03/12/2006
3615 code TA VIE!!!
La pensée du jour : "Ce qui est laid, c'est que sur cette terre il ne suffise pas d'être tendre et naïf pour être accueilli à bras ouverts", Albert COHEN.
Aujourd’hui, attention, je vais vous raconter ma vie ! Le lien avec Thiéfaine est ténu, peut-être, mais il existe tout de même.
Comme dirait l’ami Ferré, « la vie est louche » et ne laissera jamais de m’étonner, ce qui est peut-être déjà pas mal ! Il y a quelques mois, elle m’a fait un cadeau incroyable : elle a remis sur mon chemin celle qui avait été ma meilleure amie pendant des années… Petit retour en arrière : quand j’étais enfant, j’habitais dans un bled paumé. Mais, dans cette cambrousse assez triste, vivait aussi Christelle. C’est surtout au lycée que notre amitié s’est totalement épanouie. En classe, nous étions toujours assises l’une à côté de l’autre. Les profs nous confondaient systématiquement, et cela nous faisait bien rire ! Pour moi, Christelle était Christ. Pour elle, je m’appelais Cath.
Je me souviens de nos petites folies : nous fumions en cachette ce que nous appelions nos « Melca ». Un soir, Christelle m’avait téléphoné et expliqué qu’elle n’en avait plus une seule. A peut-être onze heures du soir, j’avais foncé chez elle pour lui apporter les précieuses cigarettes ! Quand nous voulions faire des sorties pas très catholiques, nous nous mettions d’accord : « si mes parents téléphonent, je suis chez toi, je rentre à telle heure ». Nous ne nous sommes fait choper qu’une fois !
Bref, c’était la grande vie, l’amitié exclusive à laquelle seule l’adolescence peut donner naissance…
Mais le premier avril 1992, et ce n'était malheureusement pas un poisson, Christelle m’expliquait qu’elle avait soudain besoin de prendre l’air… Que le temps renforcerait peut-être notre amitié, mais qu’il fallait faire une pause. Soudain, dans ma petite vie, le monde s’écroula. Littéralement. Je restai abasourdie pendant de longs mois. Pas un jour sans que je me demande (je devrais mettre un imparfait du subjonctif ici, mais bon !) : « dis, quand reviendras-tu ? ». Mais rien, jamais rien… Chaque premier avril sonnait pour moi comme une très mauvaise plaisanterie.
En 1993, je partis vivre au fin fond de l’Allemagne de l’Est. Je dus revenir assez rapidement parce que ma grand-mère allait très mal. J’eus juste le temps de la revoir. Le lendemain, elle mourait, avec, je crois, le sentiment du devoir accompli, puisqu’elle avait pu revoir la petite-fille avec laquelle elle entretenait une relation privilégiée… A l’enterrement de ma grand-mère, Christelle était là. Comme si elle avait voulu me dire que quand même, pour les moments douloureux, je pouvais encore compter sur elle. Mais déjà il me fallait regagner mes pénates germaniques…
Par la suite, revenue en France, je revis Christelle à plusieurs occasions. Comme nos parents habitent toujours dans le même village, les fêtes ou les mariages d’amis communs nous remettaient souvent en présence l’une de l’autre. Nous échangions toujours quelques mots, mais sans plus…
Vous suivez ? Je perdis donc Christelle en avril 92, et c’est en septembre de la même année que je découvris celui qui devait bouleverser ma vision du monde et me remettre d’aplomb : Thiéfaine ! Il me fallait bien cet « alcool fort » après le grand chagrin qui avait obscurci ma vie… Thiéfaine, je l’ai connu grâce à … un ex de Christelle !! Qui se trouvait également être le grand ami de mon ex à moi !!! Et j’ai toujours regretté que nous n’ayons pas pu découvrir Thiéfaine ensemble, ma Christ et moi… Nous en serons restées à Gainsbourg et à Renaud… Pour ma part, je crois que c’est aussi par chagrin que je me suis balancée à fond comme ça dans Thiéfaine… Au cœur de la détresse, le monsieur me chantait que je n’étais pas seule, quand S.O.S. amitié m’avait laissée en rade…
Bien sûr, par la suite, je connus d’autres amitiés. Mais je ne m’y abandonnai jamais complètement, je me forçais à une certaine retenue. Pour me protéger, mais aussi parce que de toute façon, Christelle avait quand même gardé la première place dans mon p’tit cœur de guimauve !
