19/10/2023
HFT était au NJP hier soir
"Combien de jours encore à contempler l'automne
à surveiller l'orage dans le cri des guetteurs
à pleurer dans les bras de ceux qui abandonnent
qui s'envolent à jamais vers un nouvel ailleurs". Hubert-Félix THIÉFAINE
Nancy, chapiteau de la Pépinière, 18 octobre 2023. Il n'est pas loin de 22h43 quand, dans la fosse, on sent l'ambiance glisser vers autre chose, cette autre chose qui m'est familière et qui tient de la braise. De-ci de-là, retentissent des « Hubert ! ». La foule se resserre. On sent que chaque petit centimètre carré compte. Tout le monde veut prendre sa place, comme dans l'émission. Moi aussi. Et, d'ailleurs, ma place (dans les premiers rangs de la fosse), je la tiens solidement depuis le début de la soirée. J'ai tout fait pour n'avoir pas à bouger une seule fois : buvette interdite, et toilettes itou. La première entraînant souvent les deuxièmes, je n'ai ingurgité qu'un minimum de liquide dans la soirée. J'ai la gorge sèche, mais tant pis. Les deux premiers concerts m'ont bien plu. Surtout le premier, de Tankus the Henge. Celui de Warhaus légèrement moins, mais c'est un univers qui demande à être découvert tranquillou chez soi, je crois, et c'est ce que je ferai bientôt.
Peu à peu, des petits malins essaient de se frayer un chemin jusque tout devant. Ah, je les connais, ces énergumènes qui, sous prétexte qu'ils apprécient Hubert comme moi, seraient prêts à tout pour griller ma place. Ah non, c'est hors de question ! Je pourrais facilement devenir mauvaise dans ces cas-là. Cependant, je laisse passer deux dames quand même parce qu'au fond, je reste une gentille. Elles sont petites, l'une des deux mesure 1 mètre 46, précise-t-elle, et elle veut avoir une chance d'apercevoir ce qui se passe sur scène. D'accord, ces deux-là peuvent me dépasser, mais pas les autres. Trop facile sinon. Il suffirait que chacun y aille de ses trémolos attendrissants, et le tour serait joué, et puis quoi encore ? Cent balles et un Mars, comme on disait quand j'étais ado ?!
Autour de moi, gens de toutes sortes. Des jeunes, des moins jeunes. Plus de moins jeunes que de jeunes, il est vrai, mais tout de même : il faut noter que la jeunesse se déplace pour HFT et que ça fait plaisir. Je voudrais bien savoir d'où viennent ces tout frais au visage encore lisse, comment ils sont tombés dans l'œuvre d'HFT, pourquoi, quand, grâce à qui ou à quoi. Ah, si j'osais, je leur demanderais !
Mais je n'ose pas et, de toute façon, il est bientôt 23 heures, ce qui veut dire qu'il est temps de sonner la fête. 23 heures, mais je fais beaucoup plus jeune, si vous voyez de quoi je parle : depuis 31 ans, la même chamade dans le cœur à chaque concert. Ça veut bien dire quelque chose, n'est-ce pas ? Ça veut dire qu'il y a encore des bouts de jeunesse là-dedans, parmi les débris, et que les concerts, ça entretient les artères ! Eh oui, un chouïa d'illusions ne nuit pas en ce monde de brutes !
Les musiciens entrent en scène, les premières notes de Droïde song emplissent le chapiteau, que tout cela échauffe de quelques degrés supplémentaires. Cette fois, Thiéfaine arrive presque en même temps que la musique, pas comme à Amnéville, par exemple, où on l'entendait d'abord chanter un certain temps avant de le voir, ce qui n'était pas sans susciter quelques questions : d'où venait sa voix ? Où se cachait-il, l'espiègle ? Quand allait-il arriver ? Là, non. Le voilà direct. C'est bien aussi. Je crois même que je préfère cette version. Et vous ?
