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14/10/2010

Jours d'orage

La pensée du jour : "Espérer, c'est démentir l'avenir". CIORAN.

Jours d’orage, c’est le titre de la biographie d’Hubert-Félix Thiéfaine qui était parue sous ma plume, chez Fayard/Chorus, début novembre 2005. En 330 pages, je tentais un portrait de cet artiste monumental auquel, jusque-là, hormis une monographie de Pascale Bigot, publiée en 1988 chez Seghers, peu d’ouvrages avaient été consacrés. Essentiellement parce que l’ombrageux Jurassien n’a jamais aimé ce genre d’exercice. Pour moi, il avait fait exception et la foule de ses fans s’y était apparemment retrouvé, même si certains auraient préféré une exégèse de son œuvre au récit de sa vie, ce qui est une autre histoire. Cinq ans ont passé. Il était temps de reprendre la bio de HFT et de la compléter. Sous le même titre, mais avec une couverture nettement plus conforme à l’image qu’on se fait de l’hombre, elle paraîtra au premier trimestre 2011, toujours chez Fayard, augmentée d’une centaine de pages. De nouveaux témoins ont accepté de venir à la barre et, surtout, Hubert lui-même m’a de nouveau ouvert sa porte. C’est à livre ouvert qu’il raconte notamment comment sa vie a basculé un soir d’août 2008, comment il s’est reconstruit, comment il repart de plus belle.  On reparle très vite de tout ça.

Par Jean Théfaine
 
Source :

12/10/2010

Article de L'Est Républicain à propos du concert d'Higelin au NJP

 

Voici l'article paru ce matin dans L'Est Républicain à propos du concert d'Higelin hier au NJP :

 

Le coup de foudre permanent

 

Avec Higelin, il faut s'attendre à tout; Sur « quel pied allait-on danser », hier soir, au chapiteau, où le vieux briscard à la voix déchirée faisait étape, une première dans l'histoire du NJP. Le « Coup de foudre », son dernier album, enregistré en terre voisine (vosgienne) allait-il enflammer ce public, multi-générations, venu en masse pour le grand monsieur ?

C'est plutôt un « coup de sang » qui lançait les débats, à l'endroit des photographes et autres « voleurs » d'images, y compris dans le public. La provocation ne l'a pas quitté, et c'était plutôt un baromètre encourageant. Rien à foudre ?

Non. Le feu couve encore sous le casque gris du combattant. Un très rock « ça booste, ça boume, ça cartonne, ça move à mort » dissipait les inquiétudes, même si l'autre Grand Jacques restait muet, entre les morceaux, loin des habitudes de causeur de scène.

Sa musique, ses textes suffisent apparemment au bonheur de ses fans. Qu'importe l'attitude, pourvu qu'on ait l'ivresse. Le public buvait ensuite jusqu'à la lie les paroles de « La jeune fille au cœur d'acier », très belle version sous influences rock américain, et sans doute du « reclus » alsaco-vosgien nommé Burger (king ?). L'Amérique s'était invitée au festin. Le « fauve » se lâchait dans une interminable version de « New York-Paris », très sèche, jusqu'à l'étourdissement.

Entre nouveaux titres et classiques indémodables (« Mona Lisa Klaxon », « Champagne »), le père d'Izia et Arthur H ne redescendait plus, restait sur son nuage. Des morceaux à rallonges, à tiroirs multiples, qui regorgent encore de trésors, chez ce musicien toujours « barré ». « La folie qui m'accompagne et qui ne m'a jamais trahi ».

Sur des guitares forgées à l'americana (Burger encore ?) , il clôturait un set sans fioritures, (trop ?) sec en bons mots pour abreuver les disciples.

Est-ce la grève qui hantait les esprits ? Higelin servait un service minimum sans mots et sans rappels. « Inhabituel », ont jugé les fins connaisseurs. Un « Pars et ne te retourne pas » enlevé, où il énumérait ses fidèles complices, Dominique Mahut (percussions) et Alice Botté (guitare), régional de l'étape et fidèle de CharlElie, en tête.

