18/06/2010
Il n'y a pas qu'HFT, il y a aussi LGS !!!
La pensée du jour : J'en ai déjà mis une tout à l'heure (voir ci-dessous). Comme il se trouve qu'elle corrrespond encore bien à ce que je ressens quelques heures plus tard, je ne la remplace pas par une autre...
J'aime bien vous faire part de mes petits coups de cœur. Voici le dernier en date : la grande Sophie. De cette artiste, à vrai dire, je ne connais pour le moment que sa jolie reprise de la chanson de Thiéfaine, « Animal en quarantaine », « Martin » aussi, et son dernier album, « Des vagues et des ruisseaux ». Un CD que j'ai acheté l'année dernière. Et qui, dès la première écoute, m'avait bouleversée... « La valse des adieux » avait tout particulièrement retenu mon attention à l'époque. Mais aussi « Quelqu'un d'autre », une chanson que je fredonne à tue-tête parfois. C'est vrai, ça, être quelqu'un d'autre, rien qu'une petite heure, une petite journée. Se glisser dans la peau d'une ou d'un autre et voir si on s'en trouve bien, mieux, ou plus mal... Il y a aussi « Tu n'as pas cherché », une de mes chansons préférées. « Des vagues et des ruisseaux », morceau au titre extrêmement poétique, traite d'un sujet grave (le grand amour qui se fait la malle) tout en faisant la part belle à l'humour : « Pour une grippe, c'est cinq jours
La migraine, une nuit
Pour un rhume qui tourne mal, tu peux compter dix (...)
Mais pour l'homme de ma vie
Je ne me suis jamais remise ».
Le morceau s'envole littéralement quand la grande Sophie chante ces mots-là :
« J'en ai versé des larmes et des larmes et des larmes et des larmes et des sanglots
Qui faisaient des vagues des vagues des vagues des vagues et des ruisseaux
La mer, la mer à perte de vue, de l'eau ».
J'aime bien aussi que la grande Sophie se tortille dans l'ironie, avec la chanson « Dans le show business ». « Je n'ai pas d'amis dans le show business
Complètement à l'ouest, je suis dans les choux », etc.
Sur cet album, j'aime les arrangements musicaux et les envolées vocales (très belle entrée dans « La valse des adieux », par exemple). C'est à la fois sobre et très travaillé, très cisaillé, peaufiné, affiné jusqu'à la perfection.
Ah, j'ai oublié de parler aussi de « Ta mauvaise foi » !
« Sous couvert de beaux discours
Tout ça pour se justifier
Dans la vie chacun son tour
Toi tu joues au ping-pong
Avec moi, c'est Pearl Harbour
Tu m'attaques et tu me fais
Des offenses et des mamours
Mais là, j'en ai ras-le-bol ».
Je n'ai pas évoqué non plus la somptueuse reprise de « Dis, quand reviendras-tu ? », la sublime chanson de Barbara. On sait ici combien j'aime la dame en noir, celle qui chanta courageusement « Göttingen », celle qui sut si bien dire l'amour, le manque, les langueurs automnales, les blessures d'enfance... Je n'aime généralement pas trop qu'on touche à cette immense icône, j'ai toujours peur qu'on l'écorche, qu'on la meurtrisse. Mais là, cette guitare et cette voix si douces, vraiment, il n'y a rien à dire, à part, pour reprendre un titre de Barbara justement : « Chapeau bas ».
Je n'ai pas dit non plus que j'aimais « Pardonner », « Quand le mois d'avril » (et ce qui pourrait être un clin d'œil à HFT, à la fin : « Quand le mois d'avril s'échappe c'est pour laisser place au joli mois de mai »), « Danser sur le disco », « Celui qui me suivait dans la rue », « Les pouvoirs de la tentation », « Ce jour-là » ! En un mot comme en cent : j'aime cet album dans son intégralité. Pas une fausse note, pas un dérapage. Du grand art. De la grande Sophie, quoi !