Les morceaux s'enchaînent. Vite, trop vite. Je sais d'avance que ce concert sera un format court et qu'il ne suffira pas vraiment à étancher ma soif, que j'ai grande et exigeante ! Mais bon, c'est toujours ça quand même. C'est mon premier concert d'après maladie. J'ai l'impression de revenir d'un autre monde, sans couleurs et sans joie. D'un monde aseptisé envahi par les bilans sanguins, les plaquettes, les neutrophiles et compagnie. Si bien que malgré moi, je suis devenue une spécialiste des globules. Je les connais tous, je sais à quoi ils servent, pourquoi ils sont là, pourquoi ils manquent parfois, etc. Avoir mal aux globules, comme dans la chanson, je sais désormais exactement ce que ça fait, je l'ai vécu dans ma chair ! Bref... Premier concert d'après maladie, disais-je, et je suis émue. Normal. C'est donc bien vrai : je me tiens là, debout et vivante parmi ces autres vivants ? Ouah, permettez-moi de ne pas tout à fait en revenir ! Et de m'en extasier, tranquillement dans mon coin. Un énième concert d'Hubert, quelle chance ! Les comptes peuvent reprendre. Il faudra d'ailleurs que je regarde où j'en suis : à une cinquantaine de concerts sans doute, mais combien au juste ? À vérifier. Juste pour ma petite gouverne, comme ça, parce que cela ne lui fera pas une belle jambe. Les comptes, elle aime ça. Figurez-vous qu'il y a peu, je me suis même amusée à calculer le nombre d'heures que j'avais passées en compagnie d'HFT. Mis bout à bout, tous les concerts font même pas une semaine. Pas tout à fait cinq jours et cinq nuits, si mes calculs et mes souvenirs sont bons. Ce n'est pas bézef. Conclusion : il en faut encore ! Oui, je sais : l'arithmétique, chez moi, revêt d'étranges formes...
Donc, les morceaux s'enchaînent, écrivais-je plus haut. À Droïde song succèdent Dies olé sparadrap joey, Narcisse, Eux, 113ème cigarette sans dormir (plus que jamais d'actualité, c'est désolant comme l'Histoire c'est l'éternel retour du même qui s'empile sur le même qui reviendra), Cabaret Sainte-Lilith (tellement sensuelle, pour le coup, qu'elle me ferait presque venir le rouge aux joues), Groupie 89 turbo 6, Diogène (joie d'entendre retentir du Goethe dans le chapiteau bondé : yeah, ça claque, et j'ai même le temps de me dire que décidément, j'adore vraiment cette langue, que ce qu'on lui reproche - son côté soi-disant rugueux -, c'est justement ce qui me fait vibrer), La fin du roman, Combien de jours encore. À propos de La fin du roman, je me demande pourquoi cette chanson a été choisie pour figurer au programme d'Unplugged et de Replugged. On sait qu'elle déchaîna quelques commentaires bien cinglants sur la toile, et m'est avis que Thiéfaine ferait là un pied de nez à tous ceux qui ne seraient pas contents, mais peut-être que je me trompe ?
Combien de jours encore me déchiquette le cœur, couplet après couplet. C'est une chanson grave, impitoyable. Et toujours ce même coup de poing dans la poitrine quand il est question de ceux qui abandonnent, qui « s'envolent à jamais vers un nouvel ailleurs ». Cela me fait penser à mon père, immanquablement, et à la longue fatigue qui précéda son départ. Je pleure. Ben oui. La chanson s'achève dans un rock brûlant, ce qui la délivre, sur la fin, d'un certain poids (celui de l'univers, peut-être ?). On se concentre sur le jeu des musiciens, et l'on oublie un peu que les accents de leurs instruments font suite à une troublante interrogation métaphysique.
Avant de chanter Combien de jours encore, Hubert a annoncé que c'était la fin du concert. Des voix s'insurgent : comment, déjà ? Mais est-ce possible ? Ça vient à peine de commencer. On était là, peinards, et déjà il faut songer à reprendre le cours de la vie, sans autre forme de procès ? C'est carrément injuste. La fosse et les gradins réclament un rappel, à grand renfort de cris, de sifflements, de tapotements de pieds. L'équipe revient. Secrètement, j'espère Mathématiques souterraines, mais non, nous ne l'aurons pas. Dommage. C'est Sweet Amanite Phalloïde Queen et La fille du coupeur de joints qui viennent boucler le show, les deux électrisant bien la foule. Qui en aurait voulu un peu plus, comme moi. Mais bon, on est en mode festival. J'ai remarqué que les festivals, c'était rien que pour me donner plus soif encore. Heureusement que je vais à Troyes la semaine prochaine, tiens ! Et à Saint-Dizier en novembre, et peut-être à Colmar en décembre, et sans doute à Mondorf-les-Bains en avril, et probablement à l'Olympia en mai !