Sa jeune troupe de techniciens venait aussi l'embrasser sur scène, comme on étreint un père (« spirituel » disait Jeanne Cherhal dans l'après-midi). Respectueusement. Chaleureusement. Comme ce public qui l'a, malgré tout, encore adulé, aimé. « Pars, et surtout reviens-nous vite ».

 

Xavier FRERE

 

Bon, eh bien ce journaliste est moins en colère que moi ! C'est sûr, moi c'est différent, j'y mets de l'affect (comme toujours).

En tout cas, j'ai envie de réagir à quelques phrases de cet article : "Qu'importe l'attitude, pourvu qu'on ait l'ivresse". Je ne suis pas du tout de cet avis. Pour moi, si l'attitude est déplorable, il ne peut y avoir ivresse. Impossible de me laisser emporter hier soir, je suis restée crispée pendant tout le concert, attendant jusqu'au bout un mot de Jacques, un sourire, et ayant attendu tout cela en vain...

Quant aux musiciens, certains semblaient vraiment mal. Alice Botté était très ému à Toul, je m'en souviens. Là, je l'ai senti tendu. Pas vraiment heureux d'être là. Il faut dire aussi qu'au début du concert, Higelin lui a lancé sur un ton sec : "Eh mec, tu démarres ?!"

"Le père d'Izia et d'Arthur H ne redescendait plus, restait sur son nuage" : eh bien moi, à aucun moment je n'ai senti Higelin sur un nuage ! A certains de ses concerts, je l'ai déjà vu s'envoler pour des transes phénoménales, mais hier soir, rien de tout cela. Le minimum syndical. "Le minimum", c'était la première chanson, et cela a été le ton de tout le concert. Quel dommage !

Higelin au NJP...

La pensée de cette nuit : "Il y a deux manières d'être malheureux : ou désirer ce que l'on n'a pas, ou posséder ce que l'on désirait". Pierre LOUYS

 

 

Normalement, quand on va à un concert, c'est, entre autres, pour se détendre. Oublier la lourdeur du quotidien, se payer une tranche de rêve. Normalement, Higelin est de ces artistes qui vous portent vers les étoiles, et cela dure plus que le temps du concert, cela dure des heures, cette magie qui vous enveloppe et vous tient chaud, il arrive même que cela dure des semaines. Normalement. Car, ce soir, rien n'était vraiment normal. Jacques Higelin est arrivé crispé. La horde de journalistes qui s'était plantée devant la scène l'a dérangé illico. Pendant la première chanson, déjà, il a montré son mécontentement. Ensuite, avant d'entamer le deuxième morceau, il a dit : « Putain, ça fait chier, j'aime vraiment pas les photos. Exprès, je vais me planquer pendant tout le temps où vous serez là ». Et il est allé se cacher, effectivement, derrière Dominique Mahut. En se plantant royalement dans les paroles de « Coup de foudre ». En commençant par la deuxième strophe, ce qui vient saper la logique et la chronologie du morceau. Une fois les journalistes partis (un vigile les a carrément chassés !), on aurait pu croire que tout allait redevenir normal. Higelinesque, comme j'aime. Mais non. Rien. Pas un mot. A part pour engueuler les musiciens. A part pour répondre à un type qui, dans le public, a crié « merci ». Et Jacques de rétorquer, d'un ton sec que je ne lui connaissais pas : « A ton service ».

Un de mes amis m'avait déjà parlé des colères monumentales d'Higelin. Ayant vu plusieurs fois l'artiste sans avoir jamais affaire à un de ses soi-disant légendaires emportements, j'avais fini par douter de la véracité du truc. Mais ce soir, j'ai pu voir de mes yeux, entendre de mes oreilles. Vérifier les choses à mes dépens. Au bout de trois chansons, j'étais horriblement crispée moi-même. Complètement tombée de mon « socle de rêve »... Ce soir, Jacques Higelin n'a pas adressé un seul mot à son public. Je n'ai pas vu la moindre esquisse d'un sourire sur son visage. A la fin, après « Pars », nous avons eu beau le rappeler à cor et à cri, il n'est pas revenu. Les lumières se sont rallumées brusquement, et merci de circuler, il n'y a plus rien à voir !

