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12/04/2006

D'autres chanteurs, oui, bien sûr!

A quelqu'un qui m'a fait remarquer que je mettais Thiéfaine dans mon Panthéon littéraire et n'avais évoqué aucun autre chanteur, je réponds que, mais si, bien sûr, j'aime plein d'autres chanteurs et chanteuses et groupes et tout ce que l'on veut! Mais Thiéfaine reste au-dessus du lot! Il est à mettre au rang des Gary et des autres, que je lis et relis sans me lasser! HFT disait à propos de Ferré : "Je peux encore l'écouter et découvrir un point virgule que je n'avais jamais ressenti auparavant" (Chorus, hiver 1998-99). Voilà, tout est dit. Je me permets de reprendre ces mots à mon compte et de dire la même chose à propos d'Hubert!

Il faudra qu'à l'occasion, je scanne et mette sur ce blog le plus beau des billets de concert de tous les temps!! Le billet du premier concert de Thiéfaine auquel j'assistai en ... non, c'est pas vrai, déjà ... 1995!! Un beau billet, vraiment, comme on n'en fait malheureusement plus! Et un concert formidable! Il faudra que je retrouve mon journal de l'époque et les impressions que j'avais notées en rentrant. C'est ma mère qui m'avait emmenée (et accompagnée) à ce concert. Quel beau souvenir! Dès notre arrivée, un type passablement aviné (quelle haleine!) nous avait lancé : "Moi, j'adore Thiéfaine parce que c'est un gros fumeur de joints". J'avais pensé (mais pas dit) : "Ben moi, mon joint, c'est Thiéfaine précisément!" Une chance que ma mère n'ait pas fait une syncope dans cette salle où ça chichonnait à mort (ma mère est asthmatique, on a frôlé la catastrophe!). Elle était sortie de là un peu ahurie!! Non, Thiéfaine ne chante pas que "Je t'en remets au vent"!!!

A propos de joints, il faudra aussi que je me laisse aller à dire ce que je pense des gens qui pensent que Thiéfaine ce n'est qu'un chanteur à fumette!!

Mais, pour l'heure, j'abandonne tout, "je remonte mon col, j'appuie sur le starter et je vais voir ailleurs".

 

"Ils croient voir venir Dieu ils relisent Hölderlin"

Johann Christian Friedrich HÖLDERLIN :

Poète allemand. Né le 20 mars 1770 à Lauffen-sur-le-Neckar, dans la douce campagne souabe, à deux heures de marche de Marbach, patrie de Schiller; mort le 7 juin 1843 à Tübingen dans cette tour dominant le Neckar où, en 1806, il avait été enfermé à la suite d'une crise de folie. Elevé et pieusement éduqué par sa mère et sa grand-mère -son père était mort en 1772-, Hölderlin fréquenta d'abord le lycée de Nurtingen, puis les écoles conventuelles de Denkendorf et de Maulbronn; enfin, à 18 ans, il entra au séminaire de Tübingen pour étudier la théologie (sa mère désirait le voir devenir pasteur); il s'y lia d'amitié avec les poètes Ludwig Neuffer et Rudolf Magenau et eut pour camarades Hegel et Schelling. Il en sortit en 1792. Déjà, sa raison était ébranlée. Caractère essentiellement mystique mais d'une religiosité tournée vers l'univers, matérialisée par le rêve d'une humanité rachetée, revenue au divin, Hölderlin ne fut pas pasteur protestant; il devint l'apôtre d'une poésie qui n'est, et ne prétend être qu'un chant religieux annonciateur d'une ère nouvelle. Les Hymnes ont été composés sous le coup de l'espérance et de l'enthousiasme suscités par la Révolution française; ils exaltent la liberté, le génie, l'amitié, la jeunesse et se ressentent encore de l'influence proche de Schiller tout en laissant percer, sous le voile d'un langage philosophique étrange sous sa plume, le grand poète hymnique que l'inspiration portera vers les sommets du chant. A Stuttgart, où en 1793 il passa les derniers examens devant le Consistoire royal pour le pastorat, Hölderlin rencontra Schiller qui le prit sous sa protection et lui procura l'emploi de précepteur à Waltershausen, chez Charlotte Kalb, l'amie qu'il avait chantée dans Intrigue et amour, publiant aussi dans sa revue La Nouvelle Thalie quelques-uns de ses poèmes et une partie de son roman Hypérion ou l'ermite en Grèce. Il existe divers fragments de ce roman sous des versions différentes dont l'une en vers est une autobiographie du poète dans sa jeunesse.

