04/05/2012
Allô, allô, monsieur Mojo...
La pensée du jour : "J'ai le regard complètement tourné vers l'avenir", Hubert-Félix THIEFAINE.
En avril parassait le numéro 1 d'un nouveau magazine consacré à la musique : MOJO. Premier bon point : le choix du titre !!! Deuxième bon point : d'emblée, ce magazine consacrait un dossier complet à Thiéfaine. Evidemment, j'ai acheté MOJO ! Je vous livre ici le portrait d'HFT signé Franck CAMHI, ainsi que le début de l'interview réalisée par Jonathan Boyer.
Début mars, Hubert-Félix Thiéfaine obtenait deux Victoires de la Musique après des années passées à poursuivre sa route bien loin du showbiz. « En ce moment, concède-t-il, ça se bouscule un peu... »
En 2001, dans « Eloge de la tristesse » (Défloration 13), Hubert-Félix Thiéfaine évoquait ainsi un loser devenu vedette : « P't'être qu'en smurfant sur ta folie / Tu d'viendras l'idole des bas-fonds / A qui le branleux Tout-Paris / Fera sa standing ovation ». On pense évidemment, à la lecture de ces vers, à son triomphe aux Victoires. Un hommage pourtant sincèrement et humblement apprécié par un artiste qui a tour à tour éprouvé ressentiment, plaisir ou indifférence quant à l'ignorance manifestée par les grands médias à son égard. Apaisé sur le sujet comme sur tant d'autres après un terrible burn-out consécutif à des années de défonce et de déprimes, Thiéfaine était sans doute prêt à recueillir une reconnaissance, qu'un showbiz exsangue ne pouvait décemment plus refuser à cet extraterrestre qui continue en pleine crise à écouler, en moins d'un an, 120 000 exemplaires d'un nouvel album...
Si son second passage à Bercy à l'automne -après celui de 1998- n'avait pas recueilli, selon le service de presse de son label, beaucoup de retombées, la reconnaissance des Victoires a précipité les choses. Depuis le samedi précédent, entre deux dates d'une tournée qui en compte déjà plus de soixante, le chanteur enchaîne les interviews. Et ce mardi soir, l'homme est fatigué. La maquilleuse qui l'accompagne nous confie avoir déjà opéré sur son visage six fois dans la journée. Une émission radio de deux heures l'a éreinté, un Paris pluvieux et bouché l'a enfermé une heure et demie dans une voiture pour rejoindre le studio photo dans le XVIIIème arrondissement de la capitale. Arrivé deux heures après l'heure prévue, il ne prend rien à boire, ni à grignoter. Il mange d'ailleurs assez peu et déjeune rarement. Un cadeau de sa maison de disques, une édition collector du dernier Best of de Dylan, lui tire un sourire. Mais l'humeur reste ombrageuse. Pour lui permettre un peu de silence, le shooting précédera l'entretien. HFT n'est pas de ces chanteurs allergiques à la pose, et la détente s'installe durant la session. Muni de petites lunettes, il observe le résultat des prises de vue sur le Mac du photographe. S'amuse d'une ressemblance avec Keith Richards sur un cliché. Puis, démaquillé, il s'installe dans un canapé du studio pour démarrer l'interview. On lui rappelle que sur La Tentation du bonheur (1996), il avait écrit ce morceau « Mojo-dépanneur TV (1948-2023) », une étrange histoire de télé qui tombe en panne pendant Les Feux de l'amour. S'il a bien souvenir du titre, le chanteur apparaît bien en peine de se remémorer le propos du texte. « Il faudrait que je réécoute ma discographie, je retiens les titres de ma set liste actuelle, mais sinon je ne me souviens plus très bien de ce que j'ai écrit. J'ai le regard complètement tourné vers l'avenir ». Pourtant, s'il a oublié certaines créations, Thiéfaine a conservé une mémoire intacte d'événements passés. Il corrige spontanément certaines dates et nourrit son récit d'anecdotes précises. Pendant près d'une heure, HFT a bien voulu tourner aussi son regard vers le passé.
Avec ces deux Victoires, les médias ne pourront plus parler à votre propos de l'éternel chanteur ignoré...