En 2003, Christelle organisa une grande fête pour ses trente ans. Et elle m’invita ! J’y allai dans l’attente d’un miracle, je crois, dans l’espoir de voir « rejaillir le feu de l’ancien volcan ». Mais rien. Ce soir-là, Christelle s’affairait dans tous les sens, normal. Et nous n’eûmes pas le temps d’échanger plus de trois mots ! Je repartis bien triste. Et nous en restâmes là.
Mais je disais en introduction que la vie est louche : en mai de cette année, il y avait une brocante dans le village de mes parents. J’y allai. Et sur qui tombai-je parmi tous les exposants ? Je vous le donne en mille ! Ben oui : Christelle ! Elle vendait, entre autres, des cartes qu’elle avait confectionnées elle-même. N’oubliant pas mon goût très prononcé pour les échanges épistolaires, elle m’offrit une de ces cartes et une enveloppe. Et, ce jour-là, je ne sais pas pourquoi, nous nous sommes réellement retrouvées. J’avais l’impression que nous reprenions la conversation là où nous l’avions interrompue… Que le lien ne s’était jamais effiloché…
Décidément, la vie nous réserve parfois de sacrées surprises ! Je crois que ce jour de mai 2006, j’ai vécu ce qu’inconsciemment j’avais attendu pendant de longues années…
Depuis, Christ et moi sommes en contact régulier. Nous nous écrivons souvent. Elle a même pensé à mon anniversaire ! Et, en janvier 2007, elle viendra manger à la maison avec son homme ! Je pense qu’il ne serait pas idiot, ce jour-là, de se mettre un bon Thiéfaine en musique de fond !! Et du Renaud, et du Gainsbourg aussi !!
Mille excuses pour cet immense étalage ! Sam dira (avec raison) que ce texte n’a pas grand-chose à faire sur mon blog ! Je sais, on est un peu loin de Thiéfaine. Mais cela faisait longtemps que je voulais écrire quelque chose sur cette amitié si forte, et tant pis si cela détonne ici !
14:40 | Lien permanent | Commentaires (18)
02/12/2006
Une charogne
La pensée du jour : "Toute l'amertume de la mer me remonte", Louis ARAGON.
Voici "Une charogne", de l'ami Charles Baudelaire. Avertissement : âmes sensibles s'abstenir!
Rappelez-vous l'objet que nous vîmes, mon âme,
Ce beau matin d'été si doux,
Au détour d'un sentier une charogne infâme
Sur un lit semé de cailloux,
Les jambes en l'air, comme une femme lubrique,
Brûlante et suant les poisons,
Ouvrait d'une façon nonchalante et cynique
Son ventre plein d'exhalaisons.
Le soleil rayonnait sur cette pourriture,
Comme afin de la cuire à point,
Et de rendre au centuple à la grande Nature
Tout ce qu'ensemble elle avait joint;
Et le ciel regardait la carcasse superbe
Comme une fleur s'épanouir.
La puanteur était si forte, que sur l'herbe
Vous crûtes vous évanouir.
Les mouches bourdonnaient sur ce ventre putride,
D'où sortaient de noirs bataillons
De larves, qui coulaient comme un épais liquide
Le long de ces vivants haillons.
Tout cela descendait, montait comme une vague,
Ou s'élançait en pétillant;
On eût dit que le corps, enflé d'un souffle vague,
Vivait en se multipliant.
Et ce monde rendait une étrange musique,
Comme l'eau courante et le vent,
Ou le grain qu'un vanneur d'un mouvement rythmique
Agite et tourne dans son van.
Les formes s'effaçaient et n'étaient plus qu'un rêve,
Une ébauche lente à venir,
Sur la toile oubliée, et que l'artiste achève
Seulement par le souvenir.
Derrière les rochers une chienne inquiète
Nous regardait d'un oeil fâché,
Epiant le moment de reprendre au squelette
Le morceau qu'elle avait lâché.
- Et pourtant vous serez semblable à cette ordure,
A cette horrible infection,
Etoile de mes yeux, soleil de ma nature,
Vous, mon ange et ma passion!
Oui! telle vous serez, ô la reine des grâces,
Après les derniers sacrements,
Quand vous irez, sous l'herbe et les floraisons grasses,
Moisir parmi les ossements.