22:56 | Lien permanent | Commentaires (3)
Chanson n°4 : "La maison Borniol"
La pensée du jour : "Si dérisoire
ce qui m'est donné
au regard
de ce qu'escomptait
ma soif". Charles JULIET.
Chanson n°4 donc. "La maison Borniol", tout un (funèbre) programme. Avant d'écouter Thiéfaine, je ne savais pas que cette maison existait vraiment ! Un jour, en lisant Le Passe-muraille, je suis tombée sur un passage concernant la maison Borniol ! A l'époque, j'avais même dû le recopier ici, vous pouvez le retrouver dans les archives, mais où au juste ? Je ne sais pas ! D'ailleurs, à propos d'archives, puisque l'actualité thiéfainienne c'est plutôt Waterloo, morne plaine depuis des lustres, je pourrais cesser d'écrire ici. Cesser de vous proposer des sujets sans imagination qui ne susciteront de toute façon pas beaucoup de commentaires. Je pourrais vous renvoyer aux archives et vous demander de trouver là-dedans de quoi apaiser votre faim (s'il y a réellement, de votre côté, une faim à lire mes billets, ce dont je doute. Les vrais fidèles de ce blog sont peu nombreux. Beaucoup restent tapis dans le silence et je ne sais pas toujours très bien si j'ai raison de continuer à payer mon abonnement Haut et fort. Katell ou l'aventurière des causes perdues ! C'est comme l'enseignement, comme toutes les illusions et les projets dans lesquels je me lance. Trop d'enthousiasme chez moi, sans doute, trop de faim justement, une faim qui gronde à l'intérieur, qui ne demande qu'à dévorer la vie et se rend compte, bredouille et stupéfaite, que c'est la vie qui finira, pour sûr, par la dévorer). Fermons cette parenthèse... Désolée, le moral n'est pas au beau fixe, mais c'est sans doute parce que ce matin encore, comme tant d'autres fois, je me suis fait draguer par un gros lourd dégoulinant de libido... Chose qui a le don de me démoraliser et de me renvoyer à mon maigrichon pouvoir de séduction !!!!
Laissons la parole à HFT, il n'y a que ça de vrai dans ce monde de brutes...
Je signale que "chignole" s'écrit avec un seul "l" selon mon Petit Larousse (on trouve deux "l" dans le livret de l'album). Et aussi que "mariol" a trois orthographes possibles : "mariol", "mariole", ou "mariolle". Un mot qui vient de l'italien, tiens, chose que j'ignorais. "Mariolo" signifie "filou"...
La maison Borniol
Hé y'a quelqu'un ?
oh, y'a quelqu'un ?
c'est moi Borniol
et je viens livrer le cercueil
si vous me payez un coup d'alcool
ben moi j'vous fais les clous à l'œil
ouais c'est moi Borniol
service rapide et je contente
même la veuve du guignol
vu que je fais le service après vente
les temps sont durs
c'est pas mariole
vivement que revienne le choléra
je pourrai changer de chignole
et me payer le cinéma
et si le choléra marche bien
je pourrai faire des folies
j'agrandirai mon magasin
et je prendrai des apprentis
je serai la maison Borniol
le supermarché de la mort
cercueils à fleurs pour les pauvres mômes
et à roulettes pour les vieillards
je serai la maison Borniol, Borniol, Borniol
maison Borniol, maison Borniol
pierres, cercueils, catafalques
maison Borniol, maison Borniol
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maison Borniol, maison Borniol
15:21 | Lien permanent | Commentaires (10)
15/06/2010
Chanson n°3 : "Je t'en remets au vent"
La pensée du jour : "Apprenez-moi la pure et douce sagesse des livres effleurés et des choses caressées". Michel TOURNIER.