Bon, d'accord, il avait froid sur scène, cela s'est vu à la façon dont plusieurs fois il a remonté le col de sa veste. D'accord, il n'avait pas d'eau, on l'a compris en le voyant plus d'une fois faire des gestes en direction des coulisses et montrer son gosier assoiffé. D'accord, quelque chose ne tournait pas rond ce soir. D'abord il y a eu ces journalistes attroupés devant la scène. Mais il n'y a pas eu que cela. Il a dû se passer quelque chose avant le concert. D'accord. Mais en quoi, nous, public, en sommes-nous responsables ? En quoi avons-nous démérité ?

J'aime beaucoup Jacques Higelin, sans quoi je ne serais pas déçue ce soir. Déçue, c'est peu dire. Amère... Je vais continuer à l'aimer, je vais me remplir à nouveau des images grandioses des concerts précédents, me dépêcher d'oublier ma colère... Il est vrai que ce soir je n'ai pas réussi à faire le lien entre l'étranger que j'ai vu sur scène et le compagnon familier qui, tant de fois, en me susurrant des mots d'espoir à l'oreille, me tira du naufrage...

« Faut faire avec ou sans ça »...

10/10/2010

Chanson n°23 : "Groupie 89 turbo 6"

La pensée du jour : "Dieu de l'amour

faites qu'en mon coeur

la douleur un jour s'efface

et meure". Jacques HIGELIN.

           

Petite absence en ce qui me concerne. Ce n'est pas que je ne pense pas à alimenter ce blog, c'est juste que parfois le temps me manque. L'inspiration aussi. Ou alors j'ai une idée en allant bosser, je me dis que je vais laisser mijoter tout ça pendant la journée et que je prendrai la plume en rentrant chez moi, mais quand je rentre, c'est fichu, le poème a foutu le camp, comme écrivait Queneau !

Ainsi la semaine dernière. J'étais toute guillerette, j'écoutais Higelin dans ma voiture et me disais que j'allais lui consacrer une note en rentrant le soir. Mais quand j'aurais pu pondre cette note, toute la magie de l'instant d'avant avait disparu, balayée par les préoccupations professionnelles, etc. Nous perdons notre vie à la gagner !

J'aurais voulu dire avec quelle puissance la musique, tout comme la lecture, m'a souvent réconciliée avec la vie. Dire la joie d'écouter les mots d'Higelin. Le bonheur qui m'emplit à l'idée d'aller le voir très bientôt en concert (c'est demain !). Au moment précis où j'imaginais ma future note (qui ne verra jamais le jour), les mots étaient là, faciles à empoigner. Mais ce soir, plus rien, bien sûr, ils se sont tirés ! Alors tant pis. En revanche, j'espère bien avoir le temps, mardi ou mercredi, de vous raconter le concert de demain (c'est du trois en un : Jacques Higelin, Jeanne Cherhal et Madjo)...

Pour ce soir, voici les paroles de "Groupie 89 turbo 6". Une chanson que j'aime beaucoup pour son côté "récréatif" et léger malgré la lourdeur de cette panzerfrau qui en fait voir des vertes et des pas mûres à son amant !

 

 

 

Groupie 89 turbo 6

 

c'est juste une fille un peu perverse

qui me plante des couteaux dans les fesses

et qui me coince dans les urinoirs

en sortant sa lame de rasoir

c'est juste une fille un peu fritée

qui s'amuse avec ma santé

et qui me dégoupille les gonades

juste au moment où je prends mon fade

oh ! Tu n'es pas la première fille qui me tape

tape-moi encore

oh ! Tu n'es pas la première fille qui me tape

tape-moi encore plus fort .../... ah !

 

C'est juste une fille un peu rocky

qui grimpe à moto sur mon lit

et qui sort sa chaîne de vélo

en me disant je t'aime saignant salaud

c'est juste une fille un peu brutale

qui déchire mes chemises, mes futals

en me disant fais gaffe baba-cool

je mets mes crampons gare tes bidoules

oh ! Tu n'es pas la première fille qui me tape

tape-moi encore

oh ! Tu n'es pas la première fille qui me tape

tape-moi encore plus fort .../... ah !

