25/02/2010
Méthode de dissection : "HF Thiéfaine Paris-Zénith" (deuxième partie)
La pensée du jour : "Et je me suis rendu compte qu'il fallait absolument que j'écrive, parce que c'était une libération, parce que c'était une explosion sans conséquence pour les autres, c'était mieux que de casser la gueule à quelqu'un". CIORAN
Le CD 2 s'ouvre sur cette sublime chanson qu'est « La dêche, le twist et le reste ». Très belle version, déchirante même, avec ce superbe violon chinois qui vient imprimer encore plus de tension à cette histoire d'amour qui tourne mal. Pour moi, et je l'ai déjà dit ici, « La dêche, le twist et le reste », c'est un peu « La vie d'artiste » façon Thiéfaine. Même sombre histoire qui tourne au vinaigre, même mélasse financière (« on bouffe une fois tous les trois jours » / « cette fameuse fin du mois qui, depuis qu'on est toi et moi, nous revient sept fois par semaine » / « et notre pitance incertaine », « moi je bricole et je fabrique des chansons qui sont invendables » / «et nos soirées sans cinéma et mon succès qui ne vient pas »).
« ça peut durer jusqu'à toujours
à moins que l'on ait le courage
de se dire merde un beau jour
et de mettre fin au naufrage »...
Eh oui, comme chantait Ferré, « l'amour meurt
comme meurent les fleurs
l'amour meurt
comme mentent les gens
l'amour va
comme vont les rivières ».
L'amour meurt, passe son tour, englué dans un quotidien glauque (« tu t'jettes sur la bouteille d'éther pour ton vol plané à deux mille »), réduit à des préoccupations bien prosaïques, mais cependant essentielles... Est-il nécessaire de dire que cette chanson me flanqua une gifle inoubliable lorsque je la découvris, à 19 ans ? Légère impression, à l'époque, d'avoir une expérience commune avec cousin Hub'...
Ferré, tiens, je l'évoquais ci-dessus, et le revoilà donc, chanté par Thiéfaine : « La solitude ». Là encore, « je suis d'un autre pays que le vôtre », « le désespoir est une forme supérieure de la critique », tout cela me fit un effet boeuf quand j'étais jeune. Et c'est Thiéfaine qui, deux ans après la disparition de Ferré, me mena vers lui. De Ferré, j'aime surtout les adaptations qu'il a faites de certains poèmes de Verlaine, d'Apollinaire, de Rimbaud, d'Aragon, et de tant d'autres. J'aime « Pépée » j'aime « L'âge d'or », « L'amour meurt », « Les romantiques », « La mélancolie, « Vingt ans », « La mémoire et la mer », « Thank you Satan ». Et aussi le très beau livre Benoît Misère. Mais je n'ai jamais réussi à entrer pleinement dans l'univers de chansons plus obscures, comme « Le chien », par exemple.
Bref... En tout cas, l'interprétation que Thiéfaine livre ici de « La solitude » est excellente, je trouve. D'ailleurs, je me souviens d'une belle soirée consacrée à Ferré, à Lyon, et durant laquelle Hubert avait brillamment interprété des chansons de celui qu'il admire tant...
Ensuite, c'est « Alligator 427 » (sans « s » ici). La chanson aux lancinants leitmotivs (« vive la mort », « je vous attends »). La chanson qui est capable de me faire flipper quand je l'écoute dans le noir (si, c'est vrai, mais je dois dire que je suis très impressionnable !!).
Puis, un peu de douceur dans ce monde vendu aux « fantômes, aux hyènes et aux vautours » : « Je t'en remets au vent ». Avec une espèce d'effet de distanciation (« Verfremdungseffekt ») à la Brecht quand Hubert déclare avoir écrit cette chanson pour une certaine Jeanne-Marie Cramouillot, qui était sa petite amie au CM2. Il paraît de toute façon que « Je t'en remets au vent » date des très jeunes années de Thiéfaine. Avoir écrit cela sans grande expérience, faut le faire, quand même ! « D'avoir voulu vivre avec moi
t'as gâché deux ans de ta vie
deux ans suspendue à ta croix
à veiller sur mes insomnies ». Je me souviens encore du sourire de ma mère, à Sarreguemines, quand la chanson avait commencé. Sans doute une des seules qu'elle ait appréciées pendant le concert, avec aussi « Animal en quarantaine » et « Crépuscule transfert », le reste lui semblant trop baroque !! J'aime bien la façon dont Thiéfaine présente cette chanson : « Mon pauvre Thiéfaine, tu sais plus quoi inventer pour te rendre intéressant » (plus tard, il chantera pour se rendre intéressant, d'ailleurs !). Et le terrible « Maintenant, je crois que dans les cours de récréation, les petits enfants savent que la Bosnie-Herzégovine, ça existe ».
« A quoi peut ressembler ton spleen
ton désespoir et ton chagrin
vus d'une des étoiles anonymes
de la constellation du chien ? »
Deuxième medley ensuite. Avec « Was ist das Rock'n'roll » comme fil conducteur.
« Série de 7 rêves en crash position ». Alors là, à Sarreguemines, sentant approcher la fin du concert, et donc du rêve, je peux vous dire que les mots « mais que devient le rêveur quand le rêve est fini ?» avaient eu une saveur assez amère pour moi. Ce concert, je l'avais tellement attendu, tellement rêvé, que le vivre enfin marquait en même temps la fin de quelque chose. La fin d'une attente ardente, tout simplement...
Heureusement, il y eut « Encore un petit café » pour me tenir debout. Et « Pogo sur la deadline ». Fin du rêve. Pas grave, j'attendrai que passe le suivant, comme d'autres espèrent le prochain bar !
