parkings annonciateurs de départs, de « tout ce qui nous attend ; demain, ce soir, ou là, dans un instant ».

Et puis il y a ces mélodies qui vous restent en tête des heures durant, ces envolées de sons, ces arrangements tissés au plus fin, au millimètre près, comme la toile d'une araignée qui se serait faite orfèvre. Il y a aussi ces déchaînements soudains, auxquels on ne s'attend pas, comme ce moment où, dans Nous sommes, le piano s'emballe comme un dément. Ou encore toutes ces fois où, dans La mer, quand elle mord, c'est méchant, on croirait entendre un ressac furibond. Et que dire de La ville blanche, alors ? Les espèces de roulements de tambour de la fin m'évoquent autant de réminiscences enfouies du tonnerre de Brest.

C'est un album marin, en somme, dans lequel on retrouve à la fois le Miossec des débuts et un Miossec infiniment autre, qui a su se réinventer. La mélancolie est restée communiste sous sa plume : elle n'oublie personne, elle a le geste généreux, le don foisonnant, et même, elle s'est encore accentuée. Mais elle n'en a pas pour autant anéanti les forces vives de l'artiste. Et tout ce petit monde, à la fois ombre et lumière, cohabite là sans heurts. On croise même Georges Perros dans un texte (On meurt), et la cohérence nous apparaît alors évidente : chez lui aussi, ombre et lumière, à tour de rôle, ou en même temps...

L'œuvre d'un artiste est-elle forcément toujours ancrée dans le territoire qui l'a vue jaillir ? Je dirais que oui. Celle de Miossec me semble trimbaler avec elle pléthore d'embruns, myriades de ciels changeants, ambiances de veillées ou de festoù-noz. En clair : elle est bretonne et plus encore finistérienne. Le Finistère, c'est la fin de quelque chose certes, puisque la terre ferme s'étiole sous nos pas, mais devant nos yeux, s'ouvre un morceau d'infini. C'est beau, c'est puissant, c'est comme l'univers de Miossec, où la fin n'est pas seulement achèvement, mais aussi et surtout ouverture.

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Questionnaire de rentrée !

Bon, il faut bien le dire : je n'en ai pas fichu une rame durant ces vacances ! J'aurais eu du temps, pourtant. Eh bien non, que dalle, je n'ai presque pas écrit. Et maintenant que la rentrée approche à pas gigantesques, les idées fusent. C'est toujours comme ça ! Je m'aperçois également que je n'ai pas livré ici une seule note sur les références présentes dans les deux titres qu'il nous a été donné de découvrir dernièrement (c'était pourtant un de mes projets). Décidément, je suis une mauvaise élève ! Je ferai tout en catastrophe une fois que les cours auront repris. Me sentir prisonnière de l'urgence me stimule, il faut croire ! En tout cas, les occasions de revenir sur ce blog seront bientôt légion car cette rentrée promet d'être riche. Nous n'avons pas fini d'entendre parler (de) Thiéfaine, entre la sortie de l'album et la parution d'un nouvel ouvrage sur lui (HF Thiéfaine, animal en quarantaine, de Sébastien Bataille). L'automne n'est pas toujours la foutue saison mélancolique qui fait regretter la "vive clarté de nos étés trop courts" !

En cette presque rentrée, j'ai eu l'idée de vous soumettre un petit questionnaire portant sur (comme c'est étonnant !) votre rapport à l'œuvre de Thiéfaine. Je vais moi-même m'amuser à répondre à ces questions ! Je vous propose également, si le cœur vous en dit, d'en poser d'autres à votre tour. Si chacun en ajoute une ou deux (ou davantage) de son cru, nous aurons de quoi bavarder ensemble durant les longues soirées de septembre !

 

Voici les miennes, suivies de mes réponses, tant qu'à faire !

La chanson / les chansons que vous avez écoutée(s) des milliers, voire des milliards de fois, sans jamais vous en lasser :

Mathématiques souterraines (toujours autant de frissons à chaque fois que je l'entends), Les dingues et les paumés, Autoroutes jeudi d'automne, Redescente climatisée, 542 lunes et sept jours environ, Annihilation, En remontant le fleuve, Petit matin 4.10 heure d'été.

 

La chanson qui est étroitement liée à votre histoire personnelle :

Je t'en remets au vent, la seule chanson de Thiéfaine que ma mère aimait ! 

