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14/06/2010

Chanson n°2 : La fin du Saint Empire romain germanique

La pensée du jour : "Neige, beaucoup de neige sur Paris; c'est étrange. Je me dis et j'en souffre : elle ne sera jamais plus là pour le voir, pour que je le lui raconte". Roland BARTHES.

 

Je suis le fils d'une société

fondamentalement épuisée

passe-moi ma pipe de Marijane

sinon je me shoote à la banane

tout comme ses autres copains mon père

s'en revenait de Germany

quand on leur a dit les petits pères

faut nous faire de la démographie

moi c'est comme ça que j'ai débarqué

par un beau matin aux aurores

la guerre venait de se terminer

on revendait les miradors

les miradors...

 

avec les germes de la guerre

on ne fabrique que des tarés

moi j'ai le coeur qui tape à l'envers

et le cerveau qui a des ratés

pourtant on m'a donné l'enfance

d'un petit Français bien rassasié

jusqu'à l'école où Mendès-France

venait nous donner la tétée

mais si je fus un beau nourrisson

répondant aux normes Nestlé

aujourd'hui j'ai l'air tellement con

qu'on veut pas de moi même dans l'armée

même dans l'armée...

 

d'ailleurs je suis toujours mal foutu

j'ai mal aux seins, j'ai mal au ...

y'a guère que dans la naphtaline

que je trouve un peu de vitamines

et pour ce qui est des nanas

j'ai même plus le courage de draguer

quand je les emmène au cinéma

je m'endors aux actualités

faut dire que maintenant les starlettes

ça devient micheton à dégommer

quand elles cartonnent pas M.L.F.

elles vous allongent au karaté

au karaté...

 

arné sné connunu salome

massasné mazna en sodome

loukoum loukoum dé trougaga

arné snavi rutabaga

 

je suis le fils d'une société

fondamentalement épuisée

refile-moi mon dir-la-da-da

sinon je me shoote au Banania

c'est la fin de mes éructations

j'ai pas le courage d'aller plus loin

mieux vaut s'arrêter là sinon

ça va se terminer en boudin

ouais, en boudin...

13/06/2010

L'ascenseur de 22h43 (1ère partie)

La pensée du jour : "L'allemand est une langue injustement décriée". Gérard MORDILLAT (Rue des Rigoles).

 

Coup de stress ce matin, lorsque je me suis rendu compte avec effroi que j'avais paumé mon t-shirt "HFT Scandale mélancolique tour" !!! Du coup, j'ai vidé toute mon armoire de fringues (il y avait du boulot) ... pour finalement retrouver le t-shirt non pas dans cette même armoire, mais dans un panier dans lequel je range mes foulards. Bon, j'ai une excuse : j'ai deux enfants qui fouillent souvent dans mes affaires, semant la pagaille un peu partout ! C'est peut-être l'une d'elles qui m'a joué ce tour ! Et puis, il y a presque vingt ans, quand j'ai entamé mes études d'allemand, j'avais une amie qui disait que mon sens du rangement (je triais tout dans des boîtes à l'époque) ne faisait pas très artiste. Aujourd'hui, si la copine en question venait faire un tour chez moi, elle verrait que je suis devenue une artiste, une vraie ! Tout traîne lamentablement. Les bouquins font des pyramides sur ma table de nuit, au pied de mon lit, sur des étagères non prévues à cet effet. Dans la cuisine aussi. Dans les toilettes. Partout où je peux entasser, j'entasse. La nature a horreur du vide ! Mais revenons à nos moutons : oui, donc, mon t-shirt de la tournée "Scandale mélancolique" trônait honteusement, scandaleusement dans mes foulards !!!