Je t'en remets au vent
D'avoir voulu vivre avec moi
t'as gâché deux ans de ta vie
deux ans suspendus à ta croix
à veiller sur mes insomnies
pourtant toi tu as tout donné
et tout le meilleur de toi-même
à moi qui ai tout su garder
toujours replié sur moi-même
mon pauvre amour, sois plus heureuse maintenant
mon pauvre amour, je t'en remets au vent
toi tu essayais de comprendre
ce que mes chansons voulaient dire
agenouillée dans l'existence
tu m'encourageais à écrire
mais moi je restais hermétique
indifférent à tes envies
à mettre sa vie en musique
on en oublie parfois de vivre
mon pauvre amour, sois plus heureuse maintenant
mon pauvre amour, je t'en remets au vent
tout est de ma faute en ce jour
et je reconnais mes erreurs
indifférent à tant d'amour
j'accuse mes imbuvables humeurs
mais toi ne te retourne pas
va droit sur ton nouveau chemin *
je n'ai jamais aimé que moi
et je reste sans lendemain
mon pauvre amour, sois plus heureuse maintenant
mon pauvre amour, je t'en remets au vent (bis)
* Sur le livret du CD, on lit : "va voir sur ton nouveau chemin", mais je crois bien que dans toutes les versions, y compris l'originale, HFT chante "va droit sur ton nouveau chemin", non ?
Il paraît (je crois avoir lu ça quelque part un jour, mais où au juste ?) que Thiéfaine aurait écrit le texte de cette chanson quand il était tout jeune. Quelle maturité il avait déjà pour pondre un truc pareil ! Belle réflexion sur la difficulté de vivre avec un artiste... Et sur la difficulté, pour l'artiste lui-même, de mener une vie "rangée", en couple, pépère...
15:00 | Lien permanent | Commentaires (5)
14/06/2010
Chanson n°2 : La fin du Saint Empire romain germanique
La pensée du jour : "Neige, beaucoup de neige sur Paris; c'est étrange. Je me dis et j'en souffre : elle ne sera jamais plus là pour le voir, pour que je le lui raconte". Roland BARTHES.
Je suis le fils d'une société
fondamentalement épuisée
passe-moi ma pipe de Marijane
sinon je me shoote à la banane
tout comme ses autres copains mon père
s'en revenait de Germany
quand on leur a dit les petits pères
faut nous faire de la démographie
moi c'est comme ça que j'ai débarqué
par un beau matin aux aurores
la guerre venait de se terminer
on revendait les miradors
les miradors...
avec les germes de la guerre
on ne fabrique que des tarés
moi j'ai le coeur qui tape à l'envers
et le cerveau qui a des ratés
pourtant on m'a donné l'enfance
d'un petit Français bien rassasié
jusqu'à l'école où Mendès-France
venait nous donner la tétée
mais si je fus un beau nourrisson
répondant aux normes Nestlé
aujourd'hui j'ai l'air tellement con
qu'on veut pas de moi même dans l'armée
même dans l'armée...
d'ailleurs je suis toujours mal foutu
j'ai mal aux seins, j'ai mal au ...
y'a guère que dans la naphtaline
que je trouve un peu de vitamines
et pour ce qui est des nanas
j'ai même plus le courage de draguer
quand je les emmène au cinéma
je m'endors aux actualités
faut dire que maintenant les starlettes
ça devient micheton à dégommer
quand elles cartonnent pas M.L.F.
elles vous allongent au karaté
au karaté...
arné sné connunu salome
massasné mazna en sodome
loukoum loukoum dé trougaga
arné snavi rutabaga
je suis le fils d'une société
fondamentalement épuisée
refile-moi mon dir-la-da-da
sinon je me shoote au Banania
c'est la fin de mes éructations
j'ai pas le courage d'aller plus loin
mieux vaut s'arrêter là sinon
ça va se terminer en boudin
ouais, en boudin...
21:27 | Lien permanent | Commentaires (3)
13/06/2010
L'ascenseur de 22h43 (1ère partie)
La pensée du jour : "L'allemand est une langue injustement décriée". Gérard MORDILLAT (Rue des Rigoles).