Je ne sais pas quelle est la portée exacte de ce genre d'événement. Ce qu'il y a de sûr, c'est que je suis déjà en tournée jusqu'au mois de décembre et que c'est plein. J'ai des salles combles depuis trente ans, j'ai une trentaine de disques d'or, elle est là ma récompense. Mais je remercie les médias : m'avoir oublié m'a donné une aura; je suis devenu la légende du mec qui se fait tout seul, qui n'en a rien à foutre et qui va son chemin. Sur les Victoires, j'ai joué le jeu, j'aurais trouvé ça prétentieux de refuser. Et puis ça fait plaisir à mon public, et à toute mon équipe. Moi, à partir du moment où il y a de la joie, ça me va !
Pourquoi est-ce cet album, Suppléments de mensonge, qui a permis cette reconnaissance ?
C'est le premier album d'une nouvelle vie, d'un renouveau, même s'il y a un cousinage avec Scandale mélancolique (2005). « Confessions d'un never been » aurait pu être sur ce nouvel opus, je le reprends d'ailleurs sur scène. J'aurais pu chanter aussi « Le Jeu de la folie », qui est un peu la préface de Suppléments de mensonge. Mais il s'est tout de même passé du temps depuis, avec un choc brutal entre les deux, mon burn-out.
Question : Dois-je mettre ici la suite de l'interview ou avez-vous tous acheté le magazine MOJO ?!!
20:00 | Lien permanent | Commentaires (9)
21/04/2012
HFT à Vandoeuvre hier soir ou comment faire encore mieux que Besançon, Gennevilliers et j'en passe !
Ebloui, ébahi, ébaubi, éberlué. C'est ainsi qu'on ressortait hier soir de la bien nommée salle des fêtes de Vandoeuvre. D'un ton ironique et malicieux, Thiéfaine venait de nous dire qu'un concert dépouillé de toute chanson évoquant l'alcool, la drogue, le sexe, Dieu ou la mort aurait été le concert du siècle. Et nous, nous sortions de la salle en nous disant que le concert du siècle, c'était celui qui s'était joué peu avant sous nos yeux ! Un concert durant lequel HFT a fait "comme d'habitude", ainsi qu'il l'a dit lui-même. Comme d'habitude et un peu plus que d'habitude. Voir Thiéfaine à Vandoeuvre et mourir !
Le public ? Chaud comme la braise. De la lave en fusion ! Je ne sais pas qui, de ce public ou de l'artiste, a entraîné l'autre dans cet incroyable volcan ! J'ai bien ma petite idée. Evidemment, oui, c'est Hubert qui a su insuffler à la salle entière quelque chose qui tenait à la fois de la magie et de la grâce. Au début, le public était dans une certaine retenue, toute relative d'ailleurs, et ne demandant qu'à exploser les coutures ! Idem du côté d'Hubert. C'était un peu comme un apprivoisement. Je t'envoie "Annihilation", "Fièvre résurrectionnelle", "Lorelei", tu me dis comment tu les reçois et on avisera. Je crois que c'est "Lorelei" qui a carrément fichu un tournant dans ce concert. Oui, c'est à ce moment-là, me semble-t-il, que nos esprits échauffés, cessant soudain d'être des "fleurs flétries", ont croisé l'aéropostale. Vraiment, c'est d'un seul coup, d'un seul, qu'on a senti monter la température, c'était palpable. Et le mercure n'a fait que s'envoler ensuite vers des hauteurs vertigineuses ! Un truc de malade ! Hubert mouillant la chemise comme jamais, Alice caressant sa guitare en de folles épousailles. Autour de moi, des visages heureux. Transfigurés. Ma grande émotion de la soirée ? Regarder s'éclater mes voisins de concert : un père, une mère et leurs deux enfants. Le gamin, du haut de ses onze ans, connaissait tout le répertoire d'Hubert par coeur ! "Impossible de faire autrement, on a grandi avec Thiéfaine", m'a dit sa frangine, âgée de 17 ans, peut-être. Ma grande satisfaction de la soirée ? Entendre ACLH se venger d'une mauvaise extinction de voix (lire à ce sujet son compte rendu du concert de Gennevilliers !) et chanter à tue-tête dans le micro : "Sweet amanite phalloïde queen" !!