Trop heureuse d'avoir remis la main sur cet objet de grande valeur sentimentale, je le porte aujourd'hui. D'habitude - et je l'ai déjà dit sur ce blog -, quand je porte ce t-shirt, il m'arrive toujours des trucs insolites. Tout à coup, un inconnu m'offre des fleurs (ou presque), et ce n'est pas l'effet magique d'Impulse, mais bien l'effet magique HFT !!!! "Les moutards de ma ville viennent vers moi pour me regarder", les gens se dirigent droit sur moi pour me dire que eux aussi, ils aiment bien HFT, mes élèves me demandent, ébahis, si je connais Thiéfaine. Et je biche déjà, me disant que nous avons enfin trouvé un terrain d'entente, eux et moi !!!!!! Et la désillusion se fait rude quand ils me disent immanquablement que chez eux, c'est papa et maman qui écoutent Hubert !!!!!!!!!

Bon, je m'égare, mes chers amis... Je voulais vous dire qu'à l'heure de renouveler mon abonnement chez Haut et fort, je sèche complètement. Plus d'idées de notes. A cela je ne vois qu'une explication : l'actualité HFT est trop cadavérique. Que dis-je ? Inexistante, oui ! Il ne se passe rien. Ou alors il se passe des choses, mais nous ne sommes pas au courant. On nous cache tout, on nous dit rien... Alors je rame sérieux dans ma cervelle (de toute façon dégommée par un morne quotidien qui m'entraîne toujours vers des préoccupations prosaïques), oui, je rame sérieux pour trouver encore des sujets de notes.

Alors j'ai décidé de sombrer pitoyablement dans la facilité : je vais mettre ici les paroles de toutes les chansons d'HFT, à commencer donc par "L'ascenseur de 22h43". Que chaque note de ce genre soit pour vous l'occasion de dire ici comment vous percevez la chanson en question, etc. De mon côté, je nourris une grande histoire d'amour avec "L'ascenseur de 22h43" !!!! Et tout le monde autour de moi le sait. D'ailleurs, avec ma satanée habitude de fêter chaque soir ou presque le passage de 22h42 à 22h43, je crois que j'ai traumatisé une de mes amies !!!! Elle ne peut plus voir "22h43" sans avoir une pensée pour HFT et moi !!!!!!! Cette chanson me rappelle également systématiquement le début de certains concerts. Qu'est-ce que j'étais jeune et fougueuse en ce temps-là (je ne suis plus jeune, mais je crois être restée assez fougueuse) !!!! D'ailleurs, "en ce temps-là, nos fleurs vendaient leur viande aux chiens et nous habitions tous de sordides tripots" !!! 

 

L'ascenseur de 22h43 (1ère partie)

 

attention, attention, la concierge se trouve

actuellement dans l'escalier

mais comme elle ne le sait pas

vous êtes priés de ne pas la déranger

 

j'arriverai par l'ascenseur de 22h43

en provenance de Babylone

 

les quais seront encombrés de pendus

laissant claquer leurs mâchoires dans le vent

en guise de discours de bienvenue

en guise de discours de bienvenue

 

j'arriverai par l'ascenseur de 22h43

en provenance de Babylone

 

je connaîtrai rien de tes habitudes

il se peut même que tu sois décédé

mais j'demanderai ta main pour la couper

mais j'demanderai ta main pour la couper

 

attention, attention, sur le palier numéro 2

l'ascenseur de 22h43 en provenance

de Babylone est annoncé

veuillez dégager le vide-ordures s'il vous plaît

et ne pas laisser les enfants s'amuser avec les fils

à haute tension

 

tout corps vivant branché sur le secteur

étant appelé à s'émouvoir

j'arriverai par l'ascenseur de 22h43

et je viendrai relever le compteur de ton ennui

 

il te faudra sans doute changer de tête

et puis brancher ton cerveau sur ton coeur

rien ne sera plus jamais comme avant

rien ne sera plus jamais comme avant

 

05/06/2010

Romain Gary

La pensée du jour (ah oui, c'est vraiment ce que je pense en ce jour) : "La vie est pavée d'occasions perdues". Romain GARY

 

