04/08/2006
Fan de Thiéfaine, moi?!
Le truc le plus fou que j’ai fait pour aller voir Thiéfaine remonte à presque huit ans, déjà. J’avoue, sans fausse honte, que je suis prof et que je suis donc en train de savourer de longues vacances (bien méritées, soit dit en passant !). En 1998, le 25 novembre, je crois, Hubert passait à Saint-Avold, à environ une bonne heure et demie de route de chez moi. J’avais dû acheter mon billet en septembre. Or, fin octobre peut-être, j’apprends que le 25 novembre précisément, j’ai une réunion parents-profs. Ce n’est pas possible, comment a-t-on pu me faire un pareil tour de cochon ?! La mort dans l’âme, je me fais rembourser mon billet. Seulement, à l’approche du jour J, je suis taraudée par le remords ! Le 25 tout pile, j’en parle à notre aide-éducateur de l’époque. Il se met illico dans tous ses états. « Comment ? Louper un concert de Thiéfaine, toi ? » Je me sens lamentable ! Toute la journée, la petite idée de quand même aller à ce concert fait son bout de chemin en moi. A 16h30, quand retentit la dernière sonnerie, la petite idée toute frêle est devenue certitude en béton : j’irai voir Thiéfaine, coûte que coûte !
Or, ce soir-là, horreur, j’ai environ six millions de parents qui veulent me voir. Ils n’en ont pas leur claque, eux, de faire la queue ?! Surtout qu’un prof d’allemand, comme chacun sait, cela ne sert pas à grand-chose, c’est celui que l’on va voir, les soirs comme celui-là, juste parce qu’il y a trop de monde devant les salles des autres profs ! Tiens, pour un peu, je me laisserais aller à leur expliquer qu’ils perdent leur temps ! Vraiment, ce soir-là, je ne comprends plus rien. A ce rythme-là, je ne quitterai pas le bahut avant 21 heures. 21 heures ! De quoi faire une crise de nerfs, là, tout de suite, devant les parents et les élèves ! Vers les 18 heures, je trouve la solution : je vais me faire un écriteau sur lequel je préciserai que je ne suis disponible que jusqu’à 19 heures. Une heure et demie de route, ai-je dit, un peu plus de mon lieu de travail, mais c’est jouable. A 19 heures, je remballe tout. Je fais le trajet la peur au ventre car, quand même, je n’ai plus de billet. Et s’il n’y en avait plus un seul en vente ? J’essaie de ne pas penser au pire ! J’arrive à la salle de concert à 20 heures 30 précises. Et vous savez quoi ? La personne qui me vend le billet me dit que j’ai de la chance, c’était le dernier ! J’ai à peine le temps de mesurer mon bonheur, j’entends déjà les premières notes de « L’ascenseur de 22h43 » !
Ce concert fut vraiment grandiose. De temps à autre, j’avais un petit accès de mauvaise conscience, quand je pensais encore aux parents que j’avais plantés (mais à qui j’avais pris soin de dire que je pourrais les recevoir un autre jour, n’importe quand, leur heure serait la mienne – enfin, pas un soir de concert de Thiéfaine, quoi !). Ouais, je me sentais quand même coupable (cela a bien dû m’arriver 33 fois ce soir-là, je le jure !), mais en même temps, une voix me disait que j’avais bien fait, qu’on n’avait qu’une vie, et bien courte, par-dessus le marché !
Bon, comme autre moment un peu dingue, il y a eu aussi ce concert au fin fond de la Bretagne. Je n’avais pas prévu d’y aller. Avant de partir en vacances là-bas, je ne savais même pas que Thiéfaine y passerait. J’ai bien dû faire trois cents bornes aller-retour ce jour-là, toute seule sur des routes un peu loufoques (bretonnes, quoi!). Il y a eu aussi la dernière tournée où, dans la même semaine, j’ai vu le père Hubert trois ou quatre fois de suite, je ne sais plus exactement (et j’étais enceinte à l’époque !). Il y a eu aussi mes audaces épistolaires, en 1995. Oui, j’avais carrément écrit à Thiéfaine ! Et il m’avait répondu, d’ailleurs. Quelques lignes laconiques au dos d’une carte postale, mais qu’à cela ne tienne !