 

La chanson qui a fait tilt en vous dès la première écoute et vous a conduit(e) à vous plonger dans l'œuvre de Thiéfaine :

Mathématiques souterraines. Le choc de ma vie !

 

La chanson que vous n'aimez pas, malgré tous vos efforts :

Mytilène Island.

 

Votre meilleur concert :

Alors là, j'hésite ! Je crois quand même que celui dont le souvenir me procure le plus d'émotions est celui de Verdun (août 2019). Les rues et les quais, le long de la Meuse, débordant d'une foule en délire, m'ont marquée à tout jamais. Je me souviens avec un émoi quasi similaire du concert qui avait eu lieu à la salle Poirel de Nancy lors de la tournée en solitaire. A un moment, tout le public s'était levé, comme un seul homme, pour acclamer Thiéfaine, et c'était beau !

 

La chanson que vous n'avez pas aimée à la première écoute et que vous avez fini par apprécier à force de persévérance :

Du soleil dans ma rue ! Comme quoi, en écrivant "ne désespérez jamais, faites infuser davantage", Henri Michaux avait raison !

 

Une chanson dont vous vous êtes lassé(e) :

J'ai beau chercher, je ne vois pas ! Je n'ai même pas réussi, contrairement à certains, à me lasser de la Fille du coupeur de joints

 

La ou les chanson(s) que vous souhaiteriez (ré)entendre lors de la prochaine tournée (essayez de limiter votre choix, si possible, et de mentionner de préférence des titres qu'HFT n'a jamais - ou que rarement - interprétés sur scène !!) :

Maalox Texas Blues, Juste une valse noire, Vendôme Gardenal Snack

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Une charogne

La pensée du jour : "Toute l'amertume de la mer me remonte", Louis ARAGON.

 

Voici "Une charogne", de l'ami Charles Baudelaire. Avertissement : âmes sensibles s'abstenir!

 

Rappelez-vous l'objet que nous vîmes, mon âme,

Ce beau matin d'été si doux,

Au détour d'un sentier une charogne infâme

Sur un lit semé de cailloux,

 

Les jambes en l'air, comme une femme lubrique,

Brûlante et suant les poisons,

Ouvrait d'une façon nonchalante et cynique

Son ventre plein d'exhalaisons.

 

Le soleil rayonnait sur cette pourriture,

Comme afin de la cuire à point,

Et de rendre au centuple à la grande Nature

Tout ce qu'ensemble elle avait joint;

 

Et le ciel regardait la carcasse superbe

Comme une fleur s'épanouir.

La puanteur était si forte, que sur l'herbe

Vous crûtes vous évanouir.

 

Les mouches bourdonnaient sur ce ventre putride,

D'où sortaient de noirs bataillons

De larves, qui coulaient comme un épais liquide

Le long de ces vivants haillons.

 

Tout cela descendait, montait comme une vague,

Ou s'élançait en pétillant;

On eût dit que le corps, enflé d'un souffle vague,

Vivait en se multipliant.

 

Et ce monde rendait une étrange musique,

Comme l'eau courante et le vent,

Ou le grain qu'un vanneur d'un mouvement rythmique

Agite et tourne dans son van.

 

Les formes s'effaçaient et n'étaient plus qu'un rêve,

Une ébauche lente à venir,

Sur la toile oubliée, et que l'artiste achève

Seulement par le souvenir.

 

Derrière les rochers une chienne inquiète

Nous regardait d'un oeil fâché,

Epiant le moment de reprendre au squelette

Le morceau qu'elle avait lâché.

 

- Et pourtant vous serez semblable à cette ordure,

A cette horrible infection,

Etoile de mes yeux, soleil de ma nature,

Vous, mon ange et ma passion!

 

Oui! telle vous serez, ô la reine des grâces,

Après les derniers sacrements,

Quand vous irez, sous l'herbe et les floraisons grasses,

Moisir parmi les ossements.

 

Alors, ô ma beauté! dites à la vermine

Qui vous mangera de baisers,

Que j'ai gardé la forme et l'essence divine

De mes amours décomposés! 

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Thiéfaine à Taratata

Bon, bon, bon, c’était plutôt sympathoche, tout ça, non ?! Je n’ai pas encore eu le temps de regarder les bonus de l’émission.

En tout cas, merci à Nagui, qui a su complimenter Hubert comme il se devait ! Il a rappelé l’affaire Drucker ! Encore un petit coup de griffe à Michel, bien fait pour lui !!!