 

c'est juste une fille comme toi et moi

enfin je crois plutôt comme toi

une fille qui s'amuse dans la vie

et qui n'a pas honte quand elle rit

c'est juste une fille

c'est juste une fille

c'est juste une fille qui s'en balance

mais qui grimpe aux murs quand elle... oh oui ! ... oui

 

c'est juste une fille un peu rétro

qui rêve d'être une panzerfrau

et qui me déguise en nymphomane

pour que je me tape son doberman

c'est juste une fille un peu olé

qui se coupe les nibards pour frimer

mais c'est si bon de jouer son jeu

quand elle décroche le nerf de bœufs

oh ! Tu n'es pas la première fille qui me tape

tape-moi encore

oh ! Tu n'es pas la première fille qui me tape

tape-moi encore plus fort .../... ah !

 

c'est juste une fille comme toi et moi

enfin je crois plutôt comme toi

une fille qui s'amuse dans la vie

et qui n'a pas honte quand elle rit

c'est juste une fille

c'est juste une fille

c'est juste une fille qui s'en balance

mais qui grimpe aux murs quand elle... oh oui ! ... oui

ah ! Vas-y mimine fais-moi la cour

frite-moi la gueule oh ! mon amour

vas-y déchaîne-toi sur mon corps

cas-y mimine fais-moi la mort

fais-moi la mort

fais-moi la mort

25/09/2010

"Animal en quarantaine"

La pensée du jour : "Nous sommes la triste opacité de nos spectres futurs". Stéphane MALLARME.

 

 

Hier, j'écoutais Thiéfaine « supplier Wakan-Tanka d'oublier de le réincarner. Aujourd'hui, changement de cap : je viens d'écouter « Animal en quarantaine » et cette fois, Thiéfaine nous ordonne d'exiger l'immortalité. De nous organiser, en somme, dans une immense et collective rébellion contre le triste sort qui nous est fait. A savoir : « on avance, on avance, on avance, c'est une évidence, on n'a pas assez d'essence pour faire la route dans l'autre sens », comme le chante Souchon. D'ailleurs, dans « Animal en quarantaine », l'image du taxi nous ramène à cette idée de la route qui défile sans que nous ayons la possibilité de faire un seul arrêt sur image : ce n'est pas nous qui conduisons, quelqu'un nous conduit inéluctablement vers la dernière station avant l'autoroute du grand saut, vers le terminus. Nous ne sommes pas aux commandes, nous ne décidons de rien, quelqu'un a pris les manettes et reste sourd à nos supplications. « Les infos grondent » et nous rattachent encore au monde, mais c'est quand même l'inévitable dérive vers « la face cachée de la nuit ». La face cachée, celle que d'ici personne ne peut voir, celle dont nul ne sait comment elle se présente ... si elle se présente. Angoisse terrible face à notre ignorance et notre impuissance. Cette chanson est un cri de révolte contre l'absurdité de notre condition. Le sujet « dérêve » en même temps qu'il dérive (et je salue au passage le grandiose parallèle sonore et sémantique entre les deux verbes, le premier ayant été magistralement inventé par Thiéfaine). Le champ lexical est très fort : le sujet, autrement dit Thiéfaine, est « tourmenté », « torturé », « dépouillé ». Le temps « s'obscurcit ». Thiéfaine s'imagine déjà « en ombre vaporeuse, âme anonyme, errante et silencieuse ». C'est-à-dire « de l'autre côté du passage obscur ». Une âme anonyme, c'est-à-dire « dépouillée de son nom », rayée du monde des vivants, privée pour toujours de ce qui y faisait son identité. Errante à l'image de ces âmes en peine qui ne trouvent jamais le repos... Silencieuse parce que muselée à jamais par la Camarde. Dans l'incapacité de communiquer avec le monde des vivants, des survivants, autrement dit des morts en sursis... Et c'est là qu'on peut voir le double sens de l'expression « en quarantaine ». « En quarantaine » , mathématiquement parlant, cela évoque le nombre de berges, de piges, d'années. « Mettre quelqu'un en quarantaine », c'est l'exclure d'un groupe, comme un pestiféré. Ici, Thiéfaine se voit déjà exclu du monde des vivants.