Coup de stress ce matin, lorsque je me suis rendu compte avec effroi que j'avais paumé mon t-shirt "HFT Scandale mélancolique tour" !!! Du coup, j'ai vidé toute mon armoire de fringues (il y avait du boulot) ... pour finalement retrouver le t-shirt non pas dans cette même armoire, mais dans un panier dans lequel je range mes foulards. Bon, j'ai une excuse : j'ai deux enfants qui fouillent souvent dans mes affaires, semant la pagaille un peu partout ! C'est peut-être l'une d'elles qui m'a joué ce tour ! Et puis, il y a presque vingt ans, quand j'ai entamé mes études d'allemand, j'avais une amie qui disait que mon sens du rangement (je triais tout dans des boîtes à l'époque) ne faisait pas très artiste. Aujourd'hui, si la copine en question venait faire un tour chez moi, elle verrait que je suis devenue une artiste, une vraie ! Tout traîne lamentablement. Les bouquins font des pyramides sur ma table de nuit, au pied de mon lit, sur des étagères non prévues à cet effet. Dans la cuisine aussi. Dans les toilettes. Partout où je peux entasser, j'entasse. La nature a horreur du vide ! Mais revenons à nos moutons : oui, donc, mon t-shirt de la tournée "Scandale mélancolique" trônait honteusement, scandaleusement dans mes foulards !!!
Trop heureuse d'avoir remis la main sur cet objet de grande valeur sentimentale, je le porte aujourd'hui. D'habitude - et je l'ai déjà dit sur ce blog -, quand je porte ce t-shirt, il m'arrive toujours des trucs insolites. Tout à coup, un inconnu m'offre des fleurs (ou presque), et ce n'est pas l'effet magique d'Impulse, mais bien l'effet magique HFT !!!! "Les moutards de ma ville viennent vers moi pour me regarder", les gens se dirigent droit sur moi pour me dire que eux aussi, ils aiment bien HFT, mes élèves me demandent, ébahis, si je connais Thiéfaine. Et je biche déjà, me disant que nous avons enfin trouvé un terrain d'entente, eux et moi !!!!!! Et la désillusion se fait rude quand ils me disent immanquablement que chez eux, c'est papa et maman qui écoutent Hubert !!!!!!!!!
Bon, je m'égare, mes chers amis... Je voulais vous dire qu'à l'heure de renouveler mon abonnement chez Haut et fort, je sèche complètement. Plus d'idées de notes. A cela je ne vois qu'une explication : l'actualité HFT est trop cadavérique. Que dis-je ? Inexistante, oui ! Il ne se passe rien. Ou alors il se passe des choses, mais nous ne sommes pas au courant. On nous cache tout, on nous dit rien... Alors je rame sérieux dans ma cervelle (de toute façon dégommée par un morne quotidien qui m'entraîne toujours vers des préoccupations prosaïques), oui, je rame sérieux pour trouver encore des sujets de notes.
Alors j'ai décidé de sombrer pitoyablement dans la facilité : je vais mettre ici les paroles de toutes les chansons d'HFT, à commencer donc par "L'ascenseur de 22h43". Que chaque note de ce genre soit pour vous l'occasion de dire ici comment vous percevez la chanson en question, etc. De mon côté, je nourris une grande histoire d'amour avec "L'ascenseur de 22h43" !!!! Et tout le monde autour de moi le sait. D'ailleurs, avec ma satanée habitude de fêter chaque soir ou presque le passage de 22h42 à 22h43, je crois que j'ai traumatisé une de mes amies !!!! Elle ne peut plus voir "22h43" sans avoir une pensée pour HFT et moi !!!!!!! Cette chanson me rappelle également systématiquement le début de certains concerts. Qu'est-ce que j'étais jeune et fougueuse en ce temps-là (je ne suis plus jeune, mais je crois être restée assez fougueuse) !!!! D'ailleurs, "en ce temps-là, nos fleurs vendaient leur viande aux chiens et nous habitions tous de sordides tripots" !!!
