23/10/2006
Histoire du soldat : suite
La pensée du jour : "Je porte des gris-gris au cou, des lunettes et une âme plus compliquée que des déclarations d'impôts", René FALLET.
Bon, alors, si j'ai bien compris, Sév attend avec impatience la suite des aventures du soldat Joseph! Je sens que je vais devoir mettre ici l'intégralité de l'Histoire du soldat! Cela ne me gêne pas! Nous en sommes déjà à la page 17, mine de rien, et la pièce n'en compte que 47! Donc, Sév, si tu veux "ton" Histoire du soldat en long, en large et en travers, c'est possible!
Voici la suite de ce que j'ai posté hier :
LE LECTEUR
A terme, à vue, cours des changes,
Bourse du samedi 31… Quel jour est-ce qu’on est ? on est un mercredi, le mercredi 28… C’est un livre qui est en avance.
C’est un livre qui dit les choses avant le temps, drôle ça !...
LE DIABLE
brusquement, après avoir inutilement essayé de jouer.
Dis donc, tu vas venir chez moi.
LE SOLDAT
Pour quoi faire ?
LE DIABLE, montrant le violon.
Tu ne vois pas ?
Je n’ai pas encore le coup.
Tu me donnes vite deux ou trois leçons
et je te ramène à la maison.
LE SOLDAT
Où est-ce que c’est ça, chez vous ?
LE DIABLE
Tout près d’ici, de tes côtés.
LE SOLDAT
C’est que je n’ai que quinze jours,
rien que quinze jours de congé.
LE DIABLE
Ce sera pour toi à peine un détour.
Et puis j’ai ma voiture : tu seras rendu plus vite qu’à pied.
LE SOLDAT
Et ma fiancée qui m’attend.
LE DIABLE
Puisque tu arriveras à temps…
LE SOLDAT
On sera logé ?
LE DIABLE
Logé, nourri, soigné, rafraîchi, dorloté,
ma voiture pour te ramener,
deux ou trois jours, un tout petit détour,
après quoi riche pour toujours…
LE SOLDAT
Qu’est-ce qu’on aura à manger ?
LE DIABLE
La cuisine est au beurre et de première qualité.
LE SOLDAT
On aura de quoi boire ?
LE DIABLE
Rien que du vin bouché.
LE SOLDAT
Et on aura de quoi fumer ?
LE DIABLE
Des cigares à bagues en papier doré.
Le rideau se baisse.
LE LECTEUR
Eh bien ! c’est comme vous voudrez.
C’est comme vous voudrez, je vous dis ;
et il a suivi le vieux chez lui,
qui se trouve avoir dit l’exacte vérité,
c’est-à-dire que Joseph a eu à boire et à manger,
et a été soigné comme il n’avait jamais été,
et montra au vieux à jouer
et le livre lui fut montré.
Deux jours valant bien le détour,
puis vint le matin du troisième jour.
Tout à coup, il vit le vieux qui entrait,
et le vieux lui dit : « Es-tu prêt ?
Mais d’abord as-tu bien dormi ? »
Et Joseph qui répond que oui.
« Et est-ce qu’on a tenu ce qu’on t’avait promis ? »
Et Joseph qui répond que oui.
« Alors tu es content ? » « Oh ! oui. » « Eh bien, dit le vieux, allons-y ! »
Ils montèrent dans la voiture, la voiture partit.
Mais tout à coup Joseph s’accroche des deux mains
au rebord en cuir des coussins ;
« Attention ! tiens-toi ! tiens-toi bien
c’est que mes chevaux vont bon train » ;
il voudrait se lever, il voudrait sauter, pas moyen ;
la calèche est montée en l’air,
elle prend le ciel en travers ;
« Es-tu content ? es-tu toujours content ? »
elle glisse en l’air au-dessus des champs,
combien de temps ? il n’y a plus de temps…
Musique. Airs de marche, comme au début de la première lecture.
Entre Denges et Denezy,
un soldat qui rentre au pays. A pris sa route à travers champs,
Va toujours et va plus avant…
Fin des airs de marche.
21:58 | Lien permanent | Commentaires (1)
22/10/2006
Histoire du soldat : "et je vois devant moi le diable en personne"
La petite pensée du jour : "Dès que nous sommes seuls, nous sommes des fous. Oui, le contrôle de nous-mêmes par nous-mêmes ne joue que soutenu par le contrôle que les autres nous imposent", François MAURIAC.
Reprenons l’Histoire du soldat là où nous l’avions laissée. Cette fois, le diable fait son apparition. Allez, lisez ses répliques en essayant d’imaginer la voix d’Hubert :
LE SOLDAT, accordant le violon.
On voit que c’est du bon marché,
il faut tout le temps l’accorder…
Le soldat se met à jouer. Musique. Petits airs au bord du ruisseau. Entre le diable. C’est un petit vieux qui tient à la main un filet à papillons. Tout à coup, il tombe en arrêt. La musique continue. Le diable s’approche du soldat par derrière. Fin de la musique.
LE DIABLE
Donnez-moi votre violon.
LE SOLDAT
Non !
LE DIABLE
Vendez-le-moi.
