27/03/2009
Antigone
La pensée du jour : « Le jardin dormait encore. Je l'ai surpris, nourrice. Je l'ai vu sans qu'il s'en doute. C'est beau un jardin qui ne pense pas encore aux hommes ». Antigone, Jean ANOUILH.
"Décortiquons" un peu cette fabuleuse chanson qu'est "Annihilation". Commençons par Antigone, mentionnée dans la première strophe :
Antigone : fille d'Oedipe et de Jocaste, Antigone eut une vie douloureuse et une mort atroce, mais ne se départit jamais de son dévouement et d'une grandeur d'âme sans pareils dans la mythologie. Quand son père fut chassé de Thèbes par ses frères et quand, les yeux crevés, il dut mendier sa nourriture sur les routes, Antigone lui servit de guide, veilla jusqu'à la fin de son existence à le réconforter et l'assista dans ses derniers moments à Colone. Puis elle revint à Thèbes; mais là, une nouvelle et cruelle épreuve l'attendait. Ses frères se disputaient le pouvoir et Polynice, parti chercher du secours chez Adraste, le roi d'Argos, revint avec une armée étrangère assiéger la ville et combattre son frère Etéocle comme un ennemi. Après la mort des deux frères, Créon, leur oncle, prit le pouvoir à Thèbes, fit des funérailles solennelles à Etéocle, mais interdit de donner une sépulture à Polynice, parce qu'il avait porté les armes contre sa partie avec le concours d'étrangers. Ainsi l'âme de Polynice ne connaîtrait jamais de repos. Pourtant, Antigone, qui considérait comme sacré le devoir d'ensevelir les morts, se rendit une nuit auprès du corps de son frère et, selon le rite, versa sur celui-ci quelques poignées de terre. Surprise par un garde et conduite auprès de Créon, elle s'entendit condamner à mort et fut enterrée vive dans le tombeau des Labdacides. Plutôt que de mourir de faim, elle préféra se pendre. Hémon, le propre fils de Créon, se suicida de désespoir; Eurydice, l'épouse de Créon, ne put supporter la mort de ce fils qu'elle aimait par-dessus tout et mit fin elle aussi à ses jours.
La figure d'Antigone prend tout son sens au XXème siècle. La contradiction entre la conscience humaine, individuelle, et le bien public, la raison d'Etat que présentent les discours d'Antigone et de Créon, trouve, dans la montée du fascisme et de l'explosion de la Seconde Guerre mondiale, toute son acuité et sa violence. Ce seront les pièces de Cocteau (1942), d'Anouilh (1944) ou de Brecht (1947). « La Résistance, dira Malraux, c'est le non d'Antigone à Créon ».
Source : Dictionnaire de la mythologie grecque et romaine, Larousse, 1993.
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24/03/2009
Annihilation
La pensée du jour : "On n'est pas artiste sans qu'un grand malheur s'en soit mêlé". Jean GENET
Ce matin, voici les paroles d'une claque que je pris un jour sur la tournée HFT en solitaire : "Annihilation". Je ne suis pas sûre de toutes les paroles et vais souligner les passages pour lesquels j'aurais besoin de vos lumières.
Qu'en est-il de ces heures troubles et désabusées
Où les dieux impuissants fixent la voie lactée ?
Où les ... nazi(e)s s'installent au Pentagone
Où Marilyn revêt son treillis d'Antigone ?
On n'en finit jamais de r'faire la même chanson
Avec les mêmes discours les mêmes connotations
On n'en finit jamais de rejouer Guignol
Chez les Torquemada chez les Savonarole
Qui donc pourra faire taire les grondements de bête
Les hurlements furieux de la nuit dans nos têtes ?
Qui donc pourra faire taire les grondements de bête ?
Lassé de grimacer sur l'écran des vigiles
Je revisite l'Enfer de Dante et de Virgile
Je chante des cantiques mécaniques et barbares
A des poupées Barbie barbouillées de brouillard
C'est l'heure où les esprits dansent le pogo nuptial
L'heure où les vieux kapos changent ma pile corticale
C'est l'heure où les morts pleurent sous leur dalle de granit
Lorsque leur double astral percute un satellite
Qui donc pourra faire taire les grondements de bête
Les hurlements furieux de la nuit dans nos têtes ?
Qui donc pourra faire taire les grondements de bête ?