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Eté du Livre hier à Metz... Je discute avec une journaliste qui écrit aussi des livres pour enfants. Elle me demande quel écrivain je place au-dessus de tous les autres. Sans réfléchir, je réponds Romain Gary. Parce que cet homme a écrit les livres que j'avais toujours espéré lire. La nuit sera calme, La promesse de l'aube, Gros-Câlin, La vie devant soi, L'angoisse du roi Salomon, Les cerfs-volants, Les mangeurs d'étoiles, Au-delà de cette limite votre ticket n'est plus valable, voilà autant de livres qui ont été des révolutions, des tornades pour moi ! Au même titre que certaines chansons de Thiéfaine. Je connais certaines phrases de Gary par coeur et elles me sont un refuge, très souvent, quand les contrariétés battent leur plein... Thiéfaine aussi aime bien cet auteur. Du coup, je me sens autorisée à remettre ici quelques mots du grand, du doux Romain Gary ! Voici quelques extraits de La promesse de l'aube :

"A quarante-quatre ans, j'en suis encore à rêver de quelque tendresse essentielle".

 

"Un train passa sur la voie. Il me parut soudain que c'était mon chagrin qui faisait tout ce fracas".

 

"La vie est pavée d'occasions perdues".

 

"Avec l'amour maternel, la vie vous fait à l'aube une promesse qu'elle ne tient jamais".

 

"Je souffre tout de même d'une maladie de foie, aujourd'hui. On avouera qu'il y a de quoi : j'en suis à mon dix millième vautour" (tiens, cela me fait penser à ces mots d'HFT : "le foie bouffé par tes vautours").

 

"Mon égocentrisme est en effet tel que je me reconnais instantanément dans tous ceux qui souffrent et j'ai mal dans toutes leurs plaies. Cela ne s'arrête pas aux hommes, mais s'étend aux bêtes, et même aux plantes".

 

"Ma course fut une poursuite errante de quelque chose dont l'art me donnait la soif, mais dont la vie ne pouvait m'offrir l'apaisement. Il y a longtemps que je ne suis plus dupe de mon inspiration et si je rêve toujours de transformer le monde en un jardin heureux, je sais à présent que ce n'est pas tant par amour des hommes que par celui des jardins".

 

"Il me semble parfois que je ne continue moi-même à vivre que par politesse, et que si je laisse encore battre mon coeur c'est uniquement parce que j'ai toujours aimé les bêtes" (autre parallèle possible avec HFT : "D'ivresse en arrogance, je reste et je survis, sans doute par élégance, peut-être par courtoisie").

 

"Je n'ai jamais imaginé qu'on pût être à ce point hanté par une voix, par un cou, par des épaules, par des mains. Ce que je veux dire, c'est qu'elle avait des yeux où il faisait si bon vivre que je n'ai jamais su où aller depuis".

 

"Je ne sais pas ce que je vois au juste dans les yeux des bêtes, mais leur regard a une sorte d'interpellation muette, d'incompréhension, de question, qui me rappelle quelque chose et me bouleverse complètement. Je n'ai d'ailleurs pas de bêtes chez moi, parce que je m'attache très facilement et, tout compte fait, je préfère m'attacher à l'Océan, qui ne meurt pas vite".

26/05/2010

"Apprends donc à tenir ta laisse"...

La pensée du jour : "Nous sommes las d'avoir fauché tant de désirs dans le beau champ de notre amour". Jules RENARD.

 

 

« Tu vides des packs de mauvaise bière

bercé par France télévision

qui t'offre ses documentaires

sur les stations d'épuration

même l'été sous la canicule

t'as froid dans ton Thermolactyl

et tu pleures au milieu des bulles

de ton sushi rayé des îles

 

apprends donc à tenir ta laisse

t'es pas tout seul en manque de secours

la tristesse est la seule promesse

que la vie tient toujours

 

t'as pas appris dans ton enfance

l'amour la joie ni le bonheur

t'as juste étudié l'arrogance

dans l'angoisse, la honte et la peur

ton fax fixe un démon qui passe

à l'heure où tout devient trop clair

où tu contemples dans ta glace

une certaine idée de l'enfer

 

apprends donc à tenir ta laisse

t'es pas tout seul en manque de secours

la tristesse est la seule promesse

que la vie tient toujours

 

peut-être qu'un jour chez Norauto

tu verras ta reine arriver

au volant de la stéréo

d'un tubing-car customisé

mais l'amour s'use à la lumière

et les louttes sont toutes un peu louffes

elles te feront jouer du somnifère

dans un H.P. avec les oufs ».