Aujourd’hui (est-ce parce que ça y est, l’âge de raison est arrivé, sans se presser ?!), je n’oserais plus écrire à Thiéfaine, pas plus que je n’oserais partir ainsi avant la fin d’une réunion parents-profs. « Les belles années passent vite », c’était donc bien vrai !
P.S. : Je dois avouer que je n'ai pas de bol : beaucoup de concerts de Thiéfaine tombent des jours de conseils de classes ou de ... réunions parents-profs! Il faudrait trouver une solution : soit l'équipe de Thiéfaine me consulte avant de communiquer le calendrier définitif d'une tournée, soit mon chef d'établissement me demande ... allez, soyons simples, quels soirs de l'année je suis disponible. Je vais lui soumettre l'idée à la rentrée!!!
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03/08/2006
Sturm und Drang
A la question « c’est quoi, le romantisme, pour Hubert-Félix Thiéfaine? », Hubert répondait, toujours dans Chorus n° 26 (décidément !) :
« C’est l’âme allemande. L’orage et la passion, « Sturm und Drang ». C’est violent ! C’est une sensibilité à fleur de peau ».
Alors moi, quand je lis ce genre de choses, je biche !! Comme, visiblement, le Sturm und Drang a marqué Thiéfaine (cf. « Confessions d’un never been »), je ne résiste pas à l’envie de consacrer une petite note à ce courant littéraire !
« Klopstock, Lessing, Wieland représentent ce que l’on pourrait appeler la génération de 1730. On pourrait tenter de regrouper les écrivains de la génération de 1745-1755, ceux qui ont environ vingt ans de moins. Ils se rassemblent autour de deux universités, Göttingen et Strasbourg, sans qu’il y ait toutefois de frontières étanches entre les deux groupes. Le moins important est celui de Göttingen, où un certain nombre d’étudiants fondent une sorte de société des admirateurs de Klopstock, le Göttinger Hainbund.
Beaucoup plus important est ce que l’on pourrait appeler le groupe de Strasbourg, que l’on appelle traditionnellement le Sturm und Drang, du titre d’un drame écrit en 1776 par Friedrich Maximilian Klinger (1752-1831) ; cette expression intraduisible (assaut et poussée ? orage et désir ?)* exprime l’atmosphère de violence et d’irrationalisme qui règne entre 1770 et 1775. Les « Stürmer », c’est ainsi qu’on les dénomme, se disaient volontiers des « génies », et on désigne aussi cette époque comme le « temps des génies » (die Geniezeit).
Le Sturm und Drang pousse à l’extrême la revendication exprimée par l’Aufklärung (=les Lumières) d’émancipation de l’individu et en même temps, par son irrationalisme, par le sentiment religieux qui transparaît à tout instant, il continue, en l’amplifiant et en la transposant sur le plan de la création littéraire, la tendance piétiste. Les deux grands courants de pensée et de sensibilité du siècle s’unissent en une soudaine et brève explosion, avant de se retrouver, sous une forme beaucoup plus épurée et apaisée, dans le classicisme. Continuateur de l’Aufklärung, le Sturm und Drang exprime d’abord UNE ASPIRATION A LA LIBERTE, A LA LIBERATION DES REGLES ET DES CADRES D’UNE SOCIETE RIGIDE, exprimée par des jeunes gens issus de la bourgeoisie, qui n’arrivent pas à trouver leur place dans le monde qu’ils découvrent, et qui ont aussi appris de Klopstock la dignité et l’indépendance du poète.