Crucifixion avec la Vierge et dix-sept saints
Fra Angelico met des larmes dans mon vin
La piété phagocyte mes prières et mes gammes
Quand les tarots s'éclairent sur la treizième lame
On meurt tous de stupeur et de bonheur tragique
Au coeur de nos centrales de rêves analgésiques
On joue les trapézistes de l'antimatière
Cherchant des étoiles noires au fond de nos déserts
Qui donc pourra faire taire les grondements de bête
Les hurlements furieux de la nuit dans nos têtes ?
Qui donc pourra faire taire les grondements de bête ?
Je dérègle mes sens et j'affûte ma schizo
Vous est un autre je et j'aime jouer mélo
Anéantissement tranquille et délicieux
Dans un décor d'absinthe aux tableaux véroleux
Memento remember je tremble et me souviens
Des moments familiers des labos clandestins
Où le vieil alchimiste me répétait tout bas :
« Si tu veux pas noircir, tu ne blanchiras pas »
Qui donc pourra faire taire les grondements de bête
Les hurlements furieux de la nuit dans nos têtes ?
Qui donc pourra faire taire les grondements de bête ?
Je calcule mes efforts et mesure la distance
Qui me reste à blêmir avant ma transhumance
Je fais des inventaires dans mon Pandémonium
Cerveau sous cellophane coeur dans l'aluminium
J'écoute la nuit danser derrière les persiennes
Les grillons résonner dans ma mémoire indienne
J'attends le zippo du diable pour cramer
La toile d'araignée où mon âme est piégée
J'attends le zippo du diable pour cramer
La toile d'araignée où mon âme est piégée
Qui donc pourra faire taire les grondements de bête
Les hurlements furieux de la nuit dans nos têtes ?
Qui donc pourra faire taire les grondements de bête ?
Qui donc pourra faire taire les grondements de bête
Les hurlements furieux de la nuit dans nos têtes ?
Qui donc pourra faire taire les grondements de bête ?
Qui donc ?
Hubert-Félix THIEFAINE
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22/03/2009
Séquelles
La pensée du jour : "Aimer quelqu'un, c'est le dépouiller de son âme, et c'est lui apprendre ainsi - dans ce rapt - combien son âme est grande, inépuisable et claire. Nous souffrons tous de cela : de n'être pas assez volés. Nous souffrons des forces qui sont en nous et que personne ne sait piller, pour nous les faire découvrir". Christian BOBIN.
Ne nous en cachons pas : « Séquelles » a atterri avec deux jours d'avance dans nos esgourdes. Tout d'abord, grande joie de retrouver, dans le livret, des pseudos ou des noms sur lesquels je peux mettre des visages. Camélia, Le Doc, Jean-Paul D., Evadné, Adrien. Des noms ou des pseudos derrière lesquels se cachent des voix amies, et je crois vous entendre me susurrer à l'oreille les jolis mots que vous avez mis sur vos séquelles. Allez, avouons-le : je suis un peu triste de ne pas avoir pondu un texte capable de retenir l'attention de ceux qui ont choisi les meilleurs témoignages. Il est vrai que j'ai d'autres séquelles à fouetter depuis un certain temps et que l'inspiration n'est pas venue. Et quand bien même, cela n'aurait peut-être rien changé. Pas d'amertume, donc. Mais quand même... Un petit soupçon de je ne sais quoi, une vague tristesse de ne pas en être. Mais d'autres ont su dire leurs séquelles et ce sont un peu les miennes que je lis aussi dans tous ces beaux témoignages.
Bien sûr, il n'y a pas soixante mille surprises dans cette compilation. Mais, rien que pour « Annihilation », ce best-hier vaut le détour, et j'ai écouté cette chanson en boucle tout à l'heure en rentrant de chez mon frère. Texte grandiose qui, à lui seul, pourrait donner lieu à une vingtaine de notes. Et donnera lieu à une vingtaine de notes, d'ailleurs, c'est promis ! Et puis il y a aussi cette sublime promesse : l'antibio signée Jean-Charles Chapuzet. L'idée est originale : revisiter l'oeuvre et la vie de Thiéfaine par le biais d'un roman policier, il fallait y penser ! Ce livre sortira en mai 2009. A suivre...
21:29 | Lien permanent | Commentaires (6)
15/03/2009
La nuit je mens...
La pensée du jour : « Parfois (comme hier, dans la cour de la Bibliothèque nationale), comment dire cette pensée fugitive comme un éclair, que mam. n'est plus là à jamais; une sorte d'aile noire (du définitif) passe sur moi et me coupe le souffle ». Roland BARTHES, Journal de deuil.