J'ajoute, parce que je n'ai pas réussi à caser cette information cruciale dans les paragraphes qui précèdent, qu'hier soir Hubert et ses musiciens étaient en grande forme et que quand est venue la minuit, ils faisaient tous beaucoup plus jeunes, et que c'était beau à voir. Avant le concert, j'ai entendu une femme dire à son voisin : « C'est fou, Thiéfaine a toujours une très belle voix ». Je ne peux qu'abonder dans son sens. Et remercier la vie qui (tout en restant une sacrée chienne) m'a donné la possibilité d'entendre une nouvelle fois cette voix que les années n'ont pas abîmée, juste rendue plus profonde. Combien de concerts encore, à regarder passer l'infini sur la scène ? Autre troublante interrogation métaphysique, et une seule réponse possible : qui vivra verra.
17:06 | Lien permanent | Commentaires (31)
17/10/2023
HFT sera au NJP demain soir. Tiens donc, moi aussi !
"Si tu n'es pas présent à l'instant que tu vis,
que peut-il te donner ?" Charles JULIET.
Quand j'ai rendez-vous avec Hubert, tout le restant m'indiffère ! Ça rime et c'est comme dans la chanson de Brassens, à ceci près que Georges n'eut jamais rendez-vous avec Hubert... Le pauvre, comme je le plains (je parle de Georges, mais la réciproque tient la route aussi !).
Moi, en revanche, j'ai grande chance et grande joie : demain, je verrai Hubert, l'immense, l'unique. Dans ma ville préférée, en plus. J'ai nommé la hautement culturelle et magique Nancy. J'espère avoir la forme demain soir car il faudra patienter jusqu'à 23 heures avant de voir HFT se produire sur la scène du chapiteau de la Pépinière. Pour moi qui me couche désormais avec les poules, cet horaire est un peu source de panique. Et si je ne tenais pas le coup jusqu'à 23 heures ? Je compte sur mon petit grain de folie pour m'assister en ces moments compliqués : normalement, la perspective de voir Hubert m'a toujours permis d'ignorer ma fatigue. Souvenirs de semaines sous haute tension où je pouvais enchaîner les concerts trois, voire quatre soirs de suite. Ces temps bénis reviendront-ils ? Il faut l'espérer. Mais force est de constater, en mon organisme malmené par la maladie et un traitement de cheval, que l'énergie n'est plus ce qu'elle était. Bref, on verra, n'anticipons pas ! De toute façon, pour l'instant, l'occasion ne se présente pas. Allez, je veux quand même parier que si HFT avait donné un concert à Metz le lendemain du NJP et un autre à Thionville le surlendemain, j'aurais été des trois ! On ne perd pas son grain de folie comme ça, non mais ! Manquerait plus que ça !
Pour le concert de demain, j'aurai une veste dont vous ne trouverez jamais la réplique au merchandising, et pour cause : c'est ma personnelle, rien qu'à moi. Explications : il y a quelques semaines, j'ai esquinté ladite veste (pensée pour mon père qui employait beaucoup le verbe « esquinter ». Maintenant, à chaque fois qu'on dit « esquinter », mes filles et moi, on a à la fois du chagrin et de la malice dans le regard). Donc, oui, j'ai fait un stupide accroc dans ma veste à peine portée l'hiver dernier. Soudain, une idée : parmi mes collègues, il y a Peggy aux mains d'or. D'un rien, elle te fait une somptueuse robe. Dans la salle des profs, il n'est pas rare qu'on fasse appel à ses services pour une tenue de mariage, un ourlet et tutti quanti. En voyant le désastre sur ma veste, j'ai immédiatement pensé à Peggy. Et alors, elle a eu, comme toujours, une idée de génie : elle a proposé de raccommoder le trou et de mettre un écusson HFT dessus. Aussitôt dit, aussitôt fait. Je vais désormais porter une veste résiliente. Ouais, rien que ça ! Une pièce unique, comme vous n'en verrez sur personne d'autre ! Moi je dis que ça va être ma cape de toute-puissance et que demain, le simple fait de la porter m'ôtera toute fatigue...
11:12 | Lien permanent | Commentaires (12)
10/10/2023
Géographie du vide : deux ans, déjà...
"Ma course fut une poursuite errante de quelque chose dont l'art me donnait la soif, mais dont la vie ne pouvait m'offrir l'apaisement". Romain GARY.