 

 

Dans « Eloge de la tristesse », , HFT s'adresse à on ne sait trop qui, un autre être avec qui il est à tu et à toi. Peut-être que cet autre est tout simplement lui-même ? D'où la rudesse du propos. Il se malmène, se réprimande... « Apprends donc à tenir ta laisse

t'es pas tout seul en manque de secours », scande-t-il dans le refrain.

Le tableau qui s'offre à nous d'emblée dans cette chanson n'est pas des plus reluisants : on imagine un type vautré sur son canapé, vidant des packs de bière (de mauvaise qualité, de surcroît !), suivant d'un œil hagard un programme télé pourri !!! Pas de quoi se réchauffer l'âme avec ce déferlement de documentaires sans intérêt. D'où cette froideur persistante, même en plein été, sous la canicule, avec un Thermolactyl appelé à la rescousse ! L'impression de froideur est renforcée ici par l'usage des consonnes dentales, qui ne sont pas réputées pour être douces (« t'as froid dans ton Thermolactyl »).

Dans le deuxième couplet, HFT revient sur l'enfance de l'individu à qui il s'adresse. Une enfance pas vraiment joyeuse non plus. Ce qu'il en reste ? Une impression d'angoisse, de honte et de peur. Deux registres s'opposent ici : d'un côté, « l'amour, la joie, le bonheur », qui ont cruellement fait défaut, et de l'autre, « l'arrogance, l'angoisse, la honte et la peur », qui ont constitué le lot quotidien de notre bonhomme.

Dans une autre chanson de Thiéfaine, « un ange passe, équipé d'un treuil ». Ici, c'est un démon qui passe. Renversement des images habituelles. L'heure a sonné où « tout devient trop clair », où la lucidité vient cramer les miroirs pour laisser l'homme nu face à son triste destin. « Une certaine idée de l'enfer », voilà tout ce qui lui saute à la figure quand il se regarde dans la glace. Ailleurs encore, ce sera un étranger qui viendra perturber le reflet contemplé...

On serait en droit, tout comme notre homme, d'attendre une lueur d'espoir dans ce tableau chargé d'ombres... On croit que cette lueur va surgir tout au bout du tunnel, tout au bout de la chanson puisque « peut-être qu'un jour chez Norauto tu verras ta reine arriver ». Notons le joli contraste entre la supposée reine et le cadre dans lequel tout est censé se dérouler. Norauto, il y a mieux comme endroit pour entamer une idylle, n'est-ce pas ?! Et le carrosse de Cendrillon n'est guère poétique : non, il s'agit d'un tubing-car customisé, on imagine avec quel ridicule !!! Qu'importe, l'idylle est de toute façon vouée à l'échec. Total et sordide. Une fois encore, comme dans « L'agence des amants de madame Müller », on flirte dangereusement avec la folie : «Et les louttes sont toutes un peu louffes

elles te feront jouer du somnifère

dans un H.P. avec les oufs »...

Revenons également sur cette phrase qui me trotte souvent dans la tête : « L'amour s'use à la lumière »... Qu'est-ce à dire ? Que trop voir, trop regarder l'autre à la lumière de la lucidité et de la routine, c'est immanquablement finir par ne plus vouloir rien voir de ce qu'il est ? Le regarder jusqu'au dégoût... « Je t'aimerai, le temps de voir dans ce grain de beauté une verrue », écrivait ce grand désabusé qu'était Jules Renard...
Dans les mots d'HFT aussi, quelle lassitude ! La vie s'évertue à nous décevoir, à ne pas tenir ses promesses. Seule la tristesse est digne de confiance puisqu'elle seule s'en tient à la sagesse populaire, à savoir : « chose promise, chose due ». D'où cet éloge, je suppose. Ce n'est pas que la tristesse soit un état si agréable, c'est juste qu'au moins, avec elle, on n'est pas déçu, ce qu'on attendait finit toujours par nous tomber sur l'échine...