(…) Dans le domaine de la littérature, cette libération s’exprime par le rejet des règles que l’esprit rationaliste avait fixées pour codifier la beauté artistique ; le génie est celui qui, dans sa liberté souveraine, définit lui-même les valeurs esthétiques, il refuse la notion de « goût », manifestation de la convention sociale. Parallèlement, le langage discursif, didactique, de l’Aufklärung, qui sert à transmettre la pensée rationnelle, est rejetée au nom du jaillissement spontané, de l’expression immédiate du sentiment ; le piétisme a ouvert la voie, et Klopstock a fourni un modèle. A l’origine du Sturm und Drang se trouve une nouvelle théorie du langage, celle que Johann Georg Hamann (1730-1788), un petit fonctionnaire de Königsberg qui n’hésite pas à polémiquer avec Kant, exprime dans les Pensées socratiques (Sokratische Denkwürdigkeiten) et dans les Croisades du Philologue (Kreuzzüge eines Philologen). Pour Hamann, Socrate, tout comme Homère ou Shakespeare, n’est pas l’homme du savoir, mais l’homme du sentiment, et le sentiment est au savoir ce que le corps vivant est au squelette, l’origine du langage n’est pas la volonté de communiquer la pensée, mais l’impulsion poétique qui pousse à l’expression sous forme d’images, la poésie est « la langue maternelle du genre humain ».
Le théoricien du Sturm und Drang est Johann Gottfried Herder (1744-1803). (...) Il reprend les idées de Hamann, en les plaçant dans une perspective historique inspirée de Rousseau : le langage est l’expression de l’âme individuelle de chaque peuple et, comme les individus, les peuples vivent. Retournant la conception optimiste de l’Aufklärung, qui voit dans l’histoire de l’humanité la marche vers le progrès, Herder y aperçoit le mouvement par lequel les peuples, qui se développent comme des organismes vivants, chacun suivant sa propre loi, s’éloignent de leurs origines ; l’histoire est donc décadence, elle mène de la jeunesse dont témoigne la Grèce antique au dessèchement que le rationalisme français fait subir à l’Europe du XVIIIème siècle. Cette décadence serait irrémédiable, si les peuples « nordiques » n’avaient conservé intacte leur force première. Il faut donc redécouvrir l’âme poétique originelle, telle qu’elle se manifeste dans la poésie populaire ; enthousiasmé par le faux le plus célèbre de l’histoire littéraire, les poésies attribuées au barde gaélique Ossian, publiées en 1760, Herder rassemble en 1778-1779 des « chansons populaires » (« Volkslieder »), ouvrant à la poésie allemande une voie qui sera particulièrement féconde. En puisant à la source de l’inspiration populaire, le poète retrouve, au-delà de l’artifice et de l’inauthenticité, la force primitive du génie, dont Shakespeare donne l’exemple le plus grandiose.
Les idées de Herder ont enthousiasmé toute une génération ; le grand événement fondateur du Sturm und Drang a été la rencontre à Strasbourg, en 1770, de Herder et d’un étudiant en droit, plus jeune que lui de quelques années, Johann Wolfgang Goethe ».
Suite au prochain numéro !
Source : La littérature allemande, Jean-Louis BANDET, Que sais-je ?
*der Sturm : la tempête, l’orage, l’ouragan, le tumulte, le déchaînement, l’impétuosité, la fougue
*der Drang : la poussée, l’impulsion, la tendance, le désir, le penchant14:00 | Lien permanent | Commentaires (0)
Y'a pas que Thiéfaine dans la vie!
Non, y'a aussi Hubert-Félix!!!
00:04 | Lien permanent | Commentaires (0)
02/08/2006
Dis-moi, Céline...
Toujours dans Chorus n° 26, Thiéfaine évoque également Céline :
« Après, j’ai croisé la route de ceux qui m’ont vraiment bousculé.
Céline d’abord. D’autant plus que c’est quelqu’un d’ambigu, et que j’ai toujours aimé l’ambiguïté ; ça pousse à se poser des questions. J’ai toujours été attiré par ce qui n’est pas très clair, car il n’y a pas que le noir et le blanc dans la vie ».