Et juste comme ça, pour le plaisir, un lien vers une interview d'Higelin, lien qu'Evadné m'a mis hier sur mon mur Facebook, cadeau pour lequel je la remercie, le grand Jacques restant, ici encore, fidèle à l'image que je me fais de lui. Image d'un être lumineux, pour qui l'amour demeure la valeur première. (Hugo, si tu passes par là, fonce voir ça, tu devrais aimer !)
http://musique.sfr.fr/recherche/?search=Higelin&targe...
Et notez déjà sur vos précieuses tablettes que Jacques Higelin sera au Fou du roi demain sur France Inter !
11:01 | Lien permanent | Commentaires (20)
22/02/2010
Psychopompes / métempsychose & sportswear
La pensée du jour : "Comme quoi parfois tout finit bien. Je le dis vite en passant, car, lorsque les choses s'arrangent, j'en ai de l'angoisse, je me demande toujours ce que l'avenir a en tête". Romain GARY
Psychopompes / métempsychose & sportswear
enfant de la balle et de la bête
je peignais mes dazibaos
sur « l'incertitude du poète »
qu'on croise au gré des noirs échos
et j'ai bu la lie de ses vers
jusqu'à la fièvre de l'écume
mais son vin était si amer
que je suis dev'nu l'amertume
nike your mother / reebok your sister
& adidas rock & roll
prototype dans un groupe en loques
au fond d'impossibles garages
je poussais mes troupeaux de phoques
loin à l'intérieur des nuages
& j'ai combattu leur messie
à m'en péter l'excalibur
pendant qu'les coqs de l'insomnie
chantaient trois fois leur imposture
nike your mother / reebok your sister
& adidas rock & roll
de port en port / de quai en quai
j'ai rencontré de drôles de gnomes
des intellos qui confondaient
C.G. Jung avec C. Jérôme
& glauque à Santa Barbara
avec un sacré mal de vivre
je me disais : je ne sais pas
pourquoi j'vais comme un bateau ivre
Santa Barbara je ne sais pas ...
de sanibroyeur en sixtine
je vois s'évanouir le futur
et je tire à la chevrotine
sur les chiennes en manteau d'fourrure
je vois l'ivrogne & son tambour
assis devant son chevalet
& Mona Lisa, mon amour
dans un blindé cabriolet
nike your mother / reebok your sister
& adidas rock & roll
la vie défile au nom du Christ
des pissotières du pain rassis
Staline était séminariste
et Jerry Lee Lewis aussi
mais le Dieu manque à cet hôtel
où je dois jouer les victimes
en contractant des salmonelles
avec des hosties aux enzymes
nike your mother / reebok your sister
& adidas rock & roll
à r'garder passer les linceuls
dans la rue aux spectres visqueux
j'sais plus si c'est moi qui suis seul
ou les aut'qui sont trop nombreux
o.k. l'art est une escroquerie
et j'ai limé trop d'as de coeur
en jouant blue moon kentucky
sous l'oeil du colonel Parker
nike your mother / reebok your sister
& adidas rock & roll
& quand le Pinocchio baveux
poussera ma brouette à l'Ankou
j'veux faire des bulles avec mon noeud
pour éloigner les loups-garous
j'veux qu'on m'déglace au Gin-Synthol
dans une boîte de Joseph Cornell
ou à la Vodka d'chez Warhol
avec du Tomato Campbell's
nike your mother / reebok your sister
& adidas rock & roll
nike ta mère / reebok ta soeur
& adidas rock & roll ... / ... (ad lib.)
Après Higelin, autre petite parenthèse aujourd'hui, avant de poursuivre la dissection de « HF Thiéfaine Paris-Zénith ».
Pourquoi cette parenthèse ? A cela mille et une raisons. La première, c'est que j'adore cette chanson. Ensuite, elle regorge d'allusions à différents artistes, à de multiples oeuvres. Il y a aussi cette évocation de l'Ankou, personnage auquel j'ai déjà dédié une note, origines bretonnes obligent !!!
Une perle parmi d'autres dans cette chanson : « A r'garder passer les linceuls
dans la rue aux spectres visqueux
j'sais plus si c'est moi qui suis seul
ou les autres qui sont trop nombreux ». J'adore cette phrase ! Même qu'il y a des fois où pour ma part, je me demande si ce n'est pas moi qui suis trop nombreuse dans mon incommensurable solitude !!!
Aujourd'hui, je me penche plus particulièrement sur « j'veux qu'on m'déglace au Gin-Synthol dans une boîte de Joseph Cornell ». Sur Facebook, dernièrement, Uther m'a demandé si, lors de mon séjour à Venise, j'avais visité la fondation Peggy Guggenheim et si j'y avais vu les boîtes de Joseph Cornell. Horreur, je ne voyais pas de quoi il parlait, je ne voyais tout bonnement pas de quelles boîtes il s'agissait ! Et l'allusion à Hubert m'avait échappé !!!! Oui, je reconnais que je ne sais pas par coeur toutes les chansons de Thiéfaine ! Je me souviens d'en avoir discuté un jour avec Evadné : elle disait qu'elle savait sur le bout des doigts les anciens titres, mais avait du mal à retenir les textes de certaines chansons récentes. Idem pour moi ! Nous nous étions demandé si ce n'était pas déjà l'âge qui rendait notre mémoire défaillante ! Aucune idée ! Et donc, pour en revenir à Venise : oui, bien sûr, visiter la fondation Peggy Guggenheim faisait partie de mes priorités ! Mais, en me rendant dans cet endroit mythique, je ne pensais pas du tout à Joseph Cornell. Pire : lorsque je me suis retrouvée devant ses boîtes, je n'ai même pas pensé une seconde à « Psychopompes / métempsychose & sportswear ». Que la honte s'abatte sur moi en une pluie de cendres ! Alors voilà, je rattrape mon impardonnable erreur. Voici quelques boîtes de Joseph Cornell. Et je vais bientôt créer ici un album photo sur Venise et la fondation Guggenheim. J'ai été un peu déçue par le lieu, je dois dire. Peut-être parce que les salles sont trop petites et qu'on n'a pas assez de recul pour admirer les oeuvres exposées ? Enfin, quand même, je suis restée en extase devant les Max Ernst.