Hölderlin voyait dans le poète un missionnaire aux dons prophétiques et rêvait d'un retour, non seulement à l'art grec, mais encore à l'authentique civilisation hellénique envisagée comme une heureuse harmonie entre le peuple, la nature et la divinité. C'est ce monde idéal disparu qu'Hypérion chercha vainement à faire renaître de la Grèce moderne.

Le rêve semblait pourtant prendre corps aux yeux de Hölderlin lorsqu'en janvier 1796 il accepta, à l'instigation de Hegel, l'emploi de précepteur du fils du banquier Gontard à Francfort-sur-le-Main. Il y resta jusqu'à l'été 1798 et ce fut le temps de son grand et fatal amour pour la mère de son élève, Suzanne Gontard (Diotima). A cette période aussi remonte le projet de son drame la Mort d'Empédocle qui fit l'objet de plusieurs rédactions entre 1798 et 1799 : c'est la tragédie humaine, considérée comme l'antithèse du drame divin, tragédie vécue par une humanité qui devra périr pour que le divin s'actualise et qui dans la majesté de la mort seulement peut révéler la noblesse, la divinité de sa nature (ce que symbolise le suicide d'Empédocle qui se jeta dans le cratère de l'Etna). Contraint entre-temps de quitter Francfort pour rompre tous liens avec Suzanne, Hölderlin mena une vie inquiète, en perpétuelles allées et venues entre Homburg vor der Höhe, où l'avait recueilli son ami Sinclair, Nurtingen où vivait sa mère, Stuttgart et Hauptwyl en Suisse. Irrémédiablement seul désormais et l'âme toujours illuminée du souvenir de Diotima qui survit idéalisée dans Hypérion, Hölderlin rechercha une consolation dans une communion extatique avec la vie divine de la nature et ses éléments sacrés : l'éther, le soleil, l'océan, la terre, les fleuves, forces fabuleuses dont lui, le poète, se croit le messager et le prophète. Les Odes, les Elégies, les Hymnes pleurent un monde abandonné par les dieux et témoignent d'une foi profonde en leur retour : le "jour" éblouissant qui fera suite à la longue "nuit".

De décembre 1801 à mai 1802, Hölderlin est à Bordeaux, précepteur chez le consul d'Allemagne; c'est sa dernière tentative de s'insérer dans un monde qui diffère trop de son idéal. Les signes manifestes de sa folie se firent jour au cours du voyage à pied qu'il entreprit (mai-juin 1802) pour regagner sa patrie; sa raison ne tarda pas à sombrer à la suite d'accès de plus en plus fréquents. Pourtant il donna encore les Derniers Hymnes (Späthymnen); à travers une accumulation d'obscurités dues au désordre dans lequel se trouvait son esprit, on y trouve des éclaircies inattendues et des témoignages bouleversants d'un entretien ininterrompu, mystérieux, avec les dieux. Hölderlin fut transporté à Tübingen en 1806, interné d'abord à la clinique du docteur Autenrieth, puis le menuisier Zimmer lui donna l'hospitalité dans une tour, sur le Neckar. Durant les trente-sept années pendant lesquelles Hölderlin se survécut à lui-même, il se fit appeler Scardanelli.

Sergio Lupi, dans Dictionnaire des auteurs de tous les temps et de tous les pays, Robert Laffont, octobre 1990.

 

"En fondant de nouveau l'essence de la poésie, Hölderlin commence par déterminer ainsi un temps nouveau. C'est le temps des dieux enfuis et du dieu qui va venir. C'est le temps de la détresse, parce que ce temps est marqué d'un double manque et d'une double négation : le ne plus des dieux et le pas encore du dieu qui va venir". Martin Heidegger

"Hölderlin est peut-être le seul des poètes de ce temps qui ait eu le sens intime du mythe, le sens des dieux, à ce point que les hommes avaient pour lui moins de réalité que les figures célestes". Albert Béguin

Hyperions Schicksalslied (Hölderlin)

Ihr wandelt droben im Licht

Auf weichem Boden, selige Genien!

Glänzende Götterlüfte

Rühren euch leicht,

Wie die Finger der Künstlerin

Heilige Saiten.

 

Schicksallos, wie der schlafende

Säugling, atmen die Himmlischen;

Keusch bewahrt

In bescheidener Knospe,

Blühet ewig

Ihnen der Geist,

Und die seligen Augen

Blicken in stiller

Ewiger Klarheit.