Alors, ô ma beauté! dites à la vermine
Qui vous mangera de baisers,
Que j'ai gardé la forme et l'essence divine
De mes amours décomposés!
14:15 | Lien permanent | Commentaires (4)
29/11/2006
Un poème en prose de Charles Baudelaire
La pensée du jour : "Roméo, c'est une légion de gamètes mâles qui montent à l'échelle pour rejoindre la gamète femelle qui les attire avec une force irrésistible", René BARJAVEL (La faim du tigre).
Ben ouais : "pas prendre pour un courrier du coeur les pulsions des glandes endocrines"!!
Voici aujourd'hui un poème en prose de l'ami Charles Baudelaire. Je sais, Evadné, que tu l'as posté dernièrement sur le forum de "Fragments d'Hubert". J'espère que tu ne m'en voudras pas si je le mets ici aussi. J'en avais l'intention depuis un petit moment. J'aime ce texte, il m'accompagne depuis des années déjà...
Au fait, n'oubliez pas de répondre à la question posée par 655321 au bas de la note intitulée "La chanson française pour les nuls"!
Et maintenant, place à Baudelaire :
Anywhere out of the worldN’importe où hors du monde
Cette vie est un hôpital où chaque malade est possédé du désir de changer de lit. Celui-ci voudrait souffrir en face du poêle, et celui-là croit qu’il guérirait à côté de la fenêtre.
Il me semble que je serais toujours bien là où je ne suis pas, et cette question de déménagement en est une que je discute sans cesse avec mon âme.
« Dis-moi, mon âme, pauvre âme refroidie, que penserais-tu d’habiter Lisbonne ? Il doit y faire chaud, et tu t’y ragaillardirais comme un lézard. Cette ville est au bord de l’eau. ; on dit qu’elle est bâtie en marbre, et que le peuple y a une telle haine du végétal, qu’il arrache tous les arbres. Voilà un paysage selon ton goût ; un paysage fait avec la lumière et le minéral, et le liquide pour les réfléchir ! »
Mon âme ne répond pas.
« Puisque tu aimes tant le repos, avec le spectacle du mouvement, veux-tu venir habiter la Hollande, cette terre béatifiante ? Peut-être te divertiras-tu dans cette contrée dont tu as souvent admiré l’image dans les musées. Que penserais-tu de Rotterdam, toi qui aimes les forêts de mâts, et les navires amarrés au pied des maisons ? »
Mon âme reste muette.
« Batavia te sourirait peut-être davantage ? Nous y trouverions d’ailleurs l’esprit de l’Europe marié à la beauté tropicale. »
Pas un mot. – Mon âme serait-elle morte ?
« En es-tu donc venue à ce point d’engourdissement que tu ne te plaises que dans ton mal ? S’il en est ainsi, fuyons vers les pays qui sont les analogies de la Mort. – Je tiens notre affaire, pauvre âme ! Nous ferons nos malles pour Tornéa. Allons plus loin encore, à l’extrême bout de la Baltique ; encore plus loin de la vie, si c’est possible ; installons-nous au pôle. Là le soleil ne frise qu’obliquement la terre, et les lentes alternatives de la lumière et de la nuit suppriment la variété et augmentent la monotonie, cette moitié du néant. Là, nous pourrons prendre de longs bains de ténèbres, cependant que, pour nous divertir, les aurores boréales nous enverront de temps en temps leurs gerbes roses, comme des reflets d’un feu d’artifice de l’Enfer ! »
Enfin, mon âme fait explosion, et sagement elle me crie : « N’importe où ! n’importe où ! pourvu que ce soit hors de ce monde ! »
14:31 | Lien permanent | Commentaires (1)
27/11/2006
Question
La pensée du jour : "Nous laisserons tous une ardoise, ô Patrick, Breton sourcilleux. Tous, à l'heure dite, car il est écrit dans les astres et dans nos paumes ravinées que nous mourrons avant de nous être acquittés de l'essentiel. Nous aurons bu sans la payer la dernière gorgée d'amertume", Jean-Claude PIROTTE.
Vite fait ce soir car je n'ai pas encore préparé mon sac pour demain. J'étais à une réunion en fin d'après-midi et j'ai dû en faire un compte rendu écrit pour mon principal. Je viens de lui taper deux pages à l'ordinateur! Avec cette réunion, le compte rendu et les conseils de classes qui vont commencer jeudi, je crois que je vais carrément dépasser les 35 heures cette semaine, n'en déplaise à Ségolène!!!