Pour ma part, j’ai découvert Céline en 1999. Très vite, je me suis senti comme une parenté d’âme avec ce Bardamu qui « n’arrivait jamais à se sentir entièrement innocent des malheurs qui arrivaient » ! Depuis, Voyage au bout de la nuit fait partie de mes livres de chevet.
Avant de commencer, j’aimerais citer ces mots de Pascal Fouché : « Faut-il ou non pardonner ses errements à un grand écrivain ? Pour certains, le génie excuse tout ; pour d’autres, l’ignominie empêche jusqu’à la lecture de ses œuvres majeures. Il reste un fait : Céline a écrit le meilleur et le pire ».
Tournons-nous donc vers le meilleur !
« « L’amour, c’est l’infini mis à la portée des caniches ».
« Pour que dans le cerveau d’un couillon la pensée fasse un tour, il faut qu’il lui arrive beaucoup de choses et des bien cruelles ».
« Le canon pour eux c’était rien que du bruit. C’est à cause de ça que les guerres peuvent durer. Même ceux qui la font, en train de la faire, ne l’imaginent pas. La balle dans le ventre, ils auraient continué à ramasser de vieilles sandales sur la route, qui pouvaient ‘encore servir’. Ainsi le mouton, sur le flanc, dans le pré, agonise et broute encore. La plupart des gens ne meurent qu’au dernier moment ; d’autres s’y prennent vingt ans d’avance et parfois davantage. Ce sont les malheureux de la terre ».
« On se défend, on s’entretient, on repasse sa vie au bipède du siècle suivant, avec frénésie, à tout prix, comme si c’était formidablement agréable de se continuer, comme si ça allait nous rendre, au bout du compte, éternels. Envie de s’embrasser malgré tout, comme on se gratte ».
« Si les gens sont si méchants, c’est peut-être seulement parce qu’ils souffrent, mais le temps est long qui sépare le moment où ils ont cessé de souffrir de celui où ils deviennent un peu meilleurs ».
« Je me prenais pour un idéaliste, c’est ainsi qu’on appelle ses propres petits instincts habillés en grands mots ».
« Ce qu’il faut au fond pour obtenir une espèce de paix avec les hommes, officiers ou non, armistices fragiles il est vrai, mais précieux quand même, c’est leur permettre en toutes circonstances, de s’étaler, de se vautrer parmi les vantardises niaises. Il n’y a pas de vanité intelligente. C’est un instinct. Il n’y a pas d’homme non plus qui ne soit pas avant tout vaniteux. Le rôle du paillasson admiratif est à peu près le seul dans lequel on se tolère d’humain à humain avec quelque plaisir ».
« Il s’endormit d’un coup à la lueur de la bougie. Je finis par me relever pour bien regarder ses traits à la lumière. Il dormait comme tout le monde. Il avait l’air bien ordinaire. Ça serait pourtant pas si bête s’il y avait quelque chose pour distinguer les bons des méchants ».
« Faire confiance aux hommes c’est déjà se faire tuer un peu ».
« Il y a les boyaux. Vous avez vu à la campagne chez nous jouer le tour au chemineau ? On bourre un vieux porte-monnaie avec les boyaux pourris d’un poulet. Eh bien, un homme, moi je vous le dis, c’est tout comme, en plus gros et mobile, et vorace, et puis dedans, un rêve ».
« Comme on devient de plus en plus laid et répugnant à ce jeu-là en vieillissant, on ne peut même plus la dissimuler sa peine, sa faillite, on finit par en avoir plein la figure de cette sale grimace qui met des vingt ans, des trente ans et davantage à vous remonter enfin du ventre sur la face. C’est à cela que ça sert, à ça seulement, un homme, une grimace, qu’il met toute sa vie à se confectionner, et encore, qu’il arrive même pas toujours à la terminer, tellement qu’elle est lourde et compliquée la grimace qu’il faudrait faire pour exprimer toute sa vraie âme sans en rien perdre ».
« Personne ne vient nous aider. Un énorme babillage s’étend gris et monotone au-dessus de la vie comme un mirage énormément décourageant ».