Arnaud a mis sur le forum « Fragments d’Hubert » toutes les dates de rediffusion de l’émission. Si j’ai bien tout retenu, il y en aura une sur France 2 le 26 janvier.

 

Encore un petit Blaise Cendrars, vous voulez bien ?

 

JOURNAL

 

Christ

Voici plus d’un an que je n’ai plus pensé à Vous

Depuis que j’ai écrit mon avant-dernier poème Pâques

Ma vie a bien changé depuis

Mais je suis toujours le même

J’ai même voulu devenir peintre

Voici les tableaux que j’ai faits et qui ce soir pendent aux murs

Ils m’ouvrent d’étranges vues sur moi-même qui me font penser à Vous.

Christ

La vie

Voilà ce que j’ai fouillé

 

Mes peintures me font mal

Je suis trop passionné

Tout est orangé.

 

J’ai passé une triste journée à penser à mes amis

Et à lire le journal

Christ

 

Vie crucifiée dans le journal grand ouvert que je tiens

Les bras tendus

Envergures

Fusées

Ebullition

Cris.
On dirait un aéroplane qui tombe.
C’est moi.

 

Passion

Feu

Roman-feuilleton

Journal

On a beau ne pas vouloir parler de soi-même

Il faut parfois crier

 

Je suis l’autre

Trop sensible.

 

 

Et, pour finir, je cite de nouveau René Fallet évoquant Cendrars :

« Une fois, à la télévision, j’ai entendu la plus parfaite définition de la littérature qui soit. Pierre Lazareff, journaliste et ami de Blaise Cendrars, auteur de ce fabuleux poème qu’est ‘La Prose du Transsibérien’, racontait lui avoir demandé un jour : ‘Blaise, tu peux bien nous l’avouer, aujourd’hui, que tu ne l’as jamais pris, le Transsibérien ?’ Cendrars lui avait répondu sublime : ‘Qu’est-ce que ça peut te foutre, si je te l’ai fait prendre ?’ ».

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Jour J moins trois!

Puisque cette saloperie de blog m'a éjecté tous mes commentaires ce soir, je vais le contraindre à m'écouter quand même car je n'ai pas fini ma crise de Calgon!

Merci à Evadné, Daniel et Tommie, pour vos réactions qui font chaud au coeur.

Je voulais simplement dire que je veux bien bâtir l'école de demain, mais qu'on ne me tape pas sur les mains! Je vais te dire, Ségo, on ne t'a pas attendue, toi et tes discours oiseux, pour prendre le taureau par les cornes! Le mammouth a de la ressource, faut pas croire! Moi, le mardi, j'ai un créneau libre en même temps que certains élèves et je fais du soutien. Si! Et sais-tu ce que je demande en échange? Rien, pas un kopeck, je rase gratis! Ma récompense, c'est un joli sourire épanoui, un petit mot du style "ouah, madame, j'ai compris", trois points de plus à l'interro! Non, mais pour qui nous prends-tu?!

Quand j'étais gamine, je criais déjà sur tous les toits que plus tard, je voulais faire maîtresse! Quand j'ai eu la joie d'aller à l'école primaire, j'ai découvert, avec une jubilation sans nom, les dictées, les rouages de la langue française, etc.! Le mercredi, chez mes grands-parents, c'était école pour tout le monde! Je faisais ma dictée avec autorité. Et si la grand-mère me faisait l'affront d'évoquer dans ces moments-là sa soupe qui allait cramer, je te la tançais vertement, crois-moi! Alors, comme vocation, ça se pose là, non?! Moi, depuis le temps que j'enseigne, tu imagines, je devrais partir en retraite à 40 piges!!! J'ai commencé à huit ans et ce n'est pas une bourge de ton espèce qui va me faire rougir d'exercer ce que je veux encore appeler le plus beau métier du monde! Va donc rejoindre tes amis au café du commerce. Doivent être contents, là-bas, tous ces boeufs, de t'entendre pérorer dans leur sens!