Une fois encore, la mort vient élire domicile dans une chanson de Thiéfaine. Il serait intéressant de recenser toutes les chansons dans lesquelles l'artiste évoque la faucheuse...

23/09/2010

"A part ça tout va bien, comme dit Schopenhauer" !

La pensée du jour : "Le ciel déjà prend goût de terre

Puisqu'on est des morts sursitaires

Tous les calculs que nous ferons

Auront une balle en plein front". Louis ARAGON

 

 

Arthur Schopenhauer : philosophe allemand (Dantzig 1788 – Francfort-sur-le-Main 1860). Il prétend ne se rattacher à aucune école (sinon de loin à la philosophie hindoue), et il s'oppose expressément à l'école post-kantienne (Fichte, Hegel). En fait, sa philosophie de la « volonté » comme fondement de la « représentation » est un démarquage de la philosophie de Fichte. C'est en 1813 qu'il soutient sa thèse à Iéna sur la Quadruple Racine du principe de raison suffisante, en 1818 qu'il publie son principal ouvrage, Le Monde comme volonté et comme représentation. Il enseigne à Berlin de 1820 à 1831, date où il quitte l'enseignement et s'oppose à tout ce qui est universitaire.
Sa théorie de la représentation, inspirée de Kant, se fonde, selon lui, sur une conception du vouloir-vivre inspirée des philosophies de l'Inde. Son pessimisme, qui unit les notions de souffrance et de vie, l'amène à prêcher l'ascétisme. Sa morale, fondée sur la pitié, est une critique, parfois profonde, de la morale formelle de Kant (Essai sur le libre arbitre, 1839). Son style très riche, plein de métaphores, recouvre en fait une doctrine qui, dans la philosophie de l'idéalisme allemand (Kant, Fichte, Schelling, Hegel), comporte peu d'éléments originaux.

 

Source : Dictionnaire de la philosophie, Didier JULIA, Editions du Club France Loisirs, Paris, 1984.

 

Il y a quelques années, je m'étais acheté un ouvrage amusant en Allemagne : Schopenhauer für Gestresste (Schopenhauer pour les gens stressés !!). On y trouve des pensées éparses, que j'aime bien lire de temps en temps (et qui me paraissent plus compréhensibles que tout ce qui a été écrit sur Schopenhauer, par exemple ce texte ci-dessus, auquel je ne pige pas grand-chose, mais que je me devais de mettre ici parce que quand même, « à part ça tout va bien comme dit Schopenhauer » !!).

Voici donc quelques pensées picorées ici ou là dans l'ouvrage mentionné ci-dessus :

« Um nicht sehr unglücklich zu werden, ist das sicherste Mittel, dass man nicht verlange, sehr glücklich zu sein ». Ce qui donne à peu près ceci, une fois traduit :

« Le moyen le plus sûr de ne pas être très malheureux est de ne pas exiger d'être très heureux ».

 

« Was sich liebt und füreinander geboren ist, findet sich leicht zusammen : verwandte Seelen grüßen sich schon aus der Ferne » : « Ceux qui s'aiment et sont nés l'un pour l'autre se retrouvent facilement : les âmes sœurs se saluent de loin ».

 

« Sehn und Erfahren ist so nötig als Lesen und Lernen » : « Voir et faire des expériences est aussi nécessaire que lire et apprendre ».

 

Désolée, mes traductions sont parfois bancales ! J'espère en tout cas que pour vous « tout va bien, comme dit Schopenhauer » ! Quant à moi, je suis désespérée, mais je me soigne !!! Le meilleur remède selon moi : HFT, à fond la gomme et les manettes, « à s'en faire péter les turbines » !