Sinon, grâce à cette chanson, j'ai appris le mot « dazibao » : en Chine, c'est une affiche rédigée par un simple citoyen, traitant d'un sujet politique ou moral, et placardée pour être lue par le public.
Bref, assez papoté. Voici quelques boîtes de Joseph Cornell :
10:46 | Lien permanent | Commentaires (15)
21/02/2010
Coup de foudre
La pensée du jour : "C'est effrayant ce qu'on en a des choses et des gens qui ne bougent plus dans son passé. Les vivants qu'on égare dans les cryptes du temps dorment si bien avec les morts qu'une même ombre les confond déjà. On ne sait plus qui réveiller en vieillissant, les vivants ou les morts". Louis-Ferdinand CELINE.
Mais la pensée du jour de Clara vaut son pesant d'or aussi. "Ecoutez" ça : au parc, je lui dis "Clara, la balançoire est trop mouillée. A ta place, je n'en ferais pas". Et Clara de rétorquer : "Ben, vas-y, maman, n'en fais pas" !!!!!!!
-Coup de foudre
-J'ai jamais su
-Qu'est-ce qui se passe à la caisse ?
-New Orleans
-Egéries, muses et modèles
-Kyrie Eleison
-Hôtel Terminus
-Août put
-Valse MF
-Bye bye bye
-Aujourd'hui la crise
-Expo photos
C'est la liste des titres de « Coup de foudre », le nouvel album d'Higelin, que j'ai pu écouter ce soir en intégralité sur Deezer et que je foncerai acheter demain !
J'ai déjà dit, je crois, à quel point j'aime Higelin ! J'aime sa folle fantaisie, son appétit de vivre, sa gourmandise, oui, les étincelles dans ses yeux ... mais peut-être que ce sont des allumettes ?! J'ai vu Higelin quatre ou cinq fois en concert. A chaque fois, je me demandais quelles surprises il allait nous balancer. Je n'ai jamais été déçue. Je l'ai vu un soir dans une salle incroyable, au fond d'un jardin. Concert gratuit et magnifique, durant lequel il avait interprété beaucoup de chansons de Trénet. Je l'ai revu plus récemment, émouvant, magnifique, pour un concert dont il avait dit lui-même dès le début qu'il ne savait pas bien où il allait le mener. Evoquant entre autres sa mère dans une chanson sublime et que je m'attendais à trouver sur « Coup de foudre ». Mais non, elle ne figure pas parmi les titres de l'album. C'est peut-être mieux comme ça, elle est trop émouvante...
Parlons donc de « Coup de foudre » :
Déjà, il y a environ un mois, j'avais pu écouter «J'ai jamais su » sur MySpace. Mélodie entraînante, petit refrain sympa qui s'imprime vite dans la mémoire (« tout bonheur que la main n'atteint pas est un leurre »)... « J'ai jamais su sur quel pied danser avec toi ». J'aime Higelin dans ses hésitations amoureuses, tout comme dans ses grandes déclarations (pour moi, « Tête en l'air » est une des plus belles chansons d'amour que la Terre ait jamais portées !!!). Alors voilà, dans « J'ai jamais su », il avoue sa difficulté à cerner la personnalité de celle qu'il aime. Merci, on se sent moins seul, Jacquot !!
Quant à la chanson qui ouvre l'album et lui donne son titre magique, elle est très belle aussi.
« C'est pas qu'je t'aime, t'aime, t'aime, t'aime, t'aime,
C'est pas qu'je t'aime, t'aime, t'aime, t'aime, t'aime,
Mais y'a d'ça ». C'est si bien dit !
Comme ça, à la première écoute, je retiendrais tout particulièrement « New Orleans », « Valse MF », « Bye bye bye », « Coup de foudre », bien sûr, « J'ai jamais su », évidemment. J'aime bien la douceur de « Egéries, muses et modèles ». « Août put » me rappelle un sublime moment du dernier concert d'Higelin : il avait dirigé le public pendant un petit moment, lui faisant chanter « Gourdon, Alpes-Maritimes, dont le donjon culmine à deux mille cinq cents pieds du niveau de la mer Méditerranée» !!! Ici, clin d'oeil à mon ami Fred06 ! C'est où, Gourdon ?!! « C'est le mois d'août, le mois où moi j'doute », ça me rappelle un peu « Mais c'est toujours au mois de mai qu'on a envie de se pendre » !
Et puis, oui, il y a « Valse MF », dont je cite pêle-mêle les extraits marquants :
« Quand on vit comme moi dans l'36ème dessous,
où y'a qu'des barjots, des tordus, des voyous,
on comprend jamais trop
ceux qui s'plaignent quand ils ont tout c'qu'il faut ».
« J'lis pas les journaux, alors j'ai peur de rien
Aujourd'hui, temps pourri, demain il fera beau ».
« La télé, la radio, c'est qu'du mou d'veau pour les chiens ».
« C'est la fin des asticots ».