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L'étranger dans la glace

descendre dans la soufflerie

où se terre le mystère inquiet

des ondes et de l'asymétrie

des paramètres au coeur violet

je vois des voiles d'aluminium

au fond de mon regard distrait

des odeurs de mercurochrome

sur le registre de mes plaies

 

le vent glacé sur mon sourire

laisse une traînée de buée

quand je regarde l'avenir

au fond de mes yeux nécrosés

le vide a des lueurs d'espoir

qui laisse une ombre inachevée

sur les pages moisies de l'histoire

où je traîne ma frise argentée

 

mais mon regard s'efface

je suis l'étranger dans la glace

mais ma mémoire s'efface

 

la brume adoucit les contours

des ratures sur mes triolets

la valse des nuits et des jours

se perd dans un murmure discret

les matins bleus de ma jeunesse

s'irisent en flou multicolore

sur les molécules en détresse

dans le gris des laboratoires

 

mais mon regard s'efface

je suis l'étranger dans la glace

mais ma mémoire s'efface

 

Paroles : Hubert-Félix THIEFAINE

 

Quelle chanson magnifique! Comme dirait ma moitié, c'est un peu "Animal en cinquantaine", cette fois-ci!

 

A propos du temps qui passe, voici un très beau texte de Jean-Roger Caussimon : "J'entends passer le Temps" (la chanson a été interprétée par Léo Ferré).

 

J'entends, j'entends

Passer le Temps

Le Temps muet, aveugle et sourd

Un roulement sur un tambour

Une fontaine sur la place

Les aboiements d'un chien perdu...

Le Temps passe...

Et ne revient plus!

 

J'entends, j'entends

Passer le Temps

Comme il va vite et comme il court!

Déjà le soleil tourne court

Et ma fenêtre sur l'impasse

S'assombrit du soir revenu...

Le Temps passe...

Et ne revient plus!

 

J'entends, j'entends

Passer le Temps

Dans la prison, dans le couvent

Partout sur la rose des vents

J'entends qu'au loin c'est marée basse

Et bientôt j'entendrai le flux...

Le Temps passe...

Et ne revient plus!

 

J'entends, j'entends

Passer le Temps

Mon pas léger, mon coeur battant

C'était hier, adieu printemps!

Et vole en éclats cette glace

Où je crois voir un inconnu!

Le Temps passe...

Et ne revient plus!

 

J'entends, j'entends

Passer le Temps

Le Temps muet, aveugle et sourd

Un roulement sur un tambour

Une fontaine sur la place

Les aboiements d'un chien perdu...

Le Temps passe...

Et ne revient plus!

 

Et ne revient plus!

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Une charogne

Avertissement : certaines âmes sensibles pourraient être écoeurées, voire scandalisées, par le contenu du poème qui va suivre. Pour ma part, j'en raffole!!!

UNE CHAROGNE

Rappelez-vous l'objet que nous vîmes, mon âme,

Ce beau matin d'été si doux

Au détour d'un sentier une charogne infâme

Sur un lit semé de cailloux,

 

Les jambes en l'air, comme une femme lubrique,

Brûlante et suant les poisons,

Ouvrait d'une façon nonchalante et cynique

Son ventre plein d'exhalaisons.

Le soleil rayonnait sur cette pourriture,

Comme afin de la cuire à point,

Et de rendre au centuple à la grande Nature

Tout ce qu'ensemble elle avait joint;

 

Et le ciel regardait la carcasse superbe

Comme une fleur s'épanouir.

La puanteur était si forte que sur l'herbe

Vous crûtes vous évanouir.

 

Les mouches bourdonnaient sur ce ventre putride,

D'où sortaient de noirs bataillons

De larves, qui coulaient comme un épais liquide

Le long de ces vivants haillons.

Tout cela descendait, montait comme une vague,

Ou s'élançait en pétillant;

On eût dit que le corps, enflé d'un souffle vague,

Vivait en se multipliant.

Et ce monde rendait une étrange musique,

Comme l'eau courante et le vent,

Ou le grain qu'un vanneur d'un mouvement rythmique

Agite et tourne dans son van.

Les formes s'effaçaient et n'étaient plus qu'un rêve,

Une ébauche lente à venir,

Sur la toile oubliée, et que l'artiste achève

Seulement par le souvenir.

 

Derrière les rochers une chienne inquiète

Nous regardait d'un oeil fâché,

Epiant le moment de reprendre au squelette

Le morceau qu'elle avait lâché.

- Et pourtant vous serez semblable à cette ordure,

A cette horrible infection,

Etoile de mes yeux, soleil de ma nature,

Vous, mon ange et ma passion!

 

Oui! telle vous serez, ô la reine des grâces,

Après les derniers sacrements,

Quand vous irez, sous l'herbe et les floraisons grasses,

Moisir parmi les ossements.

Alors, ô ma beauté! dites à la vermine

Qui vous mangera de baisers,

Que j'ai gardé la forme et l'essence divine

De mes amours décomposés!