22:40 | Lien permanent | Commentaires (0)
31/07/2006
"Souvenirs d'un pas grand-chose"
Dans Chorus n° 26 (hiver 1998-1999), Thiéfaine parle de littérature, et il y a de quoi prendre son pied!
"Je cherche une solidarité, des gens qui vibrent comme moi, qui ont vécu des choses noires", dit-il. "J'ai beau tenter vaguement de parler de bonheur, d'organiser un peu mieux ma vie, je suis toujours le même mec déchiré. Le nihilisme, le désespoir, ça revient chez moi de façon récurrente. Puisque l'on est dans la littérature, on peut aussi parler d'un type comme Bukowski. En gros, des gens qui ont les mêmes vices que moi!"
Allons donc faire un tour du côté de Bukowski et de ses Souvenirs d'un pas grand-chose!
"Elle était devenue si vieille que mourir eût été presque insensé".
"Il ne restait plus qu'une nation entière de trous du cul qui passaient leur temps à conduire des voitures, à bouffer, à avoir des gosses et à tout faire de la pire des façons, comme de voter pour le candidat à la présidence qui leur ressemblait le plus".
"L'injustice, faut croire que les trois quarts des gens, ils y pensent seulement quand c'est eux qui en sont les victimes".
"De toute façon, je n'avais aucune envie d'être quoi que ce soit. Et y arrivais brillamment".
"La route que j'avais devant moi, j'aurais presque pu la voir. J'étais pauvre et j'allais le rester. L'argent, je n'en avais pas particulièrement envie. Je ne savais pas ce que je voulais. Si, je le savais. Je voulais trouver un endroit où il n'était pas obligatoire de faire quoi que ce soit. L'idée d'être quelque chose m'atterrait. Pire, elle me donnait envie de vomir. Devenir avocat, conseiller, ingénieur ou quelque chose d'approchant me semblait impossible. Se marier, avoir des enfants, se faire coincer dans une structure familiale, aller au boulot tous les jours et en revenir, non. Tout cela était impossible. Faire des trucs, des trucs simples, prendre part à un pique-nique en famille, être là pour la Noël, pour la Fête nationale, pour la Fête des Mères, pour... les gens ne naissaient-ils donc que pour supporter ce genre de choses et puis mourir?"
"Est-ce que vous oseriez arriver une demi-heure en retard à un mariage ou à un enterrement?
-Non.
-Et pourquoi, je vous prie?
-Ben, parce que si l'enterrement, c'était le mien, il faudrait que je sois à l'heure et que si ce mariage, c'était aussi le mien, ça serait mon enterrement".
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Charles Bukowski, Hank pour les amis, est né en 1920, à Andernach, en Allemagne. Il ne découvre l'Amérique qu'à deux ans, lorsque ses parents émigrent à Los Angeles, avec l'espoir de faire fortune. De gifles en coups de lanière, son enfance n'en est pas moins réglée à la prussienne et son adolescence s'achèvera, raconte-t-il, lorsque, complètement ivre, il mettra son père k.o. Postier, magasinier, employé de bureau, Hank n'exercera que des petits métiers. Misère et médiocrité, taule à l'occasion. Pour échapper à un univers qu'il refuse autant qu'il le fascine, il boit et court les filles. Il écrit des poèmes d'abord, qui l'imposeront comme le successeur de Kerouac et de Ginsberg, puis des romans, des chroniques et des nouvelles. Il ne s'arrête d'écrire que pour boire et chercher une fille.
Les oeuvres de Bukowski traduites en français sont Les Contes de la folie ordinaire, portés à l'écran par Marco Ferrerri avec Ben Gazzara et Ornella Mutti, Les Nouveaux Contes de la folie ordinaire, L'amour est un chien de l'enfer, Women, Au sud de nulle part, Factotum, Souvenirs d'un pas grand-chose, Le Postier, Mémoires d'un vieux dégueulasse, Je t'aime, Albert, Hollywood, Pulp, Jouer du piano ivre jusqu'à ce que les doigts saignent (poèmes) et Le Ragoût du septuagénaire.