L'ascenseur de 22h43 (1ère partie)
attention, attention, la concierge se trouve
actuellement dans l'escalier
mais comme elle ne le sait pas
vous êtes priés de ne pas la déranger
j'arriverai par l'ascenseur de 22h43
en provenance de Babylone
les quais seront encombrés de pendus
laissant claquer leurs mâchoires dans le vent
en guise de discours de bienvenue
en guise de discours de bienvenue
j'arriverai par l'ascenseur de 22h43
en provenance de Babylone
je connaîtrai rien de tes habitudes
il se peut même que tu sois décédé
mais j'demanderai ta main pour la couper
mais j'demanderai ta main pour la couper
attention, attention, sur le palier numéro 2
l'ascenseur de 22h43 en provenance
de Babylone est annoncé
veuillez dégager le vide-ordures s'il vous plaît
et ne pas laisser les enfants s'amuser avec les fils
à haute tension
tout corps vivant branché sur le secteur
étant appelé à s'émouvoir
j'arriverai par l'ascenseur de 22h43
et je viendrai relever le compteur de ton ennui
il te faudra sans doute changer de tête
et puis brancher ton cerveau sur ton coeur
rien ne sera plus jamais comme avant
rien ne sera plus jamais comme avant
14:06 | Lien permanent | Commentaires (12)
05/06/2010
Romain Gary
La pensée du jour (ah oui, c'est vraiment ce que je pense en ce jour) : "La vie est pavée d'occasions perdues". Romain GARY
Eté du Livre hier à Metz... Je discute avec une journaliste qui écrit aussi des livres pour enfants. Elle me demande quel écrivain je place au-dessus de tous les autres. Sans réfléchir, je réponds Romain Gary. Parce que cet homme a écrit les livres que j'avais toujours espéré lire. La nuit sera calme, La promesse de l'aube, Gros-Câlin, La vie devant soi, L'angoisse du roi Salomon, Les cerfs-volants, Les mangeurs d'étoiles, Au-delà de cette limite votre ticket n'est plus valable, voilà autant de livres qui ont été des révolutions, des tornades pour moi ! Au même titre que certaines chansons de Thiéfaine. Je connais certaines phrases de Gary par coeur et elles me sont un refuge, très souvent, quand les contrariétés battent leur plein... Thiéfaine aussi aime bien cet auteur. Du coup, je me sens autorisée à remettre ici quelques mots du grand, du doux Romain Gary ! Voici quelques extraits de La promesse de l'aube :
"A quarante-quatre ans, j'en suis encore à rêver de quelque tendresse essentielle".
"Un train passa sur la voie. Il me parut soudain que c'était mon chagrin qui faisait tout ce fracas".
"La vie est pavée d'occasions perdues".
"Avec l'amour maternel, la vie vous fait à l'aube une promesse qu'elle ne tient jamais".
"Je souffre tout de même d'une maladie de foie, aujourd'hui. On avouera qu'il y a de quoi : j'en suis à mon dix millième vautour" (tiens, cela me fait penser à ces mots d'HFT : "le foie bouffé par tes vautours").
"Mon égocentrisme est en effet tel que je me reconnais instantanément dans tous ceux qui souffrent et j'ai mal dans toutes leurs plaies. Cela ne s'arrête pas aux hommes, mais s'étend aux bêtes, et même aux plantes".
"Ma course fut une poursuite errante de quelque chose dont l'art me donnait la soif, mais dont la vie ne pouvait m'offrir l'apaisement. Il y a longtemps que je ne suis plus dupe de mon inspiration et si je rêve toujours de transformer le monde en un jardin heureux, je sais à présent que ce n'est pas tant par amour des hommes que par celui des jardins".
"Il me semble parfois que je ne continue moi-même à vivre que par politesse, et que si je laisse encore battre mon coeur c'est uniquement parce que j'ai toujours aimé les bêtes" (autre parallèle possible avec HFT : "D'ivresse en arrogance, je reste et je survis, sans doute par élégance, peut-être par courtoisie").