 

Doch uns ist gegeben,

Auf keiner Stätte zu ruhn,

Es schwinden, es fallen

Die leidenden Menschen

Blindlings von einer

Stunde zur andern,

Wie Wasser von Klippe

Zu Klippe geworfen,

Jahr lang ins Ungewisse hinab.

 

Friedrich HÖLDERLIN

Laisse-moi

Non, laisse-moi, je t'en supplie;

En vain, si jeune et si jolie,

Tu voudrais ranimer mon coeur :

Ne vois-tu pas, à ma tristesse,

Que mon front pâle et sans jeunesse

Ne doit plus sourire au bonheur?

 

Quand l'hiver aux froides haleines

Des fleurs qui brillent dans nos plaines

Glace le sein épanoui,

Qui peut rendre à la feuille morte

Ses parfums que la brise emporte

Et son éclat évanoui?

 

Oh! si je t'avais rencontrée

Alors que mon âme enivrée

Palpitait de vie et d'amours,

Avec quel transport, quel délire

J'aurais accueilli ton sourire

Dont le charme eût nourri mes jours.

 

Mais à présent, ô jeune fille!

Ton regard, c'est l'astre qui brille

Aux yeux troublés des matelots,

Dont la barque en proie au naufrage,

A l'instant où cesse l'orage

Se brise et s'enfuit sous les flots.

Non, laisse-moi, je t'en supplie;

En vain, si jeune et si jolie,

Tu voudrais ranimer mon coeur :

Sur ce front pâle et sans jeunesse

Ne vois-tu pas que la tristesse

A banni l'espoir du bonheur?

 

Gérard de Nerval

 

 


 

 

Une allée du Luxembourg

Elle a passé, la jeune fille

Vive et preste comme un oiseau :

A la main une fleur qui brille,

A la bouche un refrain nouveau.

 

C'est peut-être la seule au monde

Dont le coeur au mien répondrait,

Qui venant dans ma nuit profonde

D'un seul regard l'éclaircirait!

 

Mais non, - ma jeunesse est finie...

Adieu, doux rayon qui m'as lui, -

Parfum, jeune fille, harmonie...

Le bonheur passait, - il a fui!

 

Gérard de Nerval

Gérard de Nerval

Epitaphe

 

Il a vécu tantôt gai comme un sansonnet,

Tour à tour amoureux insoucieux et tendre,

Tantôt sombre et rêveur comme un triste Clitandre,

Un jour il entendit qu'à sa porte on sonnait.

 

C'était la Mort! Alors il la pria d'attendre

Qu'il eût posé le point à son dernier sonnet;

Et puis sans s'émouvoir, il s'en alla s'étendre

Au fond du coffre froid où son corps frissonnait.

 

Il était paresseux, à ce que dit l'histoire,

Il laissait trop sécher l'encre dans l'écritoire.
Il voulait tout savoir mais il n'a rien connu.

 

Et quand vint le moment où, las de cette vie,

Un soir d'hiver, enfin l'âme lui fut ravie,

Il s'en alla disant : "Pourquoi suis-je venu?"

 

Gérard Labrunie, dit Gérard de Nerval, naît à Paris le 22 mai 1808. Son père, médecin de la Grande Armée, met son fils en nourrice et, deux ans plus tard, assiste en Silésie à la mort de sa femme qui l'avait accompagné. Il portera toute sa vie le deuil de sa compagne et Gérard, à son tour, cherchera sa mère dans les figures féminines qu'il inventera inlassablement, femmes de rêve et de mystère, proches toujours du néant et de la mort. Il rêve d'une filiation fastueuse et s'invente une généalogie fantaisiste : entre le lycée Charlemagne et Mortefontaine, où il passe ses vacances, il se crée aussi une "géographie magique" et reste sourd aux appels de son père, qui souhaite faire de lui un médecin. Avec la troupe des "Jeune France", il sacrifie au culte de l'étrange, boit du punch dans des têtes de mort et participe à la bataille d'Hernani en criant : "Les bourgeois, dehors!" Il prend alors le pseudonyme de Gérard de Nerval, tombe amoureux, timidement, d'une jeune soprano, Jenny Colon, fait jouer des pièces de théâtre et devient une des personnalités du Boulevard.
Si ses fantaisies généalogiques sont plus cocasses qu'inquiétantes, il n'en va plus de même à partir de 1840, et Gérard doit, cette année-là, faire un long séjour dans une maison de repos. Son père, exaspéré par son mode de vie, refuse d'aller le voir. 