La "Fille du coupeur de joints" qui, depuis tant d'années maintenant, marque la fin ou la presque-fin de chaque concert, a mis la salle sens dessus dessous ! 20 ans, 30, 40, 50 ou 60, qu'importe ? Nous étions tous redevenus des collégiens barjots ! En proie à une extase collective qui aurait laissé pantois le plus chevronné de tous les surveillants généraux !!! Qu'il reste dans son laboratoire, celui-là, et nous laisse savourer l'ultra-haute température de ce concert du siècle !
Voir Thiéfaine à Vandoeuvre et mourir. Et puis ressusciter dès le lendemain, ne même pas attendre le troisième jour, parce que quand même, faut pas déconner, il reste encore une flopée de dates à faire sur cet "Homo Plebis Ultimae Tour" ! Ce matin, sur facebook et dans la vie réelle aussi (clin d'oeil à ACLH !), on se demandait entre fans comment Hubert se débrouillait pour qu'après chaque concert on dise : "C'était encore mieux que la dernière fois" ! C'est vrai : on repart systématiquement ébloui, ébahi, ébaubi, éberlué ! On se dit que Thiéfaine vient de donner le meilleur de lui-même et qu'il lui sera difficile de faire mieux, et pourtant... Et pourtant, on assiste à chaque fois à la sublime surenchère d'un artiste de génie qui donne ses tripes et nous emmène "toujours plus loin à fond la caisse", vers "toujours, toujours plus d'ivresse'". Alors, un seul mot d'ordre : "Oh yes always on the road again man" !
16:53 | Lien permanent | Commentaires (13)
Article paru dans L'Est Républicain ce matin
La pensée du jour : "La faim qui me tenaille
il est rare qu'elle me hisse
jusqu'à l'inoubliable festin
le plus souvent elle me voue
aux heures grises de l'attente
aux terres désolées de l'ennui". Charles JULIET
Voici l'article paru ce matin dans L'Est au sujet du concert (grandiose) d'hier soir.
Salle comble, hier, à la salle des fêtes de Vandœuvre pour Thiéfaine
Fascinant Hubert-Félix
Une file d'attente qui s'allonge sur des centaines de mètres dans la rue jouxtant la salle des fêtes, il y a des signes qui ne trompent pas. Il est 18h30 et l'agitation est palpable devant la salle municipale. Une soirée à guichets fermés.
Hubert-Félix Thiéfaine entamait, hier soir, une série de concerts dans l'Est de la France après un passage en Suisse.
Sa tournée s'intitule « Homo Plebis Ultimae Tour ».
Il y a ceux qui avaient découvert les pépites de « Suppléments de mensonge » lors de ses concerts au Zénith de Nancy et au Galaxie d'Amnéville, mais cette fois, c'est auréolé des Victoires de la Musique qu'il se présentait devant les Lorrains.
Costume noir chemise blanche impeccable, le Jurassien est apparu en bonne forme.
Avec « Annihilation », « Fièvre résurrectionnelle » et « Lorelei », HFT a vite mis le feu aux poudres.
« Les dingues et les paumés »
Avec « Infinitives voiles », il a dévoilé la quintessence de son dernier album. « Garbo XW Machine », « Petit matin 4.10 heure d'été », la « Vamp orchidoclaste » et la fameuse « Ruelle des morts » qui cartonne déjà, illustrent sa mélancolie légendaire.
HFT a aussi chanté les inclassables « Les dingues et les paumés » et ses thèmes phares : sexe, drogue, alcool et déprime.
40 ans de carrière et 17 albums plus tard, l'artiste fascine encore plus ses fans qu'à ses débuts et ce public aujourd'hui, il couvre toutes les générations.
Porté par des musiciens de tout premier plan, Marc (basse), Alice (guitare), Bruce (batterie), Christopher (clavier), HFT ponctuait sa sortie vandopérienne avec un titre d'anthologie, «La fille du coupeur de joints ».
Un vrai élixir de jeunesse pour tout un public.
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07/04/2012
"Le chevalier, la mort et le diable s'enfuient des pinceaux de Dürer"...