Superbe chanson sur la crise, qui s'achève dans un splendide étouffement ! Un autre titre traite de ce fléau qui frappe le monde : « Aujourd'hui la crise ». Et toujours le même optimisme : « C'est dur aujourd'hui peut-être, demain ça s'ra vachement mieux », c'est ce que me dit toujours un de mes adorables collègues quand j'ai un coup de moins bien ! Adorable collègue qui aime Thiéfaine et Higelin aussi, d'ailleurs !!
Cet album est divin ! Beaucoup de chansons sautillantes de joie et d'entrain, cela fait un bien fou !
Merci, monsieur Higelin, merci d'illuminer nos chaumières et nos coeurs !
21:38 | Lien permanent | Commentaires (23)
20/02/2010
Méthode de dissection : "HF Thiéfaine Paris-Zénith" (première partie)
La pensée du jour : "Avant tout, je cherche le cas : dans la réflexion, la littérature, mon intérêt va surtout au fragile, au précaire, à ce qui s'effondre, et aussi à ce qui résiste à la tentation de l'effondrement mais garde la constante de la menace". CIORAN.
Voilà un live que j'affectionne tout particulièrement. C'est ici qu'enfin « j'entre dans la danse ». C'est en effet sur la tournée « Fragments d'hébétude » que j'assistai à mon premier concert de Thiéfaine ! A 22 ans, il était temps ! J'aurais pu mieux faire de ce côté-là. Fort heureusement, je me suis relativement bien rattrapée depuis (relativement seulement car il manquera toujours le concert de Bercy à mon « palmarès » pas trop dégueu par ailleurs !)
Déjà, j'aime bien la pochette de cet album. Ensuite, chapeau bas, vraiment, pour la sublime « y'a quelqu'intro », mélange de « Maison Borniol » et de « Première descente aux enfers par la face nord ». Je me souviens encore bien de ce grand moment, le père Hubert débarquant sur scène avec son chapeau et sa lanterne et demandant fiévreusement « y'a quelqu'un ? »...
Dès les premières notes, on sent que l'ambiance va être bien rock ! Et on n'est pas déçu, n'est-ce pas ?
Récapitulons : CD 1 :
-Y'a quelqu'intro
-La Terre tremble
-Paranoïd Game
-Est-ce ta première fin de millénaire ?
-Animal en quarantaine
-Les mouches bleues
-Les dingues et les paumés
-Pulque, mescal y tequila
-Medley 1 : Lorelei Sebasto Cha, Mathématiques souterraines, Exil sur planète fantôme, La fille du coupeur de joints
-Enfermé dans les cabinets (avec...)
-Fin de partie
Occupons-nous, dans un premier temps, de ce CD 1. Ce sera déjà pas mal en ce jour où je « rentre de mes insomnies », le cerveau (enfin, ce qu'il en reste) en copeaux, plongé dans un drôle de brouillard à couper au couteau, mais rempli de belles images (comme celle de ce fou rire au café Florian où Goethe et Lord Byron vinrent un jour, paraît-il, traîner leurs guêtres ! L'univers de l'ami Hubert n'est donc jamais bien loin !!)
Après l'intro -surprenante, magnifique, originale-, voici que la Terre tremble. L'album s'ouvre sur de belles interprétations endiablées de certains morceaux de « Fragments d'hébétude ». On retiendra aussi ce moment farfelu durant lequel Thiéfaine cherche à se renseigner sur l'âge de son public. Gros fouillis quand tout le monde se met à répondre comme un seul homme à cette question. C'est plus clair comme ça, en effet ! Jolie introduction à « Animal en quarantaine ». A l'époque, je faisais partie de la frange jeune du public d'HFT... Et me voici à présent moi-même à quelques encablures de la quarantaine ! « Le vent se lève au large des galaxies et je dérêve, dérive à l'infini »... Chanson surprenante dans la bouche d'un HFT se réclamant si souvent d'un certain nihilisme, clamant son peu d'intérêt pour les choses de la vie... Contradiction de laquelle je me sens assez proche, d'ailleurs !
Par une bizarre association d'idées, il est question ensuite des « mouches bleues ». Un petit tour sur Wikipédia vous renseignera sur toutes les sortes de mouches qui existent (www.http://fr.wikipedia.org/wiki/Mouche). Je ne savais pas que Marcel Aymé avait écrit une pièce de théâtre intitulée « La mouche bleue », tiens ! « Les mouches bleues », voilà une chanson qui m'a donné du fil à retordre ! Je l'ai d'abord longtemps détestée (oui, carrément !), ne la résumant ingratement qu'à un bel aphorisme (« peu à peu je vois s'estomper les rêves de mon esprit tordu, je commence même à oublier les choses que je n'ai jamais sues »). Maintenant, je l'aime bien, et j'ignore la raison de cette virevolte...
Ensuite, on a droit à une superbe version de la chanson « Les dingues et les paumés », même si à mes yeux, LA grande version reste celle d'HFT en concert volume 1... Ah, et puis il y a ensuite « Pulque, mescal y tequila ». J'adore ! Je me souviens encore de mon immense joie à Sarreguemines quand Hubert nous avait offert ce morceau (d'anthologie !). Tiens, j'aimerais bien réentendre cette chanson sur scène un jour ! Combien de fois me suis-je enivrée de ces mots : « J'ai confié mon âme à un gnome qui jonglait sous un revolver », « Et je picole en compagnie d'un spectre imbibé de strychnine », « Je respire l'odeur alcaline des relents d'amour périmé » ! Une chanson qui m'a amenée vers le fascinant volcan de Malcolm Lowry. Superbe livre, déchirant...