"Je n'ai jamais imaginé qu'on pût être à ce point hanté par une voix, par un cou, par des épaules, par des mains. Ce que je veux dire, c'est qu'elle avait des yeux où il faisait si bon vivre que je n'ai jamais su où aller depuis".
"Je ne sais pas ce que je vois au juste dans les yeux des bêtes, mais leur regard a une sorte d'interpellation muette, d'incompréhension, de question, qui me rappelle quelque chose et me bouleverse complètement. Je n'ai d'ailleurs pas de bêtes chez moi, parce que je m'attache très facilement et, tout compte fait, je préfère m'attacher à l'Océan, qui ne meurt pas vite".
09:03 | Lien permanent | Commentaires (4)
26/05/2010
"Apprends donc à tenir ta laisse"...
La pensée du jour : "Nous sommes las d'avoir fauché tant de désirs dans le beau champ de notre amour". Jules RENARD.
« Tu vides des packs de mauvaise bière
bercé par France télévision
qui t'offre ses documentaires
sur les stations d'épuration
même l'été sous la canicule
t'as froid dans ton Thermolactyl
et tu pleures au milieu des bulles
de ton sushi rayé des îles
apprends donc à tenir ta laisse
t'es pas tout seul en manque de secours
la tristesse est la seule promesse
que la vie tient toujours
t'as pas appris dans ton enfance
l'amour la joie ni le bonheur
t'as juste étudié l'arrogance
dans l'angoisse, la honte et la peur
ton fax fixe un démon qui passe
à l'heure où tout devient trop clair
où tu contemples dans ta glace
une certaine idée de l'enfer
apprends donc à tenir ta laisse
t'es pas tout seul en manque de secours
la tristesse est la seule promesse
que la vie tient toujours
peut-être qu'un jour chez Norauto
tu verras ta reine arriver
au volant de la stéréo
d'un tubing-car customisé
mais l'amour s'use à la lumière
et les louttes sont toutes un peu louffes
elles te feront jouer du somnifère
dans un H.P. avec les oufs ».
Dans « Eloge de la tristesse », , HFT s'adresse à on ne sait trop qui, un autre être avec qui il est à tu et à toi. Peut-être que cet autre est tout simplement lui-même ? D'où la rudesse du propos. Il se malmène, se réprimande... « Apprends donc à tenir ta laisse
t'es pas tout seul en manque de secours », scande-t-il dans le refrain.
Le tableau qui s'offre à nous d'emblée dans cette chanson n'est pas des plus reluisants : on imagine un type vautré sur son canapé, vidant des packs de bière (de mauvaise qualité, de surcroît !), suivant d'un œil hagard un programme télé pourri !!! Pas de quoi se réchauffer l'âme avec ce déferlement de documentaires sans intérêt. D'où cette froideur persistante, même en plein été, sous la canicule, avec un Thermolactyl appelé à la rescousse ! L'impression de froideur est renforcée ici par l'usage des consonnes dentales, qui ne sont pas réputées pour être douces (« t'as froid dans ton Thermolactyl »).
Dans le deuxième couplet, HFT revient sur l'enfance de l'individu à qui il s'adresse. Une enfance pas vraiment joyeuse non plus. Ce qu'il en reste ? Une impression d'angoisse, de honte et de peur. Deux registres s'opposent ici : d'un côté, « l'amour, la joie, le bonheur », qui ont cruellement fait défaut, et de l'autre, « l'arrogance, l'angoisse, la honte et la peur », qui ont constitué le lot quotidien de notre bonhomme.
Dans une autre chanson de Thiéfaine, « un ange passe, équipé d'un treuil ». Ici, c'est un démon qui passe. Renversement des images habituelles. L'heure a sonné où « tout devient trop clair », où la lucidité vient cramer les miroirs pour laisser l'homme nu face à son triste destin. « Une certaine idée de l'enfer », voilà tout ce qui lui saute à la figure quand il se regarde dans la glace. Ailleurs encore, ce sera un étranger qui viendra perturber le reflet contemplé...