La pensée du jour : "L'ombre passée, il se dit que, malgré ce voile, il leur demeurait un sursis avant le temps des ossements. Qu'il fallait somme toute les cueillir, ces nom de Dieu de roses de la vie !" René FALLET
Mardi, j'étais à Munich, et je suis allée à la "Alte Pinakothek", où j'ai pu enfin voir ce magnifique autoportrait de Dürer... Là-bas, j'ai pensé qu'il serait sympa de consacrer, à mon retour, une petite note à ce peintre et graveur. Et même d'écrire une série de notes sur la peinture dans les oeuvres de Thiéfaine ! Mais là, j'ai besoin de votre aide, les références ne me viennent pas si facilement ce soir, à part "l'atelier de Hieronymus Bosch".
Albrecht DÜRER : peintre allemand. Né à Nuremberg le 21 mai 1471, mort dans cette même ville le 6 avril 1528.
Fils d'Albrecht Dürer, orfèvre, il fit son apprentissage dans la boutique paternelle qu'il quitta le 30 novembre 1486 pour passer dans celle de Michael Wohlgemut. Au printemps de 1490, ses études terminées, il entreprit un voyage qui, par l'Allemagne et la Hollande, l'amena à Bâle où il fit ses premiers essais de gravure sur bois. Vers la fin de 1493, il est à Strasbourg, et au printemps de l'année suivante de nouveau à Nuremberg où il se mariera quelques mois plus tard; c'est en automne 1494 que se situe son premier court voyage en Italie (à Venise et peut-être à Padoue, Mantoue et Crémone) qui le mit en contact avec l'art vénitien de la première Renaissance. Le retour dans son pays, au début de 1495, marque le début d'une période d'intense et fructueuse activité en peinture et en gravure, encouragée par la protection de Frédéric le Sage, électeur de Saxe; c'est en effet à ces années-là qu'appartiennent les séries xylographiques de L'Apocalypse (Apokalypse), de La Grande Passion (Die Große Holzschnitt-Passion) et de La Vie de la Vierge (Marienleben). La Vie de la Vierge sera diffusée en Italie également, par les copies au burin effectuées par Marc Antonio Raimondi.
A partir de 1500 environ, Dürer, pour compléter sa culture personnelle d'artiste de la Renaissance, se mit aux études théoriques, et en particulier à celle de la perspective et des proportions de l'homme et du cheval; il n'en continua pas moins, d'ailleurs, son observation attentive des moindres détails de la nature. Quelques-uns de ses plus célèbres dessins et aquarelles, telle la fameuse Motte de terre, sont de ces années-là, pendant lesquelles sa technique de graveur devient, elle aussi, plus riche et plus complexe, comme le montrent le Saint Eustache et la Grande Fortune (Das große Glück, 1501-1502). En 1505, Dürer se trouve de nouveau à Venise, où il obtient la commande de la Madone du Rosaire (Die Madonna mit dem Zeisig) pour l'église Saint-Barthélémy : c'est une grande toile (actuellement au musée de Prague) où transparaît l'influence de Giambellino. Le Christ au milieu des docteurs (Christus unter den Schriftgelehrten) contient des réminiscences de Léonard, évidentes dans les six gravures sur bois des Nœuds qui remontent probablement à la même année 1506. Son second et dernier séjour en Italie permet surtout à Dürer de parfaire ses études théoriques par une connaissance approfondie des idées de L.-B. Alberti, de Piero della Francesca et de Léonard de Vinci.
La période qui s'étend de 1507 – année de son retour en Allemagne - à 1514, marque une reprise de son activité de graveur au détriment de celle de peintre qui cesse complètement. Les 36 xylographies de la Petite Passion (Kleine Passion), commencée en 1509, et les seize gravures au burin de la Passion, publiées respectivement en 1511 et 1513, avaient certainement été commencées au cours des cinq années précédentes, probablement en même temps que les planches célèbres du Chevalier, la Mort et le Diable (Ritter, Tod und Teufel), du Saint Jérôme dans sa cellule (Hieronymus im Gehäus) et de la Mélancolie (Melancholie). La seconde décade du siècle correspond à la phase de l'art de Dürer la plus marquée par l'humanisme; en effet, vers 1512-1513, le peintre commence à rédiger ses ouvrages théoriques tandis qu'il ne dédaigne pas de s'inspirer, pour ses gravures et ses dessins, des œuvres d'auteurs classiques comme Philostrate et Lucien. La protection de l'Empereur Maximilien Ier, à partir de 1512, sert à lui assurer la commande des dessins pour l'Arc de Triomphe (Triumphzuge) et ceux pour le Char triomphal (Triumphwagen). Dürer obtient également la commande du portrait de l'empereur en personne, en, même temps que celui de Fugger le riche, puis celle des 45 illustrations marginales qui ornent Le Livre d'heures de Maximilien.