Premier medley ensuite. Commençant par « Lorelei Sebasto Cha ». Le public, reconnaissant illico les premières notes, se déchaîne. Puis, c'est un petit bout de « Mathématiques souterraines ». Trop petit bout à mon goût, mais bon, on ne peut pas gagner à tous les coups !! Trop petit bout aussi du grandiose « Exil sur planète fantôme », dommage... Très vite, trop vite, les heures impossibles à décompter font place à « La fille du coupeur de joints ». N'empêche qu'à Sarreguemines, mamma mia, cette chanson avait déclenché une réaction du feu de Dieu dans le public. A mon avis, des coupeurs et surtout des fumeurs de joints, là-dedans, il y en avait une pléthore ! Et, comme on pouvait s'en donner à son aise dans la salle, personne ne s'était gêné ... sauf, je pense, ma mère et moi !!!!!!!!!!!! Petite anecdote amusante : mon voisin avait fini torse nu à un moment du concert, peut-être bien sur la « fille du coupeur de joints », d'ailleurs !!!!!
Puis, c'est « Enfermé dans les cabinets (avec points de suspension) » !! Je l'aime bien, celle-là... « J'aurais encore aimé franchir ta nébuleuse, mais ton corps est cousu de fil blanc barbelé ». Pensée émue pour l'abominable docteur Petiot, que Thiéfaine mentionne ici.
Le CD 1 s'achève sur « Fin de partie ». Logique ! Belles prouesses de « L'Officiel » à l'harmonica. « Tu n'entends plus le cri de tes désirs, le cri de tes désirs, le cri de tes désirs déserts », c'est fort, ça !
Voilà. Lorelei2, tu me demandais sur Facebook si j'allais prendre un CD d'HFT pour Venise. Non. Je me suis limitée raisonnablement. Les chansons, je les ai toujours dans un coin de ma tête, de toute façon, et il me suffit d'appuyer sur un bouton pour que tout se mette à fredonner joyeusement là-dedans ! Mais, quand même : en général, quand je reviens de mes pérégrinations, commander un petit HFT dans mon juke-box fait partie des priorités absolues !
PS : Cet après-midi, j'ai eu la joie de découvrir, dans mes spams que je ne regarde pourtant jamais, le joli mail d'un certain Hugo. Merci, Hugo. Si vous passez par là, postez, postez des commentaires à foison ! Ils seront forcément intéressants, vu le contenu de votre message ! Merci. "Un peu de soleil dans l'eau froide" ne nuit pas !!
PS 2 : Merci également à Fred06 pour son gentil mail, auquel je ne manquerai pas de répondre ce soir ou demain.
14:21 | Lien permanent | Commentaires (11)
13/02/2010
"Routes 88" : "Bienvenue dans notre cirque un peu pervers" !
La pensée du jour : "Le côté décisif des premières rencontres : enthousiasme ou rejet. Je ne puis aborder aucun être nouveau avec indifférence ou froideur. Toute rencontre devient pour moi un volcan". Elias CANETTI
Finalement, je trouve un peu de temps pour consacrer une note à « Routes 88 ». Cela me tenait à coeur avant de partir ! J'aime beaucoup ce live. Il s'ouvre sur « La vierge au dodge WC 51 » (oui, ici, le morceau s'intitule « La vierge au dodge WC 51 », alors que sur la version studio, on lit : « La vierge au dodge. 51 »). Oui, donc, il s'ouvre sur cette chanson, et c'est heureux, même si, comme Lorelei, je déplore l'absence de la deuxième partie, nettement plus endiablée, encore plus barge que le début ! En tout cas, en cette veille de Saint Valentin, je propose que l'on sorte des sentiers battus, des déclarations d'amour à deux balles, des gros coeurs rouges ridicules ornés d'angelots non moins ridicules, et que nous, admirateurs de Thiéfaine, nous réinventions une façon de conter fleurette. Par exemple comme ceci : « Je t'aime, je t'aime, et je t'offre ma vie et je t'offre mon corps, mon casier judiciaire et mon béri-béri, je t'aime » !! Dans le style original, voilà qui se pose là !
Deuxième morceau : « Bipède à station verticale ». Une chanson qui fait partie de mes préférées. « Paraît qu'je viens d'une catastrophe, mais les dieux sont pas très bavards »... « Parfois, parfois, j'ai la nostalgie de la gadoue »... Moi aussi. Nostalgie de la Gadoue, avec un grand G, comme le point !!
J'adore les versions de « Was ist das rock'n'roll », « Narcisse 81 », « Exil sur planète fantôme », « Chambre 2023 et des poussières » (j'espère toujours l'explication d'Arnaud à ce sujet). Pour « Les dingues et les paumés », je préfère la mouture du premier live, je la mets au-dessus de toutes les autres, de toute façon.
J'aime aussi la version d'« Affaire Rimbaud ». Quand j'étais jeune, je rêvais de mourir en écoutant cette chanson-là ! J'ai eu ma période Rimbaud, une vraie de vraie, je m'enivrais des Illuminations, tout en n'y comprenant « saintement que dalle », comme dirait Albert Cohen ! Avec mon copain Christophe, nous nous prenions pour des poètes, nous nous lisions du Rimbaud pendant de longues heures à la lueur d'une bougie, après avoir écouté Hubert-Félix, et c'était le bonheur sur terre !!
Ensuite, c'est « Droïde song », une chanson que je n'ai pas tout de suite intégrée dans mon univers. C'est sur la tournée « HFT en solitaire » que je l'ai vraiment découverte et que sa grandiose beauté m'a éclaté à la bobine. Magnifique ! « Le jour où les terriens prendront figure humaine, j'enlèverai ma cagoule pour entrer dans l'arène »... Oui, eh bien, ce n'est pas demain la veille !