Charles Bukowski est décédé en 1994.
15:15 | Lien permanent | Commentaires (0)
Isadora Duncan
Extrait du Dictionnaire de la mort des grands hommes (Isabelle BRICARD, éditions du Cherche-midi, 1995) :
Isadora DUNCAN : danseuse américaine, créatrice de la "danse libre".
MORT : 14 septembre 1927 (à 50 ans)
CAUSE : étranglée par son châle
LIEU : NICE (Alpes-Maritimes)
INHUMATION : cimetière du Père-Lachaise, à Paris (Cela me fait penser à la phrase de René Fallet : "Le Père-Lachaise, c'est moi". Mon petit jeu marche aussi avec les écrivains que j'aime!).
Isadora voulait acheter une Bugatti 37. Le garagiste du garage Helvetia vint la chercher à son hôtel, le Negresco, pour lui faire essayer le modèle. Enveloppée dans un grand châle en crêpe de Chine rouge, elle monta à l'arrière de la voiture. Le garagiste donna un coup de manivelle et s'installa au volant. Isadora se tourna vers son amie Mary Desti et lui dit en agitant son bras : "Adieu, je vais à la gloire!" Tandis que la Bugatti s'engageait sur la promenade des Anglais, le châle d'Isadora glissa de ses épaules et se mit à traîner sur la chaussée. "Le châle, Isadora! Le châle!", cria Mary, mais Isadora ne l'entendit pas. Cent mètres plus loin, les franges se prirent entre le papillon et le moyeu de la roue : la voiture se cabra et la tête de la passagère fut plaquée en arrière. La nuque brisée, Isadora Duncan mourut sur le coup.
Cette note m'a été inspirée par le commentaire qu'a laissé Waty sur "113ème cigarette sans dormir".
"La terre tremble
et tu t'essuies la bouche
dans ce qui pourrait être l'écharpe
assassine d'Isadora Duncan
qui se prit dans les rayons
de la roue
de sa Bugatti"... ("La terre tremble", Hubert-Félix THIEFAINE).
07:45 | Lien permanent | Commentaires (0)
25/07/2006
"113ème cigarette sans dormir" ou plutôt "113ème insomnie sans fumer"
Bon, je ne dors pas. Si je faisais encore partie des "milliers d'embrumés" dont parle Thiéfaine dans "Exercice de simple provocation avec 33 fois le mot coupable", j'en serais très certainement à ma "113ème cigarette sans dormir"! Mais ce vice m'a, semble-t-il, définitivement quittée...
Après m’être retournée environ cent quarante fois dans mon lit, je me suis dit qu’un petit tour sur le blog aurait peut-être un effet salutaire ! Alors essayons !
Je ne sais pas à quel degré de dépendance en sont les fans de Thiéfaine qui pourraient éventuellement atterrir sur ces pages. Pour ma part, j’en suis arrivée à une phase que d’aucuns qualifieraient sans doute de critique, mais leurs discours oiseux sur la nécessité d’aller me faire soigner ne m’atteindraient pas ! Je vais aggraver mon cas et annoncer clairement que :
a) dans une conversation, dès que quelqu’un dit "ce matin", c’est plus fort que moi, je ne peux m’empêcher d’ajouter mentalement : "le marchand de coco n’est pas passé", etc.,
b) dès que j’entends l’expression "j’ai appris hier", je pense à la partie parlée de vous savez quelle chanson (tiens, d’ailleurs, il faudra que je mette quelques lignes d’Antonin Artaud sur ce blog !),
c) en gros, tout propos qui ressemble à des paroles de Thiéfaine me fait littéralement changer de planète, tout à coup "je ne suis plus de chez vous" (oui, ça, c’est du Ferré, je sais !), j’ai mon petit for intérieur qui "pédale dans les nuages".