LE SOLDAT
Non !
LE DIABLE
posant son filet à papillons et prenant dans la main droite le livre qu’il a sous le bras gauche.
Changez-le-moi contre ce livre.
LE SOLDAT
Je ne sais pas lire.
LE DIABLE
Vous ne savez pas lire ? ça ne fait rien.
C’est un livre… on n’a pas besoin de savoir lire pour le lire.
C’est un livre, je vais vous dire,
Qui se lit tout seul ; il se lit pour vous.
On n’a qu’à l’ouvrir, on sait tout.
C’est un livre… c’est un coffre-fort…
On n’a qu’à l’ouvrir, on tire dehors…
Des titres !
Des billets !
DE L’OR !
LE SOLDAT
Faudrait me le montrer d’abord.
LE DIABLE
Je suis parfaitement d’accord.
Il tend le livre au soldat, qui se met à lire, bougeant les lèvres et suivant les lignes avec le doigt.
LE LECTEUR
A terme, à vue, cours des changes…
Pas moyen d’y rien comprendre.
LE SOLDAT
Je lis, c’est vrai, mais je ne comprends pas.
LE DIABLE
Essayez toujours, ça viendra.
LE SOLDAT
Et puis aussi, monsieur, si ce livre vaut tant d’argent, mon violon, à moi, il m’a coûté dix francs.
LE DIABLE
Ce que c’est quand même que l’honnêteté !
Elle va vous récompenser
en vous faisant faire une bonne affaire.
L’occasion n’est pas ordinaire.
Dites que oui, profitez-en…
LE SOLDAT
Oh ! bien, si vous y tenez tant !
Il donne le violon au diable et se met à lire dans le livre.
21:55 | Lien permanent | Commentaires (5)
Alors, Montpellier?!
Bonjour à tous,
Nicohiva, je me permets de te rappeler à ton devoir dominical : nous raconter le spendide concert de Montpellier!!!! Nous attendons ton récit avec impatience!
10:58 | Lien permanent | Commentaires (7)
21/10/2006
Charles Juliet encore
Oui, ce soir, encore un peu de Charles Juliet. Et, demain, promis, je reviens au sujet, avec une nouvelle note sur Histoire du soldat.
Avant Juliet, ces mots, touchants également : "La pensée que ce n'est pas moi qui ai inventé les roses m'est insupportable", Maïakovski.
Le texte qui va suivre est rempli d'espoir et d'une douce sérénité, je l'aime pour cela et parce que, par chance, je m'y reconnais depuis quelques années...
"Tu sors de la forêt. Les brouillards se sont dissipés. Tes blessures ont cicatrisé. Une force sereine t'habite. Sous ton oeil renouvelé, le monde a revêtu d'émouvantes couleurs. Tu as la conviction que tu ne connaîtras plus l'ennui, ni le dégoût, ni la haine de soi, ni l'épuisement, ni la détresse. Certes, le doute est là, mais tu n'as plus à le redouter. Car il a perdu le pouvoir de te démolir. D'arrêter ta main à l'instant où te vient le désir de prendre la plume. La parturition a duré de longues, d'interminables années, mais tu as fini par naître et pu enfin donner ton adhésion à la vie.
Depuis cette seconce naissance, tout ce à quoi tu aspirais mais qui te semblait à jamais interdit, s'est emparé de tes terres : la paix, la clarté, la confiance, la plénitude, une douceur humble et aimante. Parvenu désormais à proximité de la source, tu es apte à faire bon accueil au quotidien, à savourer l'instant, t'offrir à la rencontre. Et tu sais qu'en dépit des souffrances, des déceptions et des drames qu'elle charrie, tu sais maintenant de toutes les fibres de ton corps combien passionnante est la vie", Charles JULIET, Lambeaux.
23:05 | Lien permanent | Commentaires (0)
Souriez, vous êtes fliqués!!!
Oui, carrément! Cette fois, l'heure est grave : une de mes collègues a laissé échapper, en présence d'une élève, deux ou trois mots au sujet de ce blog! La môme m'a tannée plusieurs fois pour avoir l'adresse de mon cabaret. Je lui ai d'abord expliqué qu'il était consacré à mon chanteur préféré, mais n'en ai pas dit davantage. L'ennui, c'est qu'en cherchant bien sur la toile, la môme en question est tombée sur le blog de JPADPS. Or, il se trouve que je suis dans les liens de cette même JPADPS. Comme je ne sais pas mentir, lorsque cette brave Sandra (c'est l'élève, et elle est très perspicace!) m'a demandé si par hasard je n'étais pas dans les liens de JPA, j'ai fini par avouer. Pourquoi m'a-t-elle posé cette maudite question?! Et voilà, maintenant, il ne nous reste plus qu'à nous tenir à carreau, je ne vais plus oser être moi-même!!!!!! Merci à la collègue qui m'a cafardée! Sandra, un conseil : tu ferais mieux de ne pas fréquenter ce lieu qui ne présente de toute façon aucun intérêt pour toi! Continue à écouter Sniper. Thiéfaine, c'est pour les grands! Non, je plaisante! Fais ce que tu veux, mais merci de ne parler de ce blog à aucun autre élève. Sinon, ton 19 de moyenne en allemand, tu peux lui dire adieu!!!