 

18/09/2010

Réflexions en vrac sur "Critique du chapitre 3" et "Des adieux"

La pensée du jour : "Combien d'êtres chers, partis à l'aube de notre affection, nous laissent inassouvis ?" Fatou DIOME.

 

 

Hier, « avec un sacré mal de vivre, je me disais : je ne sais pas pourquoi je vais comme un bateau ivre »... Dans ces cas-là, un seul remède : me noyer dans les mots de Thiéfaine. Plonger dans cette somptueuse poésie, me sentir accompagnée dans les eaux glaciales de ma sombre détresse.

Machinalement, hier soir, j'ai pris « La tentation du bonheur », sans doute parce que cette tentation m'a titillée plus d'une fois, pour finalement me laisser en rade, systématiquement.

Quand on va clopin-clopant, écouter cet album peut s'avérer extrêmement dangereux ... ou salutaire, c'est selon. Pour ma part, j'ai déjà dit mille fois que le désespoir de Thiéfaine ne me faisait même pas peur ! Bien au contraire, il me permet de mieux digérer le mien. Bref...

Sur cet album, plus dangereux que tout le reste, deux morceaux : « Critique du chapitre 3 » et « Des adieux ». « Critique du chapitre 3 (du livre de l'Ecclésiaste) », c'est évidemment une référence biblique. J'ai déjà mis ce texte de l'Ecclésiaste ici. Petite piqûre de rappel :

« Il y a un temps pour tout, il y a un moment pour chaque chose sous les cieux :

Il y a un temps pour naître et un temps pour mourir;

Un temps pour planter et un temps pour arracher ce qui a été planté;

Un temps pour tuer et un temps pour soigner;

Un temps pour démolir et un temps pour bâtir;

Un temps pour pleurer et un temps pour rire », etc.

A lire ces mots de l'Ecclésiaste, on pourrait croire qu'il existe un bel équilibre entre tous ces différents moments. Que le temps passé à pleurer est égal à celui passé à rire. Or, « Critique du chapitre 3 », cela donne déjà le ton, cela annonce le thème de la chanson. C'est qu'Hubert-Félix n'est pas d'accord. Et il le dit : « Pour un temps d'amour, tant de haine en retour ». « Critique du chapitre 3 », donc, pour dire que s'il y a bel et bien un temps pour l'amour et un autre pour la haine, les proportions ne sont pas les mêmes, il y a maldonne. Chanson-cri, cri de révolte, cri de colère.

Deuxième danger de cet album, donc, « Des adieux ». Pas vraiment de révolte cette fois-ci, plutôt un simple constat : notre vie est faite d'adieux. Et même si l'on finit « toujours par noyer son cafard dans un taxi-dancing ou dans un topless-bar », il n'en reste pas moins vrai que notre condition, c'est avant tout le désespoir... Cela me fait penser à Jean d'Ormesson, que je suis allée écouter avec ferveur cet après-midi à l'Hôtel de Ville de Nancy. Et j'ai retenu, entre autres, cette phrase : « Il faut prendre avec gaieté cette situation désolante dans laquelle nous nous trouvons ». Cette situation désolante, à savoir la vie. « Et les noires sentinelles drapées dans leurs guérites

n'ont plus besoin d'antennes-paraboles-satellites

pour capter le chagrin à son extrême limite »...

 

Désolée, je ne suis guère en forme depuis quelques semaines, quelques mois, quelques années, je ne sais plus très bien. De deux choses l'une : soit je me mure dans le silence, cessant d'alimenter ce blog, ne restant pas, contrairement à Hubert, ouverte pendant les travaux, soit je viens ici déposer un peu de mon fardeau, de ma mélancolie, de mon mal-être... Au risque de vous lasser, au risque de vous chasser. Je ne sais pas très bien quelle solution il convient de choisir. Mais je sais que, pour ce qui est du « registre de mes plaies », le meilleur Mercurochrome restera toujours cet univers thiéfainien dont je me sens la frangine d'infortune, celle qui habite « rue des amours lynchées », tout près des dingues et des paumés... D'ailleurs, dingue et paumée, ne le suis-je pas un peu moi-même ?