En allant bosser, je me suis écouté le petit bijou qu'est le concert 83 (de l'ami Hubert, cela va sans dire!). Depuis des années, je me demande ce qu'il dit en guise d'introduction à "Mathématiques souterraines". J'ai fichu le volume à 22, cela ne m'a pas aidée davantage! Qui a la réponse à ma question? Et pas le droit de se moquer et de dire que ma surdité serait peut-être due à des pratiques bizarroïdes!!!
23:03 | Lien permanent | Commentaires (18)
26/11/2006
La chanson française pour les nuls
Je crois que j'ai trouvé un remède à mon mal : je vais remplacer ma dépendance à Hubert par une autre dépendance! Et c'est ainsi qu'aujourd'hui, je suis retournée voir le groupe Piccolo. Le concert commençait à 16 heures, autant dire que le public ne ressemblait pas à celui de Thiéfaine! J'étais au fond de la salle et ai pu observer les réactions des uns et des autres. Je crois que le coup de la "semence dans le sexe roux", dans "L'amour est cerise" (chanson de Ferrat reprise par le groupe), a choqué quelques âmes sensibles!
Bref, une fois de plus, ce fut un très beau moment. Je vous conseille à nouveau d'aller voir Piccolo si vous en avez la possibilité! Et, éventuellement, ayez une pensée émue pour moi quand vous entendrez la chanson "Les ecchymoses", dont j'ai écrit les paroles. C'est vraiment à se pendre! Mais bon, soyez indulgents! Voilà, je me suis fait ma petite pub, comme ça, au passage! Fort heureusement, je n'écris plus de poèmes depuis des lustres!
Avant de regagner mes pénates, je suis passée dans la librairie la plus géniale du monde. Ouverte même le dimanche! Tout à coup, que vois-je? La chanson française pour les nuls. Je ne sais pas comment vous réagissez dans ces cas-là. Pour ma part, ma petite main me démange toujours, je me précipite sur la table des matières et vais voir à la lettre "T" si le loup n'y est pas! Et il y était!!! Le petit topo sur Hubert s'intitule "Hubert-Félix Thiéfaine, l'adolescence éternelle", je crois. Une large place est faite à "La fille du coupeur de joints", chanson dans laquelle se retrouveraient, en gros, tous les jeunes, car elle évoque l'interdit. Un peu dommage de réduire l'univers du cousin Hub' à un "repaire" pour tous les adolescents, réels ou attardés. Mais enfin, n'allons pas chipoter! Le fameux bouquin a le mérite de parler de Thiéfaine et de citer également l'artiste, qui dit qu'il est encore un peu un "enfant chahuteur". J'ai bien aimé sa définition du vieillissement : "Vieillir, c'est garder toutes les étapes de sa vie en soi". J'espère ne pas déformer ses propos. Hubert en porte-parole de la jeunesse, voilà qui me ramène à la question que posait dernièrement 655321 sur ce blog et qui est malheureusement passée à la trappe. Voudrait-il bien la reposer? Je ne me souviens plus des termes exacts. Je pourrais, bien sûr, la retrouver dans les différents commentaires postés ici, mais j'ai décidé de le fliquer et de voir un peu à quelle fréquence il vient ici!!!!!
Et n'en oublions pas pour autant la pensée du jour :
"cette vieille
et toujours lancinante question
du pourquoi ici, moi, pourquoi?"
Guy GOFFETTE
19:45 | Lien permanent | Commentaires (16)
Recueillement
Sois sage, ô ma Douleur, et tiens-toi plus tranquille.
Tu réclamais le Soir; il descend; le voici :
Une atmosphère obscure enveloppe la ville,
Aux uns portant la paix, aux autres le souci.
Pendant que des mortels la multitude vile,
Sous le fouet du Plaisir, ce bourreau sans merci,
Va cueillir des remords dans la fête servile,
Ma Douleur, donne-moi la main; viens par ici,
Loin d'eux. Vois se pencher les défuntes Années,
Sur les balcons du ciel, en robes surannées;
Surgir du fond des eaux le Regret souriant;
Le Soleil moribond s'endormir sous une arche,
Et, comme un long linceul traînant à l'Orient,
Entends, ma chère, entends la douce Nuit qui marche.