22:05 | Lien permanent | Commentaires (14)
20/10/2006
Charles Juliet
La pensée du jour : « ainsi en nous
ce labyrinthe
où nous errons à la recherche
de qui nous sommes », Charles JULIET
Il y a un auteur qui n’a rien à voir avec Thiéfaine et auquel je reviens régulièrement depuis de longues années maintenant. Il mérite une petite place ici, réservez-lui un bon accueil, s’il vous plaît ! Il s’agit de Charles Juliet. Il écrit de magnifiques poèmes, ses journaux sont également d’une grande richesse… J’aime sa simplicité, simplicité au sens noble du terme. J’ai eu l’occasion de le voir un jour à la médiathèque de Nancy. Grand homme, vraiment, très effacé, très humble. Trêve de bavardage, place à monsieur Charles Juliet !
« Aveugle au loin la cohorte. Et se poursuit l’inlassable errance. Et toujours en toi, en moi, en nous, ce manque, cette faim, cette attente. Ce crucifiant besoin de ce qu’on ne saurait nommer ».
« Les gens à la dérive, les clochards que je croise dans la rue, il m’est intolérable de rencontrer leur regard. Je me reconnais dans leurs yeux ».
« Rien n’est facile ; ce qui nous a été donné, il nous faut encore le conquérir ».
« Si je n’écris pas, je suis comme ne vivant pas. Je ne pense plus qu’au suicide ».
« L’attente et la peur. La peur et l’attente. Ne croyez-vous pas que toutes deux définissent pour une grande part l’être humain ? »
« J’ai donc lu des centaines de livres, mais mes lectures n’avaient rien de systématique. J’allais vers tel ou tel ouvrage au gré de mes humeurs et des attirances, guidé le plus souvent par la seule recherche de ce qui ferait tressaillir cette région où je suis en attente d’une vie plus haute et plus intense ».
« J’étais encore dans les bois lorsqu’est tombée la nuit, et avec elle, une soudaine fraîcheur. Le silence a semblé s’approfondir, et une sourde mélancolie m’a étreint. Bien des choses remuaient dans mes limbes. Sentiment de solitude, vague angoisse, retour des peurs de mon enfance, sensation du peu que représente toute vie, crainte de ces menaces qui nous cernent, idées noires à voir approcher la mauvaise saison ».
Trois petits trucs en vrac, comme ça :
Je me demande si ces mots toucheront Evadné, j'aimerais bien connaître son avis sur Charles Juliet!
Pensons très fort à Nicohiva, qui voit Hubert en concert à Montpellier ce soir.
Dans les statistiques concernant ce blog, je constate aujourd'hui que nous atteignons les 1 069 visites depuis le début du mois, et je suis folle de joie!
21:50 | Lien permanent | Commentaires (7)
19/10/2006
Alors, Chalon?!
La pensée du jour : "Si je m'intéresse à ce que pensent les cons, je n'aurai plus de temps pour ce que pensent les gens intelligents", Eric-Emmanuel SCHMITT, Oscar et la dame rose.
Alors, Chalon?! Soph, quand tu auras soigné ta gorge et fait un petit roupillon, viens donc raconter à tata Katell ce que vous avez vécu là-bas! Pardon, je te mets sous pression, là! J'ai lu ton récit sur "Fragments d'Hubert", mais tu vois comment sont les profs : ils en veulent toujours plus! J'ai l'impression, à te lire, que le concert d'hier ressemblait à celui de Béthune... Aux balances, Hubert bâillait aussi pas mal. Ensuite, le soir, il avait eu toutes les peines du monde à "se mettre dans le concert", comme tu l'écris si bien. Mais bon, une fois que c'était parti, c'était parti! Comment était le public hier soir?
J'en profite pour souhaiter un bon concert à Nicohiva! Nous penserons à toi demain, veinard!!!
PS : Brigitte, Lunar, Doc, si vous passez par là, rien ne vous interdit d'écrire aussi quelques lignes sur le concert d'hier!!!
15:40 | Lien permanent | Commentaires (11)
18/10/2006
Petite anecdote amusante
Hier, une élève à qui je disais que Thiéfaine était le plus grand chanteur de tous les temps m'a répondu : "Non, madame, désolée, c'est Sniper"! Ce fut un rayon de soleil dans une journée pourrie sur toute la ligne. Ce soir, je voulais pousser un violent coup de gueule ici, raconter le truc infâme qui m'était arrivé hier, mais je me suis ravisée... Cela m'éloignerait beaucoup trop de Thiéfaine. Mais bon, il y a des jours où je suis très loin de Thiéfaine de toute façon, parce que la réalité n'est pas bordée de poésie, parce que le boulot me ravage les neurones, parce qu'il m'arrive de rentrer laminée le soir (je sais bien que mon cas n'est pas exceptionnel non plus!) et de n'être plus réceptive à rien... Ni à la langue de Goethe, ni aux mots de mes amis les poètes...
22:04 | Lien permanent | Commentaires (5)