Mais cette heureuse période est interrompue par la mort de Maximilien en 1519; à la crise matérielle qui suit la perte de son protecteur vient s'ajouter, pour Dürer, la crise religieuse qui se termine par sa conversion au luthéranisme. Pour solliciter du nouvel empereur Charles-Quint la prorogation de sa pension, Dürer décide de le rencontrer et, en 1520, il part pour Aquisgrana où il assiste aux cérémonies du couronnement; de là, il poursuit vers les Pays-Bas, séjournant surtout à Anvers. Ce voyage lui permet de fructueuses rencontres avec des artistes flamands, dont il reste d'admirables témoignages dans la série des dessins à pointe d'argent de son carnet et dans les pages de son Journal. Les deux grands panneaux représentant les Quatre apôtres (Die vier Apostel), conçus à l'origine pour les volets d'un diptyque ou d'un triptyque (dont la partie centrale ne fut jamais achevée, sans doute pour obéir aux interdits de la Réforme), sont généralement considérés comme le testament artistique de Dürer, comme l'œuvre capitale qui clôt son activité à la veille de sa mort (ces panneaux ont été offerts à sa ville natale).
Dürer fut le premier artiste nordique à être influencé par les théories et par les expériences de l'Italie de la Renaissance.
22:20 | Lien permanent | Commentaires (16)
31/03/2012
Un compte rendu du concert de Gennevilliers
Pas le temps en ce moment de pondre des billets ou même de recopier des articles de journaux. En revanche, je vous invite à aller lire ici le compte rendu du concert de Gennevilliers :
http://perlicuisine.canalblog.com/
Je reviens ici dès que possible.
22:00 | Lien permanent | Commentaires (12)
23/03/2012
Supplément d'interview (suite et fin)
La pensée du jour : "Une plume
De l'encre
Du papier
Si c'est encore trop demander
Alors rien que du sable
Ou de la neige
Et un doigt
Pour y tracer
Un poème".
Bernard LORRAINE
Voici (enfin !) la suite et la fin de ce fameux supplément d'interview dont je vous ai livré une infime partie la semaine dernière. J'ai bien essayé de convertir la suite de mon document word pour le mettre sur le blog. Impossible. Du coup, je retape tout ici. Je vais connaître l'interview par coeur, je pourrai remplacer HFT en cas de besoin !!!!
Comment avez-vous rencontré Léo Ferré et quelles relations entreteniez-vous ?
Nous avions le même manager en Suisse. Il a pris l'initiative de nous réunir quelques jours chez Léo en 1985. J'étais statufié, je connaissais la moindre de ses chansons. Je le considérais comme mon maître, bien que théoriquement, ni dieu, ni maître ne pouvaient nous séparer. Léo voyait bien que j'étais complètement figé, intimidé, alors il a gentiment essayé de me débloquer. Je crois ne l'avoir jamais été totalement avec lui. C'était un être plein de tendresse et de gueulantes, dans la vie comme sur scène. Un jour, il m'a téléphoné. La veille, j'étais allé le voir sur scène à Dijon et nous avions à peine échangé quelques mots, lui fatigué, moi toujours intimidé. Au téléphone, il s'est mis à me parler : "Je t'aime, je t'aime vraiment beaucoup"... C'était sincère, je le sais, sa compagne m'a dit qu'il m'adorait. J'en suis encore retourné rien que de l'évoquer.
Vos chansons et vos titres sont truffés de chiffres, d'où vient cette obsession ?