C’est grave, docteur ? Franchement, en ce qui me concerne (et ça tombe bien, car je suis la première concernée !), je ne vois aucun inconvénient à ces jolies absences que je m’octroie régulièrement dans les conversations, les réunions diverses et variées, les repas de famille. Un jour, j’étais avec une amie, nous attendions une certaine Brigitte, qui n’arrivait pas, qui n’arrivait pas… Soudain, l’amie en question s’est mise à appeler son chien "Brigitte", tant elle était à fond dans son angoisse et son attente ! Je n’ai encore jamais appelé mon chien Hubert. Félix, si, c’est déjà arrivé. Ah non, ça, c’était le chat, mais il paraît que c’est plutôt normal.
Et puis, que voulez-vous, "c’est pas tous les jours facile de vivre en société quand on a un peu d’imagination" ! "Monsieur le commissaire, j’ai ma névrose, mais monsieur le commissaire, qui n’a pas sa névrose" ?!
D’ailleurs, je dois dire que ma mère ne fait pas mieux de ce côté-là. Dernièrement, j’évoquais la chanson "Bipède", la réduisant à ce seul mot. Et ma mère d’ajouter : "Bipède à station verticale, c’est ça ?" Finalement, l’éducation, il en reste toujours quelque chose !
De temps en temps, pour essayer de me dépêtrer de cette joyeuse dépendance qui ne me gêne pas tant que ça, je me fais des plages de silence, ou alors j’écoute tous les artistes du monde sauf Thiéfaine. Et j’y reviens ensuite avec un plaisir décuplé !
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22/07/2006
Malcolm Lowry : suite et fin
Voici quelques extraits du roman Au-dessous du volcan, que j'ai terminé avant-hier :
"Mais trois nuits blanches plus tard une éternité de vie avait passé".
"Enfin! La guerre, sauf qu'elle était mauvaise, ne lui inspirait que peu d'émotions. L'un ou l'autre camp gagnerait. Et dans les deux cas la vie serait dure. Quoique si les Alliés perdaient elle serait plus dure. Et dans les deux cas l'on poursuivrait sa bataille à soi".
"la cathédrale en éternelle navigation sur les nues" (c'est beau, ça, non?!).
"Je me demande si c'est parce que ce soir mon âme est vraiment morte que j'éprouve pour l'instant quelque chose comme la paix".
"L'avenir paraissait horrible, avec la vie au bout".
La postface de Max-Pol Fouchet est très belle. En voici encore quelques extraits :
"Ah, c'est le silence, plutôt, qui devrait suivre. On éprouve de la gêne à parler après ce livre, un tel livre".
"Si la vie est impossible sans l'amour, et si nous n'aimons pas, alors nous ne vivons pas, et nous sommes dans la mort. "Le pire de tout", dit le Consul, "c'est de sentir son âme mourir" : et il ajoute : "Mes secrets sont de la tombe". Il n'est guère de page où la mort ne soit présente. L'action du livre tient en un seul jour : le Jour des Morts. Voici des meneurs de deuil, des funérailles, des coutumes funéraires, un cadavre expédié par train; voici l'indien mort, des chiens morts, et Yvonne eut un enfant, et il est mort; des fantômes errent dans le casino de la Selva, telle cantina s'appelle "la Sépultura"... On entend les chocs sourds d'un bombardement, d'un exercice de tir; le palais de Maximilien, tout ruines, est un palais funèbre".
"Il y a, chez le Consul, une soif infongible. Non d'alcool. Mais d'ontique, de statique, d'être. L'alcool, pour lui, n'est pas vice : il est le moyen d'une connaissance. Par l'alcool, il espère sortir de lui-même, sortir d'une temporalité dirigée par le péché préalable, sortir de l'historicité et de la conscience historicienne. Par l'alcool, il voit, il se fait voyant, dans l'acception rimbaldienne du terme. Ne voit-on pas, à lire nos grands contemporains, que la volonté de puissance a cédé à une volonté d'extase? Rarement l'extase fut plus héroïquement poursuivie que par le Consul Geoffrey Firmin. On mesure donc le contresens qui consisterait à tenir ce livre pour un témoignage, ou un roman "sur" l'alcool, - quand il s'agit d'un livre mystique".
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