Il y a un peu plus de deux ans, nous découvrions Géographie du vide. Voilà un album qui devait faire du bruit dans Landerneau et pas que dans Landerneau, petite cité bretonne qui, d'ailleurs, n'a rien demandé à personne. Géographie du vide sema un peu, voire beaucoup de stupéfaction dans la communauté thiéfainienne. Très vite, il y eut les pro-Géographie du vide, et puis les autres. Au départ, je me situais entre les deux, ne sachant pas trop me décider. Quelques écoutes, cependant, suffirent à faire de moi une défenseuse acharnée de cet album ! Aujourd'hui encore, je persiste et je signe. Deux ans de recul m'ont permis d'y voir plus clair. Toujours, je salue l'audace qui se dégage de toutes les chansons. Musiques inattendues et ruptures tout aussi inattendues dans ces musiques (je pense à L'idiot qu'on a toujours été ou encore à Nuits blanches, où régulièrement on passe d'une ambiance musicale à une autre).
L'ensemble s'ouvre, de manière un peu culottée déjà, sur Du soleil dans ma rue. Le genre de morceau qui te déconcerte et fait que tu ne sais plus sur quel pied danser. Ou sur quel pied ne pas danser, plutôt. On pourrait se croire dans un tube estival : le titre semble le promettre, en tout cas. Écoute attentivement la chanson, pour voir ! Et tu comprendras vite que ce soleil dans la rue d'Hubert, c'est avant tout une galère. Évidemment que cette histoire-là ne pouvait devenir une chanson à succès passant sur les radios. « La première meuf que j'ai connue m'a expulsé à quatre du mat' dans une maternité perdue qui fabriquait des automates » (comme un écho à « J'y suis né d'une vidange de carter séminal dans le garage intime d'une fleur sentimentale ») : on imagine mal ce tableau se déverser sur les ondes... La chanson en question divisa elle aussi la communauté thiéfainienne : était-ce du lard ou du cochon ? De l'art, voyons ! Art de l'ironie, art de la facétie. Passez donc au rayon farces et attrapes pour y voir les promos du jour ! Une chose est sûre : ce n'était pas de l'amour. « Faisons semblant d'être amoureux », voilà qui en dit long sur un sentiment qui n'a pas lieu. On voudrait bien, mais on ne peut point, quoi. Donc ce n'est pas une douce romance qui s'offre à nous, mais plutôt un catalogue trash. Bon, en même temps c'est HFT, n'est-ce pas ? Celui-là même qui nous dit ailleurs « pas prendre pour un courrier du cœur les pulsions des glandes endocrines »...
Et l'album poursuit son petit bonhomme de chemin, nous promenant d'une atmosphère à une autre. Nous secouant parfois. Preuve, cette Prière pour Ba'al Azabab. Une prière inversée, quoi. Si, comme moi, vous avez fait bien sagement votre catéchisme il y a quelques décennies, vous vous souvenez du poids dont chaque péché était censé affliger notre conscience. Actes de contrition à gogo, etc. Et « délivrez-nous du mal », surtout. Ici, tout le contraire. De toute façon, la prière s'adresse au « seigneur fou des bacchanales » et non à un quelconque seigneur sage des abstinences : la messe (noire, s'entend) est dite !
J'aime toutes les chansons de Géographie du vide. Cet album m'accompagne depuis deux ans et j'y reviens très régulièrement. Je frissonne toujours autant en écoutant Combien de jours encore, Reykjavik, Page noire, Nuits blanches ou Vers la folie. Et il me tarde de réentendre Combien de jours encore, Eux et Nuits blanches en concert. Plus que quelques dodos et j'y serai !
Bref, Géographie du vide ou de l'audace, encore de l'audace, toujours de l'audace ! Finalement, entre le Thiéfaine des années 1980 qui envoyait 113ème cigarette sans dormir chez Anne Sinclair et le Thiéfaine d'aujourd'hui, il n'y a pas grande différence !
11:00 | Lien permanent | Commentaires (6)
01/10/2023
Suis la flèche, dis-moi ce que tu vois !