11/09/2010

Yves Jamait à Terville hier soir

La pensée du jour : "Et si j'allais vers ce passant pour lui dire que j'ai perdu ma mère et que nous devons échanger un baiser de prochain, un éperdu baiser de communion en un malheur qui a été ou qui sera le sien ? Non, il me signalerait à la police". Albert COHEN

 

 

Aimez-vous les coquelicots ? Pour ma part, j'aime les voir parsemer de taches rouges les paysages de mai et de juin. Rouge passion. Rouge sang. Les coquelicots et moi, nous sommes faits pour nous entendre : ce sont, comme disait Yves Jamait je ne sais plus quand, je ne sais plus où et à je ne sais plus qui, ce sont des fleurs qui symbolisent d'une certaine façon la rébellion puisqu'elles se refusent à être mises en bouquets. La fragilité qu'affichent les coquelicots est donc toute de surface. Derrière le frêle voile rouge se cache une immense opiniâtreté, et cette ambivalence n'est pas faite pour me déplaire !
Longtemps, je me suis dit que ce ne serait pas idiot d'écrire une chanson sur les coquelicots. Yves Jamait a fait mieux : il a écrit une chanson sur un coquelicot, celui de la bouche de la femme aimée. Merveilleuse métaphore ! Hier, à Terville, le « chantiste » (comme il aime à se définir lui-même) n'a pas interprété « Le coquelicot ». Bizarrement, moi qui aime beaucoup cette chanson, je n'y ai pas pensé pendant le concert. Pas de « Vierzon » non plus. Deux grandes absentes, donc, hier soir, et pourtant on ne songerait pas à s'en plaindre, tant ce qu'Yves Jamait nous a offert sur un plateau était puissant, profond, sublime.

Presque deux heures de spectacle hier soir. Ah oui, spectacle, c'est bien le mot ! Il faut voir Yves Jamait sur scène, c'est là que ses chansons prennent toute la dimension qui leur sied, qui leur revient de droit. Le « chantiste » se glisse pour deux heures dans la peau d'un personnage, un peu paumé, un peu soiffard (il dit que c'est un rôle de composition et qu'il y a derrière tout cela 15 ans d'application !). Il nous parle d'un monument dijonnais : le « bar de l'univers » ! Il nous raconte Jean-Louis, patron de ce même bar, dont le métier se résume en fait à écouter les clients quand ils s'épanchent. Et, un brin d'espièglerie dans le regard, Yves ajoute : « Jean-Louis, c'est un peu comme un psychanalyste, sauf que chez lui, on n'est pas couché, mais accoudé. J'ai fait quinze ans de psy » !!

Pendant presque deux heures, Yves se donne. On peut dire qu'il trempe sa liquette. Et même sa casquette, qu'il envoie régulièrement valser dans les airs et qui retombe en une pluie de gouttelettes de sueur ! Il donne tellement, il se donne tellement que je me suis dit, pendant que le public le rappelait à cor et à cri, que c'était presque indécent d'en redemander tant nous avions déjà été royalement servis.

Après le concert, Yves vient boire un verre au bar et discuter un peu avec le public. Il reste avenant malgré l'épuisement visible. Epuisement dont il nous dira, à mon ami Christophe et à moi, qu'il est réel. Et pourtant, pas une lueur d'agacement dans les yeux quand des gens lui sautent au cou pour une photo... Bref, une grande âme. « Eine Seele von einem Menschen », comme disent les Allemands. Un éternel gosse aux allures de gavroche. Une « voix de ronce », écrivait je ne sais plus qui je ne sais plus où (l'image est si juste -c'est Christophe qui a cité ces propos hier soir), une voix qui sent les nuits qui n'en finissent pas de porter conseil, une voix qui raconte à merveille quinze ans de psy...

Terville, c'était la dernière date de cette gigantesque tournée qui a duré deux ans. En décembre, Yves Jamait reviendra par chez moi, cette fois pour un concert avec Daniel Fernandez. Les billets sont-ils déjà en vente ?!