Charles BAUDELAIRE
Punaise, ce n'est pas possible : il y a huit jours, une trentaine de fans d'Hubert se réunissait dans un bar parisien... Tout cela me semble si loin déjà... "La vie passe comme une rivière, faut pas trop demander l'heure", chantait Capdevielle. J'adorais cette chanson quand j'étais ... jeune et que je n'avais pas encore appris à mes dépens que cette phrase disait l'exacte et triste vérité...
Il y a neuf jours encore, nous attendions le concert du Zénith avec une impatience sans nom... Et voilà, le lendemain, comme disait Maupassant, "c'était fini d'attendre"... Je crois que c'est ce soir que je me fais ma redescente, et ça craint du boudin, je me sens seule face à ce vide devant moi, face à ce "plus rien à attendre". Pourtant si, flûte, Mélusine a raison : il y a le DVD et la BD. Dites, vous êtes sûrs, vous, qu'Hubert reprendra la scène dans deux ans? "Allez, couchée, mon âme, au pied, tranquille!" D'ailleurs, ces mots me font systématiquement penser à "Sois sage, ô ma Douleur, et tiens-toi plus tranquille"...
00:40 | Lien permanent | Commentaires (5)
Pêle-mêle
Ce soir, voici un petit pêle-mêle, des petites phrases que j'aime bien et que j'ai envie de partager avec vous!
"A la maison, il y avait toujours cette porte que ma mère fermait pour ne pas que j'attrape mal. Les microbes, n'est-ce pas. Et aussi pour ne pas risquer l'accident. Il passait une voiture par jour, et encore. Mais cette voiture-là aurait pu m'écraser", Jean CARMET.
"Aimer quelqu'un, c'est le dépouiller de son âme, et c'est lui apprendre ainsi -dans ce rapt- combien son âme est grande, inépuisable et claire. Nous souffrons tous de cela : de n'être pas assez volés. Nous souffrons des forces qui sont en nous et que personne ne sait piller, pour nous les faire découvrir", Christian BOBIN.
"Sait-on si l'on est, ou non, aimé? S'il advient qu'on le soit, l'est-on dans ce que l'on estime être l'excellence de soi? Est-on mieux connu de ceux qui nous aiment que de ceux qui nous détestent? Peut-être nous révélons-nous davantage à ceux qui nous sont indifférents, étant avec eux plus libres, plus conformes à une permanente vérité de nous-mêmes; exempts que nous sommes du soin de nous les gagner ou de nous en faire redouter", Louis CALAFERTE.
"Les rues qui portent des noms de fleurs sont toujours d'effrayants coupe-gorge, ou des boyaux percés dans des façades de béton. Les 'résidences' ne sont que des H.L.M. alignées côté à côte, des silos pour betteraves à tête d'hommes, des serres où se languissent d'implacables existences de légumes. L'horreur n'ose jamais dire qu'elle s'appelle l'horreur", René FALLET.
"J'aborde à la douleur que je narguais du haut de mon bonheur factice", Franck VENAILLE.
"Je rêvais d'un autre pays, d'un lieu où la vie viendrait à ma rencontre en pleine rue, comme une cavalcade au galop, où elle me piétinerait", Paul NIZON.
00:02 | Lien permanent | Commentaires (4)
24/11/2006
Le 24 novembre 1997...
La pensée du jour : "Je songe, attristé, à tout ce que j'aurai ignoré de toi", Louis CALAFERTE.