"Il est bien des choses qui ne paraissent impossibles que tant qu'on ne les a pas tentées". André GIDE
Suis la flèche (https://www.thiefaine.com/), dis-moi ce que tu vois ! Je vois, je vois … un paquet de dates qui se sont ajoutées à celles qui avaient déjà été annoncées. C'est à vous rendre chèvres les calendriers qui auraient aimé signer un pacte avec la sagesse ! Les agendas ne savent plus où donner de la tête. Il y a du Replugged dans l'air, c'est moi qui vous le dis ! Et ce premier octobre me le rappelle avec entrain : dans 17 jours, ce sera le NJP. Thiéfaine y sera. Moi aussi. Normalement, si tout va bien. Je mets des p'tites pincettes, je prends mes précautions, des fois qu'un fâcheux événement viendrait inopinément se mettre en travers de ma route, comme ce fut le cas en novembre 2022. J'vous jure, je marche sur des œufs depuis... Toujours à craindre une chute de tuiles, un accroc dans le tissu, un nouveau dérèglement de tous les sangs (pas très rimbaldien, le truc, mais passons). J'ai cette drôle d'épée au-dessus de la tête, qui a pour nom Damoclès (Dame Oclès, dirait Mathias Malzieu) et qui, « parfois, dans les lueurs des nuits blanches et hostiles », se rappelle tristement à mon souvenir. Tombera, tombera pas ? Plus qu'à attendre le prochain épisode pour le savoir.
Bref... Le NJP, il y a quelques mois encore, je ne savais même pas si j'allais pouvoir y aller. J'avais décidé de prendre mon billet au tout dernier moment. Or, un matin de juin, je reçois un SMS d'une amie qui me demande si ce concert m'intéresse. Mille fois oui, comme on sait. Et voilà que ladite amie m'annonce qu'elle m'offre la place ! Pour moi, fini le questionnement métaphysique sans fin : « J'y vais, j'y vais pas ? Si je prends le billet trop tôt, ne vais-je pas me porter la scoumoune ? Si je ne le prends pas à temps, ne vais-je pas m'en mordre affreusement les doigts par la suite, si le site du NJP vient à afficher complet pour le concert en question ? ». Oui, chez moi, la métaphysique rejoint presque toujours le thiéfainien ! Et inversement !
Donc, j'ai un billet pour le NJP (merci Annabelle). Le concert d'Hubert débutera à 23 heures et j'ai un peu la trouille de ne plus tenir solidement dans mes godasses à cette heure-là. Je me couche tellement tôt la plupart du temps... Vous seriez effarés de connaître l'heure qui me voit rejoindre les bras de Morphée ! Je croise les doigts pour que ce 18 octobre soit un jour avec et non un jour sans. Et que je ne vacille pas avant l'arrivée de mon Bébert sur scène.
Dans l'autre poche de mon jean, j'ai également un billet pour le concert du 24 novembre aux Fuseaux (Saint-Dizier). Oui ! Celui-là, ce n'est pas sans émotion que je me le suis procuré dernièrement. Cette peur qui occupe toute ma tripaille désormais, dès que je m'approche de tout projet. Projet veut dire attention, risque de ne pas se faire. Ah, purée, cette maladie, c'était pas un truc pour moi ! J'avais déjà tendance à me méfier bougrement de la vie, mais alors là, mais alors là ! Enfin, quand même, tout doucement, je sors la tête de l'eau et je me projette. Pas très loin non plus, hein... Un mois, deux mois, c'est bien. Après, cela dépasse mes compétences. Fin novembre, je dois faire un bilan sanguin. J'ai décidé de le faire après le concert de Saint-Dizier. Comme ça, si mauvaise surprise il devait y avoir, elle ne viendrait pas ternir la soirée du 24, nananère !
Et, depuis plusieurs jours (depuis que j'ai eu le Doc au téléphone, en fait, car c'est lui qui m'a suggéré l'idée), me taraude une nouvelle question métaphysique (et donc thiéfainienne) : est-ce que le concert de Troyes (25 octobre) ne serait pas jouable ? Je serai en vacances depuis quelques jours et, avec un peu de chance, reposée, les traits moins tirés, la tronche moins décalquée. Je ne sais pas, j'hésite. Je me dis que dans mon jean, il y a encore deux poches à l'arrière et que je pourrais donc aisément y glisser un troisième billet. Histoire de me venger de l'automne 2022 qui ne fut rien qu'un sombre embrouillamini de « diesels encrassés » et de pieds de nez envoyés gratis dans ma face par un sort on ne peut plus coquin, on ne peut plus mesquin.
Oui, Troyes, cela pourrait être pas mal, franchement. Toutes les conditions sont réunies, n'est-ce pas ? Seulement, je voulais aussi profiter des vacances pour aller en Allemagne, pays dont je n'ai plus foulé durablement le sol depuis un petit moment... L'arithmétique me dit que combiner HFT + Allemagne est hautement dangereux pour mes finances ! La métaphysique me dit qu'on ne vit qu'une fois et que plaie d'argent n'est pas mortelle !!! Bon, une chose est sûre : dès aujourd'hui, je regarde s'il reste des places pour le concert de Troyes et des chambres d'hôtel dans la ville !!!