J'étais nul en maths, c'est une vengeance... Non, en réalité, j'aime bien les chiffres, il y en a partout dans notre vie, alors pourquoi ne pas les utiliser ? On a des numéros d'adresse, des codes postaux, on paye des additions, on tape des codes... Et puis les chiffres, c'est de la poésie pour les mathématiciens si j'ai bien compris ce qu'écrit William Boyd. Alors, comme j'essaie d'écrire de façon circulaire, ils s'imposent à moi. Par exemple, je m'installe à la terrasse d'un bistrot en été, je note "été". Un type à côté de moi lit le journal, j'aperçois un titre : "635 morts", je note "635". Tout est dans le détail. J'entendais Roman Polanski le dire à propos de ses films. Il a raison. Un film travaillé dans le détail est infiniment plus agréable à regarder. C'est un peu ce que j'essaie de faire, d'où les chiffres, les marques, les médicaments...
Le cinéma est important pour vous ?
Très. J'allais à la Cinémathèque de Chaillot. ça coûtait cinq francs. ça ouvrait vers 3 heures de l'après-midi et on pouvait dormir jusqu'à 2h du mat'. Mais j'ai aussi vu beaucoup de films. Des trucs pas possibles. Le Warhol où la même image de clôture défile pendant trois quarts d'heure, tout Bergman, avec ses extraordinaires jeux d'ombre et de lumière. Je pense au Septième Sceau, notamment.
(Au sujet de ses débuts difficiles) Ce combat que vous avez mené vous attire un immense respect aujourd'hui. Vous le sentez ?
En filigrane, oui. Mais ça me gêne. Il y a une pudeur, je ne sais pas manipuler ce genre de situation. On me reproche d'être trop humble, en fait, je suis très orgueilleux. Mais je n'aime pas ce mot, ça me rappelle trop les curés.
Sur la pochette de votre album, vous remerciez les soignants qui se sont occupés de vous après votre burn-out : vous ont-ils ouvert à une humanité plus humaine que vous ne l'imaginiez ?
Je n'irai pas jusque là, non. Ils m'ont touché. J'ai trouvé en eux des qualités que j'apprécie chez les gens, qu'ils soient médecins ou artistes. Ils faisaient bien leur travail et arrivaient même à y rajouter un petit supplément d'âme, alors que leur profession est très malmenée.
Le jeune Hubert aurait-il pu imaginer que Thiéfaine deviendrait le plus éloquent défenseur de l'initiation au latin et au grec ?
(Rires) C'est vachement important, ne serait-ce que pour ne pas avoir l'air con. J'ai eu récemment des problèmes de racines de dents. Radios à l'appui, le stomatologue m'a parlé pendant une heure et quart, et je n'ai pu le suivre que parce que j'avais des notions de grec et de latin.
Se connaître soi-même et son corps. Le grec et le latin en seraient donc les meilleures clés...
On peut se passer du latin et du grec mais leur connaissance tire vers le haut. Ces langues mettent de la perspective, nous donnent une idée de l'humanisme et des civilisations qui nous ont précédés. Elles nous offrent une vision beaucoup plus large du monde.
Propos recueillis par Hugo Cassavetti et Olivier Milot
19:30 | Lien permanent | Commentaires (5)
15/03/2012
Supplément d'interview
La pensée du jour : "Dès que la conscience apparaît, l'homme est travaillé par la mort comme le bois par le ver". Georges PERROS
Légèrement énervée ce matin : à plusieurs reprises, déjà, j'ai essayé de publier cette note, mais elle ne passe pas.
Il y a quelque temps, Aska m'a signalé (et je l'en remercie) que sur le site de Télérama, on pouvait trouver une version enrichie de l'interview parue dans le n°3241 du même magazine. Mon idée : vous livrer ici ce supplément de questions-réponses. J'ai tapé deux fois l'interview, pour finalement la paumer !! En tout cas, je suis au top, je la connais par coeur ! 130 000 visites sur ce blog, c'est une immense satisfaction, mais combien de moments passés à m'énerver sur ce machin ?!!! Je ne suis pas une pro de la technique. Si ça ne marche pas du premier coup, je suis incapable de trouver les solutions adéquates !