Apprenant en 1842 la mort de Jenny Colon, Nerval écrit : "Elle m'appartient davantage que quand elle était vivante". L'année suivante, il fait un long voyage en Orient qui lui inspire des pages admirables.

Jamais le réel n'a paru à quelqu'un plus faux, et l'imaginaire plus vrai.
Les crises psychiques se succèdent maintenant au rythme de ses pièces : une par an environ. Entre 1852 et 1855, la maladie empire et il écrit alors ses plus belles oeuvres :  Sylvie, les Filles du feu, les Chimères, Aurélia. Il se rend à Goglau, en Silésie, où sa mère est enterrée, et le visage maternel se mêle à celui d'Aurélia...

En 1852,  il publie Lorély, souvenirs d'Allemagne.

Au début de 1855, le docteur Blanche, qui le soigne, essaie en vain de le dissuader de quitter son établissement. Nerval, honteux de son mal, évite ses amis -et ses amis l'évitent. Son dernier hiver est tragique. Démuni de ressources sûres, sans domicile fixe, il sombre peu à peu dans le désespoir dont il croyait avoir triomphé en composant Aurélia. Quittant le Boulevard pour le quartier du Châtelet, il creuse son trou dans ces vieilles rues labyrinthiques que Haussmann détruira bientôt. Dans la nuit du 25 au 26 janvier 1855, le thermomètre descend à -18°C. Gérard marche dans la sinistre rue de la Vieille Lanterne. Le froid pénètre ses os et dans son cerveau malade passent des éclairs de feu et de désespérance. Il monte sur le rebord d'une fenêtre munie de barreaux de fer, sort une tresse de sa poche, l'enroule sur un des barreaux, fait un noeud autour de sa tête et, sans quitter son chapeau, se laisse glisser. L'avant-veille, il avait écrit à une tante, chez laquelle il devait coucher : "Ne m'attends pas ce soir, car la nuit sera blanche et noire".

Sources : Dictionnaire des auteurs de tous les temps et de tous les pays, Bouquins, Robert Laffont, octobre 1990.

Le grand livre de la poésie française, Marcel Jullian, éditions Fixot, 1988.

Pour finir, quelques mots de Gérard de Nerval :

"Je suis le ténébreux, - le veuf, - l'inconsolé".

Oubli inqualifiable!

C'est pas vrai! Je viens de m'apercevoir que, dans mes "quelques paroles bien senties", j'avais oublié de mettre des extraits de l'album "De l'amour, de l'art ou du cochon?" Honte à moi! Moi qui aime tant ce disque et suis enchantée de voir que Thiéfaine chante "Psychanalyse du singe" et ""Comme un chien dans un cimetière" sur sa tournée actuelle! Pour me punir, je copierai cent fois "Je ne suis pas le mari de madame Müller

depuis lontemps je ne suis plus son amant"!!!

Bon, ben, sur cet album magnifique, il y a, par exemple :

"Ne cherche plus dans l'annuaire

j'ai mis les scellés sur mon coeur

mais passe plutôt chez le notaire

je te lègue ma part de bonheur".

 

Et puis aussi "Vendôme Gardenal Snack", à recopier en entier!

 

Et l'incontournable "De l'amour, de l'art ou du cochon?", dont je veux mettre aussi les paroles ici, plus tard.

 

J'ai mille idées pour ce blog : je voudrais consacrer un billet à Hölderlin, un à Gérard de Nerval, un autre à Baudelaire. J'aimerais chercher les raisons profondes de mon admiration pour Thiéfaine, le pourquoi, le comment, le "y a-t-il un remède?", le "mais en faut-il vraiment un?"... Essayer de décrire aussi l'indescriptible public de Thiéfaine, essayer de décrire l'indescriptible ambiance des chansons de Thiéfaine, parler en particulier de "La dêche, le twist et le reste". Etc. Et j'attends vos suggestions, tiens! D'ailleurs, si vous avez un moment, dites-moi pourquoi vous aimez Thiéfaine!

Erratum

Bien sûr, dans un des extraits d' "Exercice de simple provocation avec 33 fois le mot coupable", il faut lire "turlutte" et non "trulutte". Remarque, "trulutte", c'était pas mal non plus!

"Exercice de simple provocation avec 33 fois le mot coupable" : Thiéfaine a le génie des titres, il faudra que je fasse un billet là-dessus aussi!!