Nous sommes tous en manque de secours, mon cher HFT, et le « tu » que tu utilises ici est un « tu » universel, qui relie de bien triste façon tous les hommes entre eux... « Notre besoin de consolation est impossible à rassasier », écrivait Stig Dagerman. Pas de salut possible ici, ni dans les piètres divertissements proposés par France télévision (étonnant, non ?!!!), ni dans le souvenir de l'enfance (mais non, elle fut malheureuse, « parce qu'on avait mal aux dents, on avait mal aux dents parce que toujours on nous obligeait à manger des sucres d'orge et qu'on n'aimait pas ça » !), ni dans l'amour (qui n'est qu'un horrible « chagrin des glandes »)... A bon entendeur salut !

 

22/05/2010

Jacques Higelin à Toul hier soir

La pensée de la nuit : "ça n'en finit plus d'être sans vous". Jacques HIGELIN (Lettres d'amour d'un soldat de vingt ans).

 

 

Monsieur Jacques Higelin arrive sur scène à 20h50 (il en sortira presque trois heures plus tard). Il salue chaleureusement le public, qui se lève comme un seul homme pour l'accueillir. Il dit quelques mots avant de chanter. « Ce soir, des amis à moi sont là et je suis très ému car l'un d'eux est malade. Il s'appelle Jonathan. Je vais chanter pour vous et aussi tout particulièrement pour lui ».

Et nous voilà partis. C'est l'amour fou qui nous a donné rendez-vous. Ce rendez-vous, d'ailleurs, nous l'attendions depuis des mois, nous comptions les jours, c'était la venue du Messie, mais en mieux, en plus impressionnant, en plus bouleversant encore.

Cela commence par « Le minimum » et d'emblée, on comprend que ce soir, comme à chaque concert de l'ami Jacques, on aura droit au contraire, c'est-à-dire au maximum. On sent qu'il va se donner à fond, qu'il est heureux d'être là. Et reconnaissant, toujours reconnaissant de tant d'amour.

Plein de chansons du dernier album au programme. D'ailleurs, ce « Coup de foudre » est un joyau. Entre deux chansons, Higelin nous transporte dans ses longues tirades totalement farfelues. Mais où va-t-il chercher tout ça ? On comprend que sa mère ait toujours dit, dès la plus tendre enfance de son môme : « Laissez Jacques, il rêve ». Tout à coup, il nous dit qu'il a des seins et que peut-être même il en sortira bientôt du lait. « Madame, laissez-moi donc nourrir le petit » ! Le public est hilare.
Il parle d'amour, beaucoup, beaucoup, beaucoup. Il n'oublie pas les amis disparus (Bashung, Barbara). Il file quelques coups de griffe bien sentis à mister Sarkozy et à son équipe. Il nous dit tout à coup que nous avons l'âme bien tournée, nous, public venu de Toul et d'ailleurs, et nous nous sentons soudain importants, parce que ce n'est pas rien de s'entendre dire, de la bouche de Jacques Higelin, qu'on a l'âme bien tournée (la mienne l'est peut-être aussi, bien tournée, mais je ne sais toujours pas vers quoi !!!) !!! Il rend hommage aux femmes de sa vie. A sa mère, à toutes celles qui, je cite, l'ont remis dans le droit chemin. Il dit qu'il est vieux, mais qu'il s'en fout, qu'il aime toujours autant la vie et qu'il est bien décidé (je cite encore) à faire encore longtemps chier son monde !! Quand on le voit se dandiner sur scène, tordre sa voix dans tous les sommets possibles et imaginables, on se dit que cet homme n'est pas de notre galaxie. Qu'il a un supplément d'âme, forcément, qui lui a permis de rester jeune. Qu'il est immortel, même, et que du haut de nos trente ou quarante ans, nous faisons bien piètre figure à côté de sa somptueuse vivacité. Il ne doit pas perdre une seule miette de vie, lui, au moins ! Il s'émerveille encore. Il s'indigne aussi. De constater, par exemple, qu'il existe une « avenue du général Bigeard » à Toul. Je viens de me renseigner un peu sur Internet : Bigeard est né à Toul. Il y vit même encore. Ceci explique un peu cela, mais bon... Higelin nous dit qu'il préférerait des avenues Georges Brassens, Victor Hugo ou Léo Ferré et des allées Barbara ou Jacques Prévert ! Il se plante dans une ou deux chansons et se moque de lui-même. « J'étais persuadé que c'était les musiciens qui allaient se gourer sur celle-là et voilà que j'ai oublié les paroles ». Il saute, il danse, il frétille !