10:59 | Lien permanent | Commentaires (32)
03/09/2023
Itinéraire d'un naufragé : un ouvrage à paraître le 13 octobre. NJP : un concert de Thiéfaine à venir !
"Espérons. Nous n'avons pas le choix". Simone DE BEAUVOIR
Vous avez vu comme cet automne va être chouette ? Célébrons tout d'abord la parution, le 13 octobre, d'un livre regroupant les textes des chansons de Thiéfaine, le tout étant précédé d'un entretien exclusif. Vous me direz peut-être : « Mais on connaît toutes les paroles par cœur, pas besoin d'un recueil ! ». Vraiment, connaissons-nous toutes les paroles par cœur ? En ce qui me concerne, j'avoue que je sèche souvent sur les passages un peu ardus. Jamais réussi, par exemple, à retenir dans quel ordre passent les tramways dans La vierge au dodge 51 ! Et ce n'est pas mon unique lacune. Il y en a un paquet. Elles se sont d'ailleurs multipliées au fil des années, ma mémoire se faisant de moins en moins performante, de plus en plus poussive...
Sans oublier les grossières erreurs dont je me suis rendue coupable : paroles comprises de traviole et jamais vérifiées dans le livret accompagnant les CD. Ainsi, pendant longtemps, le futur a sniffé Narcisse à rebours, le plantant sur un long tréteau ! N'importe quoi ! Il y a de nombreuses années, j'avais demandé aux lecteurs de ce blog de me faire la liste de leurs grossières erreurs à eux, au cas où ils se seraient rendus coupables eux aussi, et cela avait donné lieu à quelques cocasseries ! Je me souviens de « Demain, tu verras tous ces petits alchimistes pulvérisés, incontinents ». Le reste, j'ai oublié. Il faudrait que je cherche.
Bref, tout ça pour dire que ce recueil à paraître ne sera pas de trop. Je me vois déjà le feuilleter passionnément, le soir, à la chandelle !
Quelques jours après la parution de ce livre, il y aura pour moi un événement énormissime : un concert de Thiéfaine ! Enfin, si tout va bien. Si la vie ne me plante pas sur un long tréteau juste avant. Si le destin ne se rend coupable d'aucune traîtrise à mon égard. Après ce que je viens de vivre, je prends des pincettes avec les projets. Je les regarde un peu bizarrement, un brin de défiance dans les yeux. Ok, il est convenu que, mais il se peut que non... Vous me direz, c'est comme ça pour tout le monde, en fait, chacun des sept milliards d'humains pouvant être tué quarante mille fois. Le tourbillon de la vie veut que nous fassions régulièrement abstraction des innombrables épées de Damoclès qui menacent de s'abattre sur nous. C'est assez volontiers, n'est-ce pas, quon oublie qu'à tout moment, on peut claquer la tête coincée dans un strapontin... Comme disait ma mère, il vaut mieux ne pas penser à tout ce qui pourrait nous tomber sur le coin du nez, sinon on ne vivrait plus.
Mais trêve de pessimisme : normalement, donc, le 13 octobre, le bel Itinéraire d'un naufragé atterrira dans mes pénates. Normalement, donc, le 18 octobre, j'assisterai à mon premier concert d'après la maladie !
15:48 | Lien permanent | Commentaires (20)
17/07/2023
Jane Birkin : une douceur infinie quitte ce monde...
Un dimanche après-midi d'avril ou de mai. C'était peut-être bien en 1997. À Sarreguemines, ça j'en suis sûre. Exactement là où j'avais vu Thiéfaine pour la première fois, deux ans auparavant. Sous le même soleil, exactement. Ma mère et moi étions assises au premier rang, tout près de la scène, tout près de Jane et de sa bonne chaleur. Elle avait planté un crayon dans sa chevelure pour y stabiliser un chignon un tantinet capricieux. Elle portait un jean et un tee-shirt blanc. Il n'y avait qu'elle pour être d'une classe indiscutable dans cette tenue ultra simple.
À un moment donné, elle avait demandé si on pouvait allumer la salle. Elle voulait voir nos visages. Et là il s'était passé un truc que je n'ai jamais oublié : elle nous avait repérées, ma mère et moi. Elle avait tout de suite saisi quel lien nous unissait (en même temps, ce n'était pas très ardu : je suis le portrait de ma mère tout craché !). Elle nous avait fait un clin d'œil en disant : "Moi aussi je suis venue avec ma mère aujourd'hui".