Il y a très exactement neuf ans, s’éteignait celle que William Sheller appelle affectueusement et respectueusement « la duchesse ». La duchesse, c’est-à-dire Barbara…
Barbara, le bel aigle noir de mon enfance. Je me souviens des longues soirées passées avec ma mère, à écouter toutes les chansons qu’elle aimait bien. Parmi ces chansons, il y en avait un paquet de Barbara. C’est surtout lorsque j’avais quinze ans que je me suis réellement amourachée de l’œuvre de Barbara. Depuis, les mots de la duchesse ne m’ont jamais quittée et j’y puise courage aux heures d’accablement…
Barbara, pour moi, c’est avant tout « Göttingen ». Quand on pense aux circonstances dans lesquelles est née cette chanson, on en ressent d’autant plus toute la portée… En juillet 1964, Gunther Klein invite Barbara à aller chanter à Göttingen. La chanteuse, dont la famille aura tant souffert de la seconde Guerre mondiale, se montre d’abord largement réticente… Elle n’a nullement envie d’aller chanter en Allemagne ! Sous l’occupation, Barbara et ses proches durent fuir et se réfugier à Saint-Marcellin. C’est d’ailleurs là qu’en 2005 eut lieu un festival Barbara. Parmi les invités … Thiéfaine ! Bref… Finalement, Barbara accepte l’invitation de Gunther Klein. Elle chante donc à Göttingen, et le public lui réserve un chaleureux accueil. Je cite ses propos : « La soirée est magnifique. Gunther prolonge mon contrat de huit jours. Le lendemain, les étudiants me font visiter Göttingen. Je découvre la maison des frères Grimm où furent écrits les contes bien connus de notre enfance ». Et voici ce que Barbara écrit à propos de la chanson « Göttingen » : « Je dois donc cette chanson à l’insistance têtue de Gunther Klein, à dix étudiants, à une vieille dame compatissante, à la blondeur des petits enfants de Göttingen, à un profond désir de réconciliation, mais non d’oubli ». Moi aussi, « il y a des gens que j’aime à Göttingen » et dans bien d’autres villes d’Allemagne, et je ne peux écouter cette chanson sans penser à eux…
Barbara, c’est aussi « Nantes », bien sûr, et tout le drame qui se cache derrière ce cri d’amour, d’amour malgré tout… C’est également « Ma plus belle histoire d’amour c’est vous », déclaration d’amour au public, cette fois. Et « L’île aux mimosas »… « Il y a si peu de temps entre vivre et mourir »… « L’enfant laboureur ». « Mais comment voulez-vous qu’un enfant laboureur,
Si on lui prend sa terre,
Fasse pousser ses fleurs, ses fleurs ? »
« Drouot », bien sûr, et puis « Tu ne te souviendras pas », et « Vienne ». Pour moi, Barbara a chanté mieux que personne le baromètre de l’amour, toujours oscillant entre « beau temps » et « pluie »… « Dis, quand reviendras-tu ? ». « Voilà combien de jours, voilà combien de nuits, voilà combien de temps que tu es reparti »… Il y a aussi « La solitude » et « La mort ». Et « L’aigle noir », évidemment !
Bref, je pourrais citer l’œuvre entière de cette artiste. Ses mots m’accompagnent au quotidien, comme ceux de Thiéfaine, et ce n’est pas incompatible !
Dimanche, au retour de Paris, j’ai demandé à Sam de me faire une faveur et de m’emmener à Précy-sur-Marne, petite commune d’environ 400 âmes, je crois, et où Barbara vivait, loin des tumultes de la scène… Cela faisait des années que je rêvais de faire ce pèlerinage. Dans le village, nous avons eu la chance de pouvoir discuter avec un monsieur qui avait été pendant longtemps le voisin de Barbara et qui l’a décrite exactement comme je l’ai toujours imaginée, généreuse et drôle. Pas du tout austère… Il nous a également dit qu’il trouvait que Barbara était déjà tombée dans un injuste oubli, alors qu’on ne manquait jamais de nous rebattre les oreilles avec Claude François, par exemple. Tout à fait d’accord. J’espère quand même que pour les dix ans de la mort de Barbara, quelqu’un pensera à lui rendre hommage, sinon je fais une révolution sur ce blog !!
En faisant ce crochet par Précy, je voulais juste, et cela avec le plus grand respect, m’imprégner de l’atmosphère dans laquelle Barbara avait pu vivre… Ce jour-là, il « automnait », comme elle aurait dit. Tout à fait le ciel qu’il fallait au-dessus de Précy… Et lorsque nous sommes arrivés dans le village, nous avons tout de suite vu ce joli panneau : « rue de la petite cantate »… Peu de temps après, nous avons entendu les cloches de l’église, que Barbara évoque dans la chanson « Précy », justement. J’ai ressenti une vive émotion en entendant ce carillon !
Voilà. Et je terminerai par cette phrase de Barbara :
« Et les mots qui sortent de ma gorge, je ne les connais pas : des mots qu’on a plantés là, des mots qui me font mal et qui m’étouffent ; alors je les crie, je les vomis pour pouvoir respirer, pour vivre… ».
Repose en paix, ma duchesse ! Merci encore et … chapeau bas !
08:37 | Lien permanent | Commentaires (9)