Ah, et puis il y a « Sweet amanite phalloïde queen », qui était d'ailleurs la chanson préférée de Christophe. Je pense toujours à lui quand je l'entends ! Depuis ma période rimbaldienne, il s'en est passé des choses, et le monde s'est vidé de quelques indispensables et lumineuses présences, dont celle de Christophe... « Manufacture de recyclage des mélancolies hors d'usage », mais c'est sublime, ça !
Un peu de douceur dans ce monde de brutes, et voici donc « Septembre rose », qui est presque une ode à la vie (presque, parce que c'est Thiéfaine, quand même, et que le désespoir n'est jamais bien loin, mais « au fond du couloir », avec son ami le blues). Une chanson qui affirme son appartenance à un registre plus joyeux. Le jeune père qu'était HFT à l'époque s'extasiait de son bonheur, mais restait tout de même légèrement sur ses gardes (cf. « Quand par manque d'habitude on s'méfie du bonheur »)...
Après « Je ne sais plus quoi faire pour te décevoir », voici les incontournables, les chansons qui seront désormais de toutes les tournées ou presque : « Zone chaude, môme », « Lorelei Sebasto Cha », « Mathématiques souterraines », « La fille du coupeur de joints » (et je mets encore une fois un « s » à « joints » !!).
Le tout s'achève sur « Errer humanum est », chanson que j'adore ! Très belle allégorie de nos pauvres conditions bien crétines : on nourrit de grandes ambitions, on fait tout pour les réaliser, et c'est finalement la déconfiture totale (« On fait Nankin-Ouagadougou pour apprendre le volapük, et on se r'trouve comme kangourou dans un zoo qui prend les tucs »). Nous voilà « aplatis comme de vieilles pizzas lâchées d'un soyouz en détresse », et le réconfort cherché auprès des « p'tites frangines », se révèle bien éphémère et dérisoire. « Pas prendre pour un courrier du coeur les pulsions des glandes endocrines ». Enfin, quand même, embarqués malgré nous dans l'aventure, nous poursuivons la route... « Toujours plus loin à fond la caisse », et ce n'est pas mon ami le Doc qui dira le contraire, je pense...
12:46 | Lien permanent | Commentaires (14)
12/02/2010
"Routes 88"
La pensée du jour : "La question n'est pas de savoir si j'ai le temps de lire ou pas (temps que personne,d 'ailleurs, ne me donnera), mais si je m'offre ou non le bonheur d'être lecteur", Daniel PENNAC (Comme un roman).
Jolie surprise en faisant nos courses tout à l'heure : tout à coup, au loin, j'ai vu un homme vêtu d'un sweat-shirt « Thiéfaine Scandale mélancolique tour ». Evidemment, je l'ai regardé avec insistance, puis l'ai montré (discrètement, s'entend !) à Sam. Je me suis approchée du monsieur en question, bien décidée à lui dire deux mots, et là, quelle joie, j'ai reconnu Etienne ! Etienne que nous n'avions pas revu depuis le Livre sur la Place 2007, peut-être bien. Etienne avec qui j'ai toujours bien aimé discuter. Etienne, que Sam avait aidé à choisir son sweat-shirt HFT après un concert à Voujeaucourt. Quand même, quelle belle équipe nous formons, nous les admirateurs d'HFT !!!
Sinon, je suis très fatiguée en ce premier soir de vacances... Il n'y paraît pas, comme ça, mais le métier de prof n'est pas de tout repos !!! Je pars lundi pour Venise, je ne suis pas sûre de pouvoir alimenter ce blog avant mon départ. Dommage, j'aurais bien voulu écrire un billet sur « Routes 88 » avant de partir sur ma "route 2010" ! Mais je n'y parviendrai pas, à mon avis. Alors, j'ai une idée. Je vais faire ma prof et vous demander de me dire en quelques lignes ce que vous pensez de ce live !! Allez, je ramasse les copies très bientôt !
Non, je plaisante, je ne vais pas faire ma prof. Dès ce matin, d'ailleurs, je me suis installée au fond de la salle de classe, j'ai envoyé au tableau la brave Charlotte qui maîtrise tout, et j'ai dit à mes chers élèves : « Terminé, je ne suis plus prof pendant 15 jours, je commence ce matin, et c'est Charlotte qui va vous expliquer la leçon » !! J'adore faire ça, cela marche en général très bien !! Et moi je fais le cancre au fond de la classe, cela me rappelle mes années-collège !!!
Donc, oui, je disais : cette fois, c'est vous qui commencez, c'est vous qui allez me donner vos impressions sur « Routes 88 ». Je consacrerai une note à ce live quand je serai rentrée de Venise... Je penserai à vous, entre une visite de musée, un tour en gondole, une pause au café Florian !!
21:56 | Lien permanent | Commentaires (5)
08/02/2010
"Thiéfaine en concert volume 2" (deuxième dissection)
La pensée du jour : "On nous montrait les ortolans, on nous dissimulait, au seuil de notre vie, toutes les grisailles, tous les regrets, tous les renoncements. Ceux-là ne se hasarderaient qu'au moment de l'addition, beaucoup plus tard. Elle serait salée, comme on dit. De larmes, comme on ne dit pas". René FALLET.
Suite et fin de cette dissection, donc.
Chanson n°6 : « Un vendredi 13 à 5h ». J'aime bien cette précision quasi mathématique chez Thiéfaine : « L'ascenseur de 22h43 », « Enfermé dans les cabinets (avec la fille mineure des 80 chasseurs) », «Chambre 2023 et des poussières », et tant d'autres. Les dates, les heures, les saisons, tout compte !