Douze ans plus tard, ma mère devait mourir dans des circonstances dramatiques. Jane resta un lien incassable entre elle et moi. En mai 2009, ma mère aurait eu 61 ans. J'avais décidé de l'emmener voir Jane sur scène pour son anniversaire. Sauf que la mort en décida autrement, et c'est seule que je me rendis au concert. Cela devint un rituel par la suite. Surveiller chaque tournée et faire une date, une date symbolique, comme pour m'accrocher à un reste de cordon ombilical. Grande émotion à chaque fois, surtout quand Jane chantait Fuir le bonheur de peur qu'il ne se sauve, L'anamour ou Quoi, trois titres que ma mère aimait particulièrement.
La dernière fois que j'ai vu Jane, c'était en 2022 à Neuves-Maisons. Ce fut bel et bien la dernière fois...
En s'en allant, Jane prive le monde d'une douceur infinie, qui va nous manquer. Elle emporte également quelque chose de ma mère, mais je ne saurais dire quoi au juste...
20:36 | Lien permanent | Commentaires (15)
11/07/2023
Festivals
La saison des festivals a commencé. Ce sera sans moi, mais je n'ai pas dit mon dernier mot ! En octobre, Thiéfaine sera au NJP (Nancy Jazz Pulsations) et j'en serai, normalement, si tout va bien.
En attendant, je me renseigne sur les concerts d'été. Ainsi, j'ai appris qu'à Saint-Denis-de-Gastine (Mayenne), au festival Au foin de la rue, il n'y avait pas eu La fille du coupeur de joints. Je me demande à quoi ça ressemble, un concert sans cette chanson culte, mais pourquoi pas ? Si vous avez vécu ça, racontez-nous ! Je suppose que cette absence ne sera pas propre au Foin de la rue et qu'elle sera la marque de fabrique un peu inattendue de tous les festivals à venir. Vous nous direz si vous savez ?
Autre élément marquant : à Saint-Denis-de-Gastine, il y a eu une version signée (= en langue des signes) de Cabaret Sainte-Lilith. Cela donne quelque chose de surprenant, voire d'hilarant (une vidéo envoyée par une de mes amies montre clairement les fous rires en coulisses sur certains passages, notamment quand il est question d'une "bonne branlette" !). Mais voyez vous-mêmes et réagissez dans les commentaires si le cœur vous en dit :
https://www.youtube.com/watch?v=VX2n4K0WrV8
Si jamais vous assistez à un festival, ici ou là, n'hésitez pas à nous faire un petit compte rendu ! Passez un bel été !
13:43 | Lien permanent | Commentaires (10)
13/05/2023
Fièvre résurrectionnelle
"La vie est deuil. Un putain d'interminable deuil". François CAVANNA
1992. Il y a ce chanteur qui entre dans ma vie par la grande porte. Ou plutôt par un ascenseur. Peut-être bien celui de 22h43, allez savoir. En tout cas, c'est par une nuit déjà froide de septembre qu'il se pointe. En moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, il va déboulonner quelques-unes de mes certitudes. Je croyais que Gainsbourg et moi ou encore Renaud et moi, c'était indépassable, eh bien non ! Soudain, il n'y a plus que ce drôle de type. Qui vient rejoindre, dans la somme de mes éblouissements, les Baudelaire, les Rimbaud, les Verlaine. Pas piqué des vers, le monsieur, c'est le cas de le dire. Très vite, l'adolescente que je suis encore flaire qu'elle tient là un durable motif d'exaltation ! De là à penser que l'exaltation durera toute sa vie, il n'y a qu'un pas … que j'ai largement franchi depuis. Combien de fois m'est-il arrivé de retrouver d'anciennes connaissances, d'anciens collègues qui m'ont dit : « À chaque fois que j'entends parler de Thiéfaine, je pense à toi ». Immense fierté d'être systématiquement associée à lui. Trop la classe, franchement, sans vouloir me vanter (ce que je fais pourtant).