On serait en droit, tout comme notre homme, d'attendre une lueur d'espoir dans ce tableau chargé d'ombres... On croit que cette lueur va surgir tout au bout du tunnel, tout au bout de la chanson puisque « peut-être qu'un jour chez Norauto tu verras ta reine arriver ». Notons le joli contraste entre la supposée reine et le cadre dans lequel tout est censé se dérouler. Norauto, il y a mieux comme endroit pour entamer une idylle, n'est-ce pas ?! Et le carrosse de Cendrillon n'est guère poétique : non, il s'agit d'un tubing-car customisé, on imagine avec quel ridicule !!! Qu'importe, l'idylle est de toute façon vouée à l'échec. Total et sordide. Une fois encore, comme dans « L'agence des amants de madame Müller », on flirte dangereusement avec la folie : «Et les louttes sont toutes un peu louffes
elles te feront jouer du somnifère
dans un H.P. avec les oufs »...
Revenons également sur cette phrase qui me trotte souvent dans la tête : « L'amour s'use à la lumière »... Qu'est-ce à dire ? Que trop voir, trop regarder l'autre à la lumière de la lucidité et de la routine, c'est immanquablement finir par ne plus vouloir rien voir de ce qu'il est ? Le regarder jusqu'au dégoût... « Je t'aimerai, le temps de voir dans ce grain de beauté une verrue », écrivait ce grand désabusé qu'était Jules Renard...
Dans les mots d'HFT aussi, quelle lassitude ! La vie s'évertue à nous décevoir, à ne pas tenir ses promesses. Seule la tristesse est digne de confiance puisqu'elle seule s'en tient à la sagesse populaire, à savoir : « chose promise, chose due ». D'où cet éloge, je suppose. Ce n'est pas que la tristesse soit un état si agréable, c'est juste qu'au moins, avec elle, on n'est pas déçu, ce qu'on attendait finit toujours par nous tomber sur l'échine...
Nous sommes tous en manque de secours, mon cher HFT, et le « tu » que tu utilises ici est un « tu » universel, qui relie de bien triste façon tous les hommes entre eux... « Notre besoin de consolation est impossible à rassasier », écrivait Stig Dagerman. Pas de salut possible ici, ni dans les piètres divertissements proposés par France télévision (étonnant, non ?!!!), ni dans le souvenir de l'enfance (mais non, elle fut malheureuse, « parce qu'on avait mal aux dents, on avait mal aux dents parce que toujours on nous obligeait à manger des sucres d'orge et qu'on n'aimait pas ça » !), ni dans l'amour (qui n'est qu'un horrible « chagrin des glandes »)... A bon entendeur salut !
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22/05/2010
Jacques Higelin à Toul hier soir
La pensée de la nuit : "ça n'en finit plus d'être sans vous". Jacques HIGELIN (Lettres d'amour d'un soldat de vingt ans).
Monsieur Jacques Higelin arrive sur scène à 20h50 (il en sortira presque trois heures plus tard). Il salue chaleureusement le public, qui se lève comme un seul homme pour l'accueillir. Il dit quelques mots avant de chanter. « Ce soir, des amis à moi sont là et je suis très ému car l'un d'eux est malade. Il s'appelle Jonathan. Je vais chanter pour vous et aussi tout particulièrement pour lui ».
Et nous voilà partis. C'est l'amour fou qui nous a donné rendez-vous. Ce rendez-vous, d'ailleurs, nous l'attendions depuis des mois, nous comptions les jours, c'était la venue du Messie, mais en mieux, en plus impressionnant, en plus bouleversant encore.
Cela commence par « Le minimum » et d'emblée, on comprend que ce soir, comme à chaque concert de l'ami Jacques, on aura droit au contraire, c'est-à-dire au maximum. On sent qu'il va se donner à fond, qu'il est heureux d'être là. Et reconnaissant, toujours reconnaissant de tant d'amour.