Un concert d'Higelin, c'est très difficile à raconter. Parce que cela doit avant tout se vivre. Parce que cela se vit et qu'il n'y a pas de mots pour dire de quoi on est plus riche à la sortie... Parce que tout ce que Jacques nous donne à voir de sa belle âme nous arrive droit dans les tripes. C'est très physique, j'avais même les larmes aux yeux en le voyant si beau, transporté par la joie d'être sur scène. Si vrai aussi. Tellement différent de tous les affreux qu'on rencontre chaque jour et dont l'agressivité vous blesse au plus profond de vous-même quand vous n'êtes pas, malgré une assez longue expérience, habitué à tant de haine...

Un concert d'Higelin, c'est de l'amour sur toute la ligne. Du Champagne qui coule à flot sur nos âmes meurtries. Du petit-lait qui se répand dans nos veines. Et cela va durer plusieurs semaines encore. L'enchantement. La venue du Messie en mieux, je vous dis !

 

Et aussi : joyeux 22 mai à tous les séminaristes de ce monde !! Euh, non, pas forcément... Joyeux 22 mai à vous, plutôt, mes très chers amis !!! Et, pour en revenir à Higelin : "C'est pas que je vous aime, mais il y a de ça" !!!!

08/05/2010

"Je suis l'évêque étrusque, un lycanthrope errant"...

La pensée du jour : "Parfois je me sens débranché". Georges PERROS (poète que je redécouvre à fond grâce à Miossec !).

 

Confessions d'un never been

les joyeux éboueurs des âmes délabrées

se vautrent dans l'algèbre des mélancolies

traînant leurs métastases de rêve karchérisé

entre les draps poisseux des siècles d'insomnie

ça sent la vieille guenille et l'épicier cafard

dans ce chagrin des glandes qu'on appelle l'amour

où les noirs funambules du vieux cirque barbare

se pissent dans le froc en riant de leurs tours

 

refrain : j'ai volé mon âme à un clown

un cloclo mécanique du rock'n roll cartoon

j'ai volé mon âme à un âme à un clown

un clown au coeur de cône du rêve baby baboon

j'ai volé mon âme à un clown

 

je rêve d'être flambé au-dessus du Vésuve

et me défocne au gaz échappé d'un diesel

à la manufacture métaphysique d'eflluves

où mes synapses explosent en millions d'étincelles

reflets de flammes en fleurs dans les yeux du cheval

que j'embrasse à Turin pour en faire un complice

ivre de Prolixine et d'acide cortical

je dégaine mon Walther PPK de service

 

refrain

 

bien vibré bien relax en un tempo laid back

rasta lunaire baisant la main d'Oméga Queen

je crache dans ma tête les vapeurs d'ammoniac

d'un Sturm und Drang sans fin au bout du never been

fac-similé d'amour et de tranquillisants

dans la clarté chimique de ma nuit carcérale

je suis l'évêque étrusque un lycantrope errant

qui patrouille dans le gel obscur de mon mental

 

refrain

 

H.F. Thiéfaine / J.P. Nataf

 

Polixine : médicament utilisé contre les troubles mentaux, la dépression moyenne ou grave, l'agitation, les douleurs persistantes, la sénilité ou les symptômes de sevrage alcoolique.