Alors oui, j'ai dix-neuf ans en 1992 et je me prends une décharge électrique en plein cœur. De celles qui, presque, justifieraient l'inconvénient d'être né(e). Ou même, allez je prends le risque, le justifient. Bien sûr que si rien ni personne ne m'avait tirée du néant, aucune conscience ne m'aurait jamais effleurée. Thiéfaine ou pas, ça n'aurait rien changé à la face de mon monde qui, précisément, n'aurait pas existé. Mais puisque deux êtres, disparus aujourd'hui, jugèrent un jour utile d'appeler à la vie un autre enfant après le premier, eh bien autant que mon inconvénient d'être née soit tout de même un peu fleuri par endroits. Sincèrement, si l'œuvre de Thiéfaine ne m'avait pas percutée de plein fouet, il aurait manqué une sacrée dimension à mon existence. Je crois qu'elle aurait été un peu fadasse de temps en temps. Thiéfaine, encore maintenant en pleine maladie, c'est celui qui réveille ma sensibilité. Sortie de l'hôpital, la démarche farouche, le pas incertain et le regard un peu hébété, j'avais l'impression que plus rien ne pouvait me secouer réellement. Il y a même eu un moment où m'est venu le dégoût des livres. Oui ! J'en avais trop lu dans ma chambre stérile. Je n'en pouvais plus de ces compagnons d'infortune. J'étais certes bien contente de les avoir fréquentés dans mon univers aseptisé, mais justement : par la suite, et pendant de longues semaines, ils étaient condamnés, les pauvrets, à me rappeler sans cesse le cauchemar vécu et pas encore tout à fait surmonté. Bon, ça s'est arrangé au fil du temps et je lis de nouveau avec grand plaisir. La musique dans tout ça ? Je n'en ai pas beaucoup écouté à mon retour de l'hôpital. Il y avait comme une césure dans ma vie, un truc difficile à expliquer. Comme l'impression de flotter à la surface des choses. De ne pas pouvoir en pénétrer l'intime substance. C'est que je me battais pour ma survie, tout un programme ! Et puis, un jour, en voiture (cela faisait déjà un bout de temps que j'étais sortie de l'hosto), une de mes filles proposa qu'on écoute Thiéfaine. Oui, j'ai des filles qui proposent ça régulièrement. Trop la classe, franchement, sans vouloir me vanter (ce que je fais pourtant). Et là, sur Mathématiques souterraines, je devins fontaine. Bien sûr que cette chanson avait encore le pouvoir de me disjoncter ! Plus tard, ce fut La dèche, le twist et le reste. Souvenirs en pagaille d'un amour vécu au sortir de l'adolescence, dans une profonde détresse. Dans la dèche, le twist et le reste, quoi. Encore un peu plus tard (choix opéré par ma fille Clara), Je t'en remets au vent. Souvenirs en pagaille de ma mère qui aimait tellement cette chanson qu'elle l'avait enregistrée plusieurs fois de suite sur la même cassette afin de pouvoir l'écouter en boucle. Eh oui, je viens d'un monde obsolète... Ensuite La ruelle des morts. Fontaine, de nouveau je bois de ton eau. Celle de mes larmes. C'est vrai que les deuils se ramassent à la pelle comme des cons. C'est vrai que la nostalgie est toujours ce qu'elle était : un machin qui te démonte les tripes.
Alors voilà. Je ressuscitai. Par la grâce de quatre chansons. Dans la voiture, ce jour-là, je me dis que je n'étais pas encore tout à fait morte cérébralement. Ouf.
N'empêche que, quand même, à l'approche de la cinquantaine (il y a encore un an, je redoutais les cinquante ans, maintenant je me dis que ce serait pas mal de les avoir), je me sens autorisée à féliciter l'adolescente un peu paumée que je fus et qui sentit, sans pouvoir encore le formuler concrètement, que Thiéfaine et elle, c'était pour la vie ! À l'époque, je ne savais pas qu'un jour il écrirait Des adieux, Exercice de simple provocation avec 33 fois le mot coupable, Annihilation, En remontant le fleuve, Page noire, et j'en passe, mais quelque chose, en moi, a dû espérer fortement la naissance de ces chefs-d'œuvre. Quelque chose, en moi, a dû savoir que le poète (car c'en est un, on ne m'enlèvera pas cette conviction) ne me décevrait pas. Encore une fois, je ne suis que gratitude. Je sais, je sais, ça paraît exagéré, et même un peu dingue. Mais je m'en moque. Je répète : encore une fois, je ne suis que gratitude. Parce que celui qui, dernièrement, m'a ramenée à l'émotion artistique que je croyais perdue, c'est encore lui, Hubert-Félix Thiéfaine !
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