Plein de chansons du dernier album au programme. D'ailleurs, ce « Coup de foudre » est un joyau. Entre deux chansons, Higelin nous transporte dans ses longues tirades totalement farfelues. Mais où va-t-il chercher tout ça ? On comprend que sa mère ait toujours dit, dès la plus tendre enfance de son môme : « Laissez Jacques, il rêve ». Tout à coup, il nous dit qu'il a des seins et que peut-être même il en sortira bientôt du lait. « Madame, laissez-moi donc nourrir le petit » ! Le public est hilare.
Il parle d'amour, beaucoup, beaucoup, beaucoup. Il n'oublie pas les amis disparus (Bashung, Barbara). Il file quelques coups de griffe bien sentis à mister Sarkozy et à son équipe. Il nous dit tout à coup que nous avons l'âme bien tournée, nous, public venu de Toul et d'ailleurs, et nous nous sentons soudain importants, parce que ce n'est pas rien de s'entendre dire, de la bouche de Jacques Higelin, qu'on a l'âme bien tournée (la mienne l'est peut-être aussi, bien tournée, mais je ne sais toujours pas vers quoi !!!) !!! Il rend hommage aux femmes de sa vie. A sa mère, à toutes celles qui, je cite, l'ont remis dans le droit chemin. Il dit qu'il est vieux, mais qu'il s'en fout, qu'il aime toujours autant la vie et qu'il est bien décidé (je cite encore) à faire encore longtemps chier son monde !! Quand on le voit se dandiner sur scène, tordre sa voix dans tous les sommets possibles et imaginables, on se dit que cet homme n'est pas de notre galaxie. Qu'il a un supplément d'âme, forcément, qui lui a permis de rester jeune. Qu'il est immortel, même, et que du haut de nos trente ou quarante ans, nous faisons bien piètre figure à côté de sa somptueuse vivacité. Il ne doit pas perdre une seule miette de vie, lui, au moins ! Il s'émerveille encore. Il s'indigne aussi. De constater, par exemple, qu'il existe une « avenue du général Bigeard » à Toul. Je viens de me renseigner un peu sur Internet : Bigeard est né à Toul. Il y vit même encore. Ceci explique un peu cela, mais bon... Higelin nous dit qu'il préférerait des avenues Georges Brassens, Victor Hugo ou Léo Ferré et des allées Barbara ou Jacques Prévert ! Il se plante dans une ou deux chansons et se moque de lui-même. « J'étais persuadé que c'était les musiciens qui allaient se gourer sur celle-là et voilà que j'ai oublié les paroles ». Il saute, il danse, il frétille !
Un concert d'Higelin, c'est très difficile à raconter. Parce que cela doit avant tout se vivre. Parce que cela se vit et qu'il n'y a pas de mots pour dire de quoi on est plus riche à la sortie... Parce que tout ce que Jacques nous donne à voir de sa belle âme nous arrive droit dans les tripes. C'est très physique, j'avais même les larmes aux yeux en le voyant si beau, transporté par la joie d'être sur scène. Si vrai aussi. Tellement différent de tous les affreux qu'on rencontre chaque jour et dont l'agressivité vous blesse au plus profond de vous-même quand vous n'êtes pas, malgré une assez longue expérience, habitué à tant de haine...
Un concert d'Higelin, c'est de l'amour sur toute la ligne. Du Champagne qui coule à flot sur nos âmes meurtries. Du petit-lait qui se répand dans nos veines. Et cela va durer plusieurs semaines encore. L'enchantement. La venue du Messie en mieux, je vous dis !
Et aussi : joyeux 22 mai à tous les séminaristes de ce monde !! Euh, non, pas forcément... Joyeux 22 mai à vous, plutôt, mes très chers amis !!! Et, pour en revenir à Higelin : "C'est pas que je vous aime, mais il y a de ça" !!!!
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