« Un vendredi 13 à 5h », donc. Ici, Thiéfaine parle de la mort. De sa mort. « Et les anges de la dernière scène viendront s'affronter à ma trouille ». Un peu comme Brel qui voulait qu'on rie et qu'on danse quand on le mettrait dans le trou, HFT souhaite que l'on « paie à tous les traîn'bars la der des ders de ses tournées ». Un autre souhait ? Oui, et pas des moindres : qu'on oublie de le réincarner ! Une vie lui aura suffi, rien que le fait de respirer lui aura toujours collé des crampes dans le sternum. Donc, non merci, pas de nouveau petit tour sur la terre, il sort d'en prendre... Le passage où il parle à son âme (« couchée, mon âme, au pied, tranquille ») me rappelle toujours les mots de Baudelaire s'adressant à sa douleur : « Sois sage, ô ma douleur, et tiens-toi plus tranquille ». En tout cas, HFT a beau ne pas s'intéresser outre mesure à la vie, il n'est pas non plus tout à fait certain de ne pas flipper le jour où il faudra en découdre avec la camarde. On en est tous là, non ? « Plutôt souffrir que mourir ». Très belle chanson, en tout cas. Et des images superbes : « nuage glacé à fleur de peau dans l'étrange ivresse des lenteurs », «les anges de la dernière scène ».
Ensuite, on retrouve notre Hubert « taxiphonant d'un pack de Kro »... C'est pas la joie non plus. « Allô S.O.S. Amitié »... Tiens, oui, c'est vrai, je veux depuis longtemps consacrer une note à S.O.S. Amitié, « va falloir qu'j'm'en occup'» ! C'est dans cette chanson que Thiéfaine dit : « la vie c'est pas du Bubble-gum et rien qu'le fait de respirer ça m'fout des crampes dans le sternum ». Le voilà « dans un train-fantôme, bloqué sur une voie de garage ». Le coeur au bord des lèvres : « La famille Duraton veut m'obliger à finir mon tapioca alors que ça fait bientôt 2 000 ans que j'ai plus faim »... Cette chanson-là, je la trouve mortelle, sans vouloir faire un mauvais jeu de mots ! Le début est affreux (« si j'peux encore vous causer c'est qu'mon pétard est enrayé »), la fin est terrible : à défaut de te faire sauter la cervelle avec un pétard, mon brave, tu n'auras qu'à utiliser la corde, lui répond-on, en substance, au bout du fil. « Vous êtes branché sur un répondeur automatique et vous avez trente secondes pour vous pendre ». Visionnaire, le père Thiéfaine ? Maintenant que les boîtes vocales ont pris le pouvoir, comme les médias, y a-t-il encore vraiment quelqu'un au bout du fil quand on appelle S.O.S. Amitié ?!!!
Puis, c'est « Autoroutes jeudi d'automne » ou « Mathématiques souterraines n°2 ». Une chanson qui me bouleverse systématiquement, pas vous ? Je lui ai déjà consacré une note, peut-être même plusieurs, je ne sais plus. « Je balance mes buvards et tire sur la ficelle pour appeler le dément qui inventa l'ennui ». Tiens, c'est vrai, ça, il se trouve où, ce con ?!!
« Autoroutes jeudi d'automne » : Un paumé « traîne son ennui dans les rues de l'errance ». Mendiant « l'oxygène aux sorties des cinoches » et vendant « des compresseurs à ses ladys-bromure ». S'arrêtant ensuite pour « mater ses corbeaux qui déjeunent » et « ses fleurs qui se tordent sous les électrochocs ». Chanson plutôt optimiste quand même puisque notre errant « remonte son col, appuie sur le starter et va voir ailleurs, encore plus loin, ailleurs ». Peut-être va-t-il s'enfoncer « plus loin dans les égouts pour voir si l'océan se trouve toujours au bout », qui sait ?
Puis, on découvre une facture bien salée, avec « Femme de Loth ». « Moi qui m'croyais gazé v'là que j'déconne pour elle », encore une phrase que j'aime. Le renouveau après un long sommeil de plomb ! Et ça, donc, écoutez-moi ça : « Nous sommes les naufragés dans cet avion-taxi
avec nos yeux perdus vers d'autres galaxies
nous rêvons d'ascenseurs au bout d'un arc-en-ciel
où nos cerveaux malades sortiraient du sommeil ». Toute la tragédie de la condition humaine se trouve contenue dans ces mots. A une époque, je les avais mis en en-tête de mon papier à lettres. De quoi effrayer les destinataires de mes courriers, non ?!!!
Le tout s'achève sur quelque chose d'un peu plus léger : « Court-métrage ». D'accord, notre type se fait salement éconduire à la fin de la chanson (la femme fatale dont il est question répond « je t'emmerde » à ses « baby I love you »). Mais il y a comme un peu de légèreté dans l'air (« en croisant les jambes si haut qu'on lui voyait le bout des seins »). Un contraste marrant entre l'espèce de « rêve américain » du début ... et cette fichue réalité à la française qui, à la fin, s'abat sur notre pauvre loser !! Pas de bol, mon vieil Edgar ! Mais t'en fais pas, va, comme chantait Birkin, « si ça peut te consoler, ça n'arrive pas seulement à toi », « tu n'es pas le premier poisson qui se meurt dans un bocal d'eau, la bouche ouverte, le ventre en l'air, les yeux comme des billes de loto » !!!