 

Charles BAUDELAIRE

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07/05/2006 | Lien permanent

La Loreley de Guillaume Apollinaire (mais je préfère celle de Heine!)

LA LORELEY

 

A Bacharach il y avait une sorcière blonde

Qui laissait mourir d’amour tous les hommes à la ronde

 

Devant son tribunal l’évêque la fit citer

D’avance il l’absolvit à cause de sa beauté

 

O belle Loreley aux yeux pleins de pierreries

De quel magicien tiens-tu ta sorcellerie

 

Je suis lasse de vivre et mes yeux sont maudits

Ceux qui m’ont regardée évêque en ont péri

 

Mes yeux ce sont des flammes et non des pierreries

Jetez jetez aux flammes cette sorcellerie

 

Je flambe dans ces flammes ô belle Loreley

Qu’un autre te condamne tu m’as ensorcelé

 

Evêque vous riez Priez plutôt pour moi la Vierge

Faites-moi donc mourir et que Dieu vous protège

 

Mon amant est parti pour un pays lointain

Faites-moi donc mourir puisque je n’aime rien

 

Mon cœur me fait si mal il faut bien que je meure

Si je me regardais il faudrait que j’en meure

 

Mon cœur me fait si mal depuis qu’il n’est plus là

Mon cœur me fit si mal du jour où il s’en alla

 

L’évêque fit venir trois chevaliers avec leurs lances

Menez jusqu’au couvent cette femme en démence

 

Va-t’en Lore en folie va Lore aux yeux tremblants

Tu seras une nonne vêtue de noir et blanc

 

Puis ils s’en allèrent sur la route tous les quatre

La Loreley les implorait et ses yeux brillaient comme des astres

 

Chevaliers laissez-moi monter sur ce rocher si haut

Pour voir une fois encore mon beau château

 

Pour me mirer une fois encore dans le fleuve

Puis j’irai au couvent des vierges et des veuves

 

Là-haut le vent tordait ses cheveux déroulés

Les chevaliers criaient Loreley Loreley

 

Tout là-bas sur le Rhin s’en vient une nacelle

Et mon amant s’y tient il m’a vue il m’appelle

 

Mon cœur devient si doux c’est mon amant qui vient

Elle se penche alors et tombe dans le Rhin

 

Pour avoir vu dans l’eau la belle Loreley

Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil

 

Guillaume APOLLINAIRE (1880-1918)

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06/06/2006 | Lien permanent

Les chiens aboient, la caravane passe...

La pensée du jour :

« Allons, mon pauvre cœur, allons, mon vieux complice,

Redresse et peins à neuf tous tes arcs triomphaux;

Brûle un encens ranci sur tes autels d'or faux;

Sème de fleurs les bords béants du précipice;

Allons, mon pauvre cœur, allons, mon vieux complice ! »

 

 

Ainsi parlait le pauvre Lélian, ainsi chuchote-t-il à mon oreille quand un « brouillard d'acier » fait peser sur nos têtes un couvercle baudelairien.

 

sacem

 

Allez, un peu d'entrain, voyons, HFT a reçu lundi une récompense bien méritée : le grand prix de la chanson française. Comme Foxy l'écrivait dans un billet consacré à cet événement (http://foxysback.hautetfort.com/), Thiéfaine a été très classe, très digne lors de cette cérémonie. Je suis sidérée par les propos d'Ariel Wizman : « Cette année, on récompense un créateur, interprète ou pas ». Interprète ou pas ?!! Là, je bloque. La suite a beau rattraper le truc, oh punaise, que je suis fâchée d'avoir entendu ce lamentable « interprète ou pas ».

 

C'est comme tous ces gens qui se sont permis des jugements à la noix, allant jusqu'à dire à HFT « tu devrais arrêter de chanter ». Bravo, monsieur Thiéfaine, d'avoir su tenir le cap contre vents et marées, et pendant de si longues années de surcroît, merci de ne pas avoir écouté les jugements à l'emporte-pièce des uns et des autres, merci de nous servir depuis si longtemps (et sur un plateau d'argent !) de si belles autorisations de délirer qui n'ont pas et n'ont jamais eu leur équivalent dans la chanson française. « Les chiens aboient, la caravane passe »...

 

P.S. sans lien (ou presque) avec ce qui précède : Dans ma sombre déprime, je viens d'avoir une idée lumineuse : et si j'allais voir HFT à Besançon vendredi ?!!

 

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