Allez, pour l'interview, je fais une dernière tentative ce matin...
Pensiez-vous que cet album allait aussi bien marcher ?
Non. On ne sait jamais si un disque va se vendre ou pas. Quand j'ai terminé Suppléments de mensonge en décembre 2010, j'y croyais comme à chacun de mes albums. Ensuite, j'ai senti que Sony, ma maison de disques, accrochait vraiment, que l'album plaisait à ceux qui l'écoutaient, que les premiers retours des critiques étaient bons. A ce moment-là seulement, j'ai commencé à me dire qu'il se passait quelque chose. Mais, encore une fois, rien n'est jamais prévisible. Quand j'ai fait Dernières balises (avant mutation), je commençais à m'installer grâce à mes trois premiers disques, j'avais un petit public. Pourtant, j'ai tout cassé avec la quasi certitude de me planter, d'être viré par ma maison de disques. J'en avais des sueurs froides à la sortie de l'album. Ce sera mon premier disque d'or. Totalement inattendu.
Vous évoquiez tout à l'heure un "changement de vie", est-il lié au burn-out que vous avez fait à l'été 2008 ?
... J'ai abandonné Itinéraire d'un naufragé, l'album sur lequel je travaillais avant mon burn-out. J'en ai simplement repris deux chansons (Petit matin 4.10 heure d'été et Garbo XW machine) dans Suppléments de mensonge et trois autres en bonus sur le deuxième CD de l'album. Il reste encore d'autres titres sur cet album fantôme que je reprendrai peut-être un jour.
Allez, j'en reste là pour aujourd'hui. Pas la peine de taper l'interview dans son intégralité si c'est pour qu'elle disparaisse à jamais dans les limbes du néant !!
Je mettrai la suite ici dans les jours qui viennent.
09:40 | Lien permanent | Commentaires (5)
11/03/2012
Un article paru dans un journal luxembourgeois suite aux Victoires de la musique
La pensée du jour : "Dépêche-toi de rire
Il en est encor temps
bientôt la poêle à frire
et adieu le beau temps". Jean TARDIEU
Merci à 655321, qui m'a donné dernièrement un article paru lundi 5 mars dans un journal luxembourgeois gratuit, L'essentiel, suite aux Victoires de la musique. Je vous recopie ici l'intégralité de cet article. J'espère pouvoir récupérer celui du Républicain Lorrain, consacré au concert d'Amnéville.
Des Victoires pour les rebelles notoires
PARIS – Catherine Ringer, Hubert-Félix Thiéfaine et Orelsan triomphent aux Victoires de la musique.
Les 27èmes Victoires françaises de la musique ont sacré, samedi soir, à Paris, deux des voix les plus singulières de la chanson française longtemps oubliées de la cérémonie, Catherine Ringer et Hubert-Félix Thiéfaine, et salué l'ascension du rappeur Orelsan.
Hubert-Félix Thiéfaine a remporté samedi ses premières Victoires en quarante ans de carrière, celle de l'artiste masculin de l'année et celle de l'album de chansons pour Suppléments de mensonge. Cette première, malgré seize albums studio et une influence revendiquée par nombre de jeunes artistes, est à l'image d'une figure du rock indépendant qui a construit sa carrière à l'écart du star-système. Absent des télés, peu diffusé à la radio, peu connu du grand public, « HFT » est cependant capable de remplir les plus grandes salles.
Autre grande figure un peu oubliée des Victoires, Catherine Ringer a été sacrée artiste-interprète féminine de l'année. Emue, elle a remercié Fred Chichin « qui m'a tellement aidée et appris de choses ». Le guitariste des Rita Mitsouko et compagnon de l'artiste est décédé fin 2007 à l'âge de 53 ans d'un cancer fulgurant. En la récompensant, les Victoires de la musique ont salué une des voix les plus singulières de la chanson française. Autre grand vainqueur de la soirée, le rappeur Orelsan est reparti avec deux trophées, celui de la révélation du public et celui de l'album de musiques urbaines pour Le chant des sirènes. Cette double consécration de la profession et du public a un goût de revanche pour le jeune rappeur, souvent comparé à l'Anglais The Streets, après la polémique qui avait marqué ses débuts.
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