Conclusion : sublime album live, à écouter au minimum 52 fois par an, ce qui ramène le tout à une fois par semaine. Oui, cela me semble être la dose idéale, pour une hygiène cérébrale parfaite !!!!
14:10 | Lien permanent | Commentaires (16)
07/02/2010
"Thiéfaine en concert volume 2" (première dissection)
La pensée du jour : "Il y a quelque chose d'indécent à s'exhiber, mais au moment où vous écrivez, vous ne vous exhibez pas. Vous êtes seul avec vous-même". CIORAN.
Il y a eu un volume 1, voici donc le volume 2. Rien que la pochette semble vouloir donner le ton. Une photo en noir et blanc. Thiéfaine a des yeux d'hystéro là-dessus. On sent qu'on va plonger dans un univers psychédélique, sans doute un peu macabre...
Voilà un album que je me suis interdit d'écouter pendant de longues années. Il faisait ressurgir à la surface trop de sales souvenirs qui me donnaient systématiquement l'impression de me noyer... D'ailleurs, même si cette sensation n'est plus de la partie maintenant quand j'écoute ce volume 2, je ne sais pas pourquoi, quand même, toutes ces chansons si fortes me percutent toujours la tripaille !
C'est « 713705 cherche futur » qui ouvre le bal. « N'est-ce pas merveilleux de se sentir piégé ? » Piégé, on l'est dès que retentissent les premières notes de cette chanson... « Et moi je reste assis les poumons dans la sciure
à filer mes temps morts à la mélancolie », combien de fois ces mots ont-ils roulé dans ma caboche ? La mélancolie est malheureusement une façon d'être qui ne se commande pas. Se laisse parfois un peu discipliner, un peu rabattre le caquet, mais reprend toujours savamment le dessus. Salope, va ! Mélancolie, mais pourquoi donc ? Je crois que le texte de « Soleil cherche futur » livre la réponse : « C'est depuis le début du monde que l'homme s'est déchiré ». C'est ce déchirement-là que pour ma part je ne digère pas bien... Pourtant, Dieu sait si je l'ai mâché, et les Allemands ont beau dire « gut gekaut ist halb verdaut » (« bien mâché, à moitié digéré »), non, ça ne marche pas à tous les coups ! La mélancolie est elle aussi un «sport de l'extrême », me semble-t-il, elle se pratique elle aussi au bord des précipices et, comme je le dis toujours, le père Hubert la connaît si bien qu'il se permet de ne la nommer qu'en trois syllabes, comme un surnom qu'on donne à une présence familière, quotidienne : « mé-lan-co »... Ici, clin d'oeil à mon ami le Doc, avec qui j'ai longuement parlé de mélanco vendredi soir au téléphone...
« Psychanalyse du singe » (tiens, c'est marrant : avec cette espèce de dyslexie qui s'empare de moi dès que je tapote sur mon clavier d'ordinateur, je viens d'écrire « psychanalyse du signe », et je me dis que ce serait aussi une possibilité de chanson, ça, tiens, moi qui crois connement aux signes et les analyse à longueur de temps ! J'aime bien « Psychanalyse du singe ». Je l'aime en live comme en studio, précédée de cette si belle phrase assassine : « Si j'étais Dieu, j'croirais pas en moi » !
Ensuite, c'est « Whiskeuses images again ». Qu'est-ce que je les aime, ces images-là ! Tout à l'heure, l'ami Hubert se retrouvait comme « une poule devant un mégot », le voici cette fois « comme un pou dans une cage en feu », à « télégraphier son code foireux ». C'est sur cette version live que Thiéfaine dit « Übermensch ou underdog man ? ». Si, si, écoutez bien, juste après le coup du porte-manteaux. Un rythme bien balancé pour cette chanson qui nous raconte les errances d'un drôle de type qui quitte sa caverne pour voir « si l'on danse en éveil dans les particules du soleil ». Un type qui « traîne une vieille caisse marquée fragile »...
Puis, c'est « au nom du père, au nom du vice, au nom des rades et des mégots » et son rythme très particulier. Tiens, encore une histoire de mélancos, au pluriel, cette fois : « je glisse dans la moiteur des mélancos ». Une chanson sur la picole et la drogue. Qui me faisait presque flipper quand j'étais jeune, tant l'univers qu'elle décrit m'effrayait...
Ensuite, retentissent les douces notes du « Chant du fou ». Idem, cette chanson m'impressionnait beaucoup par le passé. Et la façon dont Thiéfaine l'interprète ici accentue ce sentiment d'étrangeté. « Demain, tu verras tous ces petits alchimistes pulvériser un continent » (même que je connais quelqu'un qui croyait que cette phrase se terminait par deux adjectifs : « pulvérisés, incontinents » !!!!). « Ta tête tombe de son socle de rêves », encore des mots qui me trottent souvent dans la tête. Une chanson bien énigmatique pour moi. Jamais réussi à en percer le mystère, et peut-être que dans ces cas-là, « faut laisser faire et c'est très bien ». Qui est ce fou qui a chanté 17 fois ? Pourquoi 17 fois ? Pas une de plus, pas une de moins ?!
La suite dans le courant de la semaine, si vous voulez bien. Cet album me bouleverse tellement à chaque écoute qu'il me faut un peu de repos à présent... Sans doute le live qui me violente le plus...
Ecrit le 7 février 2010, point final posé à 19h05. Je dédie cette note à ma maman, qui posait son point final le 7 février 2009 sur une page inachevée... C'est peut-être impudique de balancer ces mots ici, pardon...
« J'me réveille déglingué
avec un casque sur le nez
et j'ai beau raccorder les fils
j'traîne une vieille caisse marquée fragile ». Fragile...
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