La nuit je mens
On m'a vu dans le Vercors
sauter à l'élastique
voleur d'amphores
au fond des criques
j'ai fait la cour à des murènes
j'ai fait l'amour
j'ai fait le mort
t'étais pas née
à la station balnéaire
tu t'es pas fait prier
j'étais gant de crin, geyser
pour un peu je trempais
histoire d'eau
la nuit je mens
je prends des trains
à travers la plaine
la nuit je mens
je m'en lave les mains
j'ai dans les bottes
des montagnes de questions
où subsiste encore ton écho
où subsiste encore ton écho
j'ai fait la saison
dans cette boîte crânienne
tes pensées je les faisais miennes
t'accaparer seulement t'accaparer
d'estrade en estrade
j'ai fait danser tant de malentendus
des kilomètres de vie en rose
un jour au cirque
un autre a cherché à te plaire
dresseur de loulous
dynamiteur d'aqueducs
la nuit je mens
je prends des trains
à travers la plaine
la nuit je mens
effrontément
j'ai dans les bottes
des montagnes de questions
où subsiste encore ton écho
où subsiste encore ton écho
on m'a vu dans le Vercors
sauter à l'élastique
voleur d'amphores
au fond des criques
j'ai fait la cour à des murènes
j'ai fait l'amour
j'ai fait le mort
t'étais pas née
la nuit je mens
je prends des trains
à travers la plaine
la nuit je mens
je m'en lave les mains
j'ai dans les bottes
des montagnes de questions
où subsiste encore ton écho
où subsiste encore ton écho
la nuit je mens...
(Alain Bashung, J. Fauque, Les Valentins).
09:51 | Lien permanent | Commentaires (6)
03/03/2009
Grande nouvelle
Voici un copier-coller d'un message que Jean-Michel m'a envoyé ce matin :
Hommage à Ferré du 4 au 25 juillet 2009 à Gourdon (Maison du Sénéchal) Invité d’honneur Hubert Félix Thiéfaine. Exposition d’archives Alain Fournier et Monique Maillard
Exposition d’artistes José Corréa et Christian Martinon Quatre soirées spectacles
Vendredi 10 juillet : 1re partie : Scène ouverte, 2e partie : Jehan
Samedi 11 juillet : Charles Bénichou avec la complicité de Julie Darnal
Dimanche 12 juillet : Michel Hermon
Samedi 18 juillet : Joan Pau Verdier Trois conférences-débats Ceux qui l’ont connu / L’œuvre poétique de Léo / L’édition autour de Léo Ferré S'adresser à : A. Fournier alainfournier@hotmail.fr et C. Martinon martinonceramiste@orange.fr
Bon, j'ai bien envie d'être de la partie. Pas vous ?!
11:06 | Lien permanent | Commentaires (7)
"Reflets de flammes en fleurs dans les yeux du cheval que j'embrasse à Turin"...
La pensée du jour : "Là où je n'entends pas de musique, tout me semble mort". Nietzsche dans une lettre à sa mère.
Friedrich Nietzsche (1844-1900) : philosophe allemand. Etudiant à Bonn et à Leipzig, ami de Richard Wagner, il professa à l'Université de Bâle de 1869 à 1878. Il mourut fou. L'amour enthousiaste de la vie fut le principe invariable de sa philosophie. Sa recherche d'une synthèse entre le monde dionysiaque des désirs et le monde apollinien de la sagesse (La Naissance de la tragédie, 1872), son refus de la morale chrétienne, ou « morale des esclaves » (Humain, trop humain, 1878; Par-delà le bien et le mal, 1886), son « renversement des valeurs », qui substitue une morale créatrice aux théories des valeurs toutes faites, sa théorie du surhomme (Ainsi parlait Zarathoustra, 1883-1885; La Généalogie de la morale, 1887; Le Crépuscule des idoles, 1888), ainsi que sa théorie du « retour éternel » des choses de la vie humaine sont les thèmes principaux de sa pensée. L'effort de sa morale fut de sortir du pessimisme le plus profond, mais en reconnaissant toutes les expériences négatives, les « malheurs » que la vie peut réserver à l'homme : sa maxime fut de « faire avec le désespoir le plus profond l'espoir le plus invincible », grâce à un héroïque effort de la volonté et de l'imagination. Son lyrisme, qui implique une contemplation esthétique de la vie et de la nature, le rapproche des philosophes de la nature propres au romantisme allemand (Schelling, Schopenhauer). Sa théorie du retour éternel a influencé certaines philosophies de l'histoire; sa morale individualiste a marqué certaines oeuvres littéraires – celle de Gide, par exemple. Quant à l'exploitation de sa philosophie par le fascisme et le national-socialisme, elle procède d'une déformation de sa pensée.