 

Lycanthropie : la lycanthropie est un thème courant dans de nombreuses cultures. Ces histoires d'hommes se transformant en bêtes féroces sous l'influence de la pleine lune peuvent être associées, sur le plan symbolique, à la face cachée de la Lune et à ses liens avec le monde occulte. Elles traduisent aussi la peur des hommes de succomber à leurs instincts animaux. Car, si les transformations volontaires libèrent, les changements d'apparence incontrôlés emprisonnent. En écho au mythe du loup-garou répandu en Europe, l'homme peut se métamorphoser dans d'autres régions du monde en jaguar, en tigre, en renard ou en blaireau. On attribuait aux chamans et aux sorcières le pouvoir de se transformer en lycanthropes pour voyager entre les mondes humain et spirite.
Source : Symboles et signes, origines et interprétations.

 

« Confessions d'un never been », chanson qui fait partie de celles que je préfère sur l'album « Scandale mélancolique ». Je ne pige pas tout le texte, évidemment, mais je sens bien qu'il s'en dégage la profonde tristesse d'une « âme délabrée » qui se débat dans sa « nuit carcérale ». Un de ces jours, je vais m'essayer à une petite divagation sur ce texte-là !

05/05/2010

Autour des fastes de la solitude

La pensée du jour : "Je me dis que l'amour, qui avait tant tardé à agiter ma vie, était bien la seule réalité céleste d'un univers misérable". Jean-Paul ENTHOVEN

 

Pas de jaloux ce soir puisque j'aurai alimenté mes trois blogs ! J'en sue encore !!! Oui, je ne vous ai pas dit (enfin, si, je l'ai dit à certains d'entre vous, mais je ne l'ai pas "annoncé officiellement" ici) : j'ai ouvert samedi dernier un blog sur Miossec. Oui. Car le voir en concert m'a sacrément agité la tripaille, j'ai senti qu'enfin la joie, la vraie, revenait un peu dans ma vie, que quelque chose s'était passé, qu'une faille s'était enfin un peu resserrée. Pas refermée complètement, mais resserrée, et je n'en demande pas plus... Alors voilà. J'ai donc un blog sur Miossec, maintenant ! Comme ça, je ne mettrai plus ici de notes le concernant (même si j'aime mélanger les genres). Vous pourrez aller directement sur http://duvelosanslesmains.hautetfort.com/ Ce que deviendra ce blog, je ne le sais pas moi-même. Celui-ci m'a réservé tant de surprises ! Qui eût cru, il y a quatre ans, quand ce cabaret venait de naître, qu'il allait me porter vers tant d'autres fans ? Que j'allais même rencontrer certains visiteurs de ce blog, me lier d'amitié avec eux ? Quelle belle aventure ! Pourvu que l'aventure Miossec soit aussi riche. Il faut que je fasse mon trou dans la toile, et c'est toujours coton !!! Allez jeter un oeil sur ce "vélo sans les mains", si le coeur vous en dit, mais s'il vous plaît : si vous n'aimez pas Miossec, nul besoin d'essayer, car ce serait en vain, de m'en dégoûter ! Nul besoin de poster des commentaires haineux, faites silence... En revanche, si vous aimez Miossec ou si vous avez envie de le découvrir un peu à travers mon blog, venez souvent, et partageons, partageons... Je n'abandonne pas HFT pour autant, que ce soit bien clair ! J'élargis la palette, je me lance tête baissée dans un autre élan, je suis comme ça : pétrie de mille émotions qui me mettent en permanente effervescence ! Quand ce n'est pas un mot allemand qui me fait les yeux doux, c'est une chanson d'HFT qui me rentre dans la peau, une chanson de Miossec qui m'ébranle la charpente, un mot d'Higelin qui me fait perdre la raison !!! Il me fallait donc trois blogs (et je me demande même si je ne vais pas en ouvrir un sur Higelin !! Je plaisante !!)

Mais ce soir, voici du HFT :

 

Poème n°1 autour des fastes de la solitude

 

obscurité malveillante d'une nuit de sortilège

fastes de la solitude

14ème jour de lune

encens, benjoin, styrax, myrrhe

en passant devant le cimetière

je vois qu'ils n'ont toujours pas mis de nom

sur ma tombe

 

 

 

Poème n°2 autour des fastes de la solitude

 

souvenirs

d'un prisonnier de la saison de la mort

dans le miroir – elliptique

cherchant sirius par nuit d'hiver

vega par nuit d'été

en surfant sur les vagues de gazoline

au volant d'une olds 442

dans un de ces fameux cercles merdeux

de Dante

le feu de Prométhée

brûle sous l'opium indigène

trouver l'asile de nuit

trouver l'asile

trouver

Doppelgänger le grand jumeau

pour le briser

 

01/05/2010

"Mai, joli mai" (bis)

La (deuxième) pensée du jour : "Ecrire, c'est renoncer au monde en implorant le monde de ne pas renoncer à nous". Georges PERROS.