Source : Dictionnaire de la philosophie, Didier JULIA, librairie Larousse, 1894.
A propos du « cheval que j'embrasse à Turin » (j'ai déjà évoqué cet épisode, mais j'en redis deux mots après avoir lu le dossier du magazine Lire consacré à Nietzsche en février de cette année. D'ailleurs, les lignes qui vont suivre sont extraites de ce même magazine) :
« En avril 1888, Nietzsche découvre « la calme et aristocratique ville de Turin ». Séduit, il estime avoir trouvé là, écrit-il à sa mère, son « véritable bonheur ». Il y revient à l'automne. Il loue une chambre au 6 via Carlo Alberto, fréquente le café Fiorio, se promène le long du Pô. « Turin est le premier endroit où je suis possible », écrit-il. Les derniers mois de 1888, que Nietzsche passe dans la capitale piémontaise, sont une période d'activité intense. Il y met la dernière main au Crépuscule des idoles, Nietzsche contre Wagner, L'Antéchrist et Ecce Homo. Et c'est à Turin, Piazza Carlo Alberto, que le 3 janvier 1889, selon la légende, Nietzsche, pris d'une crise de démence, se jette au cou d'un cheval maltraité par son cocher, avant de s'effondrer et de sombrer dans le silence dont il ne devait plus sortir. »
Remarques : -Je parlerai bientôt plus en détail de la théorie du surhomme, mais je veux d'abord me documenter un peu.
-Nous allons passer une partie de nos vacances d'avril dans le Piémont, non loin de Turin, et je compte y photographier les endroits où Nietzsche passa. Je mettrai tout cela sur le blog.
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26/02/2009
Whiskeuses images again
La pensée du jour : "Je flye vers le chaos caché
dans les vestiges de ma mémoire". Hubert-Félix THIEFAINE
Vieille copie du terrien-terreur
tirée au ronéo-chibreur
souvent j'aim'rais faire fonctionner
la génération spontanée
comme un pou dans une cage en feu
j'télégraphie mon code foireux
attention traversée d'engins
sur Livre des morts européens
bloody man ah ah ...
fatigué des drapeaux en berne
j'm'amuse à quitter la caverne
à voir si l'on danse en éveil
dans les particules du soleil
mais j'atterris sur des cols durs
au pied de la Mangeuse d'ordures
le cul poisseux dans l'caniveau
à baiser mon porte-manteau
bloody man ah ah ... ***
hé toi l'animal futurien
toi qu'as bien connu les martiens
t'as p't'êt' l'horaire des boute-en-train
à quelle heure passe le prochain bar
que j'paie une bière à mon clébard
certaines nuits j'imagine l'exit
du labyrinthe dans le transit
de 40 milliards de couleurs
se r'niflant avec l'oeil du coeur
mais j'me réveille déglingué
avec un casque sur le nez
et j'ai beau raccorder les fils
j'traîne une vieille caisse marquée fragile
bloody man ah ah ... fragile
bloody man
Paroles : Hubert-Félix Thiéfaine / Musique : Claude Mairet
***Comme j'ai fait dernièrement une note sur « Alambic/sortie-sud », j'ai réécouté cet album plusieurs fois. Et tout à l'heure, dans la voiture, en partant au boulot, j'ai eu une révélation: juste là où j'ai mis les trois astérisques, Hubert dit : « Übermensch ou underdog man » !!! Vous en étiez-vous aperçus ? Je pensais qu'il marmonnait un truc, comme ça, mais voilà : c'était oublier un peu vite que le père Hubert ne marmonne jamais des trucs comme ça, sans raison, juste pour la forme ! Je crois vraiment qu'il dit « Übermensch ou underdog man ». Qu'en pensez-vous ? Ce qui voudrait dire que ça y est, même sur cet album, je la tiens, ma référence à l'Allemagne !! «Übermensch », c'est le surhomme, c'est une notion qui ramène à Nietzsche, si je me souviens bien. Il faut que je creuse la question, je fais une note là-dessus dès que possible.
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22/02/2009
Allain Leprest à l'Ostra hier soir
La pensée du jour : "Quand quelqu'un de cher disparaît, nous payons de mille regrets poignants la faute de survivre. Sa mort nous découvre sa singularité unique; il devient vaste comme le monde que son absence anéantit pour lui, que sa présence faisait exister tout entier; il nous semble qu'il aurait dû tenir plus de place dans notre vie : à la limite toute la place". Simone de Beauvoir. Toutes mes pensées du jour et de chaque seconde vont vers elle, ma maman qui me manque tant et à qui j'aurais aimé raconter la soirée d'hier, et tant de choses encore...
Ce qu'il y a de formidable à l'Ostra, petite salle de concert nancéienne, c'est qu'on ne sait jamais comment la soirée va se terminer. Parfois, on ne sait même pas comment elle va commencer ! Hier, par exemple, je pensais voir, en première partie d'Allain Leprest, le groupe local Tournée générale (allez donc faire un tour sur leur Myspace, mettez-vous leurs chansons dans les esgourdes !). Mais ce fut plus encore : il y eut d'abord un duo dont j'ai oublié le nom et dont je n'ai entendu que la dernière chanson parce que je suis arrivée en retard, puis ce fut Martial Robillard (il avait déjà assuré la première partie de Zaza Fournier à l'Ostra le 24 janvier), et enfin Tournée générale, qui interprétait des chansons de Christian Paccoud.
Puis, vers 23 heures, ce fut lui. Allain Leprest, le grand, le sublime. Je suis certaine que c'est un artiste dont les chansons parleraient à Tommie, Evadné, Yoann, Sapq. Alfana aussi, sûrement. Allain Leprest, loin de tout tapage médiatique, fait son petit bonhomme de chemin, son chemin de grand bonhomme dans la chanson française. Superbe plume, voix lessivée par l'alcool et le tabac, poésie coup de poing ou caresse. Il était accompagné au piano par Léo Nissim (j'ai d'abord cru que c'était un surnom : « Léonissime », un prénom et un suffixe pour dire le talent de ce pianiste grandiose !). Allain nous a interprété toutes les chansons que j'avais espérées. Si, juste avant le concert, j'avais dit à Sam que je rêvais d'entendre « Il pleut sur la mer », « La retraite », « Nu », « J'étais un gamin laid », « C'est peut-être ». Allain Leprest, ce n'est pas seulement un chanteur, c'est aussi un comédien, et il faut regarder les expressions de son visage et ses mains pendant tout le spectacle. D'ailleurs, dès la première seconde, il nous happe totalement. Maxime, de Tournée générale, l'a accompagné à l'accordéon sur je ne sais plus quelle chanson. Jean-Philippe, le chanteur de ce même groupe (quelle voix il a, et quelle présence, lui aussi !), a interprété avec lui « C'est peut-être », cette magnifique chanson qui raconte toutes sortes de talents qui n'aboutissent pas, qui vont s'échouer contre la dure nécessité de gagner sa croûte autrement que par son art. Cette gamine qui est peut-être Colette, elle finira dans sa cuisine, un torchon étouffant ses dispositions artistiques. Et lui, là, qui peut-être a tout en lui pour devenir Jacques Brel, eh bien, autour de lui, il n'aura rien pour l'aider à devenir Jacques Brel. Il finira maçon. Ce texte est d'une époustouflante beauté, comme tous les textes de Leprest, d'ailleurs. « Il puait mauvais à rendre sourd », quelle jolie trouvaille parmi tant d'autres !
Je ne sais plus très bien à quelle heure le concert s'est terminé. En tout cas, comme après le spectacle de Zaza Fournier, tout le monde s'est installé au bar. Allain Leprest est venu lui aussi. Je me suis pointée avec quatre CD, je voulais qu'il en choisisse un pour le signer, et il m'a proposé de tous les dédicacer ! Il a agrémenté les pochettes de « Nu » et de « Quand auront fondu les banquises » de jolis dessins. Sacré bonhomme dont la présence remplit de chaleur tout l'espace qui l'entoure et tous les êtres qui ont la chance de se trouver à ses côtés. Et puis, l'Ostra, c'est vraiment un lieu magique. Une salle en sous-sol, petite par la taille, mais si grande par l'âme... Une âme qui repose sur les propriétaires des lieux. Baldo, passionné de chanson française, homme au grand coeur. Sa femme, dont j'ignore le prénom, d'une immense sensibilité... Vers deux heures du matin, la maison a offert un couscous à tous ceux qui étaient là, à tous ceux qui avaient la chance de ne pas être ailleurs !
Parfois, je rêve un peu, tranquille : et si je demandais à Baldo de nous accueillir chez lui pour une soirée Thiéfaine ? Et s'il disait « oui » ? Et si vous étiez de la partie ? En attendant, allez quand même chercher des infos sur Leprest, cousin, par l'âme et le talent, d'un autre chanteur dont nous admirons l'oeuvre !
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