Allez, une deuxième note en ce premier mai !! Un extrait de Comment j'ai usiné ma treizième défloration :

"Au début du mois de mai 2000, nous avons eu dans le Jura quelques magnifiques journées ensoleillées...

Le matin, vers 6h30, je prenais un rare plaisir à boire mon café... installé sur ma terrasse face à la forêt... entouré des vergers en fleurs... et dans le vacarme gazouillistique des piafs qui s'acharnent chaque année à construire leurs nids sous mon toit...

Je reconnaissais au passage les pinsons, les mésanges bleues et charbonnières, parfois même nonnettes, les rouges-queues, les chardonnerets, les piverts, les hirondelles... et tous les autres vautours plumés que je m'acharne à poursuivre aux jumelles depuis des lustres...

Ensuite, seulement, après cette délicieuse séance de café noir, je m'en allais vers mon usine, elle aussi illuminée de cette clarté printanière, afin d'y brancher quelques guitares, histoire d'emmerder tous ces oiseaux bordéliques... et de foutre la trouille aux merles et aux grives qui viennent toujours trop près de la maison, enlever les vers de la bouche de mes taupes...

 

Or, au début d'une de ces matinées, je me souvins d'une de ces questions souvent posées par les journalistes ou autres personnes intéressées par mes chansons, sur le fait qu'un passionné de la nature et de la campagne comme moi ne dépeignait jamais que des tableaux urbains et industriels...* question à laquelle j'aimais répondre avec cynisme que les chevreuils et les sangliers n'achetaient pas mes disques et ne venaient jamais à mes concerts...

ou combien je trouvais regrettable que des poètes comme Keats, Schiller ou Lamartine n'aient même pas eu un Mac pour faire leurs traitements de textes...

Bref, la campagne ne m'a jamais directement inspiré – sans doute parce que j'y passe trop peu de temps -

en voici une nouvelle preuve :

Par un de ces jolis matins du mois de mai, j'ai voulu tenter ma chance et essayer de fabriquer ma première chanson verte qui commençait ainsi :

« Les chardonnerets se disputent les trilles

avec leurs concurrents pinsons

et les mésanges font de la brindille

pour meubler leur deux pièces-salon

le coucou ricane dans les bois

pour faire chier Bambi l'orphelin

tandis qu'une hirondelle tournoie

dans l'air transparent du matin ».

 

Pas mal, non ? A l'exception du « pour faire chier Bambi », on dirait une poésie de CP ou de CE1...

Plus loin je durcis légèrement la plume :

«Les fleurs de coings au crépuscule

les pommiers blancs, les pêchers roses

les jeunes taureaux qui sous la tulle

de la brume s'enculent en osmose... »

 

Charmant, n'est-il pas ?... Lorsqu'un peu plus tard, je posai ma guitare pour relire mon brouillon, je devins rouge avec la tehon...

Combien d'heures m'a-t-il fallu ensuite pour corriger ce texte et trouver l'idée d'inventer des noms nouveaux, plus proches de mon style habituel ?... No lo sé... Je crois que j'ai passé toutes les autres matinées de ce très beau mois de mai à galérer sur cette toune...

 

Moralité : ne me demandez plus jamais pourquoi je n'écris pas de chansons sur les vertes prairies, ni sur les forêts profondes, ni sur les montagnes enneigées de mon Jura natal..."

 

*Nous pourrions nous amuser à recenser les extraits de chansons dans lesquels HFT évoque la ville (ça va être coton, il y en a un paquet !!). Je commence par cette phrase que j'aime beaucoup : "J'oublie toujours le nom de